236e RAPPORT INTRODUCTION

&htab;1.&htab;Le Comité de la liberté syndicale, institué par le Conseil d'administration à sa 117e session (novembre 1951) s'est réuni au Bureau international du Travail, à Genève, les 1er, 2 et 7 novembre 1984, sous la présidence de M. Roberto Ago, ancien Président du Conseil d'administration.

&htab;2.&htab;Le membre du comité de nationalité indienne n'était pas présent lors de l'examen du cas relatif à l'Inde (cas no 1113).

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&htab;3.&htab;Le comité est saisi de 113 cas pour lesquels les plaintes ont été communiquées aux gouvernements intéressés afin qu'ils adressent leurs observations. A sa présente session, le comité a examiné 51 cas quant au fond, et a abouti à des conclusions

Les 236e et 237e rapports ont été examinés et approuvés par le Conseil d'administration à sa 228e session (novembre 1984).

Y compris les cas relatif à la Turquie (cas nos 997, 999 et 1029), qui sont examinés dans le 237e rapport.

définitives dans 26 cas et à des conclusions intérimaires dans 25 cas; les autres cas ont été ajournés pour les raisons indiquées aux paragraphes suivants.

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&htab;4.&htab;Le comité a ajourné à sa prochaine session l'examen des cas concernant le Salvador (cas nos 1281 et 1286), le Maroc (cas no 1282), le Chili (cas nos 1285, 1297 et 1309), le Costa Rica (cas no 1287, 1300, 1305 et 1310), l'Espagne (cas no 1292), la République dominicaine (cas no 1293), le Brésil (cas no 1294), le Royaume-Uni/Monserrat (cas no 1295), Antigua et Barbuda (cas no 1296), le Paraguay (cas no 1301), la Colombie (cas no 1302), le Portugal (cas no 1303), la Mauritanie (cas no 1306), le Honduras (cas no 1307), la Grenade (cas no 1308) et le Guatemala (cas no 1311), car il attend les informations et observations des gouvernements concernés. Tous ces cas se réfèrent à des plaines présentées depuis la dernière réunion du comité. En ce qui concerne le cas no 1296 (Antigua-et-Barbuda), le comité a pris note de certaines informations fournies par le gouvernement lors d'une communication du 24 septembre 1984. Le comité prie le gouvernement d'envoyer des informations plus détaillées en réponse aux allégations contenues dans cette plainte.

&htab;5.&htab;N'ayant pas encore reçu les observations et informations attendues des gouvernements, le comité a également ajourné l'examen des cas déjà en instance lors de sa dernière réunion et qui concernent le Salvador (cas no 953, 973, 1150 et 1168), le Nicaragua (cas nos 1007, 1129 et 1169), la République centrafricaine (cas no 1040), le Chili (cas nos 1183, 1205, 1276 et 1278), la République islamique d'Iran (cas no 1187), le Pérou (cas no 1190), le Honduras (cas no 1271) et le Libéria (cas no 1219). Le comité prie les gouvernements de ces pays d'envoyer leurs observations le plus rapidement possible.

&htab;6.&htab;Au sujet des cas nos 1201 (Maroc), 1216 (Honduras), 1249 (Espagne), 1250 (Belgique), 1257 et 1299 (Uruguay), 1279 (Portugal), 1289 (Pérou) et 1304 (Costa Rica), les observations des gouvernements concernés ayant été reçues, le comité se propose de les examiner quant au fond à sa prochaine réunion. A propos du Maroc (cas no 1201) pour lequel le comité à sa session de mai 1984 avait instamment prié le gouvernement de transmettre ses observations sur les allégations particulièrement graves qui avaient été formulées dans cette affaire, le gouvernement communique des informations partielles en réponse à la plainte dans une lettre du 1er novembre 1984. Le comité prie à nouveau instamment le gouvernement de fournir des observations détaillées sur les allégations contenues dans cette plainte.

&htab;7.&htab;En vue de la complexité des problèmes soulevés dans cinq cas concernant l'application de la législation provinciale au Canada, le cas no 1172 (Canada/Ontario), le cas no 1234 (Canada/Alberta), le cas no 1235 (Canada/Colombie britannique), le cas no 1260 (Canada/ Terre-Neuve) et le cas no 1247 (Canada/Alberta), le comité a décidé d'en ajourner l'examen. Il estime que, pour parvenir à des conclusions définitives, il est nécessaire de procéder à une instruction complémentaire, notamment par l'intermédiaire d'une mission d'étude et d'information qui aurait pour objectif d'éclaircir les aspects de la loi et de la pratique dans les affaires en cause. En conséquence, le comité saurait gré au gouvernement d'indiquer s'il y consent afin de lui permettre de prendre les dispositions appropriées à une date rapprochée.

&htab;8.&htab;Au sujet du cas no 1212 (Chili), le gouvernement a transmis le 17 septembre 1984 certaines informations à propos des jugements concernant les dirigeants syndicaux de l'entreprise CODELCO qui avaient été l'objet de mesures d'interdiction d'exercer des fonctions syndicales et de licenciement. Il ressort des informations fournies que les jugements sont encore en instance. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de l'issue des procès en cours en relation avec la détention du dirigeant syndical, M. Di Giorgio. Le comité note que, dans une communication du 3 octobre 1984, le gouvernement déclare que les autorités judiciaires ont condamné l'intéressé à une peine de 541 jours d'emprisonnement pour outrage au Président de la République, mais que ladite peine a été commuée en simple contrôle de signature devant le directeur de la prison, étant donné que l'intéressé n'avait pas d'antécédents pénaux, et qu'il avait fait montre de bonne conduite. M. Di Giorgio a été remis en liberté. Le comité constate, d'autre part, que le gouvernement n'a pas encore envoyé les informations qui lui étaient demandées au sujet de la demande du comité d'effectuer une enquête sur les tortures qui auraient été infligées aux syndicalistes Maria Rozas, Sergio Troncoso et José Auselmo Navarrete. Le comité exprime l'espoir que le gouvernement le tiendra informé à cet égard et lui demande également d'envoyer d'urgence des observations sur les allégations contenues dans la communication de la Confédération mondiale du travail du 10 septembre 1984 (relatives aux provocations et menaces dont aurait été l'objet le dirigeant syndical M. Rodolfo Seguel) et dans la communication de la Coordinadora Nacional Sindical et d'autres organisations chiliennes d'octobre 1984 (relatives à la grève de la faim de cinq syndicalistes du Syndicat industriel Sewell et mines, qui sont employés par l'entreprise CODELCO).

&htab;9.&htab;Pour ce qui est du cas no 1220 (Argentine) concernant la dissolution par voie administrative du Syndicat des enseignants argentins, le gouvernement, dans une communication du 11 octobre 1984, déclare que cette organisation a introduit un recours en inconstitutionnalité contre la loi no 22.804 devant le ministère de la Justice et de l'Education et que ce recours est instruit par le département public concerné. Le comité prend note de cette déclaration et de ce que le gouvernement le tiendra informé de l'évolution de cette affaire.

&htab;10.&htab;&htab;Au sujet du cas no 1298 (Nicaragua), le comité considère que, pour l'examiner en pleine connaissance de cause, il est nécessaire de disposer des observations du gouvernement sur les allégations contenues dans les communications de l'organisation plaignante des 28 septembre et 15 octobre 1984. En raison de la gravité des allégations contenues dans ce cas, le comité demande au gouvernement d'envoyer ses observations dès que possible.

APPELS PRESSANTS

&htab;11.&htab;&htab;Le comité constate que, dans certains cas, en dépit du temps écoulé depuis le dernier examen des plaintes, des informations et observations attendues des gouvernements n'ont pas été reçues. Il s'agit des cas nos 1054 (Maroc), 1185 (Nicaragua), 1189 (Kenya), 1199 (Pérou), 1222 (Bahamas), 1232 (Inde), 1233 (El Salvador) et 1262 (Guatemala). Le comité attire l'attention des gouvernements concernés sur le fait que, conformément à la règle de procédure établie au paragraphe 17 de son 127e rapport, approuvée par le Conseil d'administration, il pourra présenter un rapport sur le fond des affaires en instance à sa prochaine session, même si les observations des gouvernements concernés n'étaient pas reçues à cette date. En conséquence, le comité prie instamment ces gouvernements de transmettre d'urgence leurs observations.

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&htab;12.&htab;&htab;Dans le cas no 1160 (Suriname), le comité avait demandé au gouvernement de le tenir informé des résultats de l'enquête qui serait menée sur la mort de syndicalistes survenue le 8 décembre 1982 (230e rapport, paragr. 509 à 550). Dans une communication du 8 juin 1984, le gouvernement réitère sa réponse antérieure d'après laquelle, le jour qui suivit ces décès, les autorités militaires ont publié une déclaration selon laquelle les faits sont survenus au moment où les syndicalistes essayaient de s'échapper au cours d'un transfert hors des baraquements militaires de Fort Zeelandia. Le comité ne peut que réitérer ses conclusions antérieures sur cette affaire, à savoir qu'il déplore que le gouvernement n'ait pas effectué d'enquête à propos de ces décès et qu'il n'a pas l'intention d'en faire. Il demande de nouveau instamment au gouvernement de reconsidérer son attitude dans l'intérêt du respect des droits de ces syndicalistes.

&htab;13.&htab;&htab;En ce qui concerne le cas no 1198 (Cuba), le comité, lors de son dernier examen en février 1984 (233e rapport, paragr. 550 à 564), avait demandé à la confédération plaignante de fournir des informations plus détaillées sur certaines des allégations contenues dans sa plainte. En l'absence desdites informations, en dépit de plusieurs demandes adressées aux plaignants pour qu'ils les fournissent, le comité estime que cas n'appelle pas un examen plus approfondi.

&htab;14.&htab;&htab;Pour ce qui est du cas no 1236 (Uruguay), le comité avait demandé au gouvernement de fournir des informations détaillées sur l'allégation de suspension par la Direction nationale de l'information et des services de renseignements d'une conférence de presse convoquée par l'Assemblée intersyndicale des travailleurs le 16 septembre 1983 [voir 234e rapport, paragr. 622]. Dans une communication du 2 octobre 1984, le gouvernement déclare que ni le ministère de l'Intérieur ni la Direction nationale de l'information et des services de renseignements ne sont intervenus ou n'ont eu de relations à propos de la conférence de presse en question. Face à la contradiction qui existe entre les allégations et la réponse du gouvernement, le comité considère qu'il n'est pas en mesure de formuler des conclusions à cet égard.

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&htab;15.&htab;&htab;Le comité soumet à l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations les aspects législatifs des cas suivants: cas nos 842 (Argentine), 997, 999 et 1029 (Turquie), 1066 (Roumanie), 1206 (Pérou) et 1267 (Papouasie-Nouvelle-Guinée).

SUITE DONNEE AUX RECOMMANDATIONS DU COMITE ET DU CONSEIL D'ADMINISTRATION

&htab;16.&htab;&htab;Au sujet du cas no 842 (Argentine), le comité, après avoir pris note des assurances données par le gouvernement selon lesquelles une vie syndicale normale serait rétablie à brève échéance, avait exprimé l'espoir que les organisations syndicales qui étaient encore sous tutelle administrative recouvriraient leur pleine liberté d'action. Dans une communication du 11 octobre 1984, le gouvernement précise que, depuis le 10 décembre 1983, la République argentine est retournée définitivement à la vie démocratique et à la pleine existence de toutes ces institutions fondamentales et que tous les droits, y compris en particulier ceux relatifs à l'exercice de la liberté syndicale, ont été rétablis. Le gouvernement précise que, dans une première étape particulièrement urgente, il s'est attaché à la réorganisation globale des organisations syndicales. A cet égard, tous les secteurs du mouvement ouvrier argentin ont été consultés à plusieurs reprises, ce qui a conduit à la promulgation du décret no 1696/84 ratifié par la loi no 1071 Ce texte prévoit la convocation d'élections générales dans un délai de 70 jours qui arriverait à échéance le 24 septembre. Le gouvernement confirme son engagement d'abroger la loi 22.105 qui est toujours en vigueur, en tenant compte des commentaires formulés par les organes de contrôle de l'OIT ainsi que des conclusions et suggestions de la mission de l'OIT conduite par M. N. Valticos qui s'est rendu en Argentine en mai-juin 1984. Enfin, le gouvernement affirme que, depuis le 10 décembre 1983, le pays vit sous l'empire de la liberté syndicale pleinement en vigueur. Le comité prend note de ces informations et en particulier de ce que le gouvernement a l'intention d'amender la législation syndicale. Il estime en conséquence qu'il appartiendra à la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations d'examiner l'évolution ultérieure de cet aspect du cas.

&htab;17.&htab;&htab;Au sujet du cas no 871 (Colombie) qui concerne le procès relatif à la mort d'un dirigeant syndical agricole, Justiniano Lame, le gouvernement avait indiqué précédemment que le Conseil de guerre avait acquitté le coupable présumé et que le procès avait été renvoyé pour consultation devant le Tribunal supérieur militaire. Dans une communication du 28 juin 1984, le gouvernement précise que le Tribunal supérieur militaire a annulé la décision précédente au motif que les faits avaient été qualifiés d'"homicide involontaire" au lieu de l'être d'"homicide intentionnel". L'affaire a donc été renvoyée devant l'autorité de première instance. Par la suite, elle sera à nouveau soumise pour consultation au tribunal supérieur militaire. Le comité prend note de ces informations et demande au gouvernement de le tenir informé de la suite de cette affaire.

&htab;18.&htab;&htab;En ce qui concerne le cas no 1041 (Brésil), le comité avait demandé au gouvernement de lui envoyer le texte de la sentence prononcée par les autorités militaires judiciaires à l'encontre des syndicalistes, José Francisco Da Silva, Joao Mai da Silva Filho, Jacó Bittar, Luis Iácio da Silva et Francisco Alves Mendes Filho, qui étaient accusés de délits contre la sécurité de l'Etat. Dans une communication du 6 août 1984, le gouvernement envoie le texte complet du jugement d'acquittement de ces syndicalistes; il confirme qu'ils se trouvent tous en liberté et qu'ils exercent normalement leurs activités syndicales. Le comité prend note avec intérêt de cette information.

&htab;19.&htab;&htab;Pour ce qui est du cas no 1069 (Inde), le comité avait demandé au gouvernement de lui transmettre le résultat de l'enquête judiciaire effectuée par le Département d'enquêtes criminelles de l'Etat de l'Assam en relation avec la mort d'un travailleur dans une plantation de thé au cours de sa détention dans les locaux de la police. Dans une communication du 22 août 1984, le gouvernement indique que le gouvernement de l'Etat de l'Assam l'a informé de ce que, de l'avis du fonctionnaire chargé de cette enquête, il n'y a pas de preuve suffisante pour former une plainte devant les tribunaux contre quelque agent de police que ce soit. Dans ces conditions, le comité ne peut que déplorer une fois encore la mort de ce travailleur survenue alors qu'il était detenu à la suite d'incidents survenus dans une plantation de thé où il était employé.

&htab;20.&htab;&htab;Dans le cas no 1074 (Etats-Unis d'Amérique), le comité avait demandé au gouvernement de le tenir informé des résultats des derniers recours introduits par les contrôleurs du trafic aérien licenciés. Dans une communication du 2 octobre 1984, le gouvernement déclare qu'à la date du 6 septembre 1984 11.065 ex-contrôleurs du trafic aérien ont exercé leur droit de recours devant le conseil administratif compétent et que 10.715 ont vu leur licenciement confirmé, et que 350 ont été réintégrés; 4.973 contrôleurs ont fait appel de la décision les concernant et l'employeur (l'autorité fédérale de l'aviation) a introduit 89 recours. Dans 94 cas les contrôleurs ont été réintégrés; 4.459 licenciements ont été confirmés et 439 recours sont encore en instance devant la juridiction d'appel; 2.240 ex-contrôleurs se sont pourvus en appel contre la décision initiale devant le tribunal d'appel, lequel a fait droit à la décision de l'employeur le 18 mai 1984 dans dix des onze cas les plus importants. Le onzième cas est toujours en instance devant le tribunal d'appel pour des raisons techniques. Le tribunal a émis une nouvelle résolution confirmant les licenciements. Le gouvernement indique que les intéressés peuvent encore présenter des recours devant le tribunal suprême. Le comité prend note de ces informations et demande au gouvernement de le tenir informé du résultat des recours qui sont encore en instance.

&htab;21.&htab;&htab;En ce qui concerne le cas no 1077 (Maroc), que le comité a examiné à sa réunion de mai 1982 (217e rapport, paragr. 414 à 430), il avait demandé au gouvernement de le tenir informé du résultat des recours introduits par les membres du bureau syndical du syndicat de l'entreprise AETCO LEVER licenciés ainsi que d'autres travailleurs pour avoir participé à une grève en juillet 1981 Dans une communication du 28 mai 1984, le gouvernement déclare que le Tribunal de première instance de Casablanca a ordonné à l'entreprise de verser une indemnité à 77 des travailleurs licenciés. Le gouvernement ajoute que l'entreprise a présenté un recours contre cette décision étant donné que 24 de ces travailleurs avaient déjà été indemnisés par l'entreprise avant cette décision de justice, de sorte que le tribunal examinera à nouveau le cas de ces 24 travailleurs. Le comité prend note de ces informations et de ce que le gouvernement transmettra par la suite des informations sur cette question.

&htab;22.&htab;&htab;Pour ce qui est du cas no 1130 (Etats-Unis d'Amérique), le comité avait demandé au gouvernement de le tenir informé de l'évolution des trois projets de lois en cours d'examen visant à appliquer au Congrès certaines dispositions de la loi fédérale du travail relative à l'emploi et aux droits des travailleurs. Dans une communication du 19 octobre 1984, le gouvernement déclare que la commission compétente du Sénat a ajourné, en octobre 1984, sa session sans avoir pris de décision sur lesdits projets. Le comité prend note de cette information et demande au gouvernement de lui indiquer quand la Commission sénatoriale reprendra l'examen de ces projets qui semblent avoir pour objet d'autoriser les employés du Congrès (tels que les employés du restaurant du Sénat dont l'association a porté plainte dans ce cas) à être couverts par la loi nationale sur les relations professionnelles.

&htab;23.&htab;&htab;En ce qui concerne le cas no 1141 (Venezuela), le comité avait pris note de ce que les recours engagés par les dirigeants syndicaux Andrès Velazquez et Eleuterio Benitez pour licenciement arbitraire étaient en cours d'instruction à cause de la négligence des requérants et avait demandé au gouvernement de transmettre toute décision qui interviendrait dans cette affaire. Dans une communication du 13 août 1984, le gouvernement indique que ces cas sont forclos. Le comité prend note de cette information.

&htab;24.&htab;&htab;Au sujet du cas no 1155 (Colombie), que le comité avait examiné à sa réunion de mai 1984 (234e rapport, paragr. 259 à 272), il avait demandé au gouvernement de le tenir informé de l'évolution de l'enquête judiciaire relative à l'assassinat de deux dirigeants syndicaux à Popayan (province du Cauca), le 13 septembre 1982. Dans une communication du 28 août 1984, le gouvernement indique que la mort de ces deux dirigeants s'est produite dans un contexte de désordre public et qu'elle n'avait pas de motif de caractère syndical. Il ajoute que le juge supérieur de Popayan a précisé qu'il n'était pas possible de détenir préventivement quiconque étant donné que les investigations n'ont permis de lier ces faits à aucun suspect. Enfin, le gouvernement indique qu'il continuera à communiquer tout progrès qui interviendrait dans l'enquête sur les circonstances qui entourent la mort des dirigeants syndicaux Agapito Chagüenda et Eliecer Tamayo. Le comité prend note de ces informations et de ce que le gouvernement continuera à le tenir informé de la suite de cette affaire.

&htab;25.&htab;&htab;Pour ce qui est du cas no 1163 (Chypre), le comité avait demandé au gouvernement de le tenir informé des résultats du recours engagé devant le Tribunal d'arbitrage par M. Zivanas pour des raisons de discrimination antisyndicales. Le gouvernement déclare que l'affaire a été résolue en dehors des tribunaux et que, par conséquent, le Tribunal d'arbitrage a autorisé le requérant à retirer sa plainte. Le comité prend note de cette information.

&htab;26.&htab;&htab;Au sujet du cas no 1179 (République dominicaine), le comité avait demandé au gouvernement de le tenir informé de la constitution du Syndicat des travailleurs de l'Institut agraire dominicain. Dans une communication du 27 juillet 1984, le gouvernement indique que le Secrétaire d'Etat au travail a procédé à l'enregistrement dudit syndicat. Le comité prend note avec intérêt de cette information.

&htab;27.&htab;&htab;Pour ce qui est du cas no 1181 (Pérou), le comité avait demandé au gouvernement de le tenir informé de l'évolution des travaux relatifs à l'adoption d'un projet de loi visant à réglementer la situation juridique et sociale des employés de la Banque nationale. Dans une communication du 3 septembre 1984, le gouvernement indique que le projet de statut des employés de la Banque nationale se trouve actuellement devant la Commission du travail du Sénat de la République. Le comité prend note de cette information et demande au gouvernement de continuer à le tenir informé des développements intervenus à cet égard.

&htab;28.&htab;&htab;En ce qui concerne le cas no 1210 (Colombie), que le comité avait examiné à sa réunion de novembre 1983 (paragr. 324 à 334 de son 230e rapport), il avait demandé au gouvernement d'autoriser la direction du Syndicat des métallurgistes et des mécaniciens de l'entreprise Grifos et Valvulas SA, à s'affilier au Syndicat national des travailleurs des industries mécaniques, métalliques, métallurgiques et sidérurgiques (SINTRAINE). Dans une communication du 8 août 1984, le gouvernement confirme le refus de l'autorité administrative compétente d'inscrire ladite direction syndicale de la localité de Funza de SINTRAINE, étant donné que, selon elle, cette direction syndicale ne peut se prévaloir du paragraphe b) de l'article 356 du Code du travail. Le comité souhaite indiquer à nouveau au gouvernement qu'il devrait modifier l'article 356 afin de garantir aux travailleurs concernés le droit de s'affilier aux organisations syndicales de leur choix (art. 2 de la convention no 87).

&htab;29.&htab;&htab;Pour ce qui est du cas no 1227 (Inde), le comité avait demandé au gouvernement de le tenir informé sur diverses mesures prises après une grève en août 1983. Dans une communication du 30 octobre 1984, le gouvernement déclare que tous les travailleurs qui avaient été détenus à la suite de la grève d'août 1983 ont été libérés et que l'intervention de la police pendant cette grève n'a eu pour objectif que le maintien de l'ordre public. Le gouvernement poursuit en déclarant que la question de la légalité des licenciements de février 1983 à l'entreprise J.K. Synthetics Ltd suit son cours devant le Tribunal des conflits du travail mais qu'entre-temps cette entreprise a procédé à la réintégration de 29 travailleurs qui figuraient sur la liste annexée au rapport du comité. Le gouvernement précise que deux travailleurs ont démissionné, qu'un travailleur a vu son licenciement confirmé par l'entreprise à la suite de l'enquête qui a été effectuée et que, pour ce qui concerne les 23 autres travailleurs restants, ils sont toujours mis à pied tant que l'enquête sur leur conduite n'est pas terminée. Le gouvernement insiste pour dire que le fait que certains travailleurs soient mis à pied pendant le déroulement d'une enquête interne n'est pas discriminatoire. Le comité prend note de ces informations et demande au gouvernement de le tenir informé de l'issue du jugement du Tribunal des conflits du travail et de la situation des 23 travailleurs encore suspendus.

&htab;30.&htab;&htab;Au sujet du cas no 1230 (Equateur), le comité avait demandé au gouvernement de le tenir informé du résultat de l'instruction pénale relative aux circonstances qui avaient entouré la mort de deux responsables syndicaux de la commune de Culluctuc, Pedro Cuji et Felipa Pucha, et les blessures de trois paysans survenues au cours d'un conflit entre un propriétaire et les membres de la communauté indigène de Culluctuc, le 17 juin 1983. Dans une communication du 1er juin 1984, le gouvernement précise qu'aucune décision n'a été prise et que l'affaire est en instance devant le juge pénal de Chimborazo. Il ajoute qu'il communiquera le résultat du procès dès qu'il sera disponible. Le comité souhaite recevoir ces informations.

&htab;31.&htab;&htab;En ce qui concerne le cas no 1239 (Colombie), le comité avait invité le gouvernement à lui envoyer le résultat de l'enquête judiciaire relative à la mort de Francisco Cristóbal Caro Montoya. Dans une communication du 28 août 1984, le gouvernement précise que la mort de cette personne est survenue à Curralao, près de Turbo, dans la province d'Antioquia, et que, cette zone n'étant plus de la compétence du juge supérieur de Medellín, celui-ci a adressé une commission rogatoire au juge d'instruction no 59 de Turbo pour qu'il enquête sur les faits. Le gouvernement ajoute que le ministère du Travail s'est à nouveau adressé au juge supérieur de Medellín pour lui demander de le tenir informé des résultats obtenus au cours de cette enquête et de l'état actuel du procès. Le gouvernement indique qu'il transmettra une réponse dès qu'il l'aura obtenue. Le comité prend note de ces informations.

&htab;32.&htab;&htab;Au sujet du cas no 1252 (Colombie), que le comité a examiné à sa réunion de mai 1984 (234e rapport, paragr. 273 à 283), il avait recommandé au gouvernement de procéder à une enquête judiciaire à propos de la mort du dirigeant syndical Miguel Angel Caro Henao et de le tenir informé de l'issue de ladite enquête. Dans une communication du 27 juin 1984, le gouvernement signale que les autorités compétentes, à savoir le juge d'instruction de la ville d'Apartadó, dans la province d'Antioquia, ont immédiatement procédé à ladite enquête. Il ajoute ne pas avoir reçu de réponse à sa demande d'informations, mais que le ministère du Travail a réitéré sa demande au juge d'instruction. Le comité prend note de ces informations, et espère que le gouvernement pourra envoyer à brève échéance le résultat de cette enquête.

&htab;33.&htab;&htab;Au sujet du cas no 1261 (Royaume-Uni), le comité avait attiré l'attention du gouvernement sur sa recommandation de prendre des mesures pour poursuivre les négociations avec les syndicats d'agents publics concernés et de s'efforcer spécialement de parvenir à un accord qui assurerait non seulement la continuité des opérations du centre gouvernemantal des communications de Cheltenham souhaitée par le gouvernement, mais aussi la pleine application des conventions sur la liberté syndicale qu'il a ratifiées; le comité avait aussi exprimé l'espoir que le gouvernement reconsidérerait la question à la lumière des considérations qui précèdent et le tiendrait informé de toute nouvelle mesure prise quant aux questions soulevées dans le présent cas. Le Congrès des syndicats britanniques, dans une lettre du 18 octobre 1984, attire l'attention sur le fait qu'il n'a été informé d'aucune réponse qui aurait été faite par le gouvernement à propos des recommandations du comité et qu'il semble que l'opinion du gouvernement n'ait pas changé depuis l'adoption du rapport du comité. Dans une communication du 19 octobre 1984, le gouvernement déclare qu'il examine attentivement le rapport du comité sur cette affaire et qu'il se propose de soumettre des commentaires de fond sur les considérations émises par le comité en temps opportun. Cependant, étant donné que l'affaire est encore en instance devant les tribunaux du Royaume-Uni, le gouvernement se propose de différer ses commentaires jusqu'à ce que la Chambre des Lords se soit prononcée. Le comité prend note de ces informations et attend d'autres informations de la part du gouvernement, tout en exprimant l'espoir qu'il sera possible d'engager des discussions qui conduiront à la résolution du conflit et à la restauration des droits syndicaux des agents publics concernés découlant des instruments internationaux.

&htab;34.&htab;&htab;Enfin, le comité observe que les gouvernements du Pérou (cas no 1228), de Sri Lanka (cas nos 988 et 1003), de l'Inde (cas no 1100), du Pakistan (cas no 1175) et du Nicaragua (cas no 1208) n'ont toujours pas répondu aux demandes du comité d'être tenu informé des développements relatifs aux affaires les concernant. Le comité espère que ces gouvernements pourront lui communiquer ces informations à une date rapprochée.

&htab;35.&htab;&htab;En outre, le comité relève avec préoccupation qu'en dépit du temps écoulé depuis que le Conseil d'administration a invité certains gouvernements de le tenir informé des mesures prises pour donner suite à ses recommandations les réponses attendues des gouvernements concernés n'ont pas été reçues. Le comité tient à signaler à cet égard que, conformément à la règle de procédure établie aux paragraphes 27 et 28 de son 127e rapport approuvé par le Conseil d'administration, s'il n'y a pas de réponse ou si la réponse donnée n'est pas satisfaisante en tout ou en partie, l'affaire doit être suivie sur une base périodique, le comité charge le Directeur général, à intervalles appropriés selon la nature de chaque cas, de rappeler la question à l'attention des gouvernements intéressés et de solliciter des informations sur les suites données aux recommandations approuvées par le Conseil d'administration et le comité fait, de temps à autre, le point de la question.

&htab;36.&htab;&htab;Dans ces conditions, le comité rappelle les demandes qu'il a formulées depuis longtemps déjà et qui sont restées sans réponse. Ainsi, il a demandé au gouvernement du Pérou à sa réunion de mai 1981 de procéder à une enquête judiciaire pour élucider les faits relatifs à la mort d'un syndicaliste survenue au cours d'une réunion syndicale à Lima en mai 1980 et de l'informer du résultat de l'enquête (cas no 967). Il a invité le gouvernement du Kenya, à sa réunion de février-mars 1982, à le tenir informé de l'évolution de la situation relative à la constitution d'une organisation syndicale représentant les travailleurs de l'université dont le syndicat avait été dissous par voie administrative en 1980 (cas no 984). Il a aussi demandé au gouvernement du Brésil, à sa réunion de mai 1982, de le tenir informé des mesures prises pour restaurer la personnalité juridique des associations d'enseignants de Rio de Janeiro suspendues par décret présidentiel no 83.330 du 7 août 1979 pour avoir organisé une grève (cas no 1034). De même, il a prié le gouvernement du Soudan, à sa réunion de février-mars 1983, de le tenir informé du résultat des élections de février 1983 concernant le Syndicat des cheminots dissous administrativement en mai 1981 (cas no 1037). Il a invité aussi le gouvernement du Pakistan, à sa réunion de novembre 1982, à révoquer le texte du règlement no 52 de 1981 interdisant toute activité syndicale dans les compagnies aériennes nationalisées et de lui communiquer copie de l'acte de révocation (cas no 1075). Enfin, il a demandé au gouvernement de Sierra Leone, à sa réunion de novembre 1982, d'indiquer si l'ex-secrétaire général du Congrès du travail de Sierra Leone, M. James Kabia, qui avait été interdit d'activités syndicales en mars 1982, a pu reprendre ses activités syndicales dans le pays (cas no 1121). N'ayant pas reçu les réponses et les informations attendues des gouvernements sur ces différentes affaires, le comité souhaite charger le Directeur général de rappeler ces questions à l'attention des gouvernements intéressés et de leur demander de communiquer d'urgence leur réponse pour lui permettre à sa prochaine session de faire le point de la question sur chaque cas.

CAS N'APPELANT PAS UN EXAMEN PLUS APPROFONDI Cas no 1213 PLAINTE PRESENTEE PAR L'UNION PANHELLENIQUE DES MECANICIENS DE LA MARINE MARCHANDE CONTRE LE GOUVERNEMENT DE LA GRECE

&htab;37.&htab;Le comité a examiné ce cas à sa session de février 1984 où il a présenté ses conclusions intérimaires (233e rapport, paragr. 593 à 627) approuvées par le Conseil d'administration à sa 225e session. Depuis lors, le comité a pris connaissance de certaines informations supplémentaires envoyées par le gouvernement, notamment dans une communication du 20 juin 1984.

&htab;38.&htab;La Grèce a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

&htab;39.&htab;Le cas en instance a trait à un conflit du travail qui s'est déroulé entre l'Union panhellénique des mécaniciens de la marine marchande (PEMEN) et l'Union des dockers PENEM, d'une part, et l'Union des armateurs grecs (EEE), d'autre part, au sujet du renouvellement d'une convention collective. Selon les plaignants, les employeurs en auraient refusé le renouvellement alors qu'un projet de loi visant à abaisser les salaires et les conditions de travail des marins grecs au détriment des marins du tiers monde était introduit au Parlement.

&htab;40.&htab;Une première grève de 48 heures a eu lieu en juin 1983, déclenchée par les marins grecs qui se trouvaient dans différents ports du monde, notamment aux Etats-Unis d'Amérique, en Algérie, en Côte-d'Ivoire, en Belgique et aux Pays-Bas. Cette grève aurait conduit au licenciement de plusieurs marins. En outre, il est allégué qu'à la Nouvelle-Orléans (Louisiane, Etats-Unis), 10 syndicalistes se seraient vu interdire de débarquer sur le territoire américain et de naviguer sur un bateau relâchant dans un port américain. Les plaignants prétendent qu'aucun navire n'engagerait plus de syndicalistes car ceux qui le feraient risqueraient de se voir interdire l'entrée d'un port américain.

&htab;41.&htab;Ultérieurement, une seconde grève de 48 heures aurait été déclenchée en août 1983 pour revendiquer des augmentations de salaire et des primes étant donné que les négociations avec les armateurs, qui jouiraient de l'appui du gouvernement, auraient été rompues. Les dirigeants syndicaux grévistes auraient été arrêtés le 19 août 1983 et déférés devant le Tribunal du Pirée le 28 septembre 1983.

&htab;42.&htab;Le comité avait demandé au gouvernement de fournir ses observations sur les allégations restées en instance après l'examen du cas, c'est-à-dire des licenciements de grévistes, l'inscription sur des listes noires, les empêchant de retrouver du travail, et des arrestations de grévistes à la suite de la grève d'août 1983.

B. Réponse du gouvernement

&htab;43.&htab;Dans les informations supplémentaires qu'il a fournies, le gouvernement admet l'arrestation de 14 personnes au cours de la grève du 19 août 1983, mais il explique qu'elle était intervenue lorsque les personnes en question s'étaient opposées au transport des passagers et au départ des navires sans tenir compte des ordres du Procureur du port du Pirée. Elles ont été arrêtées par la police du port et poursuivies pour infraction aux articles 167 et 169 du Code pénal relatifs à la résistance aux ordres des autorités et à la désobéissance. Par la suite, elles ont été jugées, et neuf d'entre elles ont été condamnées à quatre mois de prison par le Tribunal du Pirée. Ces dernières ont interjeté appel et ont finalement été libérées. Aucune d'entre elles n'était enregistrée comme membre d'équipage.

&htab;44.&htab;Le gouvernement indique que les grévistes qui ont été licenciés par les capitaines de navire l'ont été parce qu'ils avaient usé de violences et de menaces pour empêcher la liberté du travail des non-grévistes, contrairement à l'article 40 de la loi no 330/1976. Le gouvernement fournit des informations détaillées sur les actes illégaux commis par les marins licenciés dans les ports de Côte-d'Ivoire, des Etats-Unis, de Grèce et de Belgique, notamment sur les huit cas de recours écrits introduits le 13 juillet 1983, et le ministre de la Marine marchande a décidé que les faits reprochés par les capitaines de navire constituaient des infractions. Il ressort des informations contenues dans la réponse que les grévistes auraient intimidé les non-grévistes en leur interdisant d'appareiller sous la menace d'avoir les jambes coupées par une hachette, en leur interdisant d'ouvrir les écoutilles, en frappant des officiers, en faisant monter des journalistes à bord des bateaux pour empêcher les chargements ou refusant de rejoindre leur bord alors que le bateau allait appareiller, et en se jetant à l'eau devant les navires. Toutefois, le ministère de la Marine marchande a donné des instructions aux autorités portuaires de ne pas licencier les marins concernés, et la mention des licenciements prononcés a été annulée dans leur livret maritime.

C. Conclusions du comité

&htab;45.&htab;Le comité observe dans cette affaire que, selon les plaignants, les grèves déclenchées par les marins et qui ont conduit à des mesures de licenciements et d'emprisonnement des marins avaient un caractère professionnel. Le gouvernement, bien qu'il ait confirmé que neuf des grévistes ont effectivement été condamnés à quatre mois de prison et que d'autres marins ont été licenciés, a déclaré que les condamnations ont été prononcées pour résistance aux ordres et désobéissance et que les licenciements étaient justifiés car les marins en cause avaient porté atteinte à la liberté du travail des marins non grévistes par des mesures d'intimidation et par des menaces et des violences.

&htab;46.&htab;Dans ces conditions, le comité se doit de rappeler que, si les autorités ne doivent pas avoir recours aux mesures d'emprisonnement en cas de grève pacifique et encore moins de licenciement, dans les cas évoqués dans la présente affaire, d'après les informations détaillées fournies par le gouvernement, les grévistes, en bloquant les accès aux navires, en frappant les non-grévistes ou en proférant à l'encontre d'autres marins des menaces graves semblent avoir excédé ce qui peut être considéré comme l'exercice légitime et pacifique du droit de grève. Il apparaît, de toutes manières, que les personnes arrêtées ont été libérées et que les licenciements prononcés ont été annulés.

Recommandation du comité

&htab;47.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration de décider que ce cas n'appelle pas un examen plus approfondi.

Cas no 1256 PLAINTE PRESENTEE PAR LE COMITE POUR LA CREATION D'UNE ASSOCIATION SYNDICALE DE LA POLICE DE SURETE PUBLIQUE CONTRE LE GOUVERNEMENT DU PORTUGAL

&htab;48.&htab;La plainte du comité pour la création d'une Association syndicale de la police de sûreté publique est contenue dans trois communications datées respectivement des 30 décembre 1983, 21 février et 20 juin 1984. Le gouvernement du Portugal a fait parvenir ses observations par des communications des 17 mai et 4 octobre 1984.

&htab;49.&htab;Le Portugal a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations du plaignant

&htab;50.&htab;Le comité plaignant déclare qu'il s'est créé, le 6 février 1982, dans le but de fonder une association syndicale de la police de sûreté publique conformément à la législation en vigueur (décret-loi 215-B/75 du 30 avril 1975 portant réglementation des syndicats). Il ajoute qu'il regroupe des officiers de l'armée de terre en détachement, des agents de police et des agents administratifs. Or, allègue-t-il, le gouverneur du district de Lisbonne et la direction de la police de sûreté ont empêché la tenue de l'assemblée constituante de l'association, qui avait été régulièrement convoquée, ainsi que le déroulement des opérations de vote entre le 8 et le 26 novembre 1983, confisquant les urnes, saccageant les bureaux provisoires, saisissant des documents et conduisant des membres des bureaux de vote aux postes de police pour vérification d'identité. De plus, certains membres du comité fondateur ont subi des mesures d'intimidation et de répression y compris des peines d'amende, des mutations et des mises à la retraite d'office pour avoir organisé des banquets réunissant des agents de police ou une collecte de fonds destinés à l'association. Des agents ont été poursuivis par mesure disciplinaire pour avoir participé au vote. Par ailleurs, le ministère du Travail a refusé l'enregistrement et la publication des statuts de l'Association syndicale de la police de sûreté publique qui s'était constituée à Madère, où le vote avait pu se dérouler normalement.

&htab;51.&htab;Le comité plaignant prétend que l'assemblée constituante de novembre 1983 était légale, puisqu'elle avait été convoquée plus de six mois après l'entrée en vigueur de la loi no 29/82 du 11 décembre 1982 sur la Défense nationale et les forces armées, dont l'article 69 2) contenait des dispositions restrictives, mais de nature temporaire (d'une durée de six mois) à la constitution d'une association pour les militaires. Il précise qu'il a déposé des recours en inconstitutionnalité contre le décret-loi no 440 du 4 novembre 1982 portant approbation du règlement disciplinaire de la police de sûreté publique et contre la loi no 41/83 du 20 décembre 1983 qui a modifié l'article 69 2) de la loi sur la Défense nationale et les forces armées. Pour le plaignant, le législateur a donné un caractère rétroactif à ce second texte, étendant les dispositions restrictives à la constitution d'un syndicat applicables à la police de sûreté publique jusqu'à la publication d'une nouvelle législation à intervenir le 15 juin 1984, afin de pouvoir sanctionner ceux qui avaient pris part au vote sur la constitution de l'association syndicale, puisque l'article 69 2) de la loi sur la Défense nationale et les forces armées avait cessé d'être applicable à la police de sûreté publique le 16 juin 1983.

B. Réponse du gouvernement

&htab;52.&htab;Le gouvernement, pour sa part, explique que le personnel de la police de sûreté publique est compris dans le personnel militarisé et dans celui des forces de sécurité visés aux articles 270 et 272 de la Constitution portugaise auxquels des restrictions à l'exercice des droits d'expression, de réunion, de manifestation et d'association peuvent être applicables dans la stricte mesure des exigences de leurs fonctions. A l'appui de l'assertion relative à la nature juridique de cette catégorie de salariés, il communique divers décrets-lois spécifiques sur la police de sûreté publique, notamment des textes de 1978 et 1980 portant création de la carte d'identité du "personnel militarisé" de la police de sûreté publique, des textes de 1976, 1977, 1978 et 1980 sur les ajustements de traitements et rémunérations accessoires applicables au personnel militaire et militarisé de la police de sûreté, et des textes de 1977 et 1979 portant création au sein de la police de sûreté publique d'un corps d'intervention et d'un groupe d'opération spéciale dont le recrutement et la préparation ont un caractère éminemment militaire. Il ajoute que le décret-loi no 440/82, portant règlement disciplinaire de la police de sûreté, consacre, dans son préambule, la nature hybride de cette corporation qui exerce des attributions d'autorité civile et qui a une structure militarisée, et que la loi no 29/82 du 11 décembre 1982 sur la Défense nationale et les forces armées réaffirme expressément que les agents de la police de sûreté publique sont et continuent à être assujettis aux règles spéciales établies pour le personnel militaire. Le Tribunal suprême de justice qualifie d'ailleurs la police de "force militarisée" (arrêts des 23 juin 1982 et 22 février 1983). Sur ce dernier point, le gouvernement explique, dans sa communication du 4 octobre 1984, que l'arrêt du Tribunal suprême du 29 juillet 1983 indiquant que "les agents de la police de sûreté publique ne sont pas des militaires et que la police de sûreté publique est un corps civil" avait trait à un conflit de compétence entre les autorités judiciaires civiles et les autorités judiciaires militaires. En effet, le Tribunal suprême a décidé dans ladite affaire qu'un procès criminel intenté contre un agent de la police de sûreté publique pour des actes pratiqués dans l'exercice de ses fonctions relevait de la compétence des tribunaux civils et non militaires. La portée de la décision du Tribunal suprême avait donc un caractère limité et ne contredisait pas sa jurisprudence antérieure.

&htab;53.&htab;Le gouvernement affirme que les droits syndicaux du personnel de la police sont englobés dans les droits susceptibles d'être sujets à des restrictions. Afin de clarifier la situation de la police de sûreté publique, explique-t-il, le législateur a adopté le décret-loi no 440/83 du 4 novembre 1982 portant règlement disciplinaire de la police de sûreté publique. En outre, en attendant la législation spécifique sur la police, il a prévu, à titre transitoire, l'application à la police du régime défini par la loi no 29/82 du 11 décembre 1982 sur la Défense nationale et les forces armées, dont l'article 69 2) dispose en substance que le régime applicable aux militaires en matière de restrictions aux droits d'expression, de réunion, de manifestation et d'association est applicable à titre transitoire à la police de sûreté publique jusqu'à la publication d'une nouvelle législation que le gouvernement devra proposer à l'Assemblée nationale dans un délai de six mois.

&htab;54.&htab;Le gouvernement poursuit en expliquant que, si la législation spécifique annoncée à l'article 69 de la loi sur la Défense nationale et les forces armées n'a pas encore été adoptée, cela tient à la chute du gouvernement et à la dissolution de l'assemblée, le nouveau gouvernement n'ayant été investi que le 6 juin 1983 après les élections législatives. La validité du régime transitoire a d'ailleurs été prorogée par la loi no 41/83 du 21 décembre 1983 qui a réaffirmé que le régime applicable à la police de sûreté publique était le régime applicable aux militaires et aux agents militarisés des cadres permanents et contractuels en service actif, jusqu'à la publication de la législation spécifique pour laquelle un délai est fixé. Dans sa communication du 4 octobre 1984, le gouvernement précise qu'il a présenté à l'assemblée un projet de loi sur la sécurité intérieure et la protection civile qui a été discuté et approuvé d'une manière générale. Cependant, aux termes de la législation nationale, les projets et propositions de loi doivent être soumis à deux débats parlementaires, l'un général sur l'opportunité de la mesure envisagée, ce qui a été fait, et l'autre spécifique avec un vote article par article qui va avoir lieu et qui devra réunir la majorité des deux tiers des députés présents. Le gouvernement déclare ne pas être en mesure d'indiquer quel sera le contenu du projet au stade final, étant donné que deux propositions de loi parlementaires qui divergent par rapport au projet gouvernemental sur des aspects de substance seront présentées concurremment à l'assemblée.

&htab;55.&htab;Le gouvernement justifie les restrictions apportées par la loi à l'exercice du droit syndical de la police en invoquant l'article 9 de la convention no 87 qui dispose que la mesure dans laquelle les garanties prévues par la convention s'appliqueront aux forces armées et à la police sera déterminée par la législation nationale et il rappelle que, tant la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations que le Comité de la liberté syndicale s'en sont toujours tenus à la simple interprétation littérale de cette disposition.

&htab;56.&htab;A propos du refus d'enregistrement des statuts de l'Association syndicale des professionnels de la police de sûreté publique, le gouvernement admet qu'une demande a été déposée le 2 décembre 1983, mais il rétorque que le ministère du Travail et de la Sécurité sociale, vu l'article 69 2) de la loi no 29/82 confirmé par la loi no 41/83 interdisant à titre transitoire l'exercice des droits de réunion, d'affiliation et d'association syndicale à la police de sûreté publique, n'avait aucun fondement légal pour donner satisfaction à la demande. Pour le gouvernement, en effet, le recours en inconstitutionnalité contre la loi no 41/83 dont arguent les plaignants n'est pas admissible tant que le tribunal constitutionnel ne se sera pas prononcé sur la question.

&htab;57.&htab;Au sujet des actions disciplinaires exercées à l'encontre des agents qui ont tenté de créer ladite association, le gouvernement rappelle que la loi interdit aux militaires et aux agents militarisés des cadres permanents et contractuels en service à la police de sûreté publique de faire des déclarations publiques, de convoquer des réunions et de s'inscrire à des associations à caractère syndical. Dans ces conditions, le commandant général de la corporation a attiré l'attention des intéressés sur ces interdictions, et ceux qui se sont engagés dans de telles activités ont été sanctionnés au cours de procès disciplinaires où les droits de la défense ont été respectés. Les interessés ont introduit des recours devant le ministre de l'Intérieur qui a confirmé les sanctions. Ils ont engagé des pourvois contre la décision ministérielle devant le tribunal suprême administratif qui n'a pas encore statué.

C. Conclusions du comité

&htab;58.&htab;Le comité a pris note des allégations du comité plaignant ainsi que des observations du gouvernement à leur égard. Il observe toutefois que la plainte émane d'un comité qui avait pour objectif de fonder une association syndicale de la police de sûreté publique et qui avait pour membres des agents de la police de sûreté publique. A cet égard, le comité doit signaler que le paragraphe 1 de l'article 9 de la convention no 87 prévoit que "la mesure dans laquelle les garanties prévues par la présente convention s'appliqueront aux forces armées et à la police sera déterminée par la législation nationale".

&htab;59.&htab;Le comité observe qu'aux termes de la législation temporaire en vigueur au Portugal les membres de la police de sûreté publique ne bénéficient pas du droit d'association syndicale et que le processus législatif visant à réglementer ce droit se poursuit. Le comité exprime l'espoir que le processus aboutira à l'adoption de dispositions déterminant avec précision la portée des droits syndicaux de la catégorie de travailleurs en question. Entre-temps, le comité estime que, dans l'état actuel de la législation, il ne lui appartient pas de se prononcer sur les allégations contenues dans la présente plainte.

&htab;60.&htab;Le comité observe d'ailleurs que des recours en inconstitutionnalité sont en instance devant les tribunaux et que la législation portugaise prévoit des voies de recours en matière de sanction disciplinaire.

Recommandation du comité

&htab;61.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration de décider qu'en l'état actuel de la législation portugaise en matière de restrictions au droit syndical des membres de la police, le présent cas n'appelle pas un examen plus approfondi.

Cas no 1259 PLAINTE PRESENTEE PAR L'UNION INTERNATIONALE DES SYNDICATS DES TRAVAILLEURS DES TRANSPORTS CONTRE LE GOUVERNEMENT DU BANGLADESH

&htab;62.&htab;L'Union internationale des syndicats des travailleurs des transports a présenté une plainte en violation des droits syndicaux dans une communication datée du 3 février 1984. Elle a formulé des allégations complémentaires dans une lettre du 6 mars 1984. Le gouvernement a transmis ses observations dans une communication du 14 juillet 1984.

&htab;63.&htab;Le Bangladesh a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations du plaignant

&htab;64.&htab;Dans sa communication du 3 février 1984, le plaignant allègue que les dirigeants d'une organisation qui lui est affilée, le Syndicat des dockers de Chittagong, ont été arrêtés de façon illégale. Il s'agit du secrétaire général de ladite organisation, M. Abul Kalam, de son président, M. Jalaluddin, et de MM. Nazrul et Shiek Manik. Le plaignant soutient que les intéressés sont détenus depuis près d'un an et que, outre leur arrestation, les autorités ont pris "plusieurs mesures restrictives et répressives".

&htab;65.&htab;Dans sa communication ultérieure, le plaignant allègue qu'un dirigeant d'une autre organisation du Bangladesh qui lui est affiliée, la Fédération des syndicats des transports du Bangladesh, a été arrêté: le président par intérim de cette organisation, M. Monjurul Ahsan Khan. Dans un post-scriptum, le plaignant déclare qu'il vient d'apprendre que 37 dirigeants syndicaux du Bangladesh ont été arrêtés.

B. Réponse du gouvernement

&htab;66.&htab;Dans sa communication du 14 juillet 1984, le gouvernement déclare que les poursuites intentées contre les dirigeants syndicaux arrêtés ont pris fin et que les intéressés ont été relaxés.

C. Conclusions du comité

&htab;67.&htab;Le comité doit tout d'abord souligner que l'organisation plaignante n'allègue pas que les arrestations objet de la plainte aient été fondées sur les activités syndicales des intéressés ou leur qualité de syndicalistes et qu'elle ne fournit pas non plus d'informations tendant à montrer qu'il en ait été ainsi. Elle se borne à déclarer que - dans quatre cas - les arrestations étaient "illégales". En outre, le comité note que le plaignant, bien qu'il ait eu l'occasion de le faire, n'a pas fourni de renseignements détaillés (tels que dates, lieux) au sujet des circonstances dans lesquelles les cinq dirigeants syndicaux désignés par leur nom ont été arrêtés et qu'il n'a pas indiqué les noms des 37 autres dirigeants syndicaux qui auraient été arrêtés, probablement en mars 1984. En réponse aux allégations, le gouvernement, quant à lui, se contente de déclarer que les poursuites engagées contre tous les dirigeants syndicaux arrêtés ont pris fin et que tous les intéressés ont été relaxés.

&htab;68.&htab;Dans ces conditions, tout en appelant l'attention de façon générale sur le principe selon lequel l'arrestation et la détention de syndicalistes contre lesquels aucun chef d'inculpation n'est retenu par la suite porte atteinte aux droits syndicaux, le comité considère que le cas n'appelle pas un examen plus approfondi.

Recommandations du comité

&htab;69.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Le comité attire l'attention du gouvernement sur le principe selon lequel l'arrestation et la détention de syndicalistes contre lesquels aucun chef d'inculpation n'est retenu par la suite porte atteinte aux droits syndicaux.

b) Le comité considère que ce cas n'appelle pas un examen plus approfondi.

CAS OU LE COMITE FORMULE DES CONCLUSIONS DEFINITIVES Cas no 963 PLAINTE PRESENTEE PAR LA CONFEDERATION MONDIALE DU TRAVAIL CONTRE LE GOUVERNEMENT DE LA GRENADE

&htab;70.&htab;Le comité a déjà examiné ce cas à trois reprises et présenté des conclusions intérimaires au Conseil d'administration [voir 207e rapport, paragr. 221 à 230, 217e rapport, paragr. 528 à 539, et 226e rapport, paragr. 132 à 140] qui ont été adoptées par celui-ci à ses 215e, 220e et 223e sessions [mars 1981, mai-juin 1982 et mai-juin 1983, respectivement].

&htab;71.&htab;A ses réunions de novembre 1983, février et mai 1984, le comité a ajourné le réexamen du présent cas et, tout récemment, il a adressé au gouvernement un appel pressant pour lui demander de transmettre ses observations sur les allégations en instance. Le comité a souligné [voir paragr. 17 de son 234e rapport, approuvé par le Conseil d'administration à sa 226e session (mai-juin 1984)] que, conformément à la procédure en vigueur, il examinerait ce cas quant au fond à sa prochaine réunion même si les observations du gouvernement ne lui étaient pas parvenues à cette date. Aucune réponse n'a été reçue du gouvernement à ce sujet depuis le 12 avril 1983.

&htab;72.&htab;La Grenade n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; en revanche, elle a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examens antérieurs du cas

&htab;73.&htab;Dans sa communication initiale du 7 mai 1980, la Confédération mondiale du travail (CMT) avait allégué l'arrestation de six dirigeants syndicaux désignés nommément, l'expulsion du pays de l'un de ces dirigeants (M. Stanley Cyrus) et la fermeture arbitraire de l'atelier d'imprimerie du syndicat. Dans une communication ultérieure du 11 mars 1982, la CMT avait précisé que les cinq dirigeants syndicaux arrêtés étaient toujours détenus et elle avait ajouté les noms de deux autres syndicalistes à la liste des détenus; elle avait également indiqué que M. Cyrus se trouvait toujours en exil. Dans sa lettre du 16 mars 1983, la CMT avait déclaré que l'un des syndicalistes déjà nommés (Roland Budhlall) avait été battu, torturé et contraint - sous la menace d'armes à feu - de signer une déclaration préparée par la police. Selon la CMT, pendant son procès, M. Budhlall aurait affirmé qu'il n'avait signé la déclaration que par crainte d'être torturé de nouveau.

&htab;74.&htab;Dans ses réponses, le gouvernement avait nié l'arrestation de l'un des responsables syndicaux (M. Lloyd Roberts) et avait déclaré que les cinq autres personnes désignées n'étaient pas connues comme appartenant à un quelconque syndicat ou comme responsables syndicaux; il avait également indiqué que M. Cyrus était recherché pour meurtre. Le gouvernement avait, en outre, suggéré que le BIT envoie une mission à Grenade pour vérifier les faits.

&htab;75.&htab;Malgré le peu d'informations dont il disposait et tout en notant que le gouvernement niait l'arrestation de l'une des personnes désignées par l'organisation plaignante, le comité, lors du dernier examen du cas, avait formulé les recommandations suivantes:

- en ce qui concernait l'arrestation de huit dirigeants syndicaux mentionnés par l'organisation plaignante, il avait rappelé l'importance du principe selon lequel les intéressés doivent être jugés promptement par une autorité judiciaire indépendante et impartiale, et il avait exprimé l'espoir que si le gouvernement n'avait pas déjà pris des mesures pour faire relâcher toutes les personnes qui avaient été arrêtées en raison de leur appartenance à un syndicat ou de leurs activités syndicales, il le ferait rapidement. Il avait invité le gouvernement à fournir des informations détaillées sur le sort de ces personnes et à envoyer ses observations au sujet de la dernière communication de l'organisation plaignante dans laquelle les noms de Roland Budhlall et Super Bartholomew avaient été ajoutés à la liste des syndicalistes emprisonnés;

- en ce qui concernait l'expulsion alléguée de Grenade du responsable syndical Stanley Cyrus, le comité avait rappelé d'une manière générale que l'exil forcé de syndicalistes, non seulement les prive de la possibilité de travailler dans leur pays et les sépare de leur famille, mais qu'en outre il constitue une atteinte à la liberté syndicale car il affaiblit le mouvement syndical en le privant de ses dirigeants. Il avait estimé que M. Cyrus devait être autorisé à revenir à Grenade pour s'acquitter des fonctions syndicales auxquelles il avait été élu, et il avait exprimé l'espoir que le gouvernement avait pris ou prendrait les mesures nécessaires à cet effet;

- en ce qui concernait la fermeture alléguée de l'atelier d'imprimerie du syndicat, le comité avait rappelé que le plein exercice des droits syndicaux reposait sur la liberté d'expression mise en oeuvre par des moyens tels que la presse syndicale, et il avait invité le gouvernement à lui communiquer des informations sur les mesures prises ou envisagées pour rétablir cette liberté.

&htab;76.&htab;Dans son dernier examen du cas, en mai 1983, le comité avait recommandé au Conseil d'administration d'approuver les conclusions suivantes: face à la gravité des allégations formulées, en particulier la détention, l'expulsion du pays et la torture de syndicalistes, le comité avait prié le gouvernement d'indiquer s'il donnait son consentement à ce qu'un représentant du Directeur général effectue une mission de contacts directs, de sorte que le comité puisse être saisi à sa session de novembre d'un rapport détaillé sur la situation. Malgré les préparatifs effectués dans ce but, et la visite sur place d'un représentant du Directeur général, le gouvernement à cette époque n'a pas accordé les facilités qu'il avait promises pour la réalisation de la mission.

B. Conclusions du comité

&htab;77.&htab;Le comité note que depuis son dernier examen du cas, la Grenade a changé de gouvernement vers la fin de 1983.

&htab;78.&htab;Toutefois, après avoir examiné en détail les graves allégations (détention, expulsion et tortures de syndicalistes et fermeture arbitraire de l'atelier d'imprimerie du syndicat), le comité croit utile de reprendre les conclusions qu'il avait formulées à l'égard du précédent gouvernement dans le présent cas. Premièrement, il rappelle que, lorsque des dirigeants syndicaux sont arrêtés et détenus, il convient que les intéressés soient jugés promptement par une autorité judiciaire indépendante et impartiale. Deuxièmement, l'exil de dirigeants syndicaux hors de leur pays en raison de leurs activités syndicales constitue non seulement une violation des droits de l'homme, mais aussi une ingérence dans le mouvement syndical. Troisièmement, en ce qui concerne la fermeture de l'atelier d'imprimerie du syndicat, le comité estime que le plein exercice des droits syndicaux repose sur la liberté d'expression mise en oeuvre par des moyens tels que la presse syndicale. Enfin, en ce qui concerne l'allégation de tortures de syndicalistes, le comité a toujours insisté sur l'importance de procéder à une enquête sur les faits afin d'établir les responsabilités et d'appliquer des sanctions efficaces. [Voir, par exemple, 234e rapport, cas no 1192 (Philippines), paragr. 540.]

Recommandations du comité

&htab;79.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Le comité note que, depuis son dernier examen du cas, la Grenade a changé de gouvernement vers la fin de 1983.

b) Le comité rappelle qu'en cas d'arrestation et de détention de syndicalistes les intéressés doivent être jugés promptement par une autorité judiciaire indépendante et impartiale. c) Le comité rappelle également que l'exil de dirigeants syndicaux en raison de leurs activités syndicales constitue non seulement une violation des droits de l'homme, mais aussi une ingérence dans le mouvement syndical.

d) En ce qui concerne la fermeture de l'atelier d'imprimerie du syndicat, le comité est d'avis que le plein exercice des droits syndicaux repose sur la liberté d'expression.

e) En cas d'allégations de tortures de syndicalistes, le comité a toujours insisté sur l'importance de procéder à une enquête sur les faits afin d'établir les responsabilités et d'appliquer des sanctions efficaces.

Cas no 1243 PLAINTE PRESENTEE PAR LA CONFEDERATION INTERNATIONALE DES SYNDICATS LIBRES CONTRE LE GOUVERNEMENT DE LA GRENADE

&htab;80.&htab;La Confédération internationale des syndicats libres (CISL) a présenté une plainte en violation des droits syndicaux contre la Grenade, dans une communication du 21 octobre 1983. Bien que le gouvernement ait été prié à plusieurs reprises d'envoyer ses commentaires, aucune communication n'a été reçue de lui à ce sujet.

&htab;81.&htab;Au paragraphe 17 de son 234e rapport (que le Conseil d'administration a approuvé à sa 226e session, mai-juin 1984), le comité priait instamment le gouvernement de transmettre de toute urgence ses commentaires au sujet des allégations et signalait que, conformément à la règle de procédure établie, il examinerait le fond de l'affaire à sa prochaine session, même si la réponse du gouvernement n'avait pas été reçue à cette date.

&htab;82.&htab;La Grenade n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; elle a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations du plaignant

&htab;83.&htab;Dans sa communication du 23 octobre 1983, la CISL déclare que les incidents violents qui se sont produits récemment à la Grenade ont entraîné des effusions de sang lors desquelles deux dirigeants syndicaux, Vincent Noel, président du Conseil des syndicats de la Grenade - organisation affiliée à la CISL - et membre du conseil général du Congrès du travail des Caraïbes (CCL), et Fitzroy Bain, président du Syndicat des travailleurs de l'agriculture et autres (AAWU), ont été tués par les forces armées. La CISL exprime le vif sentiment d'horreur que lui inspirent ces événements et demande aux autorités compétentes de fournir des renseignements complets au sujet des circonstances dans lesquelles les assassinats en question ont été commis. Elle se dit aussi gravement inquiète quant à l'existence future et au respect des droits fondamentaux et des droits syndicaux dans l'île.

B. Conclusions du comité

&htab;84.&htab;Le comité note que, depuis le dépôt de la plainte, la Grenade a changé de gouvernement vers la fin de 1983.

&htab;85.&htab;Toutefois, le comité doit exprimer son inquiétude devant la gravité des allégations qui avaient été formulées à l'encontre du précédent gouvernement: deux dirigeants syndicaux, M. Vincent Noel et M. Fitzroy Bain, auraient été tués par les Forces armées. Parmi les renseignements dont il dispose, le comité relève que M. Noel, président du Conseil des syndicats de la Grenade et membre de la direction du Congrès du travail des Caraïbes, était le délégué des travailleurs de la Grenade à la session de 1982 de la Conférence internationale du travail. Dans ces conditions, le comité déplore vivement ces morts et rappelle de façon générale qu'un climat de violence comme celui dans lequel se situe l'assassinat de dirigeants syndicaux constitue un grave obstacle à l'exercice des droits syndicaux [voir, par exemple, 204e rapport, cas no 985 (Turquie), paragr. 306]. Le comité demande au gouvernement de faire procéder rapidement à une enquête judiciaire indépendante au sujet de ces morts, de façon à faire la pleine lumière sur les faits, à identifier les coupables et à engager des poursuites contre eux.

Recommandations du comité

&htab;86.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Le comité note que, depuis le dépôt de la plainte, la Grenade a changé de gouvernement vers la fin de 1983.

b) Le comité déplore vivement la mort des dirigeants syndicaux Vincent Noel et Fitzroy Bain. Un climat de violence tel que celui dans lequel ces morts ont eu lieu constitue un grave obstacle au développement des droits syndicaux. c) Le comité demande au gouvernement de faire procéder rapidement à une enquête judiciaire indépendante au sujet de ces morts, de façon à faire la pleine lumière sur les faits, à identifier les coupables et à engager des poursuites contre eux.

Cas no 1066 PLAINTE PRESENTEE PAR LA CONFEDERATION MONDIALE DU TRAVAIL CONTRE LE GOUVERNEMENT DE LA ROUMANIE

&htab;87.&htab;Le comité a déjà examiné ce cas à quatre reprises, et le plus récemment à sa réunion de février 1984 où il a présenté un rapport intérimaire au Conseil d'administration. [Voir 233e rapport, paragr. 338 à 381, approuvé par le Conseil d'administration à sa 225e session (février-mars 1984).]

&htab;88.&htab;Depuis lors, le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication du 24 octobre 1984.

&htab;89.&htab;La Roumanie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas par le comité

&htab;90.&htab;La plainte concernait les mesures de répression qui auraient été prises par les autorités roumaines à l'encontre des fondateurs et d'autres membres d'une organisation qui aurait été créée en 1979 sous le nom de "Syndicat libre des travailleurs de Roumanie" (SLOMR). Les allégations portaient également sur le sort de certaines personnes de la ville de Sighisoara censées être des militants du SLOMR, sur des mesures répressives qui auraient été prises à l'encontre de grévistes des houillères de la vallée du Jiu en 1977, ainsi que sur l'arrestation et l'emprisonnement de certaines personnes, dans la ville de Timisoara, en raison d'activités syndicales.

&htab;91.&htab;L'organisation plaignante avait allégué qu'en 1979 l'organisation dénommée "Syndicat libre des travailleurs de Roumanie" (SLOMR) avait été fondée par 20 personnes dont les noms figurent dans un document qui serait l'acte constitutif de la nouvelle organisation. Aux termes de cet acte constitutif, que le comité avait étudié, les objectifs déclarés de l'organisation étaient essentiellement de lutter pour le respect des droits de l'homme et, plus particulièrement, pour les droits des travailleurs. L'instrument précisait que l'organisation légalement constituée en conformité de la loi roumaine était affiliée à la Confédération mondiale du travail. Le plaignant avait allégué en termes généraux que cette tentative visant à constituer une organisation syndicale avait été immédiatement suivie par une série de mesures de répression de la part des autorités contre le syndicat et ses membres, y compris l'arrestation, l'internement en hôpital psychiatrique, l'exil, le passage à tabac et la condamnation expéditive. De son côté, le gouvernement avait énergiquement contesté l'existence d'une quelconque organisation nouvelle de ce genre et, par voie de conséquence, toute mesure de répression qui aurait été prise contre une telle organisation ou contre ses membres. Le gouvernement avait précisé que 15 des vingt membres fondateurs du SLOMR n'avaient pu être identifiés, que deux (Ionel Cana et Gheorghe Brasoveanu) étaient à la retraite et vivaient actuellement à Bucarest (après avoir été condamnés pour propagande fasciste, puis amnistiés), et trois (dont deux, Nicolae Gugu et Gheorghe Fratila, étaient à la retraite et l'autre, Ioana Grigore, était couturière) vivaient respectivement à Bucarest et à Otopeni et ne savaient rien du nouveau syndicat mentionné dans la plainte.

&htab;92.&htab;Estimant que les renseignements à sa disposition n'étaient pas suffisants pour lui permettre d'aboutir à des conclusions sur cet aspect du cas, le comité avait prié le gouvernement et les plaignants de fournir des informations plus précises à cet égard.

&htab;93.&htab;En réponse à cette demande, le plaignant avait transmis divers documents essentiellement établis sous forme d'articles dans des publications françaises. Ces informations donnaient plus de détails sur certains des membres fondateurs de l'organisation et des précisions sur les personnes qui auraient été les porte-parole ou les organisateurs du nouveau syndicat à Bucarest et dans d'autres régions du pays. En particulier, des informations détaillées étaient données concernant les deux personnes (Ionel Cana et Gheorghe Brasoveanu) qui auraient été membres fondateurs de l'organisation, les dates auxquelles elles auraient été arrêtées et les établissements où elles auraient été internées. Ces personnes auraient été arrêtées et détenues peu de temps après la date à laquelle la nouvelle organisation aurait été créée. Les documents transmis par le plaignant indiquaient aussi le nom de nombreuses autres personnes qui, selon lui, étaient des porte-parole ou des militants du SLOMR qui, dès lors que l'organisation a commencé à s'implanter dans diverses régions du pays, ont été persécutés ou arrêtés par la police roumaine de sécurité ou, dans certains cas, ont quitté le pays. Le gouvernement n'avait pas transmis d'informations précises en réponse aux dernières allégations du plaignant, mais il s'était borné à reprendre ses déclarations antérieures, niant que toute organisation de ce genre ait existé et, par voie de conséquence, que des mesures répressives aient pu être prises contre les fondateurs ou les membres de cette organisation.

&htab;94.&htab;S'agissant des allégations suivant lesquelles certaines personnes en rapport avec la nouvelle organisation auraient disparu (à savoir Vasile Paraschiv, Virgil Chender, Constantin Acrinei et Melania Mateescu), le comité avait décidé en février 1983, sur la base des informations fournies par le plaignant et par le gouvernement, que cet aspect du cas n'appelait pas un examen plus approfondi. Toutefois, par la suite, le plaignant avait formulé de nouvelles allégations. Il avait indiqué que divers particuliers ou organisations internationales avaient cherché sans succès à entrer en contact avec Vasile Paraschiv et Virgil Chender, et que Constantin Acrinei figurait parmi les signataires d'une lettre faisant état de la grève dans les mines de la vallée du Jiu en 1977 et de la répression qui avait suivi cette grève, et qu'il aurait été par la suite transféré dans une autre mine de Baia Borsa, dans le nord du pays. Le comité avait exprimé son regret que le gouvernement n'ait pas répondu expressément à ces allégations.

&htab;95.&htab;Pour ce qui est de l'allégation concernant la grève dans les mines de la vallée du Jiu en 1977 qui aurait été suivie par de sévères mesures de répression de la part des autorités, le plaignant avait fourni un document relatant de façon précise le déroulement de la grève. Il avait également communiqué le nom de certains mineurs contre lesquels des mesures auraient été prises après la grève (transfert dans d'autres mines plus petites ou rétrogradation). Le plaignant avait en outre fourni des renseignements au sujet du transfert dans un camp de travail forcé de plusieurs mineurs, dont certains étaient nommément désignés. Toutes les allégations relatives à cette grève de 1977 dans la vallée du Jiu avaient néanmoins été contestées en bloc par le gouvernement qui avait nié qu'une grève ait eu lieu et que des mesures de répression aient été prises à un moment donné.

&htab;96.&htab;En février 1983, le comité avait également demandé au gouvernement de lui indiquer les raisons précises de l'arrestation et de la détention de diverses personnes nommément désignées de la ville de Timisoara qui, selon le plaignant, auraient participé à l'implantation du SLOMR dans cette ville. Par la suite, le nom et l'adresse de nouveaux militants syndicaux de Timisoara avaient été indiqués par le plaignant, mais en revanche aucune explication ou information n'avait été fournie par le gouvernement pour donner suite à la demande du comité.

&htab;97.&htab;En l'absence de réponses détaillées de la part du gouvernement aux nombreuses et graves allégations formulées par le plaignant, notamment aux renseignements concrets et détaillés fournis par celui-ci dans sa dernière communication, le comité avait regretté que le gouvernement roumain n'ait pas, selon lui, répondu de façon détaillée aux graves allégations qui avaient été présentées contre lui et aux informations détaillées fournies par le plaignant qui, de l'avis du comité, pourraient mettre en question l'application des principes de la liberté syndicale en Roumanie, et notamment celle des conventions sur la liberté syndicale ratifiées par la Roumanie. En outre, afin de pouvoir formuler ses conclusions dans le présent cas en pleine connaissance de cause et avec la plus grande objectivité possible, le comité avait demandé au gouvernement de lui faire savoir rapidement s'il était disposé à accepter l'envoi d'une mission de contacts directs qui serait chargée d'éclaircir tous les points en instance dans le présent cas et de lui faire rapport sur les résultats obtenus.

B. Réponse du gouvernement

&htab;98.&htab;Dans sa réponse, le gouvernement brosse en premier lieu un tableau du développement économique de la Roumanie au cours des quatre dernières décennies qui s'est soldé par un fort accroissement des revenus. Le gouvernement estime que de telles réalisations en matière d'économie et de niveau de vie n'auraient pu être réalisées si les droits de l'homme, et notamment la liberté d'association, n'avaient pas été respectés ou si des mesures répressives avaient été exercées à l'encontre des travailleurs.

&htab;99.&htab;Retraçant l'historique du mouvement syndical en Roumanie, le gouvernement signale qu'en 1872 ont été créées l'Association générale des travailleurs roumains, puis, en 1906, la Commission générale des syndicats de Roumanie, ce qui prouve, ajoute-t-il, que l'unité des travailleurs roumains n'est pas un phénomène nouveau.

&htab;100.&htab;A l'heure actuelle, l'Union générale des syndicats de Roumanie compte 7.500.000 adhérents, soit plus de 99 pour cent du total des salariés. Le droit d'association est garanti par la Constitution, et les organisations sociales - dont les syndicats - ne constituent pas des "courroies de transmission" mais participent directement, de façon responsable et efficace, à la solution des problèmes sociaux. Les organisations syndicales jouissent notamment du droit à l'initiative législative, et tous les projets de réglementation qui concernent les droits et les obligations des travailleurs sont soumis pour avis à l'Union générale des syndicats de Roumanie.

&htab;101.&htab;Considérant les attributions, le rôle et la position des syndicats dans la société roumaine, le gouvernement rappelle les termes de l'article 19, paragraphe 8, de la Constitution de l'OIT qui prévoit qu'"en aucun cas l'adoption d'une convention ou recommandation par la Conférence ou la ratification de conventions par un Etat Membre ne devront être considérées comme affectant une loi, une décision, une coutume ou un accord qui assurent des conditions plus favorables aux travailleurs intéressés que celles prévues par une convention ou recommandation".

&htab;102.&htab;Au sujet des allégations concernant les vingt fondateurs du "Syndicat libre des travailleurs de Roumanie", le gouvernement rappelle qu'il a déjà fourni des informations sur cinq d'entre eux (Ionel Gheorghe Cana, Gheorghe Brasoveanu, Nicolae Gugu, Gheorghe Fratila et Ioana Grigore) et qu'il a déjà indiqué que les quinze autres personnes mentionnées étaient fictives. Se référant à chacune des personnes citées dans les allégations, le gouvernement indique qu'aucune d'entre elles n'habite à l'adresse indiquée par les plaignants. Plus précisément, le gouvernement fournit les informations suivantes au sujet de ces personnes:

&htab;Ilie Blidaru soudeur: 7, rue Traïan, Drobeta Turnu-Severin. A l'adresse indiquée habite Nicolae Blidaru, qui travaille dans un magasin d'alimentation.

&htab;Costel Haritoian tôlier: rue Crihala, bloc A.2, esc. B, appt. 4, Turnu. On peut supposer qu'il s'agit de la ville de Drobeta Turnu-Severin. A cette adresse et dans toute la ville, il n'existe aucune personne portant ce nom.

&htab;Endra Molnar tôlier: rue Kiselef, bloc A.6, esc. 3, appt. 7, Turnu-Severin. A l'adresse indiquée n'habite pas cette personne. Dans la ville de Drobeta Turnu-Severin, il y a une personne portant le nom de Endre Molnar, électricien et non tôlier, qui a son domicile à une autre adresse et qui ignore l'existence d'un tel "syndicat".

&htab;Romulus Bondea riveur: 14, rue Lenin, Turnu-Severin. A l'adresse indiquée habite Gheorghe Bordea, instituteur.

&htab;Nicolae Mutu fondeur: 33, bd Republicii, esc. C, appt. 14, Turnu-Severin. A cette adresse habite Zaharia Mocioiu, tourneur.

&htab;Aurelian Paunescu fondeur-mouleur: bd Tudor Vladimirescu, bloc B.2, appt. 2, Turnu-Severin. Dans la ville de Drobeta Turnu-Severin, il existe une personne portant le nom de Sebastian Paunescu qui a une autre adresse et est retraité.

&htab;Vasile Otel polisseur: 54, rue Cicero, Turnu-Severin. A l'adresse indiquée habite Ilie Popescu, responsable d'un magasin.

&htab;Aurel Mustachide riveur: 22, rue Proletari, Turnu-Severin. A cette adresse habite Ion Dobre, technicien.

&htab;Nicolae Balamat soudeur: Calea Târgu-Jiu, bloc B.5, esc. 4, appt. 8, Turnu-Severin. A l'adresse en question habite Virgiliu Balamat, serrurier, qui ignore l'existence dudit "syndicat".

&htab;Elena Pesmagiu soudeuse: rue Crihala, bloc C.4, appt. 5, Turnu-Severin. A cette adresse habite Paul Danila, mécanicien.

&htab;Victoria Ivanovici électricienne: 103, rue Dorobanti, Turnu-Severin. A l'adresse indiquée habite Dumitru Pasare, retraité. &htab;Frosa Pesteanu femme de charge: 11, Calea Grivitei, Turnu-Severin. A cette adresse habite Gheorghe Rolea, chef de dépôt.

&htab;Petre Papa soudeur: CET nord, bloc B.1, esc. 1, appt. 3, Turnu-Severin. Une personne ayant cette profession et cette adresse n'existe pas.

&htab;Mihai Gheorghiu électricien: rue Marasti, Turnu-Severin. La personne n'existe pas à l'adresse indiquée où habite Dumitru Elenescu, retraité.

&htab;Romica Badiu soudeur: 109, rue Dorobanti, Turnu-Severin. Cette personne n'existe pas à l'adresse indiquée parce que la rue Dorobanti n'a que 103 numéros.

&htab;103.&htab;Le gouvernement déduit de tous ces éléments que les allégations constituent une désinformation à laquelle se prêtent consciemment leurs auteurs. Il remarque en outre que les vingt noms mentionnés sur la liste des membres fondateurs groupent des personnes de trois localités différentes, dont l'une est située à une distance de plus de 340 kilomètres des autres et qu'elles occupent des professions et des emplois différents, certaines d'entre elles étant même retraitées. Le gouvernement estime qu'une telle structure de syndicat, même si ce dernier avait existé, ne correspondrait à aucune disposition des conventions pertinentes. Le gouvernement observe également que le syndicat en question est mentionné dans les allégations comme étant essentiellement un comité pour la défense des droits de l'homme qui se prononce notamment pour le respect de l'article 12 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, concernant la liberté de quitter un pays et d'y revenir. Le gouvernement indique à cet égard que plusieurs personnes mentionnées dans les communications des plaignants ont demandé des passeports pour se rendre à l'étranger, sans aucun rapport avec une activité syndicale quelconque. Il relève aussi que, dans la documentation soumise en langue roumaine, sont utilisées une orthographe et des dénominations anciennes modifiées depuis plusieurs décennies. Ceci prouve, selon lui, que cette documentation a été rédigée par des personnes qui n'ont rien de commun avec le pays.

&htab;104.&htab;En ce qui concerne la situation d'autres personnes mentionnées dans la plainte, le gouvernement rappelle qu'il a déjà fourni des informations au sujet de:

&htab;Vasile Paraschiv habite et travaille à Ploiesti.

&htab;G. Jurca/Yurca n'a pas été identifié.

&htab;Ion Dobre/Dobra n'a pas été identifié dans la ville de Lupeni, mais on a trouvé Constantin Dobre, ancien mineur, qui est devenu étudiant. &htab;Virgil Chender travaille dans une entreprise de la ville de Sighisoara et n'a déployé aucune activité liée au prétendu syndicat; en 1968, a été condamné à une peine privative de liberté de deux ans pour une affaire d'escroquerie et de pots-de-vin.

&htab;Melania Mateescu ancienne assistante médicale, divorcée en 1976, connue pour sa vie désorganisée, décédée en novembre 1980 par suite d'une intoxication alcoolique; n'a été connue pour aucune activité liée au prétendu syndicat.

&htab;Constantin Acrinei on n'a pu identifier aucune personne portant ce nom.

&htab;105.&htab;Au sujet des "personnes de Timisoara" (Stefan Wolf "avec sa famille", Edgard Ludwig "avec son épouse", Helmut Reiter "avec son épouse", Hörst Gangler "avec ses parents, sa soeur et les grands-parents", Helmut Wallner "avec son frère et ses parents", Steffy Mayer, Carl Gibson, Erwin Ludwig), le gouvernement remarque qu'il s'agit de personnes qui ont demandé à s'établir à l'étranger et, dans plusieurs cas, l'ont fait. Les personnes en question n'ont pas été impliquées dans des actions qui auraient été liées au prétendu "syndicat". Par ailleurs, pendant les périodes où elles ont travaillé en Roumanie, la majeure partie de ces personnes étaient membres des syndicats de leur lieu de travail.

&htab;106.&htab;Les démêlés que certaines de ces personnes ont eus avec les organes judiciaires ne concernaient pas le domaine syndical mais relevaient du droit commun. En témoigne le cas de Carl Gibson, dont la famille avait quitté le pays et qui, jusqu'au jour où il a lui-même légalement quitté le pays, est comparu devant la justice pour comportement social contraire aux réglementations légales (tentatives de passage frauduleux de la frontière).

&htab;107.&htab;Une annexe à la plainte se réfère à d'autres personnes qui auraient été réprimées pour activités syndicales. Etant donné que, dans la majorité des cas, les noms respectifs sont inintelligibles ou illisibles et sans les moindres données concernant le domicile des personnes en cause, précise le gouvernement, leur identification présente de réelles difficultés. Dans la mesure où cette identification est possible, ajoute-t-il, il résulte clairement que les personnes mentionnées n'ont pas été impliquées dans des activités liées aux dispositions des conventions nos 87 et 98. Plusieurs d'entre elles réclament purement et simplement, pour diverses raisons, des passeports. C'est le cas, à titre d'exemples, des personnes suivantes: Alexandru Comsa, Radu Sorin Ghita, Nicolae Oblici, Sorin Marin, Lucianul Lucian, Mocanu Marian, Tiplea Mircea si Daniela. Pour résoudre de telles demandes, signale le gouvernement, la législation roumaine a des dispositions claires et chaque citoyen peut s'adresser aux autorités compétentes. Dans chaque cas bien fondé, on a pu trouver des solutions adéquates.

&htab;108.&htab;Les allégations relatives à la grève dans les mines de la vallée du Jiu, en 1977, sont, selon le gouvernement, dénuées de tout fondement. Il s'agissait en fait d'une lettre adressée aux autorités par quelques mineurs, dans laquelle les signataires considéraient qu'il convenait de souligner leur attitude à l'égard de la loi sur les pensions de retraite, ainsi que d'autres questions concernant la création d'emplois pour leur épouse dans les localités voisines, l'organisation de la production et du travail, la réduction du personnel non productif. Il est également possible, ajoute le gouvernement, que des personnes non informées ou malveillantes aient donné une fausse signification à des assemblées générales ou séances de production des mineurs, au cours desquelles on discute parfois directement et de façon animée, dans un esprit critique et autocritique, des problèmes de production, de travail et de vie, d'approvisionnement et de rétribution. Les mineurs et leurs syndicats disposent, selon le gouvernement, d'un ample éventail de possibilités pour discuter et résoudre avec la Direction des mines et les organismes d'Etat les problèmes liés au processus du travail et à la vie quotidienne. Chaque fois, des solutions ont été trouvées à la satisfaction des intéressés, ce qui démontre, toujours selon le gouvernement, le sérieux, la responsabilité et la sagesse avec lesquels les parties traitent les relations réciproques.

&htab;109.&htab;Le gouvernement remarque également que les mines de la vallée du Jiu sont fréquemment visitées par des délégations étrangères, y compris syndicales. On y a aussi organisé des stages de spécialisation pour différents boursiers étrangers, dont certains sont venus par l'intermédiaire du BIT. Il est évident, ajoute le gouvernement, que de telles actions internationales constructives de coopération et d'échange d'expériences ne pourraient pas avoir lieu dans une zone minière où auraient lieu des grèves ou bien où régneraient la terreur et les répressions, comme le prétendent les plaignants. Le gouvernement fournit également des statistiques sur la production minière et les conditions de travail qui prévalent dans ce secteur d'activité.

&htab;110.&htab;En conclusion, le gouvernement déclare que les auteurs des allégations se sont principalement livrés à une spéculation politique sur des informations douteuses. Ce fait est, selon lui, corroboré par le langage irrévérencieux et inacceptable qui a été utilisé. C'est pourquoi le gouvernement demande avec insistance qu'un terme soit mis à ce cas entièrement fabriqué au profit d'intérêts politiques complètement étrangers aux buts, aux principes et à l'universalité de l'OIT.

C. Conclusions du comité

&htab;111.&htab;Le comité a examiné une nouvelle fois les différents aspects du cas à la lumière des observations les plus récentes transmises par le gouvernement. Comme dans ses communications précédentes, le gouvernement nie l'existence de toute organisation syndicale nouvelle. Il relève par ailleurs que, selon les déclarations mêmes des plaignants, l'organisation serait essentiellement un comité de défense des droits de l'homme et qu'elle regrouperait des personnes habitant dans des localités différentes et occupant des professions et emplois divers.

&htab;112.&htab;A cet égard, le comité doit constater que des preuves de la création d'une organisation intitulée "Syndicat libre des travailleurs de Roumanie" (SLOMR) ont été fournies par les plaignants. Ceux-ci ont en effet communiqué à l'appui de leurs allégations l'acte constitutif de l'organisation en question.

&htab;113.&htab;Afin de se forger une opinion sur la nature de cette organisation, le comité a de nouveau examiné la teneur de son acte constitutif. Il y est précisé que le SLOMR lutte pour le respect des droits fondamentaux de l'homme, en mettant tout particulièrement l'accent sur les droits qui découlent des rapports du travail. L'organisation ne se propose pas d'entreprendre des actions à caractère politique, car elle établit une distinction entre la défense des droits politiques du citoyen et des activités à caractère politique. Le SLOMR déclare également militer pour l'application effective de l'article 11 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels qui prévoit le droit à un niveau de vie suffisant quant à la nourriture, aux vêtements et au logement, ainsi que pour le respect de l'article 12 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques concernant le droit des personnes de quitter leur pays et d'y revenir. L'organisation se propose de lutter en premier lieu pour le respect des droits des citoyens dans les rapports de travail (droit au travail, lutte contre le chômage, amélioration des conditions de travail, droit au repos hebdomadaire, réduction de la durée du travail, approvisionnement de la population).

&htab;114.&htab;La question initiale qui se pose dans le présent cas est de déterminer si le SLOMR peut être considéré comme une organisation ayant pour but de promouvoir et de défendre les intérêts des travailleurs, selon la définition de l'article 10 de la convention no 87. Le comité relève à cet égard que l'acte constitutif du SLOMR insiste sur l'activité de l'organisation dans le domaine des relations de travail et dresse une liste de thèmes à caractère économique et social sur lesquels elle entend lutter. Le fait, comme le souligne le gouvernement, que le SLOMR se propose de militer pour les droits de l'homme ne constitue pas, de l'avis du comité, une preuve suffisante pour affirmer que l'organisation en question ne serait pas de nature syndicale. Le comité estime en effet que, pour jouer réellement et efficacement leur rôle de défense et de promotion des intérêts des travailleurs, les syndicats doivent pouvoir agir dans un climat de liberté et de sécurité. Ceci implique que, dans une situation où ils estiment ne pas jouir des libertés essentielles indispensables pour mener à bien leur mission, les syndicats sont fondés à demander la reconnaissance et l'exercice de ces libertés et que de telles revendications doivent être considérées comme entrant dans le cadre d'activités syndicales légitimes.

&htab;115.&htab;De l'avis du comité, les allégations présentées posent donc la question de la possibilité pour les travailleurs de constituer librement les organisations de leur choix. Dans ce contexte, le comité doit à nouveau rappeler que la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations a adressé au gouvernement un certain nombre d'observations ayant trait, notamment, à l'article 164 du Code du travail, aux termes duquel le fonctionnement des syndicats se conforme aux règles de la Confédération générale des syndicats, à l'article 26 de la Constitution de la Roumanie et à l'article 165 du Code du travail, qui semblent établir un lien étroit entre les syndicats et le Parti communiste roumain. La commission d'experts a considéré que ces dispositions restreignent apparemment le droit des travailleurs de constituer des organisations de leur choix et rendent juridiquement impossible de constituer des organisations indépendantes du parti.

&htab;116.&htab;Le comité note les explications fournies par le gouvernement selon lesquelles l'unité du mouvement syndical roumain remonte à une époque lointaine. Sur ce point, le comité souhaite se référer aux principes établis en la matière par la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations dans son Etude d'ensemble de 1983 sur la liberté syndicale et la négociation collective. [Voir Conférence internationale du Travail, 69e session, 1983 (rapport III, partie 4B), Liberté syndicale et négociation collective , paragr. 137.] La commission a estimé que, même dans le cas d'un monopole de fait, conséquence d'un regroupement de tous les travailleurs, la législation ne doit pas institutionnaliser cette situation de fait en citant, par exemple, nommément la centrale unique, et ceci même s'il s'agissait là d'une revendication de l'organisation syndicale existante. En effet, même dans la situation où, à un moment donné de la vie sociale d'un pays, une unification du mouvement syndical a eu les préférences de tous les travailleurs, ceux-ci doivent cependant pouvoir sauvegarder, pour l'avenir, le libre choix de créer, s'ils le souhaitent, des syndicats en dehors de la structure syndicale établie. En outre, les droits des travailleurs ne souhaitant pas s'intégrer dans les syndicats ou la centrale existants doivent être également protégés.

&htab;117.&htab;Se référant aux déclarations du gouvernement relatives à l'article 19, paragraphe 8, de la Constitution de l'OIT, le comité doit signaler, comme cela a déjà été fait antérieurement, que l'absence de conformité d'une législation nationale avec une convention ne saurait, en vertu de cette disposition de la Constitution de l'OIT, être justifiée comme instituant une situation plus favorable aux travailleurs que pour autant que ces dispositions ne sont pas en contradiction avec elle. [Voir à cet égard Bulletin officiel , vol. LV, 1972, nos 2, 3 et 4, pp. 128-152. Voir aussi Conférence internationale du Travail, 63e session, 1977, rapport III (partie 4A), rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, p. 174.]

&htab;118.&htab;En l'absence d'éléments nouveaux sur cet aspect de l'affaire, le comité ne peut donc que souligner que le droit des travailleurs de constituer les organisations de leur choix - tel qu'il est garanti par l'article 2 de la convention no 87 - implique notamment la possibilité effective de créer, dans un climat de pleine sécurité, des organisations de travailleurs indépendantes de la structure syndicale déjà existante comme de tout parti politique. Le comité note par ailleurs que, dans des rapports antérieurs adressés aux termes de l'article 22 de la Constitution de l'OIT au sujet de l'application de la convention no 87, le gouvernement s'était référé à la préparation d'une nouvelle législation syndicale. Il exprime donc le ferme espoir que cette nouvelle législation pourra être promulguée dans un proche avenir et qu'elle tiendra compte des commentaires formulés tant par la commission d'experts que par le comité lui-même, afin de donner plein effet aux garanties prévues par la convention no 87, ratifiée par la Roumanie. Le comité recommande en conséquence de signaler l'aspect législatif du cas à l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, afin que celle-ci puisse en tenir compte dans le cadre de l'examen régulier de l'application de la convention no 87.

&htab;119.&htab;Au sujet des mesures de répression qui auraient été exercées contre les fondateurs du SLOMR, le comité note que le gouvernement a fourni des informations sur cinq d'entre eux, dont trois ne savaient rien du nouveau syndicat mentionné dans la plainte. Pour ce qui est des deux fondateurs qui étaient les premiers signataires de l'acte constitutif du SLOMR - Ionel Cana et Gheorghe Brasoveanu - et sur lesquels les plaignants avaient fourni des informations détaillées (dates d'arrestation et lieux de détention), le gouvernement se borne à indiquer que ces personnes ont été condamnées pour "propagande fasciste" puis amnistiées. Le comité regrette que le gouvernement n'ait pas mentionné les faits précis qui étaient à l'origine de ces condamnations et qui lui auraient permis de déterminer si ces faits pouvaient être considérés comme liés à des activités syndicales légitimes.

&htab;120.&htab;En ce qui concerne les quinze autres membres fondateurs du SLOMR, le comité prend note des informations fournies par le gouvernement, d'où il ressort que toutes ces personnes n'habitent pas à l'adresse indiquée dans la documentation fournie par les plaignants. Le comité estime cependant que le fait que les autorités n'aient pu retrouver les personnes en question aux adresses mentionnées dans la plainte ne suffit pas à lui seul à démontrer que celles-ci n'auraient pas participé à la création du SLOMR, d'autant que, selon le dire du gouvernement lui-même, plusieurs personnes citées nommément par les plaignants ont depuis lors quitté le pays. De même, en ce qui concerne les allégations relatives à l'arrestation et à l'emprisonnement, pour activités syndicales, d'un certain nombre de personnes dans la ville de Timisoara, le comité note que, selon le gouvernement, les intéressés ont maintenant quitté le pays. Le comité rappelle à cet égard que les allégations indiquaient que ces personnes avaient été arrêtées et emprisonnées avant leur départ à l'étranger, ce que le gouvernement ne réfute pas, puisqu'il s'est borné à indiquer d'une manière générale qu'aucune d'entre elles n'avait fait l'objet de mesures d'arrestation qui auraient pu être liées à l'application de conventions internationales sur la liberté syndicale.

&htab;121.&htab;Compte tenu de tous ces éléments, le comité ne peut donc que conclure que les informations fournies par le gouvernement ne répondent pas sur tous les points aux allégations détaillées des plaignants. Il doit donc rappeler avec insistance que des mesures de détention ou de condamnation prises à l'encontre de représentants de travailleurs dans le cadre d'activités liées à la défense des intérêts de leurs mandants représentent un danger pour le libre exercice des droits syndicaux. [Voir, par exemple, 214e rapport, cas no 1093, paragr. 388.] En outre, de telles mesures peuvent entraîner un climat d'intimidation et de crainte empêchant le déroulement normal des activités syndicales de l'organisation à laquelle appartiennent les personnes concernées. [Voir, par exemple, 211e rapport, cas no 1046, paragr. 323.]

&htab;122.&htab;Pour ce qui est des allégations concernant les grèves organisées en 1977 dans les houillères de la vallée du Jiu et les mesures répressives - dont des transferts et des destitutions - qui auraient été prises à l'encontre des grévistes, le comité note que le gouvernement réitère ses déclarations précédentes selon lesquelles les affirmations des plaignants sont dénuées de fondement. Le gouvernement ajoute cependant que les événements en question se sont limités à l'envoi d'une lettre aux autorités par quelques mineurs au sujet notamment de questions de retraite, de création d'emplois et d'organisation du travail. Il rejette donc en bloc les informations fournies dans la plainte et ne fait aucune référence aux mineurs, expressément désignés par les plaignants, contre lesquels des mesures auraient été prises après la grève. Il est difficile, dans ces conditions, pour le comité, d'aboutir à des conclusions précises sur cet aspect du cas, d'autant que les faits mentionnés dans la plainte remontent maintenant à plus de sept ans. Compte tenu cependant du fait que les allégations contenaient des indications précises sur le déroulement de la grève et les conséquences dommageables qu'elle aurait entraînées sur certains travailleurs, le comité croit utile de rappeler que la grève constitue un des moyens essentiels dont doivent pouvoir disposer les syndicats pour promouvoir et défendre les intérêts de leurs membres et organiser leurs activités et que des restrictions au droit de grève mettent en cause l'exercice des droits syndicaux. En outre, lorsque des travailleurs font l'objet de mesures préjudiciables pour avoir eu recours à la grève, il y a lieu de considérer qu'ils sont sanctionnés pour leur activité syndicale et font l'objet d'une discrimination antisyndicale contraire à l'article 1 de la convention no 98. [Voir, par exemple, 214e rapport, cas nos 988 et 1003, paragr. 507.]

Recommandations du comité

&htab;123.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Le comité regrette que le gouvernement n'ait pas donné suite à la demande de mission de contacts directs.

b) Au sujet des allégations concernant la tentative de constituer une organisation connue sous le nom de "Syndicat libre des travailleurs de Roumanie", le comité souligne que le droit des travailleurs de constituer les organisations de leur choix, garanti par l'article 2 de la convention no 87, implique notamment la possibilité effective de créer, dans un climat de pleine sécurité, des organisations de travailleurs indépendantes de la structure syndicale déjà existante comme de tout parti politique. Le comité exprime le ferme espoir qu'une nouvelle législation syndicale, à la préparation de laquelle s'est référé dans le passé le gouvernement, sera promulguée dans un proche avenir et qu'elle tiendra compte des commentaires formulés par la commission d'experts et le comité, afin de donner plein effet aux garanties prévues par la convention no 87, ratifiée par la Roumanie. Le comité signale l'aspect législatif du cas à l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations.

c) Au sujet des mesures de répression qui auraient été exercées contre les fondateurs et les membres du SLOMR, le comité estime que les informations fournies par le gouvernement ne répondent pas sur tous les points aux allégations détaillées des plaignants. Il doit rappeler avec insistance que des mesures de détention ou de condamnation prises à l'encontre de représentants de travailleurs dans le cadre d'activités liées à la défense des intérêts de leurs mandants représentent un danger pour le libre exercice des droits syndicaux. De telles mesures peuvent en outre entraîner un climat d'intimidation et de crainte empêchant le déroulement normal des activités syndicales de l'organisation à laquelle appartiennent les personnes concernées.

d) Au sujet des allégations de répression de la grève dans les houillères de la vallée du Jiu en 1977, le comité note que le gouvernement rejette en bloc les informations fournies dans la plainte et ne fait aucune référence aux mineurs expressément désignés par les plaignants, contre lesquels des mesures auraient été prises après la grève. Le comité peut difficilement aboutir à des conclusions précises sur cet aspect du cas, d'autant que les faits remontent à plus de sept ans. Compte tenu cependant du fait que les allégations contenaient des indications précises sur la grève et ses conséquences, le comité croit utile de rappeler que la grève constitue un des moyens essentiels dont doivent pouvoir disposer les syndicats pour promouvoir et défendre les intérêts de leurs membres et organiser leurs activités et que des restrictions au droit de grève mettent en cause l'exercice des droits syndicaux. En outre, lorsque des travailleurs font l'objet de mesures préjudiciables pour avoir eu recours à la grève, il y a lieu de considérer qu'ils sont sanctionnés pour leur activité syndicale et font l'objet d'une discrimination antisyndicale contraire à l'article 1 de la convention no 98.

Cas no 1113 PLAINTE PRESENTEE PAR L'ASSOCIATION PANINDIENNE DU PERSONNEL ROULANT DES CHEMINS DE FER ET L'UNION INTERNATIONALE DES SYNDICATS DE TRAVAILLEURS DES TRANSPORTS (FSN) CONTRE LE GOUVERNEMENT DE L'INDE

&htab;124.&htab;Le comité a déjà examiné ce cas à trois reprises, l'examen le plus récent ayant eu lieu à sa réunion de février 1984 au cours de laquelle il a présenté des conclusions intérimaires au Conseil d'administration. [Voir 233e rapport, paragr. 463-473, approuvé par le Conseil d'administration à sa 225e session (février-mars 1984).] Depuis lors, le gouvernement a envoyé des informations complémentaires dans une communication du 10 mai 1984.

&htab;125.&htab;L'Inde n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ni la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.

A. Examen antérieur du cas

&htab;126.&htab;Les allégations essentielles dans ce cas, ouvert depuis novembre 1982, portent sur l'arrestation de 14 syndicalistes nommément désignés, en vertu de la loi de 1981 sur le maintien des services essentiels, suite à la grève d'une journée du 19 janvier 1982 et sur le licenciement, en vertu de la règle 14 (ii) des règlements des chemins de fer, de 15 syndicalistes des chemins de fer, qui a eu lieu au début de 1983. L'Association panindienne du personnel roulant des chemins de fer avait fourni des informations sur 11 des 15 syndicalistes en question dans une communication du 8 février 1984, qui figurent dans le paragraphe 469 du 233e rapport du comité. L'organisation plaignante avait indiqué, dans cette communication, qu'elle donnerait, dès que possible, les noms des quatre autres employés licenciés ainsi que des précisions les concernant, mais le comité n'a reçu aucune de ces informations.

B. Nouvelles informations fournies par le gouvernement

&htab;127.&htab;Dans sa communication du 10 mai 1984, le gouvernement indique que les dix personnes dont les noms suivent ont incité les travailleurs à ne pas se rendre à leur travail la veille du "Bharat Bandh" (journée de grève nationale): N.B. Dutta, L.C. Majhi, D.K. Sengupta, G.R. Nag, D. Barua, A.K. Rao, N.G. Prasad, D.D. Dutta, N.G. Nag, Rameswar Banerjkee. Selon le gouvernement, une enquête a été ouverte par le tribunal de simple police de Dhalbhum, Jamshedpur, dans l'Etat de Bihar, et les personnes en question ont été citées à comparaître devant le tribunal le 2 février 1982 pour expliquer pourquoi il n'y avait pas lieu d'engager contre elles des poursuites pour leurs prétendus actes de provocation, à savoir les actes d'intimidation exercés sur les travailleurs afin de les empêcher d'assurer normalement leur travail. Toutefois, le 20 février 1982, les autorités ferroviaires ont informé le tribunal qu'elles ne souhaitaient pas poursuivre leur action en justice, aucun incident majeur n'étant intervenu au cours de la journée de grève nationale. En conséquence, le juge du tribunal de simple police a interrompu l'enquête. Selon le gouvernement, il n'était donc pas question d'arrêter, de détenir ou de relaxer les dix personnes en question en vertu de la loi sur le maintien des services essentiels.

&htab;128.&htab;Pour ce qui concerne les quatre autres personnes (K. Rajanna, S.K. Jamaluddin, N. Mahalingam et P.R. Padmadabhan), le gouvernement indique que la Commission nationale de propagande des syndicats nationaux non membres de l'INTUC (Congrès national des syndicats de l'Inde) a appelé les travailleurs à observer une grève générale dans tout le pays, le 19 janvier 1982, dans tous les établissements industriels et que, le 17 janvier 1982, la police du district ferroviaire du sud a reçu des informations selon lesquelles des agitateurs s'étaient rassemblés dans l'intention d'attaquer la gare et de terroriser les employés locaux des chemins de fer. La police locale a donc investi les lieux et a découvert des personnes, parmi lesquelles les quatre mentionnées ci-dessus, armées de bâtons et de pierres, qui s'acheminaient vers la gare. Les quatre personnes citées ainsi que d'autres individus ont été arrêtés, et un dossier pénal no 6/82 a été ouvert contre eux conformément à l'article 151 du code de procédure pénale en raison du danger imminent que ces personnes faisaient encourir à la paix publique. Selon le gouvernement, elles ont comparu, pour interrogatoire, devant le juge du tribunal de simple police du sous-district de Taluk, à Gooty, le 18 janvier 1982, en présentant une demande de mise en liberté provisoire. Sur décision du juge, elles ont comparu à nouveau devant le tribunal le jour suivant et ont été relaxées sous caution. La poursuite de l'instruction du dossier a été arrêtée le 25 février 1982. Le gouvernement affirme que l'allégation selon laquelle ces quatre personnes ont été arrêtées en vertu de la loi sur le maintien des services essentiels, le 16 janvier 1982, et détenues jusqu'au 19 février 1982 est donc inexacte.

C. Conclusions du comité

&htab;129.&htab;Le comité note tout d'abord, au sujet de l'allégation relative au licenciement de 15 syndicalistes du secteur ferroviaire, que le gouvernement n'a pas envoyé d'informations complémentaires à sa première réponse et qu'il a fallu que l'organisation plaignante fournisse des informations complémentaires (telles que les noms des personnes concernées, la zone ferroviaire dans laquelle elles étaient employées et les raisons précises pour lesquelles elles auraient été licenciées). Néanmoins, le comité relève, d'après les informations fournies par le plaignant au sujet de 11 des 15 syndicalistes licenciés, que quatre d'entre eux seulement auraient été licenciés pour des activités liées à leur appartenance syndicale, à savoir M.C. Das, secrétaire général de l'Association panindienne du personnel des chemins de fer, qui aurait été licencié pour avoir dirigé une grève dans son secteur des chemins de fer de l'est, M. Arun Bhattachary, dirigeant du Conseil panindien des syndicats des gardes, qui aurait été licencié pour avoir organisé et participé à une action de solidarité pour une grève d'une journée le 19 janvier 1982, M. Tuchar Guha Takhawatha, secrétaire régional de l'Association panindienne des attachés commerciaux, qui aurait été arrêté pour le même motif que S.B. Kanji Lal, secrétaire régional de l'Association panindienne des employés de train. Les autres motifs de licenciement donnés par le syndicat plaignant ont été le refus de travailler seuls pendant plus de 10 heures par jour et la participation à un mouvement de passagers qui a conduit à un arrêt des trains. Le comité regrette que l'organisation plaignante n'ait pas fourni d'informations détaillées concernant toutes les 15 personnes qui auraient été licenciées et que le gouvernement n'ait pas été en mesure de répondre aux informations fournies par le plaignant dans sa communication du 8 février 1984.

&htab;130.&htab;Quant aux quatre travailleurs licenciés au sujet desquels il ne dispose pas d'informations, le comité tient à souligner que l'un des principes fondamentaux de la liberté syndicale est que les travailleurs doivent bénéficier d'une protection appropriée contre tous les actes de discrimination antisyndicale quant à leur emploi, tels que le licenciement, et que cette protection est encore plus importante dans le cas des dirigeants syndicaux qui, pour pouvoir remplir leurs fonctions syndicales en pleine indépendance, doivent avoir la garantie de ne pas subir de préjudice en raison de celles-ci. [Voir, par exemple, 211e rapport, cas no 1053 (République dominicaine), paragr. 163; 226e rapport, cas no 1118 (République dominicaine), paragr. 54.]

&htab;131.&htab;En ce qui concerne l'allégation relative à l'arrestation de 14 syndicalistes en vertu de la loi de 1981 sur le maintien des services essentiels, le comité prend note de la réponse du gouvernement selon laquelle 10 des 14 personnes en question n'ont jamais été arrêtées ou détenues en vertu de la loi en question puisque les autorités ferroviaires ne les ont pas poursuivies. Il note également que, selon le gouvernement, quatre autres travailleurs ont été arrêtés par la police locale qui a découvert que les intéressés étaient armés et qu'ils s'acheminaient vers la gare. Une instruction pénale (dossier no 6/82) a été ouverte contre eux conformément à l'article 151 du code de procédure pénale. Les personnes en question ont été arrêtées le 17 janvier 1982 et relaxées sous caution deux jours plus tard et l'instruction du cas arrêtée le 25 février 1982. Compte tenu de la réponse détaillée du gouvernement et du fait que le syndicat plaignant n'a pas apporté de preuve des raisons qui auraient motivé les prétendues arrestations des 14 syndicalistes mentionnés dans sa plainte, en dehors du fait qu'ils ont été cités à comparaître devant le tribunal à la suite d'une grève d'une journée qui s'est déroulée le 19 janvier 1982, le comité estime que cet aspect du cas n'appelle pas d'examen plus approfondi.

Recommandations du comité

&htab;132.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Au sujet des quatre travailleurs qui auraient été licenciés pour avoir participé à une grève d'une journée en janvier 1982 dans le secteur des chemins de fer, le comité rappelle que les travailleurs doivent bénéficier d'une protection adéquate contre les actes de discrimination antisyndicale et que cette protection est d'autant plus importante dans le cas de dirigeants syndicaux qui, pour pouvoir remplir leurs fonctions en pleine indépendance, doivent avoir la garantie de ne pas subir de préjudice en raison de celles-ci.

b) Le comité estime que les autres aspects du cas n'appellent pas un examen plus approfondi.

Cas no 1140 PLAINTE PRESENTEE PAR LA CONFEDERATION SYNDICALE DES TRAVAILLEURS DE LA COLOMBIE CONTRE LE GOUVERNEMENT DE LA COLOMBIE

&htab;133.&htab;Le comité a examiné ce cas à sa réunion de mai 1983 où il a présenté des conclusions intérimaires au Conseil d'administration. [Voir 226e rapport du comité, paragr. 274 à 293, approuvé par le Conseil d'administration à sa 223e session (mai-juin 1983).] Ultérieurement, le gouvernement a envoyé des observations supplémentaires dans des communications datées des 19 septembre et 19 octobre 1983.

&htab;134.&htab;La Colombie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

&htab;135.&htab;Lorsque le comité avait examiné ce cas à sa réunion de mai 1983, il avait formulé les recommandations suivantes sur les allégations qui restaient en instance [voir 226e rapport du comité, paragr. 293]:

&htab;Le comité prie le gouvernement d'indiquer quelles sanctions la Compagnie colombienne du tabac a prises contre les dirigeants syndicaux mentionnés par l'organisation plaignante ainsi que leurs motifs, et de préciser si les dirigeants syndicaux arrêtés pour les attentats à la vie et à l'intégrité physique qui ont été commis à proximité des barricades installées par les travailleurs au cours de la grève ont été relaxés et ne sont sous le coup d'aucune inculpation.

&htab;Le comité prie le gouvernement d'indiquer si les trois dirigeants syndicaux de l'entreprise Cerámicas del Valle qui ont été licenciés sans motif valable ont pu réintégrer leur poste et de préciser les motifs pour lesquels les trois autres ont été congédiés.

&htab;Le comité prie le gouvernement d'indiquer quelles sanctions ont été infligées à l'entreprise Larco S.A., pour avoir procédé indûment à des licenciements collectifs, et d'indiquer si des mesures ont été prises en vue de la réintégration de tous les travailleurs qui ont été congédiés pour des motifs syndicaux.

&htab;Le comité prie le gouvernement d'envoyer ses observations au sujet des allégations auxquelles il n'a pas répondu: sanctions prises contre trois dirigeants du groupe COLGAS S.A., et refus de laisser entrer les dirigeants et les militants du syndicat après la grève que les travailleurs ont effectuée pour défendre les revendications qu'ils avaient présentées.

&htab;136.&htab;Pour ce qui était des allégations relatives à la Compagnie colombienne du tabac, le gouvernement avait demandé au Bureau international du Travail, dans une communication du 19 septembre 1983, d'inviter l'organisation plaignante à donner des précisions sur les sanctions dont des dirigeants syndicaux auraient fait l'objet, ainsi que sur l'identité des dirigeants prétendument détenus. La demande du gouvernement avait été transmise à l'organisation plaignante, et le comité lui avait rappelé la teneur de cette demande lors de ses réunions successives depuis novembre 1983. L'organisation plaignante n'a pas communiqué les informations en question ni fait de commentaires à ce sujet.

B. Réponse du gouvernement

&htab;137.&htab;Dans ses communications des 19 septembre et 19 octobre 1983, le gouvernement a déclaré que, par décision du 8 juillet 1982, les autorités ont infligé une amende de 10.000 pesos à l'entreprise Cerámicas del Valle Ltda., puisque cette entreprise n'avait pas sollicité l'autorisation du juge du travail pour licencier huit dirigeants syndicaux. Le Tribunal supérieur de Cali a ordonné la réintégration de cinq de ces dirigeants, mais ils ont été, par la suite, à nouveau licenciés (l'un d'entre eux pour juste motif et les autres sans juste motif, mais avec indemnisation). Le procès des trois autres dirigeants est toujours en cours. Le gouvernement a indiqué que l'organisation syndicale de l'entreprise fonctionne normalement et qu'une convention collective a été conclue récemment.

&htab;138.&htab;Le gouvernement a déclaré également que, par décision du 11 mars 1983, les autorités ont infligé une amende de 10.000 pesos à l'entreprise Larcos SA pour avoir procédé à un licenciement collectif illégal, 21 travailleurs ayant été licenciés sans juste motif. Le gouvernement a signalé que l'entreprise a interjeté appel contre la décision qui imposait l'amende.

&htab;139.&htab;Le gouvernement a déclaré, par ailleurs, que le 7 octobre 1982 des dirigeants de l'organisation syndicale SINTRATEXIL et le représentant juridique de Tejicóndor ont signé, devant le septième inspecteur de la section des relations de travail de la Division du travail et de la sécurité sociale d'Antioquia, un acte par lequel l'entreprise s'engage à ne pas faire obstacle à l'entrée des dirigeants syndicaux et à conseiller les travailleurs dans les comités disciplinaires.

&htab;140.&htab;Enfin, pour ce qui est de la Compagnie colombienne de gaz SA (COLGAS), le gouvernement indique qu'une décision du 24 juin 1982 (que le gouvernement communique en annexe) a déclaré illégaux des arrêts collectifs du travail qui ont eu lieu les 30 avril et 26 mai 1982. Ces arrêts de travail visaient à faire pression sur l'entreprise dont l'activité est considérée comme un service public, alors que la négociation collective se déroulait normalement. Dans les considérants de la décision, l'autorité administrative indique, en particulier, ce qui suit:

... s'il est exact que, dans l'entreprise mentionnée, un cahier de revendications est en cours de discussion, selon le déroulement prévu par la loi, il est également vrai que, lorsqu'une telle situation se produit dans une entreprise dont l'activité est considérée comme un service public, les travailleurs de cette entreprise ne peuvent procéder à des arrêts collectifs de l'activité ni décréter la grève, mais doivent nécessairement soumettre leurs différends, si aucun accord n'est possible dans le cadre de la procédure de règlement direct et de conciliation, au jugement d'un tribunal d'arbitrage obligatoire comme le prévoit l'article 34 du décret 2351 de 1965... ... l'interdiction légale absolue qui limite l'exercice du droit de grève dans les services publics, constitue une raison juridique suffisante pour que soit décrétée l'illégalité des arrêts collectifs du travail auxquels ont procédé les travailleurs de l'entreprise Colombienne de gaz SA.

C. Conclusions du comité

&htab;141.&htab;Pour ce qui est des allégations relatives à la Compagnie colombienne du tabac, le comité observe que l'organisation plaignante n'a pas transmis d'informations et n'a pas non plus formulé de commentaires sur la demande de précisions relatives à ces allégations que lui a fait parvenir le Bureau international du Travail et le comité lui-même lors de toutes les réunions qu'il a tenues depuis novembre 1983. Dans ces conditions, devant le manque d'intérêt manifesté par l'organisation plaignante à l'égard de ces allégations, le comité ne poursuivra pas l'examen de ces dernières.

&htab;142.&htab;Le comité prend note, à propos du problème qui se pose dans l'entreprise Tejicóndor, de ce que, selon le gouvernement, un représentant de cette entreprise et des dirigeants de l'organisation syndicale ont signé un acte devant l'inspection du travail, en vertu duquel l'entreprise prend l'engagement de ne pas faire obstacle à l'entrée de dirigeants syndicaux.

&htab;143.&htab;Pour ce qui est des allégations relatives au licenciement massif de travailleurs de l'entreprise Larco, afin de détruire l'organisation syndicale [voir 226e rapport, paragr. 276], et au licenciement de dirigeants syndicaux de l'entreprise Cerámicas del Valle Ltda., le comité observe que l'autorité administrative a infligé une amende de 10.000 pesos aux deux entreprises en question pour n'avoir pas sollicité les autorisations correspondantes. Le comité observe également que le gouvernement n'a pas fait de commentaires sur le prétendu objectif antisyndical du licenciement massif qui a eu lieu dans l'entreprise Larco S.A. et qu'il a indiqué que cinq des dirigeants de l'entreprise Cerámicas del Valle Ltda., dont la réintégration a été ordonnée par l'autorité judiciaire, ont de nouveau été licenciés par la suite. Bien que le comité ne dispose pas d'informations suffisantes concernant ces allégations, il tient à signaler que les sanctions pécuniaires infligées par les autorités administratives ne paraissent pas suffisamment sévères pour avoir un effet dissuasif contre d'éventuels actes de discrimination antisyndicale. Dans ces conditions, compte tenu du temps qui s'est écoulé depuis que se sont produits les faits allégués, le comité se limite a appeler l'attention du gouvernement sur le fait que nul ne devrait être licencié ni faire l'objet d'autres mesures préjudiciables concernant l'emploi pour avoir mené des activités syndicales licites. [Voir, par exemple, 233e rapport, cas nos 1183 et 1205 (Chili), paragr. 500.] Le comité demande au gouvernement de prendre des mesures pour sanctionner efficacement les actes de discrimination antisyndicale.

&htab;144.&htab;Enfin, pour ce qui est des allégations relatives aux sanctions infligées à trois dirigeants du syndicat de l'entreprise COLGAS S.A., le comité observe que le gouvernement n'en a pas fait mention et s'est limité à signaler qu'il y a eu, dans cette entreprise, un arrêt de travail collectif déclaré illégal par l'autorité administrative et que cet arrêt avait été utilisé comme moyen de pression, alors que la négociation collective se déroulait normalement. Le comité observe également que l'activité déployée par l'entreprise COLGAS SA (Compagnie colombienne de gaz SA) est considérée comme un service public dans lequel il ne peut être décrété de grève et que les différends qui y surgissent dans le cadre des négociations collectives doivent nécessairement être résolus en faisant appel à un tribunal d'arbitrage obligatoire lorsqu'il n'est pas possible de parvenir à un accord par la voie d'un règlement direct et par la conciliation. A cet égard, le comité rappelle que l'imposition par voie législative de l'arbitrage obligatoire à la place du droit de grève pour résoudre les conflits du travail ne peut se justifier que dans les services essentiels au sens strict du terme - à savoir les services dont l'interruption pourrait mettre en péril la vie, la sécurité ou la santé de la personne dans une partie ou dans la totalité de la population; en dehors de ces cas, il s'agit d'une mesure contraire au droit des organisations de travailleurs d'organiser leur activité et de formuler leur programme d'action garanti par l'article 3 de la convention no 87. [Voir, par exemple, 226e rapport, cas no 1140 (Colombie), paragr. 288.] Dans le présent cas, compte tenu de ce que le comité n'est pas convaincu que l'activité de l'entreprise COLGAS SA entre dans le concept de service essentiel ci-dessus exposé et compte tenu également de la brièveté des grèves, le comité estime que les travailleurs de l'entreprise en question ont, en participant à des grèves de courte durée, exercé un droit légitime. Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement de prendre des mesures afin de reconnaître le droit de grève aux travailleurs de l'entreprise COLGAS SA.

Recommandations du comité

&htab;145.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Le comité appelle l'attention du gouvernement sur le fait que nul ne devrait être licencié ni faire l'objet d'autres mesures préjudiciables concernant l'emploi pour avoir mené des activités syndicales licites. Le comité demande au gouvernement d'étudier la possibilité de prendre des mesures pour sanctionner efficacement les actes de discrimination antisyndicale. b) Le comité rappelle que l'imposition par voie législative de l'arbitrage obligatoire à la place du droit de grève pour résoudre les conflits du travail ne peut être justifiée que dans les services essentiels au sens strict du terme, à savoir les services dont l'interruption pourrait mettre en péril la vie, la sécurité ou la santé de la personne dans une partie ou la totalité de la population. En dehors de ces cas, il s'agit d'une mesure contraire au droit des organisations de travailleurs d'organiser leur activité et de formuler leur programme d'action garanti par l'article 3 de la convention no 87. Dans le présent cas, compte tenu de ce que le comité n'est pas convaincu que l'activité de l'entreprise COLGAS SA entre dans le concept de service essentiel ci-dessus exposé et compte tenu également de la brièveté des grèves, le comité estime que les travailleurs de l'entreprise en question ont, en participant à des grèves de courte durée, exercé un droit légitime. Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement de prendre des mesures afin de reconnaître le droit de grève aux travailleurs de l'entreprise COLGAS SA.

Cas no 1153 PLAINTES PRESENTEES PAR LA FEDERATION SYNDICALE MONDIALE, LA CONVENTION NATIONALE DES TRAVAILLEURS DE L'URUGUAY, LA CONFEDERATION INTERNATIONALE DES SYNDICATS LIBRES ET LA CONFEDERATION MONDIALE DU TRAVAIL CONTRE LE GOUVERNEMENT DE L'URUGUAY

&htab;146.&htab;Le comité a examiné ce cas lors de ses réunions de mai 1983 et de février 1984 où il a présenté des rapports intérimaires au Conseil d'administration. [Voir 226e rapport du comité, paragr. 154 à 180, et 233e rapport du comité, paragr. 392 à 403, qui ont respectivement été approuvés par le Conseil d'administration à ses 223e et 225e sessions (mai-juin 1983 et février 1984).] Par la suite, le gouvernement a envoyé des observations complémentaires dans une communication en date du 25 mai 1984.

&htab;147.&htab;L'Uruguay a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

&htab;148.&htab;Lorsque le comité avait examiné le présent cas à sa réunion de février 1984, l'allégation relative au licenciement abusif de 61 salariés de la société financière Centro-Banco - dont deux seulement avaient été réintégrés dans leurs fonctions - restait en instance. Le gouvernement n'ayant pas envoyé ses observations au sujet de cette allégation, le comité l'avait prié de lui adresser ses observations sur ce point. [Voir 233e rapport, paragr. 402.]

B. Réponse du gouvernement

&htab;149.&htab;Dans sa communication du 25 mai 1984, le gouvernement déclare, au sujet du licenciement de 61 travailleurs de la société financière Centro-Banco, que, grâce à l'intervention de la Direction nationale du travail, les dirigeants syndicaux ont été réintégrés dans leurs fonctions et que, pour les autres travailleurs, une sorte de bourse du travail a été créée en vue de leur accorder une priorité de réembauche lorsque les besoins en personnel de l'institution bancaire le permettront. Cette formule a été choisie afin d'essayer de protéger l'emploi de ceux qui, du fait de la situation conjoncturelle, ont cessé d'exercer leurs activités.

C. Conclusions du comité

&htab;150.&htab;Le comité note avec intérêt que, grâce à l'intervention de la Direction nationale du travail, les dirigeants syndicaux de la société financière Centro-Banco ont été réintégrés dans leurs fonctions et que des mesures ont été prises en vue du réengagement futur, dans cette société, des autres travailleurs licenciés. Le comité exprime l'espoir que les travailleurs en cause seront réintégrés dans la Société Centro Banco à brève échéance.

Recommandation du comité

&htab;151.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et, en particulier, la conclusion suivante:

&htab;Le comité note avec intérêt que les dirigeants syndicaux de la société financière Centro Banco ont été réintégrés dans leurs fonctions et que des mesures ont été prises en vue du réengagement futur, dans cette société, des autres travailleurs licenciés. Le comité exprime l'espoir que les travailleurs en cause seront réintégrés dans la Société Centro Banco à brève échéance.

Cas nos 1207 et 1209 PLAINTES PRESENTEES PAR LA CONFEDERATION MONDIALE DU TRAVAIL ET LA FEDERATION SYNDICALE MONDIALE CONTRE LE GOUVERNEMENT DE L'URUGUAY

&htab;152.&htab;Le comité a examiné ces cas à sa réunion de février 1984 où il a soumis deux rapports intérimaires au Conseil d'administration. [Voir 233e rapport du comité, paragr. 404 à 424 et 425 à 448, approuvé par le Conseil d'administration à sa 225e session (février 1984).] Par la suite, le gouvernement a envoyé des observations complémentaires dans une communication datée du 25 mai 1984.

&htab;153.&htab;L'Uruguay a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur des cas

&htab;154.&htab;Lorsque le comité a examiné le cas no 1207, à sa réunion de février 1984, il a formulé les recommandations suivantes au sujet des allégations demeurées en suspens:

&htab;Le comité note que, selon le gouvernement, le dirigeant syndical Daniel Cocchi a été congédié pour des faits et des omissions qui ont porté atteinte à la confiance placée dans ce capitaine de bateau. Afin de pouvoir se prononcer sur cette allégation en pleine connaissance de cause, le comité prie le gouvernement de lui indiquer avec précision les faits concrets et les omissions qui ont motivé le licenciement de ce dirigeant.

&htab;Le comité demande au gouvernement de lui transmettre ses observations sur l'allégation suivant laquelle l'APEEF aurait dû demander des autorisations administratives au ministère du Travail et à la police pour pouvoir se constituer.

&htab;Le comité demande au gouvernement de lui transmettre ses observations sur l'allégation selon laquelle M. Roberto Alfonso a été déclaré inapte à remplir les fonctions de dirigeant syndical à cause de ses "antécédents idéologiques.

&htab;155.&htab;Pour ce qui est du cas no 1209, le comité avait relevé que le gouvernement n'avait pas répondu à certaines allégations et l'avait prié de lui transmettre ses observations sur les allégations restées sans réponse.

&htab;156.&htab;Les plaignants avaient allégué, en particulier, que le ministère du Travail et de la Sécurité sociale n'avait pas autorisé l'élection de dirigeants permanents, de sorte que les différentes associations de travailleurs enregistrées fonctionnaient encore avec des dirigeants provisoires.

&htab;157.&htab;Les plaignants avaient également allégué que le ministère de l'Intérieur avait interdit toute activité syndicale à MM. José Custodio, Asdrúbal Gadea, Nelson Curbelo et Julio Alonso, tous membres de la commission provisoire de l'Union des ouvriers, des employés et des cadres de la FUNSA. Ils avaient dénoncé en outre le licenciement de Roberto Mourino, Miguel Miraballes, Daniel Buscarons, Hugo Nicola, Doroteo Díaz, Anselmo Oyarzábal, Enrique Larnaudie et César Martínez Yaquelo, militants syndicaux de l'organisation en question. De plus, ils s'étaient référés au licenciement de Daniela Amoroso, membre de la commission provisoire de la Trade Development Bank, licenciée pour avoir protesté contre le congédiement d'un dirigeant syndical. Par ailleurs, les plaignants avaient indiqué qu'une interdiction d'exercer des activités syndicales aurait frappé MM. Carlos Larraya (Association des fonctionnaires du centre d'assistance du Syndicat des médecins d'Uruguay), Andrés Brun, Emeli Landriel et Julio Betervide (Association des permanents de l'Association des employés de banque d'Uruguay), José Curbelo, Milton Antognazza (Association des employés de la Banque Caja Abrera) [le comité a déjà examiné l'allégation relative à l'interdiction ayant frappé M. Antognazza dans le cadre du cas no 1153 (voir 226e rapport, paragr. 174 et 180)], Gonzalo Rodríguez (Association des employés de la Banque de crédit), Joaquín Pau (Association des employés du Banco Exterior de Espana), Francisco Rama (Association des employés de la Banque de Londres et d'Amérique du Sud), Daniel González Mazzei et Roberto E. Miranda (Association des employés de la Banque de Santander), Luis Becerra et Edgar Covagnaro (Association des travailleurs et employeurs des fabriques nationales de bière) et Mario Carbajal (Association des employés de la Banque Sudameris).

&htab;158.&htab;Enfin, selon les plaignants, le gouvernement ne reconnaît pas la représentativité de la Plénière intersyndicale des travailleurs d'Uruguay.

B. Réponse du gouvernement

&htab;159.&htab;Le gouvernement déclare que M. Cocchi a été licencié, comme l'atteste le jugement du Tribunal correctionnel de la marine marchande (annexé à sa réponse), parce que ce capitaine avait donné un ordre arbitraire et inutile portant atteinte à l'intégrité physique d'un marin, pour satisfaire un caprice personnel, faisant ainsi courir inutilement des risques à un travailleur.

&htab;160.&htab;Le gouvernement déclare par ailleurs que, conformément à l'article 15, alinéa b), de la loi no 15137 sur les associations professionnelles, les statuts de ces dernières doivent établir leurs buts et leurs objectifs qui doivent répondre à des fins professionnelles. Le ministère du Travail et de la Sécurité sociale, par le truchement du registre des associations professionnelles, veille au respect de cette obligation. Lorsqu'il est saisi d'une demande de réunion, il en examine l'ordre du jour, et l'approuve s'il est conforme aux exigences susmentionnées. L'autorisation une fois accordée, la Préfecture de police est informée de la date et du lieu de la réunion comme le prévoient les dispositions en vigueur en la matière, étant donné, en outre, qu'il lui incombe d'assurer le maintien de l'ordre général. Ces conditions n'autorisent pas cependant à prétendre qu'il y aurait intervention de la police dans les locaux où se tiennent des assemblées.

&htab;161.&htab;Quant à l'allégation relative d'interdiction d'exercer des fonctions syndicales qui aurait concerné M. Roberto Alfonso, le gouvernement indique qu'il ne dispose pas suffisamment d'éléments pour pouvoir identifier l'intéressé ni l'organisation à laquelle il appartiendrait.

&htab;162.&htab;Au sujet des allégations relatives à des mesures visant à retarder la tenue d'élections syndicales, le gouvernement déclare que le ministère du Travail convoque régulièrement des élections pour la désignation des dirigeants permanents des associations professionnelles enregistrées. Le gouvernement cite certaines des associations professionnelles qui, entre janvier et mai 1984, ont été invitées, par décision ministérielle, à procéder à de telles élections: le Syndicat autonome des omnibus; l'Association professionnelle des gardiens du port de Montevideo; l'Association professionnelle des travailleurs et employeurs de Facer Plast; l'Association des gardiens d'immeubles; la Société des conducteurs et des contrôleurs, les agents de ONDA SA; l'Association professionnelle du personnel de direction de la FUNSA, etc. Ces associations fonctionnaient sous la direction de dirigeants provisoires élus au moment de leur constitution par les travailleurs.

&htab;163.&htab;Quant à l'allégation relative à la non-reconnaissance par les autorités de la représentativité de la Plénière intersyndicale des travailleurs (PIT), le gouvernement déclare que l'entité qui s'est dénommée elle-même Plénière intersyndicale des travailleurs ne s'est jamais adressée au ministère du Travail et de la Sécurité sociale ni pour se faire inscrire au registre, ni pour faire reconnaître sa personnalité juridique, ni non plus pour faire enregistrer ses statuts et la liste nominative de ses dirigeants, tout cela en violation de la loi no 15137. Pour ce qui est du fonctionnement de ladite plénière en tant qu'association de fait, le gouvernement indique que la plénière intersyndicale a appelé, le 19 janvier 1984, à une grève générale en vue, notamment, d'obtenir la libération de personnes condamnées par la justice pour des activités terroristes, ce qui a motivé sa dissolution.

&htab;164.&htab;Pour ce qui est de l'interdiction d'exercer des activités syndicales qui a frappé certains dirigeants syndicaux, le gouvernement déclare que les personnes citées par les plaignants ont été averties par la Préfecture de police de ce qu'elles étaient en infraction avec l'article 39, alinéa d), du décret d'application no 513/81 de la loi no 15137 sur les associations professionnelles. Toutes ces personnes ont présenté leur démission en tant que dirigeants provisoires au registre des associations professionnelles du ministère du Travail et de la Sécurité sociale. Se référant à l'interdiction établie à l'article 39, alinéa d), du décret no 513/81, le gouvernement déclare que cette interdiction découle des dispositions de l'article 5, alinéa d), de la loi dont le libellé a été modifié lors de la dernière mission de contacts directs envoyée par l'OIT dans le pays. Cette disposition ne permet pas d'interdire des dirigeants syndicaux "pour des raisons syndicales", étant donné que les organisations syndicales auxquelles ces dirigeants appartenaient qui ont été déclarées illégales par les pouvoirs publics l'ont été à l'époque non pour des raisons syndicales, mais pour s'être associées à des mouvements politiques qui cherchaient à renverser le gouvernement par la violence. A cet égard, les dossiers que le représentant du Directeur général a eu l'occasion d'examiner au cours de la mission de contacts directs dont il a déjà été question contenaient des preuves que les mesures de répression adoptées à l'égard de certaines personnes qui exerçaient, alors, des fonctions de dirigeants syndicaux l'ont été, non pas parce qu'elles exerçaient des activités syndicales, mais parce qu'elles participaient activement à des mouvements terroristes. De même, la dissolution de ces entités ne tenait pas à des "raisons syndicales" mais à la défense de la souveraineté et de la sécurité nationales. Dans ce contexte, les dirigeants d'organisations dissoutes qui ont participé à des activités terroristes ne peuvent occuper de nouveau des charges de dirigeants syndicaux, cela leur étant interdit conformément à la Constitution de la République. Du reste, quel Etat permettrait à des personnes qui se sont compromises dans ce type d'activités d'assurer des fonctions de dirigeant syndical?

&htab;165.&htab;Pour ce qui est des allégations relatives à des licenciements, le gouvernement déclare que MM. Roberto Mourino, Miguel Miraballes, Daniel Buscarons, Hugo Nicola, Doroteo Díaz, Anselmo Oyarzábal, Enrique Larnaudie et César Martínez Yaquelo ne figurent pas dans les dossiers du registre des associations professionnelles de sorte que l'on peut affirmer qu'ils ne sont pas des dirigeants provisoires de l'Association des ouvriers, des employés et des cadres de la FUNSA et qu'ils n'ont pas non plus effectué les démarches nécessaires en vue de la constitution de cette association. Consultée, l'entreprise affirme que les personnes en question n'étaient que des employés et non pas des dirigeants syndicaux, qu'elles ont été mises au bénéfice de l'assurance-chômage voici un an et demi et qu'elles n'ont pas été réintégrées depuis. Mme Daniela Amoroso, qui n'a jamais fait partie de la commission provisoire de l'Association des employés de la Trade Development Bank, se trouve dans une situation analogue.

C. Conclusions du comité

&htab;166.&htab;Le comité prend note de ce que le licenciement du dirigeant syndical, M. Daniel Cocchi, a été motivé, comme a pu le constater le Tribunal correctionnel de la marine marchande, par le fait que ce capitaine de navire a donné un ordre arbitraire et inutile portant atteinte à l'intégrité physique d'un marin.

&htab;167.&htab;Pour ce qui est des prétendues autorisations que l'APEEF aurait dû solliciter pour pouvoir se constituer, le comité observe que le gouvernement a déclaré que, lorsqu'elles sont saisies d'une demande relative à l'organisation d'une assemblée, les autorités du ministère du Travail et de la Sécurité sociale en examinent l'ordre du jour et approuvent celui-ci lorsqu'il est conforme aux dispositions prévues à l'article 15, alinéa b), de la loi no 15137 sur les associations professionnelles, en vertu desquelles les statuts de ces associations doivent préciser leurs buts et leurs objectifs qui doivent se rapporter à des fins professionnelles. Le comité note, de même, qu'une fois ledit ordre du jour approuvé la Préfecture de police est informée de la date et du lieu de la réunion sans que cela implique une intervention de la police dans les locaux où se tiennent les assemblées.

&htab;168.&htab;A cet égard, le comité estime que l'exigence de soumettre aux autorités, pour approbation, l'ordre du jour d'une réunion tendant à la formation d'une organisation syndicale implique une limitation importante de l'autonomie syndicale, et appelle l'attention du gouvernement sur le fait que le droit de tenir des réunions syndicales ne doit pas être subordonné à une autorisation préalable et que les autorités doivent s'abstenir de toute intervention tendant à le limiter. [Voir, par exemple, 233e rapport, cas no 1217 (Chili), paragr. 109.]

&htab;169.&htab;Pour ce qui est des allégations relatives aux retards apportés aux élections des dirigeants permanents des associations professionnelles, le comité prend note de ce que, selon le gouvernement, des élections ont été convoquées, par décisions ministérielles, dans certaines associations professionnelles (dont six sont mentionnées par le gouvernement). A cet égard, le comité tient à souligner que le droit des travailleurs d'élire librement leurs représentants devrait s'exercer conformément aux statuts des diverses associations professionnelles et ne devrait pas être subordonné à la convocation d'élections par une décision ministérielle étant donné que ceci constitue une ingérence des autorités contraire aux principes de la convention no 87. Le comité regrette que l'intervention des autorités ait eu pour résultat que, plus de trois ans après l'adoption de la nouvelle législation syndicale, la majeure partie des organisations créées n'ont toujours pas de dirigeants permanents. Le comité prie le gouvernement de prendre des mesures dans l'esprit des principes susmentionnés afin que toutes les organisations existantes puissent procéder le plus rapidement possible à l'élection de dirigeants permanents.

&htab;170.&htab;Pour ce qui est de l'incapacité juridique qui frappe des dirigeants syndicaux, le comité note que le gouvernement reconnaît que tous les intéressés, à l'exception de M. Roberto Alfonso, ont reçu un avertissement de la Préfecture de police pour infraction aux dispositions de l'article 39, alinéa d), du décret d'application no 513/81 de la loi sur les associations professionnelles. Le comité note également que, selon le gouvernement, les personnes frappées de l'incapacité juridique d'exercer des fonctions syndicales en vertu de l'article 39, alinéa d), du décret susmentionné seraient des dirigeants d'ex-organisations qui ont participé à des activités terroristes. A ce sujet, le comité rappelle que, dans son 233e rapport, lors de l'examen du cas no 1209, il a estimé que l'article 39, alinéa d), du décret no 513 (l'exigence, pour pouvoir être élu dirigeant syndical, de ne pas avoir occupé de poste de direction dans des organisations déclarées illégales) était contraire aux principes de la convention no 87 et permettait légalement d'interdire à des dirigeants syndicaux d'exercer leurs fonctions, même pour des raisons syndicales comme celles d'avoir occupé un poste de direction dans des organisations syndicales déclarées illégales.

&htab;171.&htab;Dans ces conditions, constatant que l'interdiction qui frappe certaines personnes de pouvoir occuper des fonctions de dirigeants syndicaux peut découler du fait qu'elles ont occupé un poste de direction dans des organisations syndicales déclarées illégales, indépendamment du fait que les intéressés aient ou non commis des délits qui constituent un véritable risque pour l'exercice des fonctions syndicales, le comité invite le gouvernement - comme il l'a déjà fait dans son 233e rapport - à prendre les mesures nécessaires pour modifier les dispositions de l'article 39, alinéa d), du décret no 513 et à reporter la mesure d'interdiction qui frappe les personnes citées par les plaignants.

&htab;172.&htab;Le comité observe que le gouvernement, dans sa réponse, déclare qu'il ne dispose pas de suffisamment d'éléments pour pouvoir identifier M. Roberto Alfonso et l'organisation à laquelle il appartiendrait. A cet égard, le comité se réfère aux allégations de la Confédération mondiale du travail contenues dans sa communication datée du 2 juin 1983 [voir 233e rapport, cas no 1207, paragr. 407] selon lesquelles l'organisation à laquelle appartient M. Roberto Alfonso est l'Association du personnel navigant de l'entreprise FRIPUR, et selon lesquelles il aurait été interdit à cette personne de remplir les fonctions de dirigeant syndical en raison de ses antécédents idéologiques. Compte tenu du temps qui s'est écoulé depuis la formulation de cette allégation, le comité ne peut que renvoyer aux considérations formulées dans le paragraphe précédent.

&htab;173.&htab;Quant aux allégations relatives à des licenciements, le comité note que, selon la communication du gouvernement en date du 25 mai 1984, les huit personnes mentionnées par les plaignants ne sont des dirigeants provisoires d'aucune association professionnelle, qu'elles ont été mises au bénéfice de l'assurance-chômage et n'ont pas été réintégrées depuis plus d'un an et demi. A cet égard, le comité rappelle que la protection contre les actes de discrimination antisyndicale concerne tous les travailleurs, et non pas seulement les dirigeants syndicaux. Par conséquent, le comité regrette que le gouvernement n'ait pas spécifié les faits qui ont motivé le licenciement de ces personnes. Compte tenu du temps qui s'est écoulé depuis la présentation des allégations, le comité se limite à signaler à l'attention du gouvernement que le licenciement de travailleurs pour avoir exercé des activités syndicales est contraire aux principes de la liberté syndicale.

&htab;174.&htab;Le comité examinera l'allégation relative à la non-reconnaissance par le gouvernement de la représentativité de la Plénière intersyndicale des travailleurs d'Uruguay dans le cadre du cas no 1257.

Recommandations du comité

&htab;175.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Le comité note que le licenciement du dirigeant syndical, M. Daniel Cocchi, a été motivé par le fait que ce capitaine de navire a donné un ordre arbitraire et inutile qui a porté atteinte à l'intégrité physique d'un marin.

b) Le comité estime que l'exigence de soumettre aux autorités, pour approbation, l'ordre du jour d'une réunion tendant à la formation d'une organisation syndicale, implique une limitation importante de l'autonomie syndicale et appelle l'attention du gouvernement sur le fait que le droit de tenir des réunions syndicales ne doit pas être subordonné à une autorisation préalable et que les autorités devraient s'abstenir de toute intervention tendant à limiter ce droit.

c) Quant aux allégations relatives à des retards apportés à l'élection des dirigeants permanents des associations professionnelles, le comité tient à souligner que le droit des travailleurs d'élire librement leurs représentants devrait s'exercer conformément aux statuts des diverses associations professionnelles et ne devrait pas être subordonné à la convocation d'élections par décision ministérielle étant donné que ceci constitue une ingérence des autorités contraire aux principes de la convention no 87. Le comité regrette que l'intervention des autorités ait eu pour résultat que, plus de trois ans après l'adoption de la nouvelle législation syndicale, la majeure partie des organisations constituées n'ont toujours pas de dirigeants permanents. Le comité invite le gouvernement à prendre des mesures dans le sens des principes susmentionnés afin que toutes les organisations existantes puissent procéder, aussitôt que possible, à l'élection de dirigeants permanents.

d) Pour ce qui est des allégations relatives à l'incapacité juridique d'exercer des fonctions syndicales qui frappe certaines personnes, le comité prie le gouvernement de reporter cette mesure en ce qui concerne les personnes mentionnées par les plaignants et de prendre les dispositions nécessaires pour modifier l'article 19, alinéa d), du décret no 513/81 (qui exige, pour pouvoir être élu dirigeant syndical, de ne pas avoir occupé de poste de direction dans des organisations (y compris des organisations syndicales) déclarées illégales.

e) Le comité appelle l'attention du gouvernement sur le fait que le licenciement de travailleurs pour avoir exercé des activités syndicales est contraire au principe de la liberté syndicale.

Cas no 1274 PLAINTE PRESENTEE PAR LA CONFEDERATION INTERNATIONALE DES SYNDICATS LIBRES CONTRE LE GOUVERNEMENT DE L'URUGUAY

&htab;176.&htab;La plainte figure dans une communication de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) du 11 avril 1984. Le gouvernement a répondu par une communication datée du 21 mai 1984.

&htab;177.&htab;L'Uruguay a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations du plaignant

&htab;178.&htab;Dans sa communication du 11 avril 1984, la CISL allègue que M. Hugo de los Santos, dirigeant du syndicat du textile "Manos del Uruguay" et membre du comité exécutif du Congrès ouvrier du textile, a été arrêté, ainsi que son épouse, dans la matinée du 7 avril 1984, par des militaires et conduit, à ce qu'il semble, au régiment 13. La CISL réclame la mise en liberté de ce dirigeant et le respect de son intégrité physique.

B. Réponse du gouvernement

&htab;179.&htab;Dans sa communication du 21 mai 1984, le gouvernement déclare que l'arrestation de M. Hugo de los Santos est en rapport avec la manifestation de protestation à laquelle ont participé tout d'abord quelque 200 personnes, le 5 avril 1984, devant l'entreprise textile "Fibratex", auxquelles se sont joints par la suite, à cet endroit, des travailleurs d'autres usines textiles, soit au total un groupe de 500 personnes. Malgré les discours improvisés prononcés devant l'entreprise mentionnée et bien que les manifestants se soient dirigés ensuite, en portant des affiches, vers l'entreprise textile "MUSA", les forces armées, qui sont chargées d'assurer l'ordre public, se sont abstenues d'intervenir, permettant ainsi aux travailleurs de manifester librement leur mécontentement. Toutefois, vu que M. Hugo de los Santos Figueros, qui se trouvait en "liberté surveillée", s'était joint au groupe en tant qu'agitateur, l'intéressé a été traduit devant l'autorité judiciaire compétente qui a décidé, le 9 avril, sa détention pour une durée de cinq jours.

&htab;180.&htab;Enfin, le gouvernement déclare qu'il n'existe pas d'éléments qui permettent de vérifier l'affirmation de l'organisation plaignante selon laquelle M. de los Santos serait un dirigeant syndical de l'association des travailleurs de "Manos del Uruguay", ajoutant qu'il présume que cette affirmation n'est pas exacte puisque le nom de l'intéressé ne figure pas dans la demande d'organisation de l'assemblée constitutive de ladite association et que le ministère du Travail et de la Sécurité sociale n'a, en outre, pas eu communication de la liste éventuelle des responsables de l'association.

C. Conclusions du comité

&htab;181.&htab;Le comité observe que, d'après les déclarations du gouvernement, la détention de M. Hugo de los Santos pendant les cinq jours où il a été mis à la disposition de la justice était due à sa participation à une activité incompatible avec le régime de liberté surveillée auquel il était soumis, à savoir la participation en tant qu'agitateur à une marche de protestation de travailleurs du secteur des textiles. Le comité note que la marche en question avait sans doute revêtu un caractère pacifique puisque, comme le gouvernement l'indique, les forces armées se sont abstenues d'intervenir.

&htab;182.&htab;A cet égard, le comité considère que le fait qu'une personne se trouve en liberté surveillée ne devrait pas avoir pour effet de lui interdire de participer à des activités syndicales licites, comme une marche de protestation pacifique. Vu que le gouvernement a exprimé des doutes quant au statut de dirigeant syndical de M. Hugo de los Santos, le comité tient à signaler que le principe susmentionné s'applique non seulement aux dirigeants syndicaux, mais aussi aux syndicalistes.

&htab;183.&htab;Dans ces conditions, le comité déplore que M. Hugo de los Santos ait été détenu pendant cinq jours et il appelle l'attention du gouvernement sur le principe relatif aux effets du régime de liberté surveillée sur l'exercice des droits syndicaux.

Recommandations du comité

&htab;184.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Le comité considère que le fait qu'une personne soit soumise à un régime de liberté surveillée ne devrait pas avoir pour effet de lui interdire de participer à des activités syndicales licites, comme une marche de protestation pacifique.

b) En conséquence, le comité déplore que M. Hugo de los Santos ait été détenu pendant cinq jours pour avoir participé à une marche pacifique, et il appelle l'attention du gouvernement sur le principe relatif aux effets du régime de liberté surveillée sur l'exercice des droits syndicaux.

Cas no 1196 PLAINTE PRESENTEE PAR LA CONFEDERATION DEMOCRATIQUE DU TRAVAIL CONTRE LE GOUVERNEMENT DU MAROC

&htab;185.&htab;La plainte de la Confédération démocratique du travail date du 17 janvier 1983. Le comité a dû ajourner l'examen de ce cas à plusieurs reprises dans l'attente des observations du gouvernement. A sa réunion de mai 1984, le comité a demandé instamment au gouvernement de transmettre d'urgence ses observations sur cette affaire et lui a signalé qu'il pourrait présenter un rapport sur le fond de l'affaire même si la réponse n'était pas reçue avant la présente réunion. Depuis lors, le gouvernement a fourni sa réponse dans une communication du 22 juin 1984.

&htab;186.&htab;Le Maroc n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. En revanche, il a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de la confédération plaignante

&htab;187.&htab;Dans sa communication du 17 janvier 1983, la Confédération démocratique du travail (CDT) allègue de nombreuses violations des droits des militants du Syndicat national de l'eau et de l'électricité (CDT-SNEE), organisation qui lui est affiliée, perpétrées par la direction de l'Office national de l'électricité (ONE) et par les pouvoirs publics, au cours des élections qui se sont déroulées les 25 et 26 mai 1982 pour désigner les délégués du personnel de l'Office national de l'électricité (ONE) à la Commission supérieure de l'électricité du Maroc, à la Commission principale du personnel, au Conseil des oeuvres sociales et au conseil d'administration de la Caisse mutuelle de la sécurité sociale.

&htab;188.&htab;Ces violations ont eu pour résultat d'éliminer le syndicat (SNEE) et, par voie de conséquence, de laisser le champ libre au syndicat rival, la Fédération nationale de l'éclairage et des forces motrices (FNEFM-UMT), qui, de ce fait, a tout naturellement remporté l'ensemble des sièges. Cette élimination, poursuit la confédération plaignante, a privé ses militants de la place qu'ils escomptaient dans les organismes professionnels susnommés et a pesé sur les élections législatives qui devaient se dérouler pendant l'été 1983 puisqu'une partie des députés élus pour six ans émane, par le jeu d'un suffrage à deux degrés, d'élections au sein des divers organismes professionnels.

&htab;189.&htab;La confédération plaignante explique en effet que la direction de l'ONE a annoncé le 23 février 1982 que les élections aux organismes professionnels au scrutin proportionnel étaient fixées du 25 au 28 mai suivant et que la liste des candidats devait être déposée à la direction au plus tard le 27 avril 1982 à 18 heures et être accompagnée de lettres individuelles de candidature. Or les listes de la SNEE accompagnées de ces lettres ont été régulièrement déposées le 27 avril à 10 heures comme l'attestent les récépissés de la direction joints à la plainte. Cependant, dès le lendemain, des délégués de la centrale syndicale rivale se seraient rendus dans divers centres du Maroc où les élections devaient se dérouler, dans le but de faire pression sur les candidats de la SNEE afin qu'ils retirent leur candidature. Les militants auraient résisté mais leurs adversaires auraient usé de contraintes morales et physiques (menaçant des candidats et leurs familles, enlevant leurs victimes et les conduisant devant le secrétaire général du syndicat adverse, M. Mohamed Abderrazak, de la FNEFM-UMT qui aurait supervisé la rédaction et la signature d'un acte de retrait de candidature). Cette extorsion de démissions aurait touché MM. Najmi et Bahroud. Les lettres de retrait de candidature ainsi arrachées aux militants ayant été adressées par les adversaires à la direction, celle-ci en aurait profité pour ignorer les listes de la CDT en les considérant comme nulles, arguant de ce que le règlement des élections (établi par la direction) dispose que "toute démission intervenant avant la date d'enregistrement entraînera l'annulation de la liste correspondante", cet enregistrement lui-même devant avoir lieu sept jours avant la date limite de dépôt des listes de candidats.

&htab;190.&htab;Selon la confédération plaignante, l'argument de la direction serait spécieux car les militants CDT, contraints de signer les actes de retrait de candidature, ont immédiatement écrit à la direction pour l'informer des pressions qu'ils avaient subies et lui confirmer qu'ils maintenaient leurs candidatures. Les lettres de protestation adressées à la direction confirmant le maintien desdites candidatures signées de MM. Najmi et Bahroud et datées des 28 et 29 avril 1982 respectivement sont jointes à la présente plainte. Par ailleurs, le syndicat en tant que tel a dénoncé les agissements de ses rivaux, notamment en adressant des télégrammes tant à la direction qu'au ministère de tutelle, à savoir le ministère de l'Energie et des Mines dont photocopie est annexée à la plainte. La direction, cependant, décida définitivement que les listes étaient nulles et qu'elles n'avaient pas à être publiées.

&htab;191.&htab;Le syndicat a demandé alors à la direction une confirmation écrite du rejet des candidatures et d'en préciser les motifs, mais celle-ci s'y refusa se contentant d'indiquer verbalement que la centrale CDT était en fait illégale car interdite par l'Etat puisque ses dirigeants étaient en prison. Or, explique la confédération plaignante, la CDT n'est pas interdite en droit, même si certains de ses dirigeants étaient à l'époque en détention préventive à la suite des événements de Casablanca du 20 juin 1981 puisque leur procès n'avait pas eu lieu. (Depuis lors, d'ailleurs, les dirigeants de la CDT ont été remis en liberté. [Voir 233e rapport, cas no 1054, Maroc, paragr. 318 à 381.]) Le SNEE-CDT prit acte officiellement du rejet de ses candidats par la direction le 17 mai 1982 en lui adressant une lettre dont copie a été envoyée à toutes les autorités concernées: wali du grand Casablanca, ministres de l'Energie et des Mines, du Travail, de la Justice, des Affaires étrangères, Premier Ministre, directeur du Cabinet royal. Malheureusement, aucune de ces autorités n'est intervenue pour rétablir la légalité des élections, et ce silence a permis à la direction de l'ONE de s'estimer couverte et d'éliminer ledit syndicat. Les pouvoirs publics ayant laissé la direction libre d'agir à sa guise, les élections eurent lieu sans la participation du syndicat SNEE, et le syndicat rival connu pour sa collaboration avec la direction a obtenu l'ensemble des sièges.

&htab;192.&htab;L'organisation plaignante explique également que le syndicat ne peut obtenir l'annulation de ces élections pour des raisons de fait et de droit: en effet, l'article 20 du règlement établi par la direction générale de l'Office national de l'électricité en mai 1982 relatif aux élections des membres du Conseil des oeuvres sociales et du conseil d'administration de la Caisse mutuelle de sécurité sociale dispose: "Au cas où un litige entre la direction générale de l'ONE et les organisations syndicales légalement constituées ne pourrait être réglé à l'amiable entre elles, il serait soumis à l'arbitrage de la Commission supérieure du personnel dans les cinq jours qui suivent la proclamation des résultats." En admettant que le délai de cinq jours stipulé par le règlement puisse être aisément respecté, explique la confédération plaignante, l'arbitrage ouvert par l'article 20 ne peut avoir aucun effet régulateur car la Commission supérieure qui en est chargée se compose uniquement de la direction, puisqu'elle est présidée par le directeur général ou son délégué, et, des représentants de la centrale syndicale adverse dont les candidatures ont été admises. De ce fait, il est évident que le litige ne peut jamais être objectivement arbitré puisque les arbitres sont juges et parties.

&htab;193.&htab;Par ailleurs, ajoute la confédération plaignante, il est impossible d'obtenir en justice l'annulation des élections pour les raisons suivantes: la Cour suprême, dans un arrêt du 27 juillet 1979, a posé comme règle que le délai de cinq jours ouverts par l'article 24 de l'arrêté du ministre délégué au Travail et aux Affaires sociales du 26 décembre 1962 relatif à l'élection des délégués du personnel pour "former un recours sur la régularité et la sincérité des élections électorales" commence à partir de la proclamation des résultats "par le bureau de vote", laquelle intervient toujours, d'après la Cour suprême, immédiatement après le dépouillement du scrutin. Or cette thèse de la Cour suprême méconnaît le mécanisme véritable des élections qui se déroulent au sein de l'ONE. Celles-ci n'étaient en réalité pas régies par l'arrêté du 26 décembre 1962 mais par le règlement susmentionné établi par la direction et dont les dispositions ne sont pas conformes audit arrêté. En effet, d'après le règlement, les bureaux de vote (répartis sur de nombreux points du territoire national) ne proclament pas les résultats de scrutin, ce qui est d'ailleurs logique ce scrutin étant national, en ce sens que les élus aux divers organismes professionnels représentent l'ensemble du personnel de l'ONE et non les employés de tel ou tel de ses centres situés à tel ou tel point du territoire. La proclamation des résultats se fait donc au siège de l'ONE, et, d'une tout autre manière, longtemps après le scrutin, à la date décidée par la direction. L'article 13 du règlement dispose en effet que: "à l'issue du scrutin les urnes contenant les votes ainsi que les exemplaires des listes électorales pointés et les procès-verbaux sont centralisés à Casablanca à la direction générale de l'ONE par le président de la commission de dépouillement qui en reste néanmoins responsable jusqu'à l'issue du dépouillement", et l'article 18 du règlement dispose que: "Les résultats sont proclamés par le président et sanctionnés par une décision du directeur général de l'ONE." Il n'est donc pas vrai que le président de la commission de dépouillement proclame les résultats: cette proclamation est toujours faite par le directeur général de l'ONE et par lui seul sous forme de "décision" rendue publique par affichage. Ainsi, la proclamation des résultats et la formalisation administrative de cette proclamation se confondent et ont lieu en même temps. Elles sont le fait d'une seule et même personne. Partant, lorsque la Cour suprême dans son arrêt susvisé a posé comme règle que le délai de cinq jours ouverts par l'article 24 de l'arrêté du 26 décembre 1962 "commence du jour de la proclamation des résultats par le bureau de vote" (d'après les termes de l'arrêt) elle s'est référée à un fait qui ne se produit jamais: la proclamation des résultats par le bureau de vote, proclamation qui interviendrait, pense à tort la Cour de cassation, immédiatement après la fin du vote. Dès lors, la confédération plaignante estime qu'il est clair que tout recours devant les tribunaux pour obtenir l'annulation des élections régulières ne peut qu'être déclaré irrecevable puisqu'il ne peut jamais en pratique être formé qu'après la publication de la "décision" directoriale alors que la Cour suprême estime que cette décision ne peut constituer le point de départ du délai.

&htab;194.&htab;En conclusion, selon la confédération plaignante, il apparaît que les chances de la CDT d'obtenir la place qu'elle mérite dans les organismes professionnels de l'ONE et à un plus haut niveau au sein du Parlement sont réduites à néant dans les circonstances présentes par l'effet de l'attitude de la direction (qui viole ouvertement les règles électorales), des agissements délictueux de la centrale syndicale concurrente (qui exerce des pressions sur ces candidats pour qu'ils retirent leur candidature ce qui, d'après la direction, rend nulles les listes), du silence des pouvoirs publics (qui laissent faire) et enfin de la Cour suprême (qui fait de la loi une interprétation manifestement incompatible avec la réalité).

B. Réponse du gouvernement

&htab;195.&htab;Dans sa réponse du 22 juin 1984, le gouvernement confirme que l'Office national de l'électricité a déclaré nulles les listes électorales des délégués du personnel qui ont fait l'objet de contestations de la part du Syndicat national de l'eau et de l'électricité.

&htab;196.&htab;Selon lui, cette décision aurait été motivée par les faits suivants. D'une part, les listes devenues incomplètes du fait de la démission de certains candidats dans les cinq jours qui suivaient la présentation des candidatures ne pouvaient être prises en considération car elles n'étaient pas conformes au modèle réglementaire. D'autre part, certaines signatures apposées sur les listes des candidatures n'auraient pas été conformes à celles figurant au dossier individuel des candidats.

&htab;197.&htab;Concernant les allégations relatives aux abus exercés contre les travailleurs de l'organisation plaignante au sein ou à l'extérieur de l'Office national de l'électricité, le gouvernement indique que l'enquête qui a été menée à ce sujet a révélé que ces allégations étaient dénuées de tout fondement.

C. Conclusions du comité

&htab;198.&htab;La présente affaire a trait essentiellement à la contestation par la confédération plaignante des résultats des élections syndicales de mai 1982 des délégués du personnel de l'Office national de l'électricité (ONE) qui se seraient déroulées en violation des droits des syndicalistes du Syndicat national de l'eau et de l'électricité (SNEE), organisation affiliée à la confédération plaignante.

&htab;199.&htab;Sur le premier grief relatif à la violation des règles électorales par la direction générale de l'ONE, le comité observe que le gouvernement ne fait aucun commentaire. Le comité relève cependant pour sa part que la direction générale de l'ONE a adopté deux règlements intérieurs pour les élections de mai 1982, l'un pour les élections des membres du Conseil des oeuvres sociales et du conseil d'administration de la Caisse mutuelle de sécurité sociale et l'autre pour les élections des représentants du personnel de la Commission supérieure de l'électricité au Maroc et de la Commission principale du personnel. Aux termes de ces deux règlements (articles 3 et 20), les listes des candidats sont déposées et enregistrées à la direction générale de l'ONE à Casablanca contre récépissé du directeur général de l'office ou de son représentant. Toute démission intervenant avant la date d'enregistrement annule la liste correspondante. En outre, le règlement des litiges entre la direction générale de l'ONE et les organisations syndicales est soumis à l'arbitrage de la Commission supérieure du personnel dans les cinq jours qui suivent la proclamation des résultats.

&htab;200.&htab;Le comité constate que ces dispositions confèrent le pouvoir discrétionnaire d'enregistrer les listes des candidats à l'autorité patronale et attribuent le pouvoir de trancher les litiges à la Commission supérieure du personnel, composée de représentants de la direction de l'ONE et d'élus sur des listes qui doivent avoir été agréées par la direction générale. Ce comité estime que les organes ainsi habilités pour intervenir dans la procédure électorale ne présentent pas tout le degré d'indépendance souhaitable. En conséquence le comité veut croire que ces dispositions seront modifiées et il insiste auprès du gouvernement pour que le contrôle des élections soit confié aux autorités judiciaires.

&htab;201.&htab;Sur le second grief relatif aux pressions qui auraient été exercées par des syndicalistes de la liste adverse pour obtenir le retrait de candidatures des syndicalistes de la liste de la confédération plaignante, le comité note que la confédération plaignante a fourni deux lettres signées des intéressés et adressées à la direction de l'ONE selon lesquelles les intéressés auraient été contraints, par la violence, de retirer leurs candidatures, ce qu'ils auraient fait dans un premier temps, et ce sur quoi ils seraient revenus, en maintenant leurs candidatures par la suite. Le gouvernement se borne à réfuter ces allégations en indiquant que l'enquête qui a été menée à ce sujet a révélé qu'elles étaient dénuées de tout fondement. Le comité ne peut que constater le caractère contradictoire de ces deux versions et, compte tenu de ce que la confédération plaignante n'a pas établi que les deux intéressés aient porté plainte devant les tribunaux pour séquestration et extorsion de retrait de candidatures, le comité estime qu'il ne lui appartient pas de poursuivre plus avant l'examen de cette allégation.

&htab;202.&htab;Sur le troisième grief concernant le silence des pouvoirs publics vis-à-vis des demandes réitérées de la confédération plaignante (télégrammes adressés au ministre de l'Energie et des Mines pour l'informer des pressions qu'auraient subies les candidats, lettres au wali du grand Casablanca et à plusieurs ministres les avertissant du rejet des candidatures par la direction de l'ONE), le comité observe que le gouvernement assure qu'il n'y a pas eu de pressions et prétend que les candidatures ont été rejetées notamment pour non-conformité des signatures des candidats. Sur ce point également le comité insiste pour que le contrôle des élections, y compris le contrôle concernant le dépôt des listes des candidats, soit toujours confié aux autorités judiciaires.

&htab;203.&htab;Enfin, le comité constate que le gouvernement n'a pas fourni d'observations sur le grief concernant l'interprétation par la Cour de cassation de l'article 24 de l'arrêté du ministre du Travail et des Affaires sociales du 26 décembre 1962 relatif au dépôt de recours sur la régularité des élections des délégués du personnel. Le comité observe que cet article 24 prévoit seulement que, "dans les cinq jours qui suivent l'élection, tout électeur a le droit de former un recours sur la régularité et la sincérité des opérations électorales". Le comité relève également que, selon la Cour de cassation, le délai de cinq jours commence à partir de la proclamation des résultats "par le bureau de vote" immédiatement après le dépouillement du scrutin. Or il apparaît que les résultats des élections sont proclamés au siège de l'ONE, longtemps après le scrutin, par le président de la Commission de dépouillement et sanctionnés par une décision du directeur général de l'ONE. L'interprétation de la Cour de cassation rend donc impossible en pratique tout recours des travailleurs et de leurs organisations sur la procédure et le résultat des élections. Cette absence de possibilité de recours constitue, dans le cas d'espèce, de l'avis du comité, une atteinte au droit des travailleurs d'élire librement leurs représentants.

Recommandations du comité

&htab;204.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Au sujet des dispositions des règlements intérieurs de l'Office national de l'électricité qui confèrent le pouvoir discrétionnaire d'enregistrer les listes des candidats à l'autorité des employeurs et qui attribuent le pouvoir de trancher les litiges à la Commission supérieure du personnel, elle-même composée de représentants de la direction et d'agents élus avec l'agrément de la direction, le comité estime que les organes ainsi habilités pour intervenir dans la procédure électorale ne présentent pas tout le degré d'indépendance souhaitable. Le comité veut donc croire que ces dispositions seront modifiées.

b) Le comité insiste auprès du gouvernement pour que le contrôle des élections, y compris le contrôle concernant le dépôt des listes des candidats, soit toujours confié aux autorités judiciaires. c) Au sujet de l'interprétation restrictive donnée par la Cour de cassation de la disposition de l'arrêté du 26 décembre 1962 relatif au dépôt de recours sur la régularité des élections des délégués du personnel, le comité estime qu'une telle interprétation dans le cas d'espèce rend impossible en pratique tout recours des travailleurs et de leurs organisations et entraîne donc une limitation du droit des travailleurs d'élire librement leurs représentants.

Cas no 1253 PLAINTE PRESENTEE PAR L'UNION LOCALE DES SYNDICATS DE CASABLANCA (UNION MAROCAINE DU TRAVAIL) CONTRE LE GOUVERNEMENT DU MAROC

&htab;205.&htab;L'Union locale des syndicats de Casablanca, organisation affiliée à l'Union marocaine du travail, a déposé une plainte en violation des droits syndicaux au Maroc dans une communication du 13 décembre 1983. Le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication du 28 mai 1984.

&htab;206.&htab;Le Maroc n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. Il a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l'organisation plaignante

&htab;207.&htab;Dans sa communication du 13 décembre 1983, l'organisation plaignante allègue plusieurs mesures de discrimination antisyndicale qui seraient imputables au patronat de la ville de Mohammedia, avant-port situé à 30 kilomètres de Casablanca. Des conflits du travail ayant pour origine la remise en question du droit syndical et le non-respect de la législation du travail auraient éclaté dans plusieurs entreprises. Ainsi, d'une part, deux délégués syndicaux, MM. Taïebi Rekkaz et Ammi Aït, auraient été licenciés à l'entreprise Linge-service; un délégué du personnel, M. Mohamed Hamraoui, aurait été mis à pied à l'hôtel Samir. La direction de l'entreprise SOMEPI aurait embauché de nouveaux travailleurs pour briser une grève et elle aurait licencié des grévistes, et la société multinationale Firestone refuserait l'organisation des élections des délégués du personnel. D'autre part, dans les sociétés COSEB et STRAFOR-MAROC, la direction ne respecterait pas le droit du travail, la première embauchant des travailleurs sans carte de travail ni affiliation à la sécurité sociale, à des conditions de salaire inférieures au salaire minimum garanti, la seconde embauchant des travailleurs temporaires alors que les travailleurs permanents n'atteignent pas les 48 heures de travail par semaine, abaissant ainsi les salaires déjà faibles des permanents. En conclusion, l'organisation plaignante met en cause le laxisme des agents de l'autorité marocaine et du délégué à l'emploi de la ville.

B. Réponse du gouvernement

&htab;208.&htab;Le gouvernement, dans sa communication du 28 mai 1984, répond à l'allégation concernant le conflit à la société Fadola Linge-service qu'après des remaniements intervenus dans l'entreprise en mai 1983, un accord signé par les deux parties devant l'inspection du travail a prévu la réintégration des travailleurs sans condition préalable, le versement d'indemnités aux deux délégués syndicaux, le respect par l'employeur des droits acquis des travailleurs et le renvoi du responsable de la production devant le tribunal.

&htab;209.&htab;Pour ce qui concerne le conflit à l'hôtel Samir provoqué par la mise à pied pendant trois jours d'un employé pour refus d'exécution des ordres de son supérieur, ce refus a conduit la direction à recourir au délégué du personnel pour remplacer le travailleur mis à pied. Ce délégué du personnel ayant refusé de remplacer son collègue, il a lui-même été mis à pied pendant huit jours. Selon le gouvernement, il ne s'agit que de l'application d'une mesure disciplinaire à l'encontre de deux travailleurs qui ont délibérément refusé d'exécuter les ordres de leurs supérieurs.

&htab;210.&htab;Pour le conflit qui s'est développé à la société SOMEPI, le gouvernement explique qu'une grève avait été déclenchée le 21 avril 1982 pour protester contre le transfert de deux travailleurs, transfert motivé par des raisons de réorganisation. L'employeur avait réagi par le licenciement collectif de tous les travailleurs. Cependant sur intervention de l'inspection du travail l'employeur est revenu sur sa décision, acceptant de réintégrer tous les travailleurs, sauf les deux personnes qui avaient été transférées. Selon le gouvernement, le sort de ces deux personnes devait faire l'objet de négociations, mais les travailleurs ayant maintenu leur refus de reprendre le travail, l'accord intervenu devant l'inspecteur du travail a donc été le suivant: démission collective des 11 travailleurs de l'entreprise et imposition à l'employeur du versement d'une indemnité forfaitaire à chaque travailleur licencié. L'accord en question est annexé à la réponse du gouvernement.

&htab;211.&htab;Au sujet de la société Firestone où, selon l'organisation plaignante, la direction aurait refusé l'organisation des élections de délégués du personnel, le gouvernement confirme que ladite entreprise a négligé d'organiser les élections devant l'absence de candidatures des travailleurs. Cependant, les travailleurs en question avaient été informés de la date limite des dépôts de candidatures et de la date de la tenue des élections. La copie du procès-verbal rédigé par la direction de l'entreprise sur cette question précise que "les ouvriers ne se sont pas mis d'accord entre eux pour les élections de leurs délégués" et qu'en conséquence la liste d'inscription est restée vide.

&htab;212.&htab;Le gouvernement fournit aussi des éléments de réponse aux questions relatives à des manquements à la législation du travail qui se produiraient à l'usine de conserves COSEB et à l'entreprise STRAFOR-MAROC. A l'usine de conserves, explique le gouvernement, la main-d'oeuvre employée est saisonnière et en majorité féminine. Les travailleuses bénéficient des droits prévus par la législation en matière de salaires, congés payés, sécurité sociale et durée du travail. La non-affiliation de ces travailleurs à la caisse marocaine de retraite ne viole pas la législation du travail en ce sens que l'affiliation à la caisse de retraite n'est pas obligatoire sur le plan juridique. Pour ce qui concerne l'entreprise STRAFOR-MAROC, la durée du travail avait effectivement été réduite de trois heures par semaine pour faire face à une baisse d'activité. Néanmoins, depuis le 1er février 1984, la relance des activités de l'entreprise lui a permis de revenir sur sa décision.

C. Conclusions du comité

&htab;213.&htab;La présente affaire porte sur des mesures discriminatoires qui auraient frappé des travailleurs pour des raisons syndicales ainsi que sur une mise en oeuvre insuffisante de la législation du travail.

&htab;214.&htab;Le comité observe avec regret que des licenciements de travailleurs sont effectivement intervenus dans certaines entreprises à la suite de conflits du travail. Il observe aussi que les élections syndicales n'ont pas eu lieu dans une entreprise faute de candidats.

&htab;215.&htab;Le comité rappelle, d'une manière générale, l'importance qu'il attache à l'exercice de la grève en tant que moyen essentiel dont doivent pouvoir disposer les travailleurs et leurs organisations pour promouvoir et défendre leurs intérêts professionnels. Le comité doit également signaler, comme il l'a fait dans des cas antérieurs concernant le Maroc [voir 214e rapport, cas nos 992 et 1018, paragr. 91, et cas no 1017, paragr. 104], que le recours à une main-d'oeuvre étrangère à l'entreprise pour remplacer les grévistes comporte le risque d'une atteinte au droit de grève qui peut affecter le libre exercice des droits syndicaux.

&htab;216.&htab;Dans les différentes affaires évoquées dans le présent cas, le comité prend note des explications du gouvernement concernant la manière dont les autorités ont contribué à résoudre plusieurs des conflits du travail qui avaient éclaté dans certaines entreprises de la ville de Mohammedia. Il note en particulier que, grâce à l'intervention de l'inspection du travail, des indemnités de licenciement ont été versées à deux délégués syndicaux dans une entreprise et à onze travailleurs licenciés pour fait de grève dans une autre entreprise. Il note aussi que deux travailleurs auraient été mis à pied pour avoir refusé d'accomplir leurs tâches et non pour des raisons syndicales et que, selon le gouvernement, la législation du travail est appliquée dans les entreprises objet de la plainte. Le comité indique sur ce point que sa compétence se limite aux allégations de violation de la liberté syndicale.

&htab;217.&htab;En conséquence, le comité observe que les autorités ont contribué à trouver une solution acceptable pour les deux parties aux conflits qui s'étaient développés à la société Linge-Service et à la société SOMEPI et il estime qu'il n'y a pas lieu de poursuivre l'examen de ces aspects du cas.

&htab;218.&htab;En ce qui concerne la tenue des élections professionnelles à la société multinationale Firestone, le comité rappelle qu'aux termes du Dahir no 1 61-116 du 29 octobre 1962 (29 joumada I 1382), la représentation du personnel dans les entreprises est confiée aux délégués du personnel qui ont pour mission de présenter au chef d'établissement les réclamations individuelles et collectives et de saisir en cas de désaccord l'agent chargé de l'inspection du travail. Tout en notant que, d'après le procès-verbal établi par la société marocaine de pneumatiques Firestone adressé aux autorités, les élections ne se sont pas déroulées car les travailleurs ne se sont pas mis d'accord entre eux pour les élections de leurs délégués, le comité estime devoir insister sur l'importance qu'il attache au principe selon lequel les travailleurs et leurs organisations doivent pouvoir élire leurs représentants dans les entreprises, condition nécessaire au déroulement normal des activités syndicales dans l'entreprise et de la protection des travailleurs.

&htab;219.&htab;En conséquence, le comité exprime l'espoir que des élections professionnelles auront lieu à brève échéance, assurant ainsi l'application des principes contenus dans la recommandation (no 143) concernant les représentants des travailleurs, 1971, et l'application de la législation nationale pertinente.

Recommandations du comité

&htab;220.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administrtion d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Le comité rappelle l'importance qu'il attache à l'exercice de la grève en tant que moyen dont doivent pouvoir disposer les travailleurs et leurs organisations pour promouvoir et défendre les intérêts de leurs membres et que le recours à une main-d'oeuvre étrangère à l'entreprise pour remplacer les grévistes comporte le risque d'une atteinte au droit de grève qui peut affecter le libre exercice des droits syndicaux. b) Le comité observe que les autorités ont contribué à trouver une solution acceptable aux parties dans plusieurs conflits qui s'étaient développés dans des entreprises de la ville de Mohammedia et il estime que, sous réserve des commentaires susmentionnés, il n'y a pas lieu de poursuivre ces questions.

c) Le comité rappelle l'importance de la tenue d'élections professionnelles pour assurer la représentation du personnel dans les entreprises, et il exprime l'espoir que des élections de représentants du personnel auront lieu à brève échéance à la société multinationale Firestone, assurant ainsi l'application des principes contenus dans la recommandation no 143 ainsi que l'application de la législation nationale pertinente.

Cas no 1238 PLAINTE PRESENTEE PAR LA FEDERATION PANHELLENIQUE DES FONCTIONNAIRES DE LA POLICE RURALE (POYA) CONTRE LE GOUVERNEMENT DE LA GRECE

&htab;221.&htab;La plainte de la Fédération panhellénique des fonctionnaires de la police rurale (POYA) est contenue dans une communication du 15 septembre 1983. L'Internationale des services publics a appuyé cette plainte par une lettre du 27 octobre 1983. En outre, la POYA a soumis des informations complémentaires à l'appui de sa plainte, le 26 janvier 1984. Le gouvernement de la Grèce a fait parvenir ses observations dans une communication du 18 juin 1984 et le texte de la décision de la Cour de cassation no 420/1983 relative à cette affaire le 24 août 1984.

&htab;222.&htab;La Grèce a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de la fédération plaignante

&htab;223.&htab;D'après la fédération plaignante, le gouvernement hellénique serait intervenu arbitrairement dans l'administration et le fonctionnement de l'organisation syndicale suprême des fonctionnaires grecs (ADEDY), dont elle est membre. Le gouvernement aurait mené une série d'actions afin d'arriver à la destitution de l'administration légale de l'ADEDY, et à la nomination d'une administration dont les membres seraient proches du parti socialiste au pouvoir, le PASOK, afin de placer le syndicalisme grec sous son contrôle politique.

&htab;224.&htab;La fédération plaignante estime être directement lésée par la destitution des membres légitimement élus des organes d'administration de l'ADEDY, et elle ajoute que sa plainte est appuyée par 11 autres fédérations, unions ou associations du secteur public, à savoir: la Fédération panhellénique du personnel des organismes des personnes morales de droit public et celle du personnel des organismes de politique sociale, l'Union des fonctionnaires diplômés (AT), l'Association des fonctionnaires du ministère des Services sociaux, celle des fonctionnaires du service de comptabilité générale de l'Etat, et du personnel civil de la gendarmerie, l'Union panhellénique des femmes fonctionnaires, celle des surveillants de la santé publique, et des huissiers du secteur public, celle du personnel civil du ministère de la Défense nationale et de l'Etat-major général de l'armée, et celle des fonctionnaires gardes forestiers.

&htab;225. Le Conseil général dirige l'action générale de l'ADEDY et élit un président, deux vice-présidents et deux secrétaires. Le Comité directeur exécute les décisions du congrès et du Conseil général, et désigne en son sein un président, trois vice-présidents, un secrétaire général, un secrétaire général adjoint, un secrétaire syndical et un trésorier.

&htab;226.&htab;La fédération plaignante indique que le vingt-quatrième Congrès panhellénique des fonctionnaires qui s'était tenu du 10 au 13 septembre 1979 avait élu les 85 membres du Conseil général et le Comité directeur. Or, depuis l'arrivée au pouvoir du PASOK, le 18 octobre 1981, le gouvernement grec aurait systématiquement ignoré l'ADEDY chaque fois qu'il était appelé à régler des questions concernant les fonctionnaires. Il aurait de plus exercé une pression sur les fonctionnaires pour qu'ils ne remplissent pas leurs devoirs économiques envers l'ADEDY. Il aurait aussi gêné l'édition et la circulation d'un journal syndical intitulé " Action des fonctionnaires " dans le but d'en obtenir la fermeture et d'empêcher ainsi les fonctionnaires d'être informés par leur propre organe de presse des mesures en cours les concernant et de leurs conséquences. Il aurait même interdit à la radio et à la télévision de présenter les activités de l'ADEDY. Par ailleurs, il aurait remplacé les syndicalistes qui représentaient l'ADEDY au Comité économique et social de la Communauté économique européenne par des personnes de son choix. Il aurait en outre intenté des poursuites contre des syndicalistes, en particulier le président de la fédération plaignante auquel il aurait infligé une amende d'un montant de trois mois de salaire à cause de ses activités syndicales. Le gouvernement aurait aussi incité les directions de certaines organisations syndicales de fonctionnaires favorables au PASOK à renverser les membres élus des organes d'administration de l'ADEDY pour obtenir la majorité. En effet, reconnaît la fédération plaignante, parmi les syndicalistes élus aux organes d'administration au vingt-quatrième Congrès de l'ADEDY en 1979, beaucoup étaient favorables au PASOK. Enfin, il aurait projeté de réduire à trois ans le mandat des organes de direction syndicale sans consulter l'ADEDY.

&htab;227.&htab;Face à ces mesures antisyndicales, le Conseil général de l'ADEDY, utilisant les possibilités contenues à cet effet dans ses statuts, a décidé d'avancer la convocation du vingt-cinquième congrès au 31 août 1982, aux fins d'examiner les problèmes des fonctionnaires, de prendre des décisions et éventuellement d'élire une nouvelle administration. Mais, entre-temps, le projet gouvernemental de loi syndicale a été voté le 1er juillet 1982 (loi no 1264/82), poursuit la fédération plaignante.

&htab;228.&htab;C'est alors, ajoute-t-elle, qu'une organisation syndicale, membre de l'ADEDY et proche du PASOK, a demandé au tribunal de paix d'Athènes, en application de la loi nouvelle, l'annulation de la décision du Conseil général relative à la convocation du vingt-cinquième Congrès de l'ADEDY, et que le tribunal de paix d'Athènes a fait droit à cette demande, empêchant la convocation dudit congrès. Parallèlement à cette action, cinq des 70 organisations membres de l'ADEDY ont introduit un recours devant le tribunal de première instance d'Athènes pour obtenir la nomination d'une administration provisoire de l'ADEDY car, selon elles, aux termes de la nouvelle législation syndicale en vigueur, le mandat de l'administration de l'ADEDY avait expiré. Les cinq personnes proposées comme membres de l'administration provisoire provenaient exclusivement des cinq organisations en question. Cependant, l'administration élue de l'ADEDY a prouvé au tribunal que son mandat n'avait pas encore expiré et qu'en conséquence la nomination d'une administrastion provisoire n'était pas justifiée. Le tribunal de première instance d'Athènes a fait droit aux arguments de défense des membres élus de la direction de l'ADEDY (décision no 7906 du 26 juillet 1982).

&htab;229.&htab;Les cinq organisations syndicales rivales de la fédération plaignante ont alors saisi la Cour d'appel d'Athènes qui les a également déboutées, confirmant le jugement du tribunal de première instance (arrêt no 1037/82) et reconnaissant que le mandat des membres élus n'avait pas expiré et que la nomination d'une administration provisoire n'était pas justifiée, affirme la fédération plaignante. D'ailleurs, la Cour d'appel a estimé que la réduction du mandat des organes d'administration élus avant la mise en vigueur de la loi n'était pas compatible avec la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical ratifiée par la Grèce.

&htab;230.&htab;Les cinq organisations syndicales en question se sont alors pourvues en cassation et, contre toute attente, d'après la fédération plaignante, elles ont gagné leur pourvoi, et la Cour de cassation a procédé à la destitution de l'administration élue de l'ADEDY.

&htab;231.&htab;La fédération plaignante joint à sa plainte les commentaires sur l'arrêt de la Cour de cassation qu'un ancien conseiller à la Cour, M. Christos Katharios, a fait paraître dans la presse. Ce juriste estime que l'article 9, alinéa 1, de la loi no 1264 du 1er juillet 1982 sur la démocratisation du mouvement syndical qui prévoit que "le mandat des organes de direction aura une durée maximale de trois ans" et qui est applicable aux employés civils de l'Etat, en vertu de l'article 30 de la loi nouvelle, ne peut avoir d'effet rétroactif, car l'article 2 du Code civil hellénique prévoit que "la loi dispose pour l'avenir et n'a point d'effet rétroactif". Selon lui, la loi nouvelle n'est pas applicable aux directions syndicales qui ont été élues pour une durée de plus de trois ans. Les dispositions de l'article 26, alinéas 1 et 2, de cette loi, qui ne seraient pas claires, ne semblent pas imposer d'effet rétroactif à l'article 9, alinéa 1. Et même si le législateur avait prévu expressément que la disposition de l'article 9, alinéa 1, était applicable aux associations dont les statuts prévoient que la durée de leur mandat est supérieure à trois ans, une telle disposition irait à l'encontre des dispositions constitutionnelles et de la convention no 87 et devrait être frappée de nullité. Toujours selon ce juriste, la réduction des mandats électifs dont la durée a été fixée par les statuts abolit en effet le droit des organisations de formuler leur programme d'action. En tout état de cause, estime-t-il, dans le présent cas, les personnes nécessaires à l'administration de l'association existaient et étaient présentes et elles se défendaient contre l'intrusion de personnes qui demandaient à entrer dans l'association. Aussi, même si l'on admettait l'interprétation erronée de la Cour de cassation selon laquelle l'article 9, alinéa 2, de la loi a aboli la durée des mandats des organes syndicaux, les membres du conseil qui ont été élus par le congrès auraient-ils dû être préférés à une administration provisoire. En outre, étant donné le caractère d'intérêt général de cette affaire, la Chambre de la Cour de cassation qui en était saisie aurait dû, en application de l'article 563, paragraphe 2, alinéa 6, du Code de procédure civile, la porter devant la Cour de cassation pour qu'elle soit jugée par la Cour toutes chambres réunies. Le commentateur s'insurge également contre le fait qu'aux termes de la décision de la Cour de cassation, du 6 avril 1983, l'administration de l'ADEDY a été confiée à une administration provisoire pour huit mois, jusqu'à l'élection d'une administration définitive.

&htab;232.&htab;Dans une communication ultérieure du 26 janvier 1984, la fédération plaignante indique que le gouvernement a, depuis le dépôt de la plainte, favorisé la convocation d'un congrès de fonctionnaires entre le 1er et le 4 décembre 1983. Selon elle, ce congrès serait illégal puisqu'il aurait été convoqué par une administration illégalement nommée, qu'une pression psychologique et professionnelle aurait été exercée sur des milliers de fonctionnaires pour les décourager de présenter leur candidature, que 40 fédérations auraient été biffées du registre de l'ADEDY, et qu'un nouveau quotient électoral aurait été mis en place pour l'élection des représentants au congrès. Deux cent cinquante-six représentants sur 600 auraient participé à ce congrès de la minorité des fonctionnaires qui n'aurait été qu'un congrès d'enseignants, étant donné que, sur ces 256 représentants, 172 seraient venus de ce milieu. Les fonctionnaires de la plupart des ministères, des instances juridictionnelles, du service des impôts, des douanes, des organismes de la politique sociale, de la police rurale, les gardes forestiers, les surveillants de la santé publique, le personnel du service national de statistiques, de la caisse postale d'épargne, les inspecteurs de l'enseignement et les inspecteurs du ministère de l'Economie n'y auraient pas été représentés, ce qui correspondrait à 58 pour cent des fonctionnaires. En conséquence, d'après la fédération plaignante, l'administration de l'ADEDY élue par ce congrès serait illégale, et les organisations syndicales non représentées auraient créées un "comité de coordination des organisations syndicales de la fonction publique" pour défendre les droits syndicaux des fonctionnaires.

B. Réponse du gouvernement

&htab;233.&htab;Le gouvernement rejette plusieurs des allégations de la fédération plaignante qu'il estime vagues. Ainsi, selon lui, elle n'a pas indiqué les mesures qu'il aurait prises, même indirectes, et qui auraient constitué une contrainte quelconque contre les fonctionnaires publics pour qu'ils ne remplissent pas leur devoir économique envers l'ADEDY. De même, elle n'a pas indiqué non plus la nature des prétendues entraves qui auraient été mises à l'édition et à la circulation du journal de l'ADEDY. Au contraire, précise le gouvernement, ce journal est demeuré en circulation jusqu'à ce que l'administration précédente de l'ADEDY cède la place à l'administration provisoire. De même encore, elle n'a pas mentionné de faits concrets qui permettraient d'inférer que le gouvernement aurait interdit à la radio et à la télévision de présenter les activités de l'ADEDY. En ce qui concerne la représentation de la Grèce au sein du Comité économique et social de la Communauté économique européenne, le gouvernement affirme que l'allégation de la fédération plaignante, selon laquelle des syndicalistes dont les noms figuraient sur la liste auraient été arbitrairement remplacés par d'autres, est totalement dépouvue de fondement.

&htab;234.&htab;A propos des allégations de poursuites entamées contre un fonctionnaire public et de l'imposition d'une peine d'amende à son encontre, le gouvernement déclare que M. Constantin Zanias est un fonctionnaire de la Direction de la police rurale du ministère de l'Ordre public, et qu'au terme d'une enquête administrative il a été convaincu d'avoir, en dehors du service, eu un comportement indigne d'un fonctionnaire. Il a donc été condamné en application des articles 206.1 b), f) et m), et 207 du décret présidentiel no 611 de 1977, portant statut de la fonction publique. Par la suite, une peine disciplinaire d'amende de trois mois de salaire lui a été infligée à l'unanimité par une instance disciplinaire supérieure pour des motifs disciplinaires et non syndicaux.

&htab;235.&htab;Quant à l'élaboration du projet de loi syndicale, le gouvernement indique avoir respecté les promesses inscrites à cet égard dans son programme d'activité, et il affirme avoir invité toutes les organisations syndicales à formuler et à faire connaître leur avis, sans évidemment en exclure l'ADEDY, comme le prétend la fédération plaignante.

&htab;236.&htab;Au sujet du conflit interne qui s'est développé au sein même de l'ADEDY, le gouvernement prétend ne pas y avoir pris part puisque, d'après lui, ce genre de conflit est de la compétence des tribunaux grecs qui se sont prononcés à divers stades. La Cour de cassation a rendu son arrêt dans cette affaire par la décision no 420 du 6 avril 1983. Elle a prononcé la déchéance de l'administration de l'ADEDY en application des dispositions de la loi no 1264 de 1982, et a nommé une nouvelle administration provisoire par voie judiciaire. Le gouvernement s'étonne que la fédération plaignante puisse ainsi attaquer une décision de la Cour de cassation, émanation d'une justice indépendante, objective et impartiale, durant la période actuelle.

&htab;237.&htab;Le gouvernement envoie en réponse aux critiques formulées par le conseiller à la retraite près la Cour de cassation, M. Katharios, la réplique du conseiller rapporteur dans cet arrêt, M. Theodoropoulos, publiée le 20 mai 1983 à Athènes. L'intéressé précise en substance que l'arrêt en question a été rendu à l'unanimité par le président, le conseiller, l'avocat général et la Cour de cassation qui, tous, ont suivi la position qu'il soutenait dans son rapport. La décision de la Cour de cassation s'est fondée, indique-t-il, sur les attendus suivants:

&htab;Attendu que les dispositions des articles 9.1 b) et 26.1 a) et 2 de la loi no 1264 de 1982, entrée en vigueur depuis le ler juillet 1982, et dont l'article 32.1 a porté abrogation de la loi no 330 de 1976 disposent:

&htab;"le mandat des organes de direction aura une durée de trois ans" (art. 9.1 b), "l'assemblée des membres de toute organisation syndicale peut opter pour l'introduction immédiate de la procédure d'élection prévue dans cette loi" (art. 26.1 a) et:

&htab;"si l'assemblée se prononce négativement, le mandat des organes est prolongé normalement, sous réserve des dispositions de l'article 9.1 b)" (art. 26.2).

&htab;Attendu en outre que le projet de loi susvisé, et plus spécifiquement son article 26.2, disposait:

&htab;"Si l'assemblée se prononce négativement, le mandat des organes est prolongé normalement, conformément aux statuts".

C'est-à-dire, précise le rapporteur, qu'au terme du projet gouvernemental il était envisagé que les organes de direction soient maintenus dans leurs fonctions mais que, comme il ressort du procès-verbal des débats au Parlement grec, p. 4660, session PID du 14 juin 1982, sur la discussion de l'article 26, les termes "conformément aux statuts" ont été rayés, tenant compte du fait que l'article 9.1 b) fixe à ce propos une limite. En conséquence, à compter de l'entrée en vigueur de la loi, au 1er juillet 1982, la durée du mandat des organes de direction des organisations syndicales ne peut excéder trois ans.

&htab;238.&htab;Il en est résulté, poursuit le rapporteur, la destitution automatique de ces organes et une situation où les personnes nécessaires à l'administration de la personne juridique (le syndicat) ont fait défaut au sens de l'article 69 du Code civil. Dans ces conditions et en application de cet article 69, il était nécessaire de procéder à la nomination d'une administration provisoire.

&htab;239.&htab;Le rapporteur explique également que ce point de vue est confirmé par les procès-verbaux du débat sur la discussion de l'article 20 de la loi abrogée no 330 de 1976, qui disposait déjà:

&htab;"La durée du mandat des membres du comité directeur des associations professionnelles est fixée par les statuts mais ne peut excéder quatre ans.

&htab;Il est interdit à un membre du comité directeur d'une association professionnelle d'exercer ses fonctions après l'expiration de son mandat, tout acte qu'il accomplirait après la date considérée sera nul et de nul effet."

Au cours du débat sur l'article 20, le ministre avait déclaré qu'en tout état de cause il estimait que le délai de quatre ans constituait une échéance maximale et que, pour ce qui concerne le paragraphe 2, il n'y aurait pas d'administration défaillante puisque l'article 69 du Code civil serait applicable, précise le rapporteur.

&htab;240.&htab;Le rapporteur indique encore que les dispositions sur la limite des mandats ne sont pas contraires aux articles 12, 4 et 23.1 de la Constitution, puisque ce sont ces dispositions constitutionnelles qui, justement, confèrent au législateur le droit de déterminer le cadre et les conditions dans lesquels s'exerce sans entrave la liberté syndicale. Elles ne sont pas non plus contraires à la convention no 87 ratifiée par le décret-loi no 4204 de 1961. Par conséquent, la Cour de cassation a estimé à bon droit que la Cour d'appel, en refusant la demande des organisations qui avaient intenté l'action en nullité, avait transgressé les dispositions de la loi. Le rapporteur réplique également, au sujet de l'effet rétroactif de la loi, qu'elle ne produit ses effets qu'à partir du jour où elle est entrée en vigueur, à savoir à partir du 1er juillet 1982.

&htab;241.&htab;Quant à l'article 69 du Code civil concernant l'absence de personnes exerçant l'administration, le rapporteur indique qu'il dispose:

&htab;"Si les personnes nécessaires à l'administration de la personne juridique font défaut, ou si leurs intérêts sont en conflit avec ceux de la personne juridique, le Président du tribunal civil nomme une administration provisoire à la requête de celui qui a un intérêt légitime."

Il ajoute que la doctrine et la jurisprudence ont toujours estimé qu'une administration est réputée défaillante toutes les fois qu'elle fait vraiment défaut, pour quelque raison que ce soit, y compris en cas de destitution, et il cite plusieurs arrêts allant dans ce sens. Il précise également que l'ADEDY n'avait proposé personne pour l'administration provisoire comme le prétend la fédération plaignante, mais qu'au contraire elle s'était retirée de la cause le matin même de l'audience, chose unique dans les annales de la Cour de cassation.

&htab;242.&htab;Au sujet du renvoi aux chambres réunies, le rapporteur indique que l'article 563, paragraphe 2 b), du Code de procédure civile, dispose:

&htab;"La Chambre qui statue est tenue de renvoyer le jugement de l'affaire aux chambres réunies (de la Cour de cassation) dans le cas où elle récuse l'application de la loi comme étant inconstitutionnelle".

Or, dans la présente affaire, indique le rapporteur, la Chambre qui statuait a considéré que la loi était conforme à la Constitution et qu'elle n'était pas contraire à la convention no 87. Il n'y avait donc pas de base légale pour un renvoi aux chambres réunies. Quant à la notion d'intérêt général qui aurait été en cause et pour laquelle le renvoi aurait "pu" se faire à titre facultatif, selon le rapporteur un tel renvoi aurait constitué un déni de justice pour les requérants puisque les chambres réunis n'auraient pas pu rendre leur arrêt avant le 12 septembre 1983 (date de l'échéance du mandat quadriennal statutaire de l'administration de l'ADEDY) et qu'alors leur recours serait devenu sans objet.

&htab;243.&htab;C'est donc à bon droit également que la Cour de cassation a statué sur la désignation d'une administration de la personne morale, affirme le rapporteur.

&htab;244.&htab;Au sujet de la seconde communication de la fédération plaignante, le gouvernement déclare que les allusions à de prétendues interventions du gouvernement dans la convocation du Congrès de l'ADEDY en décembre 1983 sont dénuées de fondement et inadmissibles. L'administration provisoire de l'ADEDY avait pour but de régler les questions de son fonctionnement conformément à la loi, et le gouvernement n'avait aucune raison d'intervenir, déclare-t-il.

&htab;245.&htab;L'allégation selon laquelle l'administration de l'ADEDY serait l'élue d'un congrès de minorités est sans fondement non plus puisque l'ADEDY regroupe 33 fédérations comptant 150.000 membres et que trois autres fédérations ont demandé leur affiliation à cette organisation. Le congrès, affirme le gouvernement, réunissait 28 fédérations, à savoir celles qui ont appliqué les procédures de représentation proportionnelle prévues par la loi no 1261 de 1982 et, sur les 150.000 membres enregistrés, 115.000 ont voté et élu 256 représentants, alors qu'au congrès précédent de l'ADEDY auquel se réfère la fédération plaignante, 50.000 fonctionnaires seulement avaient voté. Le congrès de décembre 1983 était donc manifestement deux fois plus représentatif que le congrès de 1979 puisqu'il comptait deux fois plus d'électeurs et que toutes les tendances étaient présentes, conclut le gouvernement.

C. Conclusions du comité

&htab;246.&htab;Cette affaire comporte deux aspects: un conflit interne qui s'est développé au sein de l'Union administrative suprême des fonctionnaires publics, organisation du troisième degré, regroupant au plan national différentes unions de fonctionnaires publics ci-après dénommée l'ADEDY et la répression dont aurait été l'objet le président de la Fédération panhellénique des fonctionnaires de la police rurale, organisation de deuxième degré affiliée à l'ADEDY, qui porte plainte dans le présent cas.

&htab;247.&htab;En ce qui concerne le conflit interne survenu au sein de l'ADEDY qui a conduit à la destitution de l'administration de cette organisation et à la nomination d'une administration provisoire prononcée par la voie judiciaire de la Cour de cassation en avril 1983, d'une part, et le Congrès des unions des fonctionnaires qui s'est tenu en décembre 1983 pour désigner la nouvelle administration, d'autre part, le comité a pris note des explications détaillées fournies tant par la fédération plaignante que par le gouvernement.

&htab;248.&htab;Le comité a déjà eu à connaître d'un conflit interne au sein de l'organisation syndicale suprême des travailleurs grecs, la Confédération générale du travail de Grèce, à sa réunion de novembre 1983 [230e rapport, cas no 1193, paragr. 284 à 323.] où il a rappelé, comme il l'avait fait à maintes reprises précédemment, qu'en matière de contestations d'élections syndicales les autorités publiques doivent s'abstenir de toute intervention qui pourrait limiter le droit des organisations d'élire librement leurs représentants et d'organiser leur gestion, et qu'il importe pour garantir l'impartialité et l'objectivité de la procédure que le contrôle des élections syndicales soit le fait des autorités judiciaires compétentes. [Voir notamment 73e rapport, cas no 348, paragr. 114 (Honduras), et 230e rapport, cas no 1193, paragr. 318 (Grèce).]

&htab;249.&htab;Dans le présent cas, le comité observe que la destitution des dirigeants de l'ADEDY a été prononcée à la demande de certains d'entre eux par la Cour de cassation hellénique, en application d'une législation nouvellement adoptée sur la démocratisation du mouvement syndical et sur la protection des libertés syndicales des travailleurs (loi no 1264 du 1er juillet 1982). Cette législation a réduit à trois ans la durée du mandat des organes de direction syndicale (art. 9) et a conféré aux syndicats le droit d'opter pour l'introduction immédiate de la procédure d'élections prévue par la loi (art. 26).

&htab;250.&htab;Quant à la nomination d'une administration provisoire, le comité observe qu'elle a également été prononcée par décision judiciaire en application cette fois de l'article 69 du Code civil hellénique (loi no 2250 du 15 mars 1940, dans sa teneur modifiée). Le comité a d'ailleurs pris connaissance de la décision de la Cour de cassation sur l'ensemble de cette affaire.

&htab;251.&htab;La question qui se pose est celle de savoir si la réduction du mandat des organes de direction à trois ans prononcée par voie législative porte atteinte au droit des organisations d'élire librement leurs représentants garanti par l'article 3 de la convention. Sur ce point, le comité note que la loi no 330 de 1976 sur les associations et les unions professionnelles et sur la protection de la liberté syndicale abrogée par la loi nouvelle contenait déjà une disposition semblable, quoique de moindre portée, sur la durée des mandats puisqu'elle les limitait à quatre ans (art. 20). Or cette disposition de la loi no 330 n'avait fait l'objet ni de contestation des organisations syndicales helléniques ni de commentaires des organes de contrôle du BIT. En outre, la législation de plusieurs pays, qui fixe une durée maximale aux mandats des organes directeurs afin, semble-t-il, d'obliger les dirigeants à retourner régulièrement devant les électeurs et de permettre ainsi que la volonté des membres soit respectée, n'a pas non plus été critiquée par les organes de contrôle.

&htab;252.&htab;Le comité relève que la loi no 1264 de juillet 1982 a réduit d'un an la durée maximale des mandats et a permis que la disposition nouvelle soit immédiatement applicable aux mandats en cours, faisant ainsi grief à une partie de la direction syndicale de l'ADEDY élue sous l'empire de la loi no 330 de mai 1976 et faisant droit à la demande d'une autre partie de cette même direction syndicale. Le comité estime que, d'une manière générale, les lois réglementant la fréquence des élections et fixant une durée maximale aux mandats des organes directeurs ne mettent pas en cause les principes de la liberté syndicale. Néanmoins, dans le présent cas, comme le prévoyait le projet d'article 26.2) cité par le rapporteur de la Cour de cassation, la législation aurait pu garantir que les organes de direction soient maintenus dans leurs fonctions "conformément aux statuts" des organisations. Toutefois, la Cour n'ayant fait qu'appliquer la loi telle qu'elle a été votée, le comité, tout en regrettant l'intervention du législateur, estime qu'il n'est pas nécessaire de poursuivre cet aspect du présent cas.

&htab;253.&htab;En ce qui concerne l'allégation selon laquelle la nouvelle administration de l'ADEDY serait l'élue d'un congrès syndical de minorité, le comité observe que la fédération plaignante prétend que le congrès de décembre 1983 n'aurait été qu'un congrès d'enseignants, puisque, sur 256 représentants, 172 seraient venus de ce milieu, et que les fonctionnaires de nombreuses administrations n'y auraient pas été représentés. En revanche, le gouvernement soutient que le congrès de décembre 1983 aurait été deux fois plus représentatif que le congrès de septembre 1979 puisqu'il compterait deux fois plus d'électeurs, et que toutes les tendances y auraient été représentées. Il explique que, sur 150.000 fonctionnaires, 115.000 regroupés dans 28 fédérations ont voté, alors qu'au congrès précédent auquel se réfère la Fédération de la police rurale plaignante, 50.000 fonctionnaires seulement avaient voté. De plus, depuis le congrès, l'ADEDY compte en tout 33 fédérations et trois autres fédérations ont engagé le processus d'affiliation, conclut le gouvernement.

&htab;254.&htab;Pour sa part, le comité a pris connaissance de la législation qui a introduit le système de représentation proportionnelle en matière d'élections des organes administratifs d'une organisation syndicale (art. 9 et 12 de la loi no 1264) et des dispositions relatives à la représentation des fonctionnaires (art. 30, alinéa 3). Il note que les organes administratifs d'une organisation syndicale sont élus selon le système de la représentation proportionnelle simple, avec répartition résiduelle au plus fort reste (art. 12), et que le nombre de représentants à chaque organisation syndicale du deuxième ou du troisième degré est fixé sur la base du même critère pour toutes les organisations affiliées à l'organisation du deuxième ou du troisième degré considérée. Il note également que la loi précise, en ce qui concerne les fonctionnaires, que chaque organisation du premier degré ne peut désormais s'affilier qu'à une seule organisation du deuxième degré, et que les organisations syndicales du premier degré qui sont affiliées à plus d'une organisation du deuxième degré doivent décider lors de leur assemblée générale à quelle organisation du deuxième degré ou fédération elles veulent demeurer affiliées (art. 30, alinéa 3).

&htab;255.&htab;Le comité estime que le système électoral de représentation proportionnelle ainsi que l'obligation faite aux organisations du premier degré de choisir l'organisation du deuxième degré à laquelle elles veulent demeurer affiliées ne mettent pas en cause les principes de la liberté syndicale. Néanmoins, étant donné que, selon la Fédération de la police rurale plaignante, certaines fédérations de fonctionnaires ne seraient pas représentées au sein de l'ADEDY, le comité veut croire que les fédérations non encore représentées au sein de l'ADEDY pourront engager le processus d'affiliation en appliquant les procédures de représentation proportionnelle et de non double affiliation prévue par la loi et qu'elles pourront de ce fait participer au prorata de leurs résultats électoraux à l'administration suprême des unions de fonctionnaires.

&htab;256.&htab;En ce qui concerne la répression dont aurait été l'objet le président de la Fédération panhellénique des fonctionnaires de la police rurale, le comité note que, selon le gouvernement, l'intéressé qui est un fonctionnaire de la Direction de la police rurale a été convaincu d'avoir hors service eu un comportement indigne d'un fonctionnaire et qu'il a été condamné en première instance puis à l'unanimité par l'instance disciplinaire supérieure à une peine d'amende.

&htab;257.&htab;Le comité, tout en notant que la fédération plaignante n'a pas indiqué la nature des activités syndicales qui auraient conduit son président à une sanction disciplinaire, regrette que le gouvernement se soit contenté d'indiquer que l'intéressé a eu hors service un comportement indigne d'un fonctionnaire, sans préciser les faits concrets qui lui sont reprochés. Dans ces conditions, le comité ne peut que rappeler l'importance qu'il attache à la protection des dirigeants syndicaux dans l'exercice de leurs activités syndicales légitimes.

Recommandations du comité

&htab;258.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) En ce qui concerne la destitution de l'Administration suprême des fonctionnaires publics (ADEDY) et la nomination d'une administration provisoire prononcées par la Cour de cassation en avril 1983, en application de la loi syndicale no 1264 de juillet 1982 (ayant réduit à trois ans la durée maximale des mandats des organes de directions syndicales qui était de quatre ans aux termes de la loi antérieure), le comité, tout en regrettant que la loi nouvelle ait été rendue applicable immédiatement et non à l'expiration du mandat en cours, comme le prévoyait le projet de loi, estime néanmoins que la réglementation de la fréquence des élections afin d'obliger les dirigeants à retourner régulièrement devant les électeurs ne met pas en cause les principes de la liberté syndicale. En conséquence, le comité estime qu'il n'est pas nécessaire de poursuivre cet aspect du cas.

b) En ce qui concerne le congrès de l'ADEDY tenu en décembre 1983 dont la représentativité est contestée par la fédération plaignante, le comité prend note des données statistiques fournies par le gouvernement d'où il ressort que 115.000 fonctionnaires sur 150.000 enregistrés auraient voté. Le comité veut croire néanmoins que les fédérations non encore représentées au sein de l'ADEDY pourront engager le processus d'affiliation en respectant les procédures de représentation proportionnelle et de non double affiliation prévues par la loi et qu'elles pourront de ce fait participer au prorata de leurs résultats électoraux à l'administration suprême des unions de fonctionnaires.

c) En ce qui concerne la répression dont aurait été l'objet le président de la fédération plaignante, le comité observe que, selon le gouvernement, l'intéressé a été condamné pour conduite indigne d'un fonctionnaire. Le comité regrette que le gouvernement n'ait pas précisé les faits concrets qui lui ont été reprochés et que la fédération plaignante n'ait pas indiqué la nature des activités syndicales qui l'aurait conduit à être sanctionné. Dans ces conditions, le comité ne peut que rappeler l'importance qu'il attache à la protection des dirigeants syndicaux dans l'exercice de leurs activités syndicales légitimes.

Cas no 1263 PLAINTES PRESENTEES PAR LE CONSEIL GENERAL DES SYNDICATS DU JAPON, L'INTERNATIONALE DES SERVICES PUBLICS ET LA CONFEDERATION MONDIALE DES ORGANISATIONS DE LA PROFESSION ENSEIGNANTE CONTRE LE GOUVERNEMENT DU JAPON

&htab;259.&htab;Dans une communication du 21 mars 1984, le Conseil général des syndicats du Japon (SOHYO), au nom du Congrès des syndicats de fonctionnaires (KOMUIN-KYOTOH), a présenté une plainte contre le gouvernement du Japon. Le même jour, le Secrétariat professionnel international de l'enseignement s'est associé à cette plainte. Dans une communication également du 21 mars 1984, l'Internationale des services publics (ISP), au nom de son affilié japonais, JICHIRO, a aussi présenté une plainte, de même que la Confédération mondiale des organisations de la profession enseignante (CMOPE), dans une lettre du 28 mars 1984.

&htab;260.&htab;Le Japon a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949; il n'a pas ratifié la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.

A. Allégations des plaignants

&htab;261.&htab;Les plaignants, dans leurs diverses lettres, allèguent que le gouvernement a violé les principes de la liberté syndicale en décidant d'appliquer en partie seulement la recommandation relative à l'augmentation des traitements en 1983 faite par le Service national du personnel (SNP), organisme indépendant qui a été institué en vertu de la loi sur les administrations nationales afin de formuler des recommandations concernant les salaires, en compensation de la non-reconnaissance du droit de négociation collective et du droit de grève aux agents de la fonction publique au Japon. [L'un des plaignants souligne qu'en vertu des articles IV et V de cette loi, les membres du SNP doivent jouir de la plus haute considération morale, être notoirement favorables au système démocratique de gouvernement et à une administration efficace.] Plusieurs plaignants font observer que la recommandation du SNP concernant les hausses de traitement pour 1982 n'a pas été appliquée entièrement, ce qui a fait l'objet d'une plainte antérieure contre le gouvernement du Japon. [Voir 222e rapport, cas no 1165, paragr. 153-169, approuvé par le Conseil d'administration à sa 222e session, en mars 1983.]

&htab;262.&htab;Les plaignants font l'historique de la situation comme suit: en avril 1983, ils ont présenté au SNP des demandes d'augmentation des traitements à appliquer à compter du 1er avril 1983; la réponse du gouvernement, datée du 25 avril 1983, dont une copie est fournie, indique que "le gouvernement fera tout son possible de bonne foi pour appliquer la recommandation de 1983, malgré la situation financière difficile"; le 5 mai 1983, le SNP a recommandé d'augmenter les traitements et salaires du personnel des administrations publiques nationales de 6,47 pour cent en moyenne, par personne et par mois, avec effet rétroactif au 1er avril 1983; certains des plaignants n'ont pas jugé cette augmentation satisfaisante, en particulier du fait que la recommandation de 1982 n'avait pas été appliquée, mais ils ont demandé instamment au gouvernement de l'appliquer rapidement et intégralement; le 21 octobre, le gouvernement a décidé d'accorder une augmentation de 2 pour cent en moyenne, et il a simplement notifié cette décision aux syndicats intéressés, sans aucune négociation ou consultation. Les plaignants ont transmis une copie d'une déclaration publiée le 20 octobre 1983 par le président du SNP dans laquelle il déplore vivement cette décision, car elle ne tient pas compte du fait que le système du SNP compense la restriction imposée aux droits syndicaux des agents publics. A cet égard, la CMOPE souligne que, outre les restrictions susmentionnées aux droits syndicaux des agents de la fonction publique, la législation pertinente ne renferme aucune disposition concernant les négociations entre les syndicats de la fonction publique et l'employeur public ou le recours à un organe indépendant contre une recommandation du SNP ou contre la façon dont le gouvernement donne suite à une recommandation; elle souligne que toute mesure prise par le syndicat pour manifester son mécontentement est condamnée, malgré les dispositions constitutionnelles garantissant le droit de négocier et d'agir collectivement. Elle conclut que les dispositions contenues dans les conventions nos 98 et 151 ne sont nullement garanties. En vertu de la législation en vigueur, le gouvernement a présenté un projet de loi proposant une augmentation de traitement de 2 pour cent en moyenne - malgré l'opposition des syndicats de la fonction publique et des partis politiques d'opposition -, qui a été adopté unilatéralement sans véritable délibération.

&htab;263.&htab;Selon les plaignants, cette application partielle de la recommandation du SNP pour 1983 n'est pas acceptable pour les motifs suivants: i) les fonctionnaires dont les salaires réels avaient déjà sensiblement diminué du fait de la non-application de la recommandation du SNP pour 1982 ont subi à nouveau une perte de revenu effectif par suite d'une décision unilatérale; ii) il existe une discrimination flagrante dans la façon dont le gouvernement traite les fonctionnaires par rapport aux travailleurs du secteur privé et aux travailleurs des sociétés publiques et des entreprises nationales dont les salaires sont fixés par la négociation collective; iii) la décision du gouvernement est un déni de ses affirmations antérieures faites dans le cadre des plaintes contre la non-application de la recommandation du SNP pour 1982 lorsqu'il a déclaré que la non-application "a été une mesure de caractère exceptionnel adoptée dans une situation économique nationale critique sans précédent, et que le gouvernement a l'intention de faire tout ce qui est en son pouvoir pour empêcher la répétition d'une situation semblable à l'avenir". [Voir 222e rapport, paragr. 167.]

&htab;264.&htab;En conclusion, les plaignants demandent que les recommandations du SNP soient appliquées intégralement pour corriger l'injustice imposée actuellement aux agents publics, que le gouvernement respecte les recommandations du BIT concernant les garanties adéquates qui doivent exister toutes les fois que des droits fondamentaux sont déniés ou sujets à des restrictions afin de sauvegarder pleinement les intérêts des travailleurs, et que le gouvernement prenne des mesures appropriées pour permettre aux organisations de fonctionnaires de participer à la prise des décisions, car des décisions unilatérales prises par le gouvernement concernant les salaires et d'autres conditions d'emploi ne sont pas de nature à favoriser l'harmonie dans les relations professionnelles.

B. Réponse du gouvernement

&htab;265.&htab;Dans sa communication du 10 octobre 1984, le gouvernement déclare qu'il maintient fermement sa politique fondamentale de respect des recommandations du SNP - il considère que le SNP constitue une mesure de compensation intégrale contrebalançant les restrictions aux droits syndicaux des agents publics - et qu'il a fait jusqu'ici tout son possible pour appliquer ces recommandations malgré les difficultés financières. Le gouvernement souligne qu'il a exposé clairement sa position aux représentants des organisations de travailleurs intéressées le 4 avril 1984 et, en ce qui concerne la recommandation du SNP pour 1984, il examine actuellement les moyens de lui donner suite du point de vue de cette politique fondamentale.

&htab;266.&htab;Selon le gouvernement, les ministres et les représentants du gouvernement concernés ont eu de nombreux entretiens avec les organisations de travailleurs intéressées pour leur expliquer la situation financière d'une gravité sans précédent dans laquelle se trouve le pays et pour entendre leur point de vue. En particulier, la veille du jour où a été prise la décision du Conseil du Cabinet, les ministres et les représentants du gouvernement concernés ont eu un nouvel entretien avec les représentants des organisations de travailleurs intéressées pour leur demander de comprendre les circonstances qui ont rendu difficile l'application intégrale de la recommandation du SNP pour 1983. Le gouvernement a convoqué une conférence des ministres du Cabinet s'occupant des salaires à cinq reprises - les 5 et 26 août, le 9 septembre et les 7 et 20 octobre 1983. Après avoir examiné attentivement les moyens de donner suite à la recommandation, en tenant compte de l'ensemble de ses incidences politiques, économiques et sociales, le gouvernement a finalement décidé le 21 octobre 1983 d'augmenter la rémunération du personnel des administrations publiques nationales de 2 pour cent en moyenne, avec effet rétroactif au 1er avril 1983. Il a décidé en outre que, bien qu'aucun crédit n'ait été alloué pour mettre en oeuvre cette révision des traitements à ce moment-là, de nouveaux efforts seraient déployés pour obtenir des fonds de diverses sources, par exemple en économisant sur les crédits qui avaient déjà été réduits et en diminuant davantage le nombre d'agents des administrations publiques nationales; le gouvernement souligne toutefois qu'en pratique il n'y a pas eu de licenciement d'agents de ces administrations.

&htab;267.&htab;Le gouvernement fournit des statistiques détaillées attestant la gravité de la situation financière du Japon en 1983, notamment l'existence de problèmes comme la dépendance massive à l'égard d'obligations en couverture de déficit et l'insuffisance des rentrées fiscales. Le gouvernement souligne que, dans cette situation économique, les prix à la consommation ont été très stables au Japon, les taux annuels d'augmentation par rapport à la période correspondante de l'année précédente étant de 2,4 pour cent pour 1982 et de 1,9 pour cent pour 1983. Il explique qu'un système de majoration périodique annuelle des traitements s'applique aux agents des administrations publiques nationales (à l'exception d'un petit nombre d'entre eux, par exemple ceux qui ont fait l'objet d'une sanction disciplinaire et ceux qui ont été absents du travail pour cause de maladie); ce système, bien qu'il soit différent par nature d'une révision des échelles de traitement, a un effet similaire et la majoration périodique de 1983 a atteint en moyenne approximativement 2 pour cent. Le gouvernement est convaincu que, si l'on tient compte des augmentations annuelles régulières - le taux de majoration des traitements pour l'exercice fiscal 1983 étant presque égal à la hausse de l'indice des prix à la consommation -, les conditions de vie des fonctionnaires sont dûment prises en considération.

C. Conclusions du comité

&htab;268.&htab;Le comité note que ce cas a trait à une allégation relative au défaut d'application intégrale, par le gouvernement, de la recommandation du Service national du personnel visant à augmenter de 6,47 pour cent les traitements des fonctionnaires des administrations publiques nationales du secteur "non opérationnel" à partir du 1er avril 1983. Le gouvernement, après avoir examiné la recommandation, a décidé le 21 octobre 1983 d'augmenter les traitements de ces fonctionnaires de 2 pour cent en moyenne, avec effet rétroactif au 1er avril 1983.

&htab;269.&htab;Selon les plaignants, le fait que le gouvernement n'ait à nouveau pas intégralement et rapidement appliqué la recommandation du SNP en 1983 constitue une violation des principes de la liberté syndicale et, en particulier, des garanties qui devraient être accordées lorsque le droit de grève et le droit de négociation collective ne sont pas reconnus au personnel de la fonction publique ou des services essentiels. Le gouvernement, pour sa part, explique dans sa réponse que la décision finale a été la conséquence d'une situation économique nationale d'une gravité sans précédent, que des ministres et des représentants du gouvernement ont expliqué la situation aux organisations de travailleurs intéressées, à de nombreuses occasions, et que, bien qu'aucun crédit n'ait encore été alloué pour appliquer l'augmentation de 2 pour cent accordée aux fonctionnaires, l'effectif des fonctionnaires des administrations publiques nationales n'a pas été réduit. Le gouvernement fait valoir que, compte tenu des prix à la consommation au Japon et du système d'augmentations annuelles régulières, on peut constater que les conditions de vie des travailleurs ont été dûment prises en considération.

&htab;270.&htab;Le comité rappelle que, lorsqu'il a examiné la plainte (mentionnée par les plaignants dans le présent cas) concernant le défaut d'application de la recommandation du SNP pour 1982 [cas no 1165, 222e rapport du comité, parag. 153 à 169], il a souligné que, lorsque des droits aussi fondamentaux que le droit de négociation collective ou le droit de grève dans les services essentiels ou dans la fonction publique font l'objet d'interdictions ou de restrictions - comme c'est le cas dans cette affaire -, des garanties appropriées, telles que des procédures de conciliation et d'arbitrage, impartiales et expéditives, aux diverses étapes desquelles les intéressés doivent pouvoir participer et dans lesquelles les sentences rendues doivent être appliquées entièrement et rapidement doivent être accordées pour protéger pleinement les intérêts des travailleurs ainsi privés d'un moyen essentiel de défendre leurs intérêts professionnels.

&htab;271.&htab;Au sujet de la catégorie des fonctionnaires concernés par les recommandations du Service national du personnel, le comité relève de nouveau, comme il l'a fait dans le cas no 1165, qu'outre le fait qu'ils sont privés du droit de grève ils n'ont aucun droit de participer à un mécanisme de négociation quel qu'il soit pour la fixation de leurs conditions d'emploi, y compris de leurs traitements. Les seules mesures compensatoires sembleraient être l'existence du service précité et les avantages dont cette catégorie de personnel bénéficie par suite de la mise en oeuvre des recommandations dudit service concernant des augmentations de traitements. Le degré d'adéquation de ces mesures compensatoires dépend en conséquence de l'application rapide et sans restriction des augmentations de traitements recommandées par le Service national du personnel, principe qui a été reconnu par la Cour suprême du Japon elle-même. Il semble au comité que dans le passé les recommandations du Service national du personnel et leur mise en oeuvre par le gouvernement ont fourni aux travailleurs concernés une compensation pour les restrictions de leurs droits syndicaux.

&htab;272.&htab;Dans le cas no 1165, le comité avait pris note des assurances données par le gouvernement selon lesquelles il maintenait fermement sa politique fondamentale de respect des recommandations du SNP, le défaut d'application de ces recommandations en 1982 n'ayant été qu'une mesure de caractère exceptionnel adoptée dans une situation économique nationale critique sans précédent. Le gouvernement avait l'intention de faire tout ce qui était en son pouvoir pour empêcher la répétition d'une situation semblable à l'avenir. Le comité, par conséquent, tout en regrettant que les recommandations du Service national du personnel n'aient pas été mises en oeuvre en 1982, avait exprimé le ferme espoir qu'à l'avenir les recommandations du SNP seraient rapidement et complètement mises en oeuvre, afin d'assurer aux fonctionnaires concernés une certaine compensation pour les restrictions de leurs droits syndicaux en matière de négociation collective et de droit de grève.

&htab;273.&htab;Le comité fait observer, en outre, que la question de la mise en oeuvre partielle de la recommandation du SNP pour 1983 a été portée à l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, laquelle, dans une observation adressée au gouvernement en 1984, a souligné qu'elle comprenait parfaitement qu'en période de crise ou de difficultés économiques les gouvernements jugeaient nécessaire d'imposer des restrictions au processus normal de fixation des salaires, mais que, dans le cas d'espèce, où les agents publics du secteur non opérationnel (c'est-à-dire tous les salariés des administrations publiques nationales et locales autres que les agents des sociétés ou entreprises publiques) non seulement sont privés du droit de grève, mais voient aussi leur capacité de négocier sérieusement limitée; il était particulièrement important que les recommandations du Service national du personnel soient intégralement appliquées. La commission d'experts a exprimé l'espoir que, si les restrictions aux droits syndicaux fondamentaux de ces travailleurs devaient être maintenues, le gouvernement réexaminerait les procédures et le mécanisme de fixation des salaires et des conditions de travail dans la fonction publique afin que les garanties énoncées dans la convention soient pleinement appliquées aux fonctionnaires visés par ladite convention.

&htab;274.&htab;Le comité ne peut que regretter que la recommandation du Service national du personnel n'ait pas été pleinement appliquée non plus en 1983 en dépit des assurances données par le gouvernement en 1983 par lesquelles il avait déclaré qu'il ferait tout son possible pour respecter les recommandations formulées par le Service national du personnel. En conséquence, le comité doit exprimer des doutes sur le fait que le système actuel de détermination des conditions d'emploi dans le service public japonais inspire la confiance des parties (article 8 de la convention no 151). Le comité appelle donc à nouveau l'attention du gouvernement sur ses conclusions précédentes (dans le cas no 1165) et sur les observations de la commission d'experts en 1984. Il exprime le ferme espoir que le gouvernement parviendra à mettre en place une procédure de détermination des salaires et des conditions de travail dans la fonction publique qui accordera à ces travailleurs une compensation adéquate aux droits fondamentaux dont ils ne jouissent pas actuellement et dans laquelle les travailleurs participeraient.

Recommandations du comité

&htab;275.&htab;Le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Le comité rappelle le principe selon lequel, lorsque des droits aussi fondamentaux que le droit de négociation collective et le droit de grève dans les services essentiels ou dans la fonction publique sont déniés ou sujets à des restrictions, comme dans le présent cas, des garanties adéquates telles que des procédures de conciliation et d'arbitrage impartiales et expéditives, aux diverses étapes desquelles les intéressés doivent pouvoir prendre part et dont les décisions, une fois adoptées, doivent être complètement et rapidement mises en oeuvre, devraient exister pour sauvegarder pleinement les intérêts des travailleurs ainsi privés d'un moyen essentiel de défense de leurs intérêts. Etant donné que les recommandations du Service national du personnel n'ont pas été pleinement appliquées depuis 1981, le comité exprime des doutes sur le fait que le système actuel de détermination des conditions d'emploi dans le service public japonais inspire la confiance des parties (article 8 de la convention no 151).

b) Le comité regrette que la recommandation du Service national du personnel n'ait de nouveau pas été pleinement appliquée en 1983; il appelle donc l'attention du gouvernement sur les conclusions qu'il avait formulées dans le cas no 1165 et sur les observations faites par la commission d'experts à cet égard en 1984 et exprime le ferme espoir que le gouvernement parviendra à mettre en place une procédure de détermination des salaires et des conditions de travail dans la fonction publique qui garantira à ces travailleurs une compensation adéquate aux droits fondamentaux dont ils ne jouissent pas actuellement et dans laquelle les travailleurs participeraient.

Cas no 1280 PLAINTE PRESENTEE PAR LA CONFEDERATION INTERNATIONALE DES SYNDICATS LIBRES CONTRE LE GOUVERNEMENT DU CHILI

&htab;276.&htab;La plainte figure dans une communication de la Confédération internationale des syndicats libres en date du 9 mai 1984. Le gouvernement a répondu par une communication en date du 17 septembre 1984.

&htab;277.&htab;Le Chili n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l'organisation plaignante

&htab;278.&htab;L'organisation plaignante allègue que, le 7 mai 1984, le gouvernement a arbitrairement exilé M. Héctor Basualto, président de la Fédération des pêcheurs d'Iquique et de la Coordination régionale syndicale d'Iquique, dans l'île Melinka, située à l'extrême sud du pays. Cette île est inhospitalière, étant d'un accès difficile, et les conditions de vie y sont particulièrement pénibles. L'organisation plaignante ajoute que ce dirigeant syndical souffre d'un diabète avancé et que, faute de soins médicaux, sa vie est en danger.

&htab;279.&htab;En conclusion, l'organisation plaignante réclame que ce dirigeant syndical soit mis en liberté inconditionnelle et que l'on prenne soin de sa santé.

B. Réponse du gouvernement

&htab;280.&htab;Le gouvernement déclare qu'en vertu du décret no 4575 du 3 mai 1984, émis en vertu des attributions accordées par la disposition transitoire 24 de la Constitution politique de la République, M. Héctor Basualto Aguirre a été assigné à résidence pendant trois mois à Melinka, localité située au sud du pays. Par la suite, il a été transféré dans la localité de Lago Ranco. Le gouvernement ajoute que si les autorités ont été obligées de prendre cette mesure, c'est en raison des actes subversifs réitérés dont il s'est rendu coupable dans la ville d'Iquique et que les actes en question n'ont aucun rapport avec les activités syndicales.

&htab;281.&htab;Le gouvernement conclut en faisant observer que la mesure d'assignation à résidence qui a frappé M. Basualto est arrivée à terme le 2 août 1984 et que, à partir de cette date, M. Basualto n'est frappé par aucune interdiction et jouit d'une large liberté de circulation dans le pays.

C. Conclusions du comité

&htab;282.&htab;Le comité observe que la présente plainte se réfère à la relégation, le 7 mai 1984, du dirigeant syndical Héctor Basualto en l'île Melinka, au sud du Chili.

&htab;283.&htab;Le comité observe que l'organisation plaignante n'a pas indiqué les motifs de la relégation de ce dirigeant syndical et n'a pas non plus précisé si ces motifs étaient en relation avec la fonction ou les activités syndicales de M. Basualto, s'étant limité à qualifier cette mesure d'arbitraire. Le comité observe également que le gouvernement n'a pas indiqué les faits concrets qui avaient motivé la mesure de relégation et s'est limité à relever de manière générale qu'il s'était rendu coupable d'actes subversifs réitérés n'ayant aucune relation avec les activités syndicales.

&htab;284.&htab;Dans ces conditions, tout en prenant note du fait que le dirigeant syndical en question se trouve en liberté inconditionnelle depuis le 2 août 1984, le comité rappelle que les mesures qui impliquent une privation de liberté, telles que la relégation ou l'assignation à résidence doivent être prises par voie judiciaire exclusivement et non pas par voie administrative.

Recommandations du comité

&htab;285.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Le comité observe que ni l'organisation plaignante ni le gouvernement n'ont précisé les faits concrets qui avaient motivé la décision décrétant la relégation du dirigeant syndical, M. Héctor Basalto, du 7 mai jusqu'au 2 août 1984.

b) Le comité rappelle que les mesures qui impliquent une privation de liberté, telles que la relégation ou l'assignation à résidence, doivent être prises exclusivement par voie judiciaire et non pas par voie administrative.

CAS OU LE COMITE DEMANDE A ETRE TENU INFORME DE L'EVOLUTION Cas nos 1157 et 1192 PLAINTES PRESENTEES PAR LA FEDERATION SYNDICALE MONDIALE ET LE KILUSANG MAYO UNO CONTRE LE GOUVERNEMENT DES PHILIPPINES

&htab;286.&htab;Le comité a examiné le cas no 1157 à deux reprises, et il a présenté des conclusions intérimaires au Conseil d'administration [voir paragr. 276 à 286 de son 222e rapport et paragr. 294 à 302 de son 226e rapport] qui les a approuvées à ses 222e (mars 1983) et 223e (mai-juin 1983) sessions, respectivement. D'autres informations fournies par le gouvernement sur le cas no 1157 ont été consignées au paragraphe 20 du 230e rapport, au paragraphe 9 du 233e rapport et au paragraphe 10 du 234e rapport, approuvés par le Conseil d'administration en ses 224e (novembre 1983), 225e (février-mars 1984) et 226e (mai-juin 1984) sessions, respectivement. Le comité a examiné le cas no 1192 à sa réunion de mai 1984 [voir paragr. 521 à 543 de son 234e rapport] et a présenté des conclusions intérimaires au Conseil d'administration qui les a approuvées à sa 226e session (mai-juin 1984). Le gouvernement a fourni les informations supplémentaires qui lui ont été demandées au sujet des deux cas, dans une communication en date du 23 août 1984. Dans une lettre du 8 septembre 1984, les Syndicats des Philippines et des services connexes (SPSC), membres de la Fédération syndicale mondiale (FSM), organisation plaignante dans le cas no 1157, a communiqué de nouvelles allégations relatives à ce cas.

&htab;287.&htab;Les Philippines ont ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examens antérieurs des cas

&htab;288. &htab;Cas no 1157 . L'allégation en instance, après l'examen le plus récent de ce cas par le comité, concerne l'arrestation, le 2 septembre 1982, de M. Bonifacio Tupaz, secrétaire général du SPSC et membre du conseil général de la FSM, et son procès en cours (procès pénal no Q-21741 devant le tribunal de Quezon); l'intéressé est accusé de conspiration criminelle en vue d'une rébellion ou d'une insurrection, agissements passibles de sanctions prévues par l'article 136 du Code pénal révisé des Philippines. Dans sa réponse, le gouvernement avait fait observer que cette arrestation - de même que celle d'autres dirigeants syndicalistes tels que M. Crispin Beltran qui a eu lieu en même temps - était sans rapport avec l'exercice d'activités syndicales et que les activités des syndicats intéressés n'avaient pas été affectées par l'arrestation de leurs dirigeants. Le gouvernement avait informé le comité de la libération et de l'assignation à résidence de M. Tupaz le 1er mai 1983; en plusieurs occasions, il avait informé le comité de l'ajournement du jugement du cas no Q-21741 dont le tribunal de première instance de la ville de Quezon a été dessaisi au profit du tribunal régional de la même ville.

&htab;289.&htab;Le comité avait recommandé au Conseil d'administration d'appeler l'attention du gouvernement sur certains principes selon lesquels les cas doivent être jugés promptement et de manière impartiale et de lui demander de communiquer des renseignements sur les faits nouveaux qui interviendraient dans le procès intenté à M. Tupaz et M. Beltran.

&htab;290. &htab;Cas no 1192 . Les allégations en instance après l'examen du cas par le comité ont trait:

a) à l'arrestation, en août 1982, de plusieurs dirigeants syndicaux (en particulier M. C. Beltran, secrétaire général de l'organisation plaignante), au sujet de laquelle il a été demandé au gouvernement de transmettre, aussitôt que possible, des informations sur les faits nouveaux relatifs au procès pénal no Q-21741 qui a été intenté contre certains d'entre eux devant le tribunal de première instance de la ville de Quezon et qui a été remis à plusieurs reprises;

b) à la torture - au sujet de laquelle des détails sont donnés dans le rapport d'Amnesty international - infligée, pendant sa détention, à un dirigeant syndical (M. R. Nolasco, membre du conseil national du KMU) et au sujet de laquelle le comité a demandé au gouvernement de le tenir informé de toutes mesures qu'il prendrait en vue de procéder à une enquête pour établir les responsabilités; et

c) à l'incursion effectuée dans les locaux de certains syndicats et à la confiscation de leurs biens, en août 1982, au sujet desquels le gouvernement n'a fait aucun commentaire et à propos desquels le comité a souligné auprès du gouvernement l'importance de restaurer les syndicats intéressés dans leurs biens et de veiller à ce que de pareils incidents ne se reproduisent pas.

B. Faits nouveaux

&htab;291.&htab;Dans une lettre du 8 septembre 1984, le SPSC a allégué que, comme son secrétaire général est toujours assigné à résidence, il n'a pas été en mesure d'assister à une réunion syndicale qui devait se tenir hors des Philippines, à savoir la réunion du conseil exécutif de la FSM, en octobre 1984, en Bulgarie. Il communique des copies des demandes que M. Tupaz a adressées à cet égard au Président, au ministre du Travail et de l'Emploi, au chef du personnel des forces armées et à la Cour suprême, et dans lesquelles il demandait l'autorisation de quitter le pays pour remplir ses obligations syndicales internationales.

&htab;292.&htab;Dans sa communication du 23 août 1984, le gouvernement rappelle deux aspects du cas no 1192 sur lesquels le comité s'est prononcé, à savoir que le comité partage les conclusions auxquelles la commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations est parvenue dans ses observations formulées en 1984 à propos de l'incompatibilité de la législation syndicale des Philippines avec la convention no 87 et l'allégation relative à la violation de la convention no 98 qui semblait concerner la question de la représentativité des syndicats aux fins de la négociation collective. Sur le premier point, le gouvernement fait observer que tout amendement à la législation nationale doit se faire selon certaines procédures qui donnent le temps de revoir la législation actuelle et de présenter les recommandations qui s'imposent en la matière aux autorités compétentes. Il indique que l'autorité compétente est le nouveau parlement qui s'est réuni le 23 juillet 1984 et que la procédure tripartite est respectée à cet égard. Sur le second point, le gouvernement cite l'article 257 du Code du travail qui permet aux travailleurs eux-mêmes de décider de la question de la représentativité grâce à des élections à bulletin secret au sein de l'unité de négociation.

&htab;293.&htab;En ce qui concerne les arrestations d'août et de septembre 1982 de plusieurs syndicalistes, le gouvernement reconnaît la nécessité d'une procédure prompte et impartiale menée par un tribunal indépendant et impartial. Il fait observer que tous les accusés qui faisaient l'objet du dossier pénal no Q-21741, à l'exception de M. Beltran, ont été provisoirement libérés (M. Tupaz étant assigné à résidence) et que le tribunal régional de Quezon a repris les audiences concernant ce cas le 15 août 1984. Selon le gouvernement, les avocats de certains des accusés ne s'étant pas présentés, les avocats de MM. Beltran, Tupaz et Nieva ont été commis d'office pour défendre les autres accusés, conformément à la procédure normale et au règlement du tribunal, afin d'éviter de nouveaux retards dans le jugement de l'affaire. Le tribunal a renvoyé l'audience au 12 septembre 1984 après avoir ordonné, sur demande du ministère public, à l'administrateur-séquestre de la Préfecture de police (Metropolitan Command MIV) de remettre au laboratoire d'investigation criminelle certaines machines à écrire saisies dans les locaux des syndicats investis par les autorités militaires, en vue de leur production à la prochaine audience prévue.

&htab;294.&htab;En ce qui concerne les tortures alléguées et la disparition d'un dirigeant du KMU, le gouvernement signale que, selon le ministère de la Défense nationale, Ricardo Nolasco n'a jamais été arrêté en 1981. Il a déposé plainte auprès de la direction des renseignements, le 17 novembre 1981, au sujet d'un enlèvement dont il aurait été victime et de tortures que lui auraient fait subir, pendant deux jours, des membres non identifiés du personnel militaire mais il a refusé d'être examiné par un médecin officier. Il a demandé à être examiné par un médecin privé en vue de soumettre les conclusions de l'examen à la Préfecture de police (Philippines constabulary Metropolitan Command (PCM)). Toutefois, toujours selon le gouvernement, Nolasco ne s'est plus manifesté depuis et aucune suite n'a pu être donnée à sa plainte puisqu'il n'avait fourni aucun détail concernant les hommes qui l'auraient arrêté et torturé, non plus que sur le véhicule utilisé. Sa plainte reste enregistrée au cas où il souhaiterait poursuivre son action.

&htab;295.&htab;En ce qui concerne l'arrestation et la disparition alléguées de trois autres membres nommés du KMU, le ministère de la Défense nationale fournit les informations suivantes: Antonio Sta Ana et Jemeliana Paguio ont été arrêtés le 25 juin 1981 lors d'une incursion effectuée dans une maison à Orion, au cours de laquelle plusieurs documents subversifs ont été saisis. Des accusations de subversion ont été déposées auprès du Procureur général de la province de Bataan sous dossier IS. no 81-112 le 5 juillet 1981. Selon le gouvernement, avant que la première enquête ne commence, les personnes en question se sont échappées, et un autre détenu a affirmé qu'ils avaient réussi à le faire en détruisant les grillages des fenêtres de leur cellule. Une mesure disciplinaire a été prise à l'encontre du sergent de service pour négligence. Depuis lors, M. Paguio a été aperçu avec des hommes armés lors d'un affrontement armé le 30 août 1981 à Bataan. Le gouvernement ne dispose d'aucune information sur M. Sta Ana et il présume que ce dernier est entré dans la clandestinité pour "reprendre ses activités subversives". En outre, le gouvernement déclare que les unités militaires en opération ne disposent d'aucune information sur l'arrestation alléguée de Félix Ocido dont le dossier reste ouvert jusqu'à ce que des preuves supplémentaires soient apportées. Le gouvernement relève que le rapport d'Amnesty international dont le plaignant a fait mention est suspect, dans la mesure où il a été publié de manière à coïncider avec la visite du chef de l'Etat aux Etats-Unis et à embarrasser le gouvernement en cette occasion.

&htab;296.&htab;En ce qui concerne l'incursion effectuée dans les bureaux du KMU, le gouvernement déclare, sur la base des premières informations et des documents saisis, que le parti communiste des Philippines projetait de provoquer des désordres massifs dans tout le pays en septembre 1982 en faisant appel à des groupes de travailleurs, particulièrement au KMU. La police a donc investi les locaux du KMU, le 13 août 1982, et a saisi des documents et des banderoles subversifs. Une liste de noms de code de membres du parti communiste faisant partie des organisations professionnelles a été décodée et les personnes suspectées ont été arrêtées en vertu des arrêtés présidentiels nos 107-82, 112-82 et 114-82. M. C. Beltran a été arrêté en vertu de l'arrêté présidentiel no 103-82. Des plaintes ont été déposées auprès des tribunaux civils réguliers et le jugement a été considérablement retardé, selon le gouvernement, par certaines manoeuvres dilatoires de la défense. Le gouvernement déclare que tous les documents, le matériel et l'équipement d'imprimerie qui ont été saisis l'ont été en vertu de mandats de perquisition (nos 408, 409 et 413) délivrés par le tribunal pénal du 7e district judiciaire les 12 et 14 août 1982; ils sont conservés comme preuve à conviction pour le procès et seul le tribunal est habilité à décider de ce qu'il y a lieu d'en faire jusqu'à l'issue du procès. Le gouvernement souligne que les seuls accusés encore détenus au camp Crame, dans la ville de Quezon (MM. Beltran, Jose Britanico, Simplicio Anino, Lauro Pabit et Milleth Soriano) bénéficient de tous leurs droits, y compris l'accès à un conseil juridique, les visites de leurs parents et d'autres personnes intéressées et l'assistance médicale.

&htab;297.&htab;Dans sa communication du 28 septembre 1984, le gouvernement fait observer que les retards apportés au règlement du dossier pénal resté en suspens ne sont pas uniquement imputables au gouvernement étant donné que la défense a demandé le report de plusieurs audiences qui étaient prévues. Au sujet de la demande de M. Tupaz de se rendre en Bulgarie pour assister à une réunion syndicale, le gouvernement envoie copie de l'avis favorable concernant cette demande, émis par le ministre du Travail, dans une note adressée au Président de la République en date du 12 septembre 1984. Le gouvernement indique qu'il a réagi rapidement sur cette question puisque la lettre adressée au ministre par M. Tupaz était datée du 7 septembre 1984.

C. Conclusions du comité

&htab;298.&htab;Le comité note que le procès des dirigeants syndicaux arrêtés en août et septembre 1982 devait reprendre le 12 septembre 1984 conformément à la procédure pénale normale, mais il regrette que l'un des accusés, M. Beltran, reste détenu. Dans ces conditions, le comité indique à nouveau l'importance qu'il attache à une procédure prompte et impartiale. Tout en notant que certains reports des audiences qui étaient prévues ont eu lieu à la demande de la défense, le comité tient à faire observer au gouvernement que des procédures exagérément longues peuvent susciter un sentiment d'injustice. Le comité exprime donc le ferme espoir que le jugement concernant les dirigeants du SPSC et du KMU, qu'ils soient détenus ou non, assignés à résidence ou en liberté provisoire, aboutira à une conclusion rapide. Il demande au gouvernement de le tenir informé de l'issue du procès.

&htab;299.&htab;En ce qui concerne les allégations relatives à l'arrestation, à la torture et à la disparition inexpliquée de dirigeants et membres du KMU (M. R. Nolasco, M. A. Sta Ana, M. J. Paguio et M. Félix Ocido), formulées dans le document d'Amnesty international, le comité note que le gouvernement prétend que les enquêtes n'ont abouti à aucune information sur M. Ocido, que M. Sta Ana et M. Paguio, accusés de subversion, ont été arrêtés, mais qu'ils ont échappé à la surveillance de la police qui ignore où ils se trouvent; que M. Nolasco a déposé plainte pour enlèvement et torture, en novembre 1981, mais qu'il n'a pas poursuivi son action et que l'on ignore également où il se trouve. Compte tenu de ces informations et du fait que les attaques dont ces syndicalistes auraient été l'objet remontent à 1981. Le comité rappelle, comme il l'a fait en plusieurs occasions au sujet de la disparition de syndicalistes [voir, par exemple, 202e rapport, cas no 924 (Guatemala), paragr. 152], qu'il déplore le climat d'insécurité dans lequel des disparitions inexpliquées ont lieu. Il tient à signaler qu'un tel climat constitue inévitablement une grave entrave à l'exercice de la liberté syndicale. Il demande au gouvernement de continuer ses investigations sur ces disparitions inexpliquées et de le tenir informé des résultats.

&htab;300.&htab;Pour ce qui est de l'occupation des locaux syndicaux et de la confiscation des biens syndicaux, en août 1982, le comité prend note de l'affirmation du gouvernement selon laquelle tous les documents, matériel et équipement d'imprimerie qui ont été saisis l'ont été en vertu de mandats de perquisition délivrés, légalement, par l'autorité judiciaire et selon laquelle toutes ces pièces sont conservées en vue de leur production lors du procès dont il est question ci-dessus. Au vu de ce qui précède, le comité demande au gouvernement de le tenir informé des mesures prises pour restituer leurs biens aux syndicats une fois le procès achevé.

&htab;301.&htab; Le comité demande au gouvernement d'indiquer si le secrétaire général du SPSC a effectivement été autorisé à assister à la réunion du conseil exécutif de la FSM, en Bulgarie, en octobre 1984 et à remplir ainsi les obligations syndicales qui découlent de l'affiliation de son organisation à une organisation syndicale internationale.

Recommandations du comité

&htab;302.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Le comité note que le procès des dirigeants syndicaux arrêtés en août et septembre 1982 devait reprendre le 12 septembre 1984, mais regrette que l'un des accusés, M. C. Beltran, demeure détenu; il exprime le ferme espoir que le procès aboutira à une conclusion rapide et demande au gouvernement de le tenir informé de l'issue du procès.

b) Pour ce qui est de l'arrestation, des tortures et de la disparition inexpliquée dont auraient fait l'objet des dirigeants et membres cités du KMU, en 1981, le comité rappelle qu'il déplore le climat d'insécurité dans lequel des disparitions inexpliquées ont lieu. Il tient à signaler qu'un tel climat constitue inévitablement une grave entrave à l'exercice des droits syndicaux. Il demande donc au gouvernement de continuer ses investigations sur ces disparitions inexpliquées et de le tenir informé des résultats.

c) En ce qui concerne l'occupation des locaux syndicaux et la confiscation de biens syndicaux, en août 1982, le comité demande au gouvernement de l'informer des mesures prises en vue de restituer les biens saisis à leurs propriétaires légitimes, à savoir les syndicats intéressés, à l'issue du procès pour lequel ils sont conservés comme pièces à conviction.

d) Le comité demande au gouvernement d'indiquer si le secrétaire général du SPSC a effectivement été autorisé à assister à une réunion du conseil exécutif de la FSM, en Bulgarie, en octobre 1984 et à remplir ainsi les obligations syndicales qui découlent de l'affiliation de son organisation à une organisation syndicale internationale.

Cas no 1225 PLAINTE PRESENTEE PAR LA CONFEDERATION INTERNATIONALE DES SYNDICATS LIBRES CONTRE LE GOUVERNEMENT DU BRESIL

&htab;303.&htab;Le comité a déjà examiné ce cas à sa session de février 1984 où il a présenté un rapport intérimaire qui a été approuvé par le Conseil d'administration à sa 225e session, février-mars 1984. [Voir 223e rapport, paragr. 659 à 671.] Depuis lors le gouvernement a envoyé certaines informations dans une communication du 21 mai 1984.

&htab;304.&htab;Le Brésil n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, mais il a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

&htab;305.&htab;La plainte de la Confédération internationale des syndicats libres concernait plusieurs conflits du travail qui avaient éclaté en juillet 1983 dans des raffineries de pétrole de Campinas et de Bahia et dans la métallurgie à Sao Bernardo do Campo où des grèves organisées à l'appui de revendications socio-économiques auraient été punies par des licenciements de grévistes et par la mise sous tutelle des syndicats. En outre, l'aggravation de la situation découlant de la politique économique du gouvernement a conduit à une grève générale le 21 juillet 1983, indiquait la confédération plaignante. Le ministre du Travail a riposté par la mise sous tutelle des autorités fédérales des syndicats des employés de banques et des employés de métro de Sao Paulo.

&htab;306.&htab;Le gouvernement dans sa réponse antérieure n'avait pas réfuté les allégations mais il avait expliqué qu'aux termes du décret-loi no 1632 du 4 août 1978 les secteurs du pétrole, des banques et des transports métropolitains sont considérés comme des services essentiels dans lesquels la grève est interdite et où les grévistes peuvent être licenciés et les dirigeants syndicaux destitués. Il avait aussi déclaré que la grève déclenchée dans les industries métallurgiques l'avait été en violation de la loi no 4330/64 et d'instruments normatifs récemment adoptés.

&htab;307.&htab;En février 1984, le comité avait rappelé au gouvernement que la grève est un des moyens essentiels dont doivent pouvoir disposer les travailleurs et leurs organisations pour la défense et la promotion de leurs intérêts professionnels et que les services essentiels où la grève pourrait être interdite doivent s'entendre au sens strict du terme, à savoir les services dont l'interruption risquerait de mettre en danger dans tout ou partie de la population la vie, la sécurité ou la santé de la personne. Le comité avait également indiqué que l'interdiction de la grève dans les secteurs du pétrole, de la banque et des transports métropolitains prévue par le décret-loi no 1632 du 4 août 1978 était contraite aux principes de la liberté syndicale. Il avait donc demandé au gouvernement de le tenir informé des mesures prises pour supprimer le contrôle exercé sur les syndicats en cause et pour rétablir les dirigeants dans leurs fonctions et réintégrer les dirigeants syndicaux et les grévistes licenciés dans leurs emplois. Le comité avait en outre demandé au gouvernement de modifier sa législation, en particulier le décret-loi no 1632 du 4 août 1978, pour réduire la liste des services essentiels où la grève peut être interdite aux services essentiels au sens strict du terme. Le comité avait enfin également demandé au gouvernement de communiquer le texte des dispositions enfreintes par les grévistes dans le cas de la grève des travailleurs des industries métallurgiques, mécaniques et de matériels électriques de Sao Bernardo.

B. Réponse du gouvernement

&htab;308.&htab;Dans sa communication du 21 mai 1984, le gouvernement annonce que le ministre du Travail a levé la mise sous tutelle administrative qui pesait sur le syndicat des travailleurs des industries métallurgiques, mécaniques et de matériels électriques de Sao Bernardo do Campo y Diadema, sur le syndicat des travailleurs de la distillerie et de la raffinerie de pétrole de Paulinéa y Campinas, ainsi que sur le syndicat des travailleurs des entreprises de transports métropolitains de Sao Paulo et sur le syndicat des travailleurs de l'industrie de distillerie et de raffinerie de pétrole de l'Etat de Bahia. Il indique également que les élections concernant ces syndicats sont en cours. Le gouvernement réfute par ailleurs les allégations selon lesquelles des dirigeants syndicaux ou des travailleurs auraient été licenciés pour faits de grève.

&htab;309.&htab;Pour ce qui concerne la mise sous tutelle du syndicat des travailleurs des établissements bancaires de Sao Paulo, le gouvernement indique qu'elle n'a pas été levée car les autorités compétentes du ministère du Travail procèdent à une vérification des comptes de ce syndicat.

&htab;310.&htab;Le gouvernement affirme également que des études visant à modifier la législation syndicale notamment en ce qui concerne le droit de grève, y compris pour ce qui est de la loi no 4330 de 1964 et du titre VI de la consolidation des lois du travail sur les conventions collectives, sont en cours. Le ministre du Travail a présenté le texte de l'avant-projet de loi et ses modifications aux organisations syndicales et aux autres secteurs intéressés de la société, afin d'être en mesure de présenter au Congrès national un projet de loi issu du consensus social conclut le gouvernement.

C. Conclusions du comité

&htab;311.&htab;Le comité note avec intérêt que la mise sous tutelle administrative des syndicats objets de la plainte a été levée à l'exception de celle du syndicat des travailleurs des établissements bancaires de Sao Paulo pour lequel les autorités compétentes procèdent à une vérification des comptes et que, selon le gouvernement, personne n'aurait été licencié pour faits de grève. Le comité note également que les élections sont en cours au sein des syndicats dont la mise sous tutelle a été levée. Sur ce dernier point, le comité rappelle qu'il avait demandé au gouvernement de rétablir les dirigeants syndicaux dans leurs fonctions. En conséquence, le comité prie le gouvernement de faire en sorte que les dirigeants syndicaux en cause aient la possibilité d'être réélus dans leurs fonctions.

&htab;312.&htab;En ce qui concerne la vérification des comptes du syndicat des travailleurs des établissements bancaires de Sao Paulo, le comité rappelle comme il l'a indiqué à maintes reprises dans le passé que si les dispositions législatives prévoyant la présentation aux autorités compétentes de rapports financiers annuels et de renseignements complémentaires sur certains points que ces rapports n'éclairent pas, ne portent pas atteinte en elles-mêmes à l'autonomie financière des syndicats, les mesures administratives de contrôle de la gestion, telles que les expertises comptables et les enquêtes ne devraient être appliquées que dans des cas exceptionnels, lorsque des circonstances graves le justifient (par exemple en cas d'irrégularités apparues dans les rapports financiers annuels ou à la suite de plaintes émanant de membres) afin de parer au danger d'une intervention des autorités qui risquerait d'entraver l'exercice du droit qu'ont les syndicats d'organiser librement leur gestion. [Voir notamment 83e rapport, cas no 399, paragr. 285 et 287, Argentine.]

&htab;313.&htab;Dans le présent cas, la vérification des comptes du syndicat des travailleurs des établissements bancaires de Sao Paulo intervient alors que ce syndicat a été placé sous un régime de tutelle par les autorités fédérales parce que ses dirigeants avaient pris part à la grève générale du 21 juillet 1983. Aussi le comité estime que ladite "vérification des comptes" a eu un objet plus large. Le comité insiste en conséquence auprès du gouvernement pour que ce contrôle soit assorti de certaines garanties contre l'intervention des autorités et en particulier que le fonctionnaire chargé du contrôle soit lui-même soumis au contrôle des autorités judiciaires. Il exprime en outre l'espoir que la mise sous tutelle administrative de ce syndicat sera levée à brève échéance.

&htab;314.&htab;Le comité prend note avec intérêt des assurances données par le gouvernement concernant la modification de la loi syndicale y compris les dispositions sur le droit de grève. Le comité exprime le ferme espoir que ces amendements mettront la législation en conformité avec les principes de la liberté syndicale et prie le gouvernement de le tenir informé de toute évolution intervenue dans ce domaine.

Recommandations du comité

&htab;315.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver les conclusions suivantes:

a) Le comité note avec intérêt que le régime de tutelle administrative de quatre des cinq syndicats objets de la plainte a été levé et que les élections concernant ces syndicats sont en cours. Le comité demande à nouveau au gouvernement de faire en sorte que les dirigeants syndicaux des syndicats en question aient la possibilité d'être réélus dans leurs fonctions.

b) Le comité insiste auprès du gouvernement pour que la vérification des comptes du syndicat des travailleurs des établissements bancaires de Sao Paulo opérée actuellement par les autorités, alors que ce syndicat est toujours sous tutelle administrative, soit achevée au plus tôt et soit assortie de certaines garanties et, en particulier, que le fonctionnaire chargé de cette vérification soit lui-même soumis au contrôle des autorités judiciaires. Le comité espère à nouveau que le régime de tutelle administrative imposé à ce syndicat sera levé à brève échéance.

c) Le comité exprime le ferme espoir que les amendements à la législation syndicale y compris les dispositions sur le droit de grève envisagés par le gouvernement mettront cette législation en conformité avec les principes de la liberté syndicale. Il souhaite rappeler au gouvernement que le BIT reste à la disposition de toutes les parties intéressées pour leur fournir toute assistance pouvant contribuer à la préparation de la future législation en vue de garantir l'instauration d'une situation conforme aux normes et aux principes de l'OIT en matière de liberté syndicale. En tout état de cause, le comité prie le gouvernement de le tenir informé de toute évolution intervenue dans ce domaine.

Cas nos 1240 et 1248 PLAINTES PRESENTEES PAR LA FEDERATION NATIONALE DES TRAVAILLEURS DE L'ETAT CONTRE LE GOUVERNEMENT DE LA COLOMBIE

&htab;316.&htab;La plainte relative au cas no 1240 figure dans une communication de la Fédération nationale des travailleurs de l'Etat (FENALTRASE) en date du 30 septembre 1983. La FENALTRASE a envoyé des informations complémentaires dans des communications en date du 25 octobre 1983 et du 22 mars 1984. Le gouvernement a répondu par les communications du 22 novembre et du 21 décembre 1983, du 8 février, du 4 mai et du 27 juin 1984.

&htab;317.&htab;Compte tenu de la contradiction existant entre les allégations de l'organisation plaignante et la réponse du gouvernement concernant la question de la personnalité juridique du syndicat de l'Institut de district pour la protection de l'enfance et de la jeunesse, et conformément à la règle de procédure en vigueur, le BIT a porté à la connaissance de l'organisation plaignante la teneur de la communication du gouvernement datée du 8 février 1984 afin qu'elle présente ses commentaires éventuels. Ceux-ci ont été transmis par la FENALTRASE dans une communication en date du 12 avril 1984, qui a alors été remise au gouvernement.

&htab;318.&htab;En ce qui concerne le cas no 1248 que le comité a examiné à sa réunion de mai 1984, un rapport intérimaire a été présenté par le comité au Conseil d'administration. [234e rapport du comité, paragr. 623 à 638, approuvé par le Conseil d'administration à sa 226e session (mai-juin 1984).] Le gouvernement a fourni des informations supplémentaires dans des communications en date des 27 juin et 8 août 1984.

&htab;319.&htab;La Colombie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l'organisation plaignante dans le cas no 1240

&htab;320.&htab;Dans ses communications du 30 septembre et du 25 octobre 1983, la FENALTRASE a allégué que le Syndicat de l'Institut de district pour la protection de l'enfance et de la jeunesse (SINTRAIDIPRON), qui avait été constitué le 13 février 1983, s'était vu refuser la personnalité juridique malgré les nombreux recours présentés en vue de l'obtenir. L'organisation plaignante a expliqué que l'Institut était financé par le gouvernement et par des capitaux étrangers et que le directeur de l'Institut s'était toujours opposé à la création d'un syndicat qui, selon lui, porterait un coup fatal à l'Institut, lequel accomplit une oeuvre de charité: il recueille les enfants et les adolescents abandonnés. D'après l'organisation plaignante, divers moyens ont été employés - pressions politiques, cadeaux personnels - pour éviter que le SINTRAIDIPRON obtienne la personnalité juridique.

&htab;321.&htab;L'organisation plaignante signale également le licenciement de sept dirigeants du syndicat (Raúl Rivera Guzmán, Pastor López, Felipe Jiménez, Uriel Palomino, Lucila Garzón, Hugo Ortiz et Luis Ignacio Puentes) et de huit membres fondateurs (Rosana Angel de Lara, Fernando Fierro, Ana Elvia Gómez, Marco Tulio Alarcón, Antonio Ricón, Alberto Rincón, Marta Arias et Carlos Campos).

&htab;322.&htab;Dans une communication ultérieure en date du 22 mars 1984, l'organisation plaignante a indiqué qu'aucune solution n'avait été apportée aux faits allégués.

&htab;323.&htab;Le gouvernement ayant signalé, dans une communication du 8 février 1984, que le SINTRAIDIPRON avait obtenu la personnalité juridique par la décision no 00030 prise par le ministère du Travail et de la Sécurité sociale le 5 janvier 1984, le BIT a envoyé copie de ladite décision à l'organisation plaignante pour qu'elle formule ses commentaires. L'organisation plaignante a répondu le 12 avril 1984 que la décision no 00030 du 5 janvier 1984 avait été contestée le 11 janvier par l'un des juristes de l'Administration de district et que le ministère du Travail n'avait toujours pas résolu l'affaire. En attendant, le syndicat ne pouvait pas fonctionner et ses dirigeants étaient toujours licenciés.

B. Examen antérieur du cas no 1248

&htab;324.&htab;Après avoir examiné ce cas à sa réunion de mai-juin 1984, le comité a présenté les recommandations suivantes concernant les allégations qui étaient restées en instance:

&htab;Le comité prie le gouvernement de préciser quels ont été les motifs concrets des "déclarations d'annulation de nomination" (c'est-à-dire des licenciements) de 23 membres et de trois dirigeants (président, secrétaire et trésorier) du Syndicat du Fonds de roulement des douanes.

&htab;Le comité prie le gouvernement de répondre aux allégations relatives aux licenciements des présidents des sections de Santander et de la Guajira du Syndicat de la Caisse nationale de prévoyance, et aux allégations concernant le licenciement de Hernán Sánchez, Guillermo Osorio et Francisco Balbín Arango, respectivement président, secrétaire et trésorier du Syndicat des employés des entreprises publiques de Medellín.

&htab;325.&htab;L'organisation plaignante avait signalé que les personnes susmentionnées avaient été licenciées du Syndicat du Fonds de roulement des douanes suite à la dénonciation par le syndicat de certaines irrégularités.

&htab;326.&htab;L'organisation plaignante avait signalé, en outre, au sujet du licenciement des trois dirigeants du Syndicat des entreprises publiques de Medellín qu'en 1981, alors que se négociait le cahier de revendications, ceux-ci avaient été arrêtés à la demande de la direction de l'entreprise puis condamnés à 90 jours d'emprisonnement. En conséquence de cette décision, des démarches avaient été entamées pour obtenir la levée de l'immunité syndicale qui les protégeait et, un an plus tard, le jugement avait été prononcé à l'encontre de ces dirigeants, qui furent licenciés par la direction.

C. Réponse du gouvernement

&htab;327.&htab;Pour ce qui est du cas no 1240, le gouvernement avait déclaré dans sa communication du 22 novembre 1983 que, lorsqu'il était saisi d'une demande d'octroi de la personnalité juridique, le ministère du Travail et de la Sécurité sociale analysait uniquement les aspects juridiques de la demande, et qu'il se prononçait indépendamment de toute influence extérieure.

&htab;328.&htab;Dans sa communication du 21 décembre 1983, le gouvernement avait ajouté que la personnalité juridique avait tout d'abord été refusée au SINTRAIDIPRON, du fait que certaines de ses dispositions statutaires constituaient une violation flagrante des dispositions du Code du travail relatives à l'ordre public. Par ailleurs, le gouvernement avait déclaré que la question de savoir si les fonctionnaires de district (dont font partie les travailleurs de l'Institut de district pour la protection de l'enfance et de la jeunesse) étaient des agents publics ou des travailleurs officiels de l'administration (catégorie soumise à un régime juridique différent en matière de syndicalisation et de négociation collective) était encore en instance et que le ministère ne pouvait se prononcer sur la personnalité du syndicat avant que le Conseil d'Etat ne prenne une décision sur la question.

&htab;329.&htab;Dans ses communications du 4 février, du 4 mai et du 27 juin 1984, le gouvernement a déclaré qu'en vertu de la décision no 00030 du 5 janvier 1984 (que le gouvernement a joint en annexe) la personnalité juridique a été octroyée à SINTRAIDIPRON à la condition que ses statuts soient mis en conformité avec la législation en vigueur. Cependant, poursuit le gouvernement, un appel a été interjeté contre ladite décision conformément aux règles en vigueur et cet appel est toujours en instance car il doit être soumis à l'examen du Conseil d'Etat. Celui-ci dira si les fonctionnaires du district de Bogotá sont des agents publics ou des travailleurs de l'Administration et définira ainsi le régime légal qui leur est applicable. Le ministère du Travail devra se conformer à cette décision.

&htab;330.&htab;Pour ce qui est des allégations de licenciement survenus à l'Institut de district pour la protection de l'enfance et de la jeunesse (IDIPRON), le gouvernement déclare que la nomination de MM. Felipe Jiménez, Uriel Palomino et Hugo Ortiz a été annulée par le maire de Bogotá dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire en matière de recrutement et de licenciement que la loi lui confère.

&htab;331.&htab;Le gouvernement signale en outre que, sur la liste des employés prétendument licenciés que l'organisation plaignante a présentée, figurent le nom de M. Alberto Rincón, qui n'a jamais été un fonctionnaire de l'Institut, et ceux de MM. Fernando Fierro et Marco Tulio Alarcón, qui ne sont ni membres ni membres fondateurs du syndicat.

&htab;332.&htab;Le gouvernement indique que, dans la législation du travail applicable aux agents publics, la notion de licenciement n'existe pas; la cessation de service se produit notamment par déclaration d'annulation des nominations. L'autorité chargée du recrutement, à savoir le maire de Bogotá dans le cas d'IDIPRON, est habilitée à recruter et à licencier librement les fonctionnaires lorsque des motifs de service ou l'intérêt public le réclament.

&htab;333.&htab;Le gouvernement ajoute, d'autre part, que les fonctionnaires dont la nomination a été annulée ont entamé auprès des tribunaux du travail une procédure en vue d'obtenir une indemnité de licenciement et que ces annulations de nomination étaient motivées non pas par leur fonction syndicale mais par la nécessité d'améliorer la prestation d'un service public tel que celui qui est assuré par IDIPRON.

&htab;334.&htab;En ce qui concerne le cas no 1248, le gouvernement fait observer que les déclarations d'annulation de nomination de certains employés du Fonds de roulement des douanes n'ont été motivées que par les besoins du service, c'est-à-dire les conditions requises pour une meilleure prestation du service du Fonds de roulement des douanes. Pour que l'Etat puisse garantir la prestation satisfaisante des services qui relèvent de sa compétence, la législation nationale a conféré aux autorités le droit de recruter et de licencier librement les fonctionnaires attachés aux différents organismes publics et ce pouvoir est discrétionnaire: en d'autres termes, les autorités ont toute latitude pour faire valoir les besoins du service (qui peuvent être entravés par des facteurs liés à la moralité, à l'efficacité, etc.) et doivent, par conséquent, pouvoir recruter ou licencier d'urgence du personnel. Etant donné que ce pouvoir est discrétionnaire, la décision administrative par laquelle un fonctionnaire est congédié n'a pas à être motivée expressément, car la loi autorise que les motifs soient évalués en toute liberté par l'autorité qui est à l'origine de la décision. Ces idées ont été exposées à quatre représentants de FENALTRASE par le directeur général du Fonds, qui les a reçus dans son bureau au mois de septembre 1983. Le Fonds de roulement des douanes a renoncé aux services de certains de ses employés en conformité avec la loi et dans l'exercice du pouvoir susmentionné, puisque ceux-ci ne faisaient pas partie du cadre permanent des fonctionnaires de l'Administration et ne bénéficiaient d'aucune immunité juridique spéciale. Il convient de préciser que le ministère du Travail et de la Sécurité sociale n'est pas en droit de demander au directeur général du Fonds quels ont été les motifs concrets et particuliers qui l'ont poussé à déclarer l'annulation de chacune des nominations, car il n'est pas habilité à intervenir dans l'exercice d'une attribution que la loi accorde audit fonctionnaire.

&htab;335.&htab;Le gouvernement déclare aussi que les motifs du licenciement d'un fonctionnaire engagé à des conditions prévoyant la liberté de recrutement et de licenciement ne peuvent en aucun cas être liés à sa fonction ou à ses activités syndicales. Si un fonctionnaire fait l'objet d'une déclaration d'annulation de nomination du seul fait qu'il est syndicaliste, l'instance judiciaire compétente du contentieux administratif pourra, dès que la raison de l'annulation lui aura été prouvée, ordonner la réintégration du fonctionnaire et condamner l'organisme qui a prononcé l'annulation au règlement des indemnités qui lui seraient dues.

&htab;336.&htab;En ce qui concerne MM. Hernán Sánchez, Guillermo Osorio et Francisco Baldín Arango, le gouvernement déclare qu'il ne s'agissait pas d'agents publics engagés à des conditions prévoyant la liberté de recrutement et de licenciement mais de travailleurs de l'Administration et, avant de renoncer à leurs services, il a fallu lever au préalable leur immunité syndicale, conformément aux normes juridiques en vigueur. En conséquence, l'entreprise s'est prévalue de la jurisprudence qui autorisait la fin de la relation de travail, garantissant ainsi le respect des droits des travailleurs.

&htab;337.&htab;Enfin, le gouvernement signale, au sujet des licenciements des présidents des sections de Santander et de La Guajira du Syndicat de la Caisse nationale de prévoyance, que leurs nominations ont été annulées pour raisons de service, en vertu du droit de libre nomination et destitution des fonctionnaires.

D. Conclusions du comité

&htab;338.&htab;En ce qui concerne la personnalité juridique du SINTRAIDIPRON, le comité note que, par la décision administrative no 00030 du 5 janvier 1984, la personnalité juridique a été accordée à cette organisation syndicale à condition que ses statuts soient mis en conformité avec la loi. Le comité note également que ladite décision a fait l'objet d'un appel qui est encore en instance car il doit être soumis à l'examen du Conseil d'Etat dont la décision déterminera si les travailleurs du district de Bogotá (dont font partie les travailleurs du SINTRAIDIPRON) sont des agents publics ou des travailleurs de l'Administration, et définira ainsi le régime juridique applicable. Le ministère du Travail devra se conformer à cette décision. Dans ces conditions, le comité prie le gouvernement de le tenir informé de la teneur de la décision du Conseil d'Etat et exprime l'espoir que le SINTRAIDIPRON jouira très prochainement de la personnalité juridique.

&htab;339.&htab;Pour ce qui est des déclarations d'annulation de nomination prononcées à l'Institut de district pour la protection de l'enfance et de la jeunesse (IDIPRON), le comité note que, selon le gouvernement, elles ont été motivées non pas par la fonction syndicale des personnes concernées, mais par la nécessité d'assurer une meilleure prestation du service public offert par cet institut, et qu'elles ont été décidées par le maire de Bogotá en vertu de son pouvoir de recruter et de licencier librement les fonctionnaires. Le comité note également que le gouvernement déclare, contrairement au dire de l'organisation plaignante, que M. Alberto Rincón n'était pas un fonctionnaire d'IDIPRON et que MM. Fernando Fierro et Marco Tulio Alarcón ne sont ni des membres ni des membres fondateurs du syndicat. Le comité déplore que le gouvernement n'ait pas indiqué les motifs concrets des déclarations d'annulation de nomination de sept dirigeants et de cinq membres fondateurs du syndicat et qu'il se soit borné à déclarer, de manière générale, que leur licenciement n'était pas fondé sur leurs activités syndicales, mais qu'il avait été décidé en application du droit de recruter et de licencier librement des fonctionnaires lorsque des raisons de service ou l'intérêt public le réclament. Dans ces conditions, étant donné que, d'après les déclarations du gouvernement, les intéressés semblent avoir accepté la déclaration d'annulation de nomination puisqu'ils ont entamé devant les tribunaux une procédure en vue d'obtenir une indemnité de licenciement, le comité désire insister pour que l'exercice du droit de recruter et de licencier librement les agents publics non inscrits au cadre permanent de l'administration ne soit en aucun cas motivé par la fonction ou les activités syndicales de ceux-ci et que la législation prévoie des garanties dans ce sens: par exemple en établissant des procédures de recours en cas d'annulation de nomination d'un agent public considérée comme une discrimination antisyndicale de sorte qu'il appartienne à l'administration ou aux autorités publiques en cause de prouver que la décision n'est pas liée aux activités syndicales de la personne en question.

&htab;340.&htab;En ce qui concerne les déclarations d'annulation de nomination de 23 membres et de trois dirigeants (président, secrétaire et trésorier) du Fonds de roulement des douanes et des présidents des sections de Santander et de La Guajira du Syndicat de la Caisse nationale de prévoyance, le comité prend note des déclarations du gouvernement qui sont semblables en substance à celles qu'il a formulées au sujet des annulations de nomination à IDIPRON. Le comité note en particulier que le pouvoir de recruter et de licencier librement, et pour des raisons de service, les fonctionnaires non inscrits au cadre permanent de l'Administration est discrétionnaire et que la décision administrative par laquelle un fonctionnaire est congédié ne doit pas être motivée expressément. Dans ces circonstances, le comité réitère les principes exprimés au paragraphe précédent.

&htab;341.&htab;Pour ce qui est du licenciement de MM. Hernán Sánchez, Guillermo Osorio et Francisco Baldín, dirigeants du Syndicat des employés des entreprises publiques de Medellín, le comité relève que l'autorité judiciaire a autorisé la cessation de la relation de travail, une fois levée l'immunité syndicale.

Recommandations du comité

&htab;342.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions suivantes: a) Le comité exprime l'espoir que le SINTRAIDIPRON jouira très prochainement de la personnalité juridique et prie le gouvernement de l'informer de la décision du Conseil d'Etat à cet égard.

b) Le comité souligne que l'exercice du droit de recruter et de licencier librement des agents publics non inscrits au cadre permanent de l'administration ne doit en aucun cas être motivé par la fonction ou les activités syndicales de ceux-ci, et que la législation devrait prévoir des garanties dans ce sens: par exemple en établissant des procédures de recours en cas d'annulation de nomination d'un agent public considérée comme une discrimination antisyndicale de sorte qu'il appartienne à l'administration ou aux autorités publiques en cause de prouver que la décision n'est pas liée aux activités syndicales de la personne en question.

Cas no 1264 PLAINTE PRESENTEE PAR LE SYNDICAT NATIONAL DES TRAVAILLEURS DES SERVICES PUBLICS CONTRE LE GOUVERNEMENT DE LA BARBADE

&htab;343.&htab;Dans une communication du 22 février 1984, le Syndicat national des travailleurs des services publics (NUPW) a présenté une plainte en violation des droits de négociation collective contre le gouvernement de la Barbade; il a transmis de nouvelles informations à ce sujet le 9 avril 1984. Le gouvernement a communiqué ses observations dans une lettre du 3 juillet 1984.

&htab;344.&htab;La Barbade a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l'organisation plaignante

&htab;345.&htab;Dans sa communication du 22 février 1984, le NUPW déclare qu'il s'efforce depuis 1980 de se faire reconnaître par la Banque nationale de la Barbade en qualité d'agent négociateur pour toutes les catégories de travailleurs de cette institution publique. La banque a refusé de le reconnaître, bien que le nombre de ses adhérents dépasse les 50 pour cent requis aux fins de la reconnaissance. Selon l'organisation plaignante, le Département du travail a fait le compte des cartes de membres et a décidé que le syndicat devait obtenir la reconnaissance, mais l'employeur l'a refusée.

&htab;346.&htab;Dans sa communication du 9 avril 1984, l'organisation plaignante explique qu'elle est un syndicat enregistré depuis 1964, anciennement Association de la fonction publique de la Barbade, et qu'elle a été fondée en 1944 pour représenter les travailleurs des services publics. Elle est affiliée au Congrès des travailleurs des Caraïbes, à l'Internationale des services publics et à la Confédération internationale des syndicats libres, et a demandé son affiliation à la Fédération des employés, techniciens et cadres. En 1976, la Caisse d'épargne de la Barbade - dont les employés étaient membres du NUPW - est devenue la Banque nationale de la Barbade, et le syndicat n'a pas tardé à éprouver des difficultés en matière de représentation: par exemple, refus de facilités pour tenir des réunions syndicales dans les locaux de la banque et refus de rencontrer les représentants du syndicat pour négocier une convention collective. En 1980, la banque a reçu un relevé statistique des membres du NUPW dans ses différents départements - ils y étaient en majorité - mais cela n'a pas résolu la question. L'organisation plaignante a fourni une copie du décompte des votes fait par le Département du travail le 31 mai 1984.

&htab;347.&htab;Le NUPW indique que la banque a néanmoins déduit et remis au syndicat le montant des cotisations et des primes d'assurance médicale, et a autorisé les membres de son personnel affilié au syndicat à suivre des cours de formation et à prendre part à d'autres activités syndicales.

&htab;348.&htab;L'organisation plaignante a attiré l'attention de l'employeur sur la Constitution de la Barbade, dont l'article 21 prévoit des garanties pour la liberté syndicale, et a adressé des copies de sa note au Premier ministre, qui est également chargé des questions économiques et financières, et dont la banque relève; elle a aussi écrit au ministre du Travail, mais sans résultat. Elle estime que ce refus de reconnaissance est une violation de la convention no 98.

B. Réponse du gouvernement

&htab;349.&htab;Dans sa communication du 3 juillet 1984, le gouvernement indique que la Banque nationale de la Barbade a été créée en application de la loi sur la Banque nationale de la Barbade, et qu'il n'y a pas à la Barbade de législation prévoyant une procédure pour le règlement des différends. La pratique établie à cet égard est que les parties en conflit tentent d'abord de résoudre leur désaccord et, si elles échouent, l'une d'elles ou les deux peuvent déférer la question au chef du Service du travail pour conciliation. La plupart des différends ainsi déférés sont réglés, mais il arrive que la conciliation à un niveau supérieur soit nécessaire.

&htab;350.&htab;D'après le gouvernement, il n'y aurait eu aucune réunion entre les représentants de la banque et ceux du syndicat, et les négociations n'auraient eu lieu que par correspondance, ce qui n'est pas souhaitable. Aucune des parties ne s'est adressée au chef du Service du travail en vue d'une conciliation. Le gouvernement signale que le ministre du Travail a été informé officiellement du différend le 8 février 1984 et qu'on lui a demandé ses bons offices pour essayer de régler le différend. En conséquence, il a donné instruction au chef du Service du travail d'organiser des réunions avec les représentants de la banque et ceux du syndicat en vue de trouver une solution.

C. Conclusions du comité

&htab;351.&htab;Le comité note que le présent cas concerne la violation présumée de la convention no 98 du fait de la non-reconnaissance du syndicat plaignant en qualité de représentant des travailleurs de la banque nationale - organisme établi par la loi - malgré une confirmation du Département du travail à cet effet. Il note aussi que, selon le gouvernement, les autorités compétentes s'efforcent actuellement de régler ce différend.

&htab;352.&htab;Dans des cas analogues, par le passé, le comité a souligné l'importance qu'il attache au principe selon lequel les employeurs - y compris les pouvoirs publics en leur qualité d'employeur - doivent reconnaître, aux fins de négociations collectives, les organisations représentatives des salariés à leur service. [Voir, par exemple, 190e rapport, cas no 882 (Royaume-Uni/Saint-Vincent), paragr. 289.] Il a aussi estimé dans le passé que, lorsqu'une vérification objective de la réclamation d'un syndicat confirmait que celui-ci était majoritaire - comme c'est le cas ici -, les pouvoirs publics devaient prendre les mesures nécessaires de conciliation afin d'obtenir cette reconnaissance par l'employeur aux fins de négociations collectives. [Voir, par exemple, 218e rapport, cas no 1122 (Costa Rica), paragr. 327.] Le comité estime que ce principe s'applique ici d'autant plus que, dans le présent cas, le refus de reconnaissance a paralysé les négociations collectives au sein de la banque. Eu égard à cette situation, le gouvernement doit - en vertu de l'article 4 de la convention no 98 qu'il a ratifiée - prendre des mesures pour encourager et faciliter la négociation de conventions collectives. Le comité note que le chef du Service du travail s'est déjà efforcé de régler le différend et il veut croire que les efforts entrepris permettront aux employés de banque de négocier collectivement leurs conditions d'emploi. Il prie le gouvernement de l'informer du résultat des mesures en cours.

Recommandations du comité

&htab;353.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Le comité rappelle le principe selon lequel les employeurs - y compris les administrations publiques en leur qualité d'employeurs - doivent reconnaître aux fins de négociations collectives les organisations représentatives des salariés à leur service.

b) Il prend note du fait que les autorités compétentes s'efforcent actuellement de régler le différend portant sur la reconnaissance auquel le Syndicat des employés de banque est confronté, et il prie le gouvernement de l'informer du résultat des mesures prises qui, il veut le croire, conduiront à des négociations collectives volontaires conformément à l'article 4 de la convention no 98.

CAS OU LE COMITE FORMULE DES CONCLUSIONS INTERIMAIRES Cas nos 1098 et 1132 PLAINTES PRESENTEES PAR LA CONFEDERATION INTERNATIONALE DES SYNDICATS LIBRES, LA FEDERATION SYNDICALE MONDIALE, LA CONVENTION NATIONALE DES TRAVAILLEURS D'URUGUAY ET LE CONGRES PERMANENT D'UNITE SYNDICALE DES TRAVAILLEURS D'AMERIQUE LATINE CONTRE LE GOUVERNEMENT DE L'URUGUAY

&htab;354.&htab;Le comité a examiné ces cas à ses réunions de novembre 1982, de mai 1983 et de février 1984 où il a présenté des rapports intérimaires au Conseil d'administration. [Voir 218e rapport du comité, paragr. 631-654, 226e rapport du comité, paragr. 141-153, et 233e rapport du comité, paragr. 382-391, approuvés respectivement par le Conseil d'administration à ses 221e, 223e et 225e sessions de novembre 1982, mai-juin 1983 et février 1984.] Le gouvernement a envoyé ultérieurement des observations complémentaires dans une communication du 25 mai 1984.

&htab;355.&htab;L'Uruguay a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur des cas

&htab;356.&htab;Quand le comité a examiné ces cas à sa réunion de février 1984, il a formulé les recommandations suivantes au sujet des allégations demeurées en instance:

&htab;Le comité, tout en notant que le gouvernement a indiqué les types de délits dont se seraient rendu coupables les 34 syndicalistes mentionnés dans la liste qui figure en annexe ("associations subversives", "attentat contre la Constitution", etc.), prie le gouvernement d'indiquer les faits concrets qui leur sont imputés, afin de pouvoir déterminer si leurs détention, poursuite ou condamnation sont liées à leurs activités syndicales. Le comité demande au gouvernement de fournir des informations sur la situation de ces personnes et, en particulier, d'indiquer si elles sont détenues.

&htab;Le comité demande à nouveau au gouvernement de prendre des mesures en vue d'accorder la liberté aux dirigeants syndicaux et syndicalistes Alberto Casas Rodríguez, Daniel Uriarte Pintos, Gene Mateos Calvete, Nelson Cuello Camejo, Ramón Freire Pizzano, Armando Coronel Báez, Humerto Bonelli, Helvecio Bonelli Arias, Alberto Urruty Pizzaro et Elbio Quinteros Bethancourt et de le tenir informé de toute action entreprise dans ce sens.

B. Réponse du gouvernement

&htab;357.&htab;Au sujet des faits concrets qui ont motivé la poursuite des personnes mentionnées dans l'annexe au dernier rapport du comité, le gouvernement déclare que le tribunal compétent a fourni des informations sommaires, dans les limites établies par la Constitution de la République à son article 118, alinéa 2, indiquant que les mesures prises visaient des actions telles que la possession d'armes, les exercices de tir, la distribution de bulletins clandestins, le recouvrement de contributions financières en espèces, le prosélytisme, la transmission de directives, la compilation d'informations, la falsification de documents, l'organisation d'hôpitaux clandestins, l'usage de fausses pièces d'identité, les attentats avec des lance-fusées, l'agression contre des commerces, l'impression et la distribution de tracts, l'entraînement à la filature de personnes, les manifestations sur la voie publique à l'intérieur du pays, le stockage des armes et les contacts avec d'autres mouvements terroristes. Toutes ces activités ont été effectuées au bénéfice du parti communiste, après que celui-ci eut été déclaré illégal par le décret no 1026/973 du 28 novembre 1973 parce qu'il s'était fait l'inspirateur et l'instrument de la subversion, "... en encourageant une lutte de classes artificielle pour détruire l'unité et l'économie nationales et en attaquant les principes de base du régime constitutionnel: la liberté, la famille, l'éducation, le travail, la propriété, bref la personne humaine".

&htab;358.&htab;Au sujet de la demande que le comité a faite au gouvernement de prendre des mesures visant à libérer 10 personnes, le gouvernement déclare que, bien que la décision doive être prise par le tribunal compétent, il a transmis la requête à ce dernier en exprimant, en outre, le désir qu'il y soit fait droit. Le gouvernement indique qu'il communiquera immédiatement toutes décisions prises en ce sens.

C. Conclusions du comité

&htab;359.&htab;Le comité note que le gouvernement a transmis aux autorités judiciaires sa demande de prendre des mesures pour remettre en liberté 10 dirigeants syndicaux et syndicalistes et qu'il a en outre exprimé le désir qu'il y soit fait droit. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de toutes décisions prises à cet égard.

&htab;360.&htab;En ce qui concerne les 34 syndicalistes détenus, poursuivis ou condamnés pour lesquels le comité avait demandé au gouvernement d'indiquer les faits concrets qui leur étaient imputés, le comité constate que le gouvernement a indiqué de manière globale les faits qui avaient motivé leur poursuite en signalant que toutes les activités qui leur sont imputées ont été exercées au bénéfice du parti communiste. Le comité note que quelques-unes de ces activités n'ont aucun rapport avec la liberté syndicale et constituent des délits de droit commun (possession d'armes, falsification de documents, usage de fausses pièces d'identité, attentats avec des lance-fusées, agressions contre des commerces, etc.). Néanmoins, certaines autres activités qui leur sont imputées auraient pu être exercées dans le cadre d'activités syndicales, indépendamment du fait qu'elles aient eu ou non une orientation favorable aux objectifs du parti communiste. Il en est ainsi, semble-t-il, notamment du recouvrement de contributions financières et de l'impression et de la distribution de tracts. Par conséquent, le comité prie le gouvernement de réexaminer la situation de ces personnes en vue de libérer celles qui ont pu faire l'objet de mesures privatives de liberté pour avoir exercé des activités de type syndical. Le comité prie le gouvernement de fournir des informations à ce sujet.

Recommandations du comité

&htab;361.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Le comité note que le gouvernement a transmis aux autorités judiciaires sa demande de prendre des mesures visant à mettre en liberté 10 dirigeants syndicaux et syndicalistes et qu'il a exprimé en outre le désir qu'il y soit fait droit. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de toute décision prise à cet égard. b) En ce qui concerne les 34 syndicalistes détenus, poursuivis ou condamnés pour lesquels le comité avait demandé au gouvernement d'indiquer les faits concrets qui leur étaient imputables, le comité constate que le gouvernement a indiqué globalement les faits qui ont motivé leur poursuite et que quelques-unes de ces activités n'ont aucun rapport avec la liberté syndicale et constituent des délits de droit commun. Néanmoins, certaines des autres activités qui leur sont imputables auraient pu être exercées dans le cadre d'activités syndicales. Par conséquent, le comité prie le gouvernement de réexaminer la situation de ces personnes en vue de libérer celles qui ont pu faire l'objet de mesures privatives de liberté pour avoir exercé des activités de type syndical, et de fournir des informations à ce sujet.

Cas no 1254 PLAINTE PRESENTEE PAR LA CONVENTION NATIONALE DES TRAVAILLEURS D'URUGUAY CONTRE LE GOUVERNEMENT DE L'URUGUAY

&htab;362.&htab;La plainte figure dans une communication de la Convention nationale des travailleurs d'Uruguay, datée du 9 janvier 1984. Cette organisation a envoyé des informations complémentaires par des communications des 26 janvier et 19 avril 1984. Le gouvernement a répondu par des communications des 7 mai et 6 août 1984.

&htab;363.&htab;L'Uruguay a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l'organisation plaignante

&htab;364.&htab;L'organisation plaignante allègue, dans ses communications des 9 et 26 janvier 1984, que M. Daniel Martínez, membre du mouvement qui vise à obtenir l'exercice des droits syndicaux dans le secteur public et, plus précisément, dans l'entreprise ANCAP (Administration nationale des combustibles, alcool et ciment Portland), a été informé, à la fin du mois d'octobre 1983, de son licenciement, en application de l'Acte institutionnel no 7. Selon le plaignant, cet acte serait appliqué, dans ce cas comme dans d'autres, dans le but de persécuter les fonctionnaires de l'Etat qui exercent des activités syndicales, afin d'empêcher la reprise de l'activité syndicale.

&htab;365.&htab;L'organisation plaignante précise que M. Daniel Martínez, ingénieur en mécanique industrielle, était entré à l'ANCAP le 27 septembre 1979, au titre d'une bourse, dont il a continué à bénéficier jusqu'au 1er décembre 1982. A compter de cette date, il a été intégré parmi les cadres permanents de l'ANCAP, comme ingénieur du Département de l'entretien. En août 1983, il a été proposé, par ses supérieurs, au poste de chef d'atelier, mais les instances supérieures se sont opposées à sa nomination. Quelques mois plus tard, comme il a été indiqué, il s'est vu appliquer les dispositions de l'Acte institutionnel no 7 par mesure de discrimination syndicale.

&htab;366.&htab;L'organisation plaignante allègue, en outre, que dans l'enseignement les organisations de travailleurs se heurtent à des mesures d'intimidation et de discrimination antisyndicale. C'est ainsi que les ordonnances nos 17 et 28 du Conseil national de l'éducation (dont elle communique certains articles) interdisent, expressément, les activités syndicales et prescrivent la destitution des fonctionnaires pour activités syndicales ou raisons idéologiques.

&htab;367.&htab;L'organisation plaignante ajoute que, dans les premiers jours de janvier 1984, trois professeurs du collège "Santa María" ont été licenciés; il s'agit de MM. José Pedro Rilla, Juan Carlos Ottavianelli et Hugo Nilo Pintos; les deux premiers appartiennent à la commission provisoire de l'Association des travailleurs de l'Institut général - collèges maristes - et le troisième est membre de cette association. Le directeur de l'établissement en question a reconnu par écrit la compétence technique et l'aptitude pédagogique de ces professeurs, mais il a fait valoir que l'activité menée par les intéressés dans le cadre de la loi no 15137 allait à l'encontre du projet éducatif du collège.

&htab;368.&htab;L'organisation plaignante indique également que leurs heures de cours, pour la présente année, n'ont pas été attribuées, au mois de mars 1984, à six professeurs de l'Université du travail de l'Uruguay. S'il est vrai que ces professeurs exerçaient leurs fonctions à titre provisoire, ils n'en comptaient pas moins de longues années d'ancienneté et possédaient une compétence technico-pédagogique bien établie. Comme aucune raison professionnelle ne justifie cet état de choses, il ne reste, pour seule explication, que les activités de l'Association civile des fonctionnaires de l'UTU. Au cours du même mois, un autre professeur, membre de la commission de direction de l'Association des professeurs de l'enseignement secondaire, a été informé de ce que les heures de cours, qui lui avaient déjà été attribuées pour un seul lycée, seraient réparties entre six lycées différents, ce qui le mettait ainsi dans l'impossibilité d'exercer son activité professorale. Le plaignant indique également que pour des raisons étrangères à l'exercice de son activité professionnelle il n'est pas attribué d'heure de cours à une enseignante du secondaire. Enfin, l'organisation plaignante allègue que, le 3 février 1984, des fonctionnaires de l'enseignement se sont réunis sur l'esplanade de l'Université de la République. Par cette manifestation, les intéressés entendaient revendiquer le respect de la liberté syndicale et protester contre les licenciements et la persécution syndicale. Par la suite, les membres de la Coordinadora de la Enseñanza (organisme de coordination de l'enseignement) ont été convoqués à la préfecture de police pour l'enregistrement de leurs dépositions.

B. Réponse du gouvernement

&htab;369.&htab;Dans sa communication datée du 7 mai 1984, le gouvernement transmet une copie de la décision de la direction de l'ANCAP de licencier M. Daniel Martínez Villaamil, dont la teneur est la suivante:

&htab;&htab;&htab; 27 octobre 1983

&htab;ATTENDU QUE : Par décision (D) no 1027/12/982, en date du 10 décembre 1982, il a été procédé, régulièrement, à l'intégration de M. Daniel Carlos Martínez Villaamil (registre no 36.073/5), afin qu'il participe au fonctionnement des services de la société, en qualité d'ingénieur en mécanique industrielle (échelle II, grade 22, groupe 1), avec affectation à la direction technique de la Division des combustibles;

&htab;ETANT DONNE : I)  Que conformément à l'article 40 des statuts des fonctionnaires de l'ANCAP (décret no 472/966) toute nomination a un caractère provisoire pour une période de un an. Durant cette période, l'employé peut être licencié, sans qu'il en soit donné motif, par décision de la direction par quatre voix pour. La loi no 14.173 établit que cette décision doit être adoptée à l'unanimité lorsque la direction est composée de trois membres;

&htab;II)&htab;Que le décret constitutionnel no 7/977 établit, en son article 15, que toutes les nominations qui sont faites dans la fonction publique, à compter de la date de son entrée en vigueur, auront un caractère provisoire pour une durée de un an, période pendant laquelle la décision prise à cet égard pourra être annulée sans qu'il en soit donné motif;

&htab;CONSIDERANT : I)  Que la nomination de M. Daniel Carlos Martínez Villaamil date de moins de un an; et

&htab;II)&htab;Que la confirmation du fonctionnaire en question dans la charge pour laquelle il a été nommé n'est jugée ni opportune ni nécessaire, la direction estimant que l'administration peut se passer du concours de l'intéressé sans compromettre l'efficacité du service;

COMPTE TENU DE TOUTES CES CONSIDERATIONS, LA DIRECTION DECIDE:

&htab;1°) D'annuler l'intégration régulière de M. Daniel Carlos Martínez Villaamil (registre no 29.068-7), en qualité d'ingénieur en mécanique industrielle (échelle II - grade 22 - groupe 1), avec affectation à la direction technique de la Division des combustibles, établie par la décision (D) no 1027/12/982 en date du 10 décembre 1982, conformément aux dispositions des articles 4 des statuts des fonctionnaires de l'ANCAP (décret no 472/966) et 15 du décret constitutionnel no 7/977 et aux attendus qui précèdent. &htab;2°) De renvoyer le cas à l'administration générale pour suite à donner.

&htab;370.&htab;Toujours selon le gouvernement, il est inexact que M. Martínez Villaamil ait été licencié comme le prétend le plaignant; cette décision d'annuler la nomination de l'intéressé aurait pu être prise même sans mentionner l'article 15 du décret constitutionnel no 7/977 qui semble tellement affecter l'organisation plaignante, étant donné que la décision d'annuler la nomination repose, essentiellement, sur le plan juridique, sur une disposition fréquemment appliquée des statuts des fonctionnaires de l'ANCAP, précisément l'article 4 de ces statuts, qui sont en vigueur depuis 1966.

&htab;371.&htab;Par ailleurs, toujours selon le gouvernement, il n'a pas connaissance de ce que M. Martínez Villaamil ait mené des activités syndicales qui l'auraient exposé à des représailles et, à cet égard, l'organisation plaignante ne donne pas de précisions sur ces prétendues activités.

&htab;372.&htab;Quant aux allégations relatives au licenciement de membres de la commission provisoire de l'Association des travailleurs de l'Institut général - collèges maristes -, le gouvernement déclare dans sa communication du 6 août 1984 que le Secrétariat d'Etat au travail est intervenu, à la demande des intéressés, au sujet de plaintes relatives à des licenciements intervenus dans l'Institut général - collèges maristes. Le conciliateur officiel, alors en poste, a pris note de ce qu'il avait été versé des indemnités aux travailleurs intéressés à leur entière satisfaction. Le droit syndical n'avait été violé dans aucun des cas présentés, dans la mesure où l'Association des fonctionnaires du collège Santa Maria n'a pas été constituée conformément à la loi 15137 relative aux associations professionnelles. Il n'existait, d'ailleurs, à ce sujet, qu'une demande présentée le 22 septembre 1982. Par la suite, cette association n'a pas soumis ses statuts ni tenu d'assemblée constitutive, de sorte qu'elle n'a même pas des dirigeants provisoires auxquels la loi susmentionnée et son décret d'application auraient conféré la protection due aux dirigeants syndicaux. Tous ces faits donnent à penser que les requérants se sont désintéressés de la question et qu'ils n'ont pu réunir le soutien de 15 travailleurs au minimum comme l'exige la loi. En outre, il ne paraît pas raisonnable d'affirmer que les licenciements intervenus en 1984 résultent simplement d'une demande présentée des années auparavant.

&htab;373.&htab;Pour ce qui est des enseignants auxquels il n'a pas été attribué d'heures de cours ou dont les heures de cours ont été réparties entre divers lycées, le gouvernement déclare que l'imprécision de l'allégation ne permet pas d'y apporter une réponse et que les plaignants n'ont fourni aucun élément qui permette de bien distinguer chaque cas.

&htab;374.&htab;Quant aux ordonnances nos 17 et 28 du Conseil national de l'éducation (CONAE), le gouvernement déclare qu'il est inexact qu'elles interdisent les activités syndicales et qu'elles prescrivent la destitution des fonctionnaires pour activités syndicales; il rappelle, en outre, une série de dispositions qui reconnaissent le droit d'organisation au personnel enseignant et formule des observations sur diverses dispositions des ordonnances susmentionnées.

C. Conclusions du comité

&htab;375.&htab;Le comité prend note de ce que les allégations de l'organisation plaignante et la réponse du gouvernement relatives à la cessation de la relation de travail de M. Daniel Martínez Villaamil dans l'entreprise publique ANCAP sont contradictoires. L'organisation plaignante estime qu'il s'agit d'une mesure de persécution motivée par le fait que l'intéressé a mené des activités syndicales visant à l'obtention de l'exercice des droits syndicaux dans le secteur public, mesure décidée en application de l'Acte institutionnel no 7. Le gouvernement a indiqué qu'il n'a pas connaissance de ce que M. Martínez Villaamil ait mené des activités syndicales qui l'auraient exposé à de prétendues représailles et il a relevé, à cet égard, que l'organisation plaignante n'a pas non plus donné de détails au sujet de ces prétendues activités. Le gouvernement a transmis le texte de la décision de la direction de l'ANCAP relative au licenciement de M. Martínez Villaamil et a fait observer que la décision d'annuler la nomination de ce fonctionnaire a reposé, essentiellement, sur le plan juridique, sur l'article 4 des statuts des fonctionnaires de l'ANCAP, et que cette mesure aurait également pu être prise sans qu'il soit fait mention de l'Acte institutionnel no 7.

&htab;376.&htab;Le comité relève, par ailleurs, que dans les considérants de la décision de la direction de l'ANCAP relative au licenciement de M. Martínez Villaamil, il est dit que "la confirmation du fonctionnaire en question dans la charge à laquelle il a été nommé n'est jugée ni opportune ni nécessaire, la direction estimant que l'administration peut se passer du concours de l'intéressé sans compromettre l'efficacité du service".

&htab;377.&htab;Le comité note que, tant le statut des fonctionnaires de l'ANCAP que l'Acte institutionnel no 7 (qui depuis a été abrogé) contiennent des dispositions qui prévoient que toute nomination de fonctionnaire ou d'employé aura un caractère provisoire pour une période de un an, durant laquelle le fonctionnaire ou l'employé pourra être licencié sans qu'il en soit donné motif. A cet égard, le comité tient à signaler l'importance qu'il accorde à ce que la législation prévoie des garanties appropriées afin d'éviter que la cessation de la relation de travail d'un employé ou d'un fonctionnaire du secteur public puisse être motivée par l'exercice par l'intéressé d'une fonction ou d'activités syndicales.

&htab;378.&htab;Quant au licenciement des trois syndicalistes de l'Association des travailleurs de l'Institut général - collèges maristes (MM. Rilla, Ottavianelli et Nilo Pintos), le comité prend note des déclarations du gouvernement et, en particulier, de ce que, selon lui, il n'y a pas eu violation du droit syndical en raison du fait que depuis 1982 l'association a omis de procéder aux démarches légales en vue de sa constitution. Le comité prie le gouvernement de lui indiquer les faits précis qui ont motivé le licenciement des professeurs en question afin de pouvoir se prononcer à ce sujet en disposant de tous les éléments d'information.

&htab;379.&htab;Pour ce qui concerne les actes de discrimination dont auraient fait l'objet certains professeurs, en ce qui concerne l'attribution des heures de cours, le comité observe que l'organisation plaignante n'a pas indiqué le nom des intéressés et que le gouvernement déclare ne pas être en mesure de répondre, les allégations ne distinguant pas suffisamment les cas les uns des autres.

&htab;380.&htab;Quant aux allégations relatives aux ordonnances nos 17 et 28 du Conseil national de l'éducation, le comité observe que le gouvernement a répondu à ce sujet. Le comité prie le gouvernement de lui envoyer le texte desdites ordonnances, afin de pouvoir examiner les allégations en pleine connaissance de cause.

&htab;381.&htab;Enfin, le comité observe que le gouvernement n'a pas répondu à l'allégation selon laquelle la préfecture de police aurait convoqué des membres de la Coordinadora de la Enseñanza pour l'enregistrement de leurs dépositions au sujet de la réunion de fonctionnaires de l'enseignement, le 3 février 1984, sur l'esplanade de l'Université de la République. Le comité prie le gouvernement de lui communiquer ses observations à ce sujet.

Recommandations du comité

&htab;382.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Le comité relève que le statut des fonctionnaires de l'ANCAP et l'Acte institutionnel no 7, qui depuis a été abrogé, contiennent des dispositions qui prévoient que toute nomination de fonctionnaire ou d'employé aura un caractère provisoire pour une période de un an, durant laquelle il sera possible de licencier le fonctionnaire ou l'employé en question sans en donner le motif. A cet égard, le comité tient à signaler l'importance qu'il accorde à ce que la législation prévoie des garanties appropriées afin d'éviter que la cessation de la relation de travail d'un employé ou d'un fonctionnaire du secteur public puisse être motivée par l'exercice, par l'intéressé, d'une fonction ou d'activités syndicales. b) Le comité prie le gouvernement de lui indiquer les faits précis qui ont motivé le licenciement de MM. Rilla, Ottavianelli et Nilo Pintos afin de pouvoir se prononcer à ce sujet en disposant de tous les éléments d'information.

c) Le comité prie le gouvernement de lui communiquer le texte des ordonnances nos 17 et 28 du Conseil national de l'éducation afin de pouvoir examiner les allégations relatives à ces ordonnances en pleine connaissance de cause.

d) Le comité observe que le gouvernement n'a pas répondu à l'allégation selon laquelle la préfecture de police aurait convoqué des membres de la Coordinadora de la Enseñanza pour l'enregistrement de leurs déclarations au sujet de la réunion de fonctionnaires de l'enseignement, le 3 février 1984, sur l'esplanade de l'Université de la République. Le comité prie le gouvernement de lui communiquer ses observations à ce sujet.

Cas no 1290 PLAINTE PRESENTEE PAR L'ASSOCIATION OUVRIERE AUTONOME DES TRAVAILLEURS DES TRANSPORTS INTERNATIONAUX CONTRE LE GOUVERNEMENT DE L'URUGUAY

&htab;383.&htab;La plainte a été présentée par l'Association ouvrière autonome des travailleurs des transports internationaux dans une communication du 21 juin 1984. Le gouvernement a répondu dans une communication du 7 août 1984.

&htab;384.&htab;L'Uruguay a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l'organisation plaignante

&htab;385.&htab;Dans sa communication du 21 juin 1984, l'organisation plaignante fait état du licenciement de quatre des cinq membres du bureau directeur provisoire de l'Association ouvrière autonome des travailleurs des transports internationaux. Elle déclare qu'il s'agit en fait d'actes de discrimination antisyndicale et que les licenciements se sont produits lorsque l'administration de l'entreprise de transport international de fret "Nicolás González" a appris qu'une assemblée constitutive de l'association ouvrière s'était réunie le 28 janvier 1984.

B. Réponse du gouvernement

&htab;386.&htab;Le gouvernement déclare qu'il n'a eu connaissance que du lienciement de trois personnes, à savoir celles qui avaient réclamé par voie administrative d'être intégrées dans leurs fonctions en application du droit syndical. Le gouvernement ajoute que, le 11 mai 1984, lors d'une audience de conciliation présidée par la Direction des relations professionnelles du ministère du Travail et de la Sécurité sociale, la réintégration dans ses fonctions avait été obtenue pour une des personnes licenciées, et ce aux mêmes conditions d'emploi que précédemment avec le maintien de l'ancienneté acquise dans l'entreprise. Dans les deux cas restants, il n'avait pas été possible de concilier les parties, car l'entreprise refusait de reconnaître l'activité syndicale qu'avaient eue les personnes licenciées et affirmait que le licenciement avait eu lieu pour des motifs relevant rigoureusement de l'exercice de leurs fonctions professionnelles. Malgré la déclaration de l'entreprise, la procédure administrative n'a pas encore été épuisée; elle se poursuit, en vue de déterminer s'il existe ou non un lien entre la cessation de la relation de travail de ces deux travailleurs et l'activité syndicale qu'ils exerçaient. Lorsque la procédure arrivera à son terme, le gouvernement communiquera les résultats obtenus.

C. Conclusions du comité

&htab;387.&htab;En ce qui concerne les allégations relatives aux licenciements de nature antisyndicale de dirigeants de l'Association ouvrière autonome des travailleurs des transports internationaux, le comité note que, selon le gouvernement, trois travailleurs seulement de l'entreprise de transport international de fret "Nicolás González" ont demandé, par voie administrative, à être réintégrés dans leurs fonctions en application du droit syndical. Le comité note également que l'un des dirigeants syndicaux a été réintégré dans ses fonctions à la suite d'une audience de conciliation présidée par l'autorité administrative.

&htab;388.&htab;Le comité note en outre que, pour ce qui est des deux autres dirigeants syndicaux licenciés par l'entreprise, le gouvernement a déclaré que la procédure administrative suit son cours en vue de déterminer si leur licenciement est lié ou non à l'activité syndicale qu'ils exerçaient. Le comité demande au gouvernement de communiquer les résultats de la procédure administrative actuellement en cours concernant ces licenciements.

&htab;389.&htab;D'une manière générale, le comité souhaite rappeler la grande importance qu'il attache au principe selon lequel nul ne doit être licencié ni frappé par d'autres mesures préjudiciables se rapportant à l'emploi pour avoir exercé des activités syndicales légitimes. [Voir, par exemple, 233e rapport, cas nos 1183 et 1205 (Chili), paragr. 500.]

Recommandations du comité

&htab;390.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Le comité note qu'un des dirigeants syndicaux licenciés par l'entreprise de transport international de fret "Nicolás González" a été réintégré dans ses fonctions à la suite d'une audience de conciliation présidée par l'autorité administrative.

b) Le comité demande au gouvernement de communiquer les résultats de la procédure administrative engagée par les deux autres dirigeants syndicaux licenciés par l'entreprise susmentionnée.

c) Le comité rappelle, d'une manière générale, l'importance qu'il attache au principe selon lequel nul ne doit être licencié ni faire l'objet d'autres mesures préjudiciables liées à l'emploi pour avoir exercé des activités syndicales légitimes.

Cas no 1110 PLAINTE PRESENTEE PAR LA CONFEDERATION MONDIALE DU TRAVAIL CONTRE LE GOUVERNEMENT DE LA THAILANDE

&htab;391.&htab;Le comité a déjà examiné ce cas à deux reprises [voir 226e rapport, paragr. 181 à 191, et 233e rapport, paragr. 449 à 462] et il a présenté au Conseil d'administration des conclusions intérimaires que celui-ci a approuvées à sa 223e session (mai-juin 1983) et à sa 225e session (février-mars 1984) respectivement. Le gouvernement a fourni des informations complémentaires au sujet du cas dans une communication du 31 août 1984.

&htab;392.&htab;La Thaïlande n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examens antérieurs du cas

&htab;393.&htab;Dans ses communications initiales du 26 janvier et du 27 mai 1982, la Confédération mondiale du travail (CMT) alléguait que, le 14 octobre 1981, deux dirigeants du Syndicat de la Ferme Saha et Cie avaient été tués par balles tandis qu'un troisième avait été blessé, à la suite de la rupture de négociations avec la direction de la ferme. Le gouvernement déclarait qu'après enquête policière au sujet des meurtres, deux individus avaient été inculpés, jugés, reconnus coupables et condamnés à mort par la Cour d'assises thaïlandaise le 13 décembre 1982. D'après le gouvernement, la cour avait jugé que les propriétaires de la ferme avaient payé les accusés pour commettre ces assassinats car ils étaient mécontents du rôle dirigeant que les victimes jouaient dans la création d'un syndicat dans l'entreprise.

&htab;394.&htab;Lors de son premier examen du cas, le comité avait vivement déploré les deux assassinats et s'était déclaré indigné devant de tels agissements qui ne pouvaient qu'appeler des mesures extrêmement sévères à l'encontre également des employeurs qui en étaient responsables à l'origine. Il avait insisté auprès du gouvernement pour qu'il fournisse des informations sur les procédures engagées contre les propriétaires de la Ferme Saha et Cie et pour qu'il communique le texte du jugement qui serait prononcé à leur encontre.

&htab;395.&htab;Par la suite, le gouvernement avait déclaré que son observation quant au fait que les assassins des deux syndicalistes auraient été à la solde des propriétaires de la ferme ne devrait pas être prise comme représentant son opinion propre, car il s'agissait d'une simple remarque fondée sur des présomptions réunies par les autorités de la Thaïlande. Il avait aussi indiqué que le ministère du Travail n'était pas en mesure d'engager une action contre la Ferme Saha et Cie, car cela n'entrait pas dans ses compétences. Selon le gouvernement, cette affaire relevait de la compétence exclusive de la police et de la Cour d'assises qui ne pouvaient lui donner d'autres suites judiciaires puisque aucune des parties n'avait intenté une action contre la Ferme Saha et Cie.

&htab;396.&htab;Lors de son second examen du cas, le comité avait demandé au gouvernement d'envoyer le texte de la décision judiciaire relative aux assassinats, compte tenu de la contradiction qui existait entre les différentes déclarations du gouvernement. Il avait aussi prié le gouvernement d'examiner à nouveau les mesures qui pouvaient être prises pour poursuivre les instigateurs du crime et de le tenir informé des résultats de toute nouvelle enquête qui serait menée par la police ou les tribunaux au sujet des morts en question, ainsi que de toute mesure que le ministère du Travail viendrait à prendre pour faire en sorte que les droits syndicaux des travailleurs de la Ferme Saha et Cie soient pleinement respectés. Le comité avait appelé l'attention du gouvernement sur le principe selon lequel la liberté syndicale ne peut se développer que dans une situation de respect et de garantie complets des droits fondamentaux de l'homme, en particulier du droit à la vie et du droit à la sécurité de la personne. Il lui avait demandé de prendre les mesures appropriées pour garantir le droit à la sécurité personnelle des syndicalistes.

B. Faits ultérieurs

&htab;397.&htab;Dans une communication du 31 août 1984, le gouvernement déclare qu'il ressort de l'examen de l'arrêt de la Cour que l'allusion au fait que le propriétaire de la Ferme Saha et Cie aurait payé les accusés pour qu'ils assassinent les syndicalistes en question n'était qu'une simple assertion verbale de l'oncle et de la tante de l'un des accusés à l'officier de police qui enquêtait sur l'affaire, et qu'elle n'était corroborée par aucun fait ni confirmée par la déposition des accusés. En outre, poursuit le gouvernement, les éléments de preuves rassemblés par les autorités thaïlandaise révèlent que, avant les meurtres, il y avait eu des heurts, allant jusqu'aux violences physiques, entre l'un des accusés et l'une des victimes.

C. Conclusions du comité

&htab;398.&htab;Le comité note l'explication du gouvernement selon laquelle il n'apparaît nullement dans l'arrêt que la Cour d'assises a rendu au sujet du meurtre des deux syndicalistes que les coupables auraient été à la solde du propriétaire de la Ferme Saha et Cie, mais il regrette que les explications du gouvernement n'aient pas été fournies plus tôt. Il demande à nouveau au gouvernement de fournir une copie de l'arrêt en question.

&htab;399.&htab;Le comité note que le gouvernement ne fournit pas d'informations - comme le comité lui avait demandé de le faire - sur les mesures que le ministère du Travail aurait prises éventuellement pour faire en sorte que les droits syndicaux des travailleurs de la Ferme Saha et Cie soient pleinement respectés. Cette omission est particulièrement regrettable étant donné que le syndicat de l'entreprise en question a perdu deux de ses dirigeants il y a plus de trois ans et qu'on ne dispose d'aucun renseignement permettant de savoir s'il poursuit ses activités ou même s'il existe encore. Dans ces conditions, le comité ne peut que réitérer la conclusion qu'il a formulée précédemment, selon laquelle la liberté syndicale ne peut s'exercer que dans une situation de respect et de garantie complets des droits fondamentaux de l'homme, en particulier du droit à l'inviolabilité et à la sécurité de la personne. [Voir, par exemple, 234e rapport, cas no 1252 (Colombie), paragr. 282.]

Recommandations du comité

&htab;400.&htab;Dans ces conditions, notant que les auteurs du meurtre des deux syndicalistes en question ont été dûment jugés et punis, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Le comité note que, selon le gouvernement, il n'apparaît en fait aucunement dans l'arrêt de la Cour d'assises au sujet de l'affaire en question que le propriétaire de la Ferme Saha et Cie aurait payé les auteurs des meurtres en vue d'éliminer des militants syndicaux. Il regrette que cette explication n'ait pas été fournie plus tôt. Il demande à nouveau au gouvernement de fournir une copie de l'arrêt en question.

b) Le comité déplore que le gouvernement n'ait pas fourni de renseignements sur les mesures prises pour faire en sorte que les droits syndicaux des travailleurs de la Ferme Saha et Cie soient pleinement respectés, d'autant plus que le syndicat de cette entreprise a perdu deux de ses dirigeants il y a plus de trois ans.

c) Le comité ne peut que réitérer la conclusion qu'il a formulée antérieurement selon laquelle la liberté syndicale ne peut s'exercer que dans une situation de respect et de garantie complets des droits fondamentaux de l'homme, en particulier du droit à l'inviolabilité et à la sécurité de la personne.

Cas nos 1176, 1195 et 1215 PLAINTES PRESENTEES PAR LE CONGRES PERMANENT DE L'UNITE SYNDICALE DES TRAVAILLEURS D'AMERIQUE LATINE, LA FEDERATION AUTONOME SYNDICALE GUATEMALTEQUE, LA CONFEDERATION INTERNATIONALE DES SYNDICATS LIBRES ET LA FEDERATION SYNDICALE MONDIALE CONTRE LE GOUVERNEMENT DU GUATEMALA

&htab;401.&htab;Les plaintes relatives au cas no 1176 figuraient dans des communications du Congrès permanent de l'Unité syndicale des travailleurs d'Amérique latine (CPUSTAL) et de la Fédération autonome syndicale guatémaltèque (FASGUA) datées, respectivement, des 21 janvier 1983 et 3 mars 1984. La FASGUA avait envoyé des informations complémentaires dans des communications des 29 mars et 10 octobre 1984. Lors de la réunion de novembre 1983, face à la contradiction existant entre les allégations des plaignants et la réponse du gouvernement du 25 octobre 1983, le comité avait décidé de communiquer à l'organisation plaignante (CPUSTAL) la réponse du gouvernement, afin qu'elle fasse connaître ses observations en la matière. Depuis lors, le comité a demandé, à plusieurs reprises, à l'organisation plaignante de transmettre ses observations.

&htab;402.&htab;Pour ce qui est du cas no 1195, dans lequel l'organisation plaignante est la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), le comité l'a examiné, lors de sa réunion de novembre 1983, et a présenté un rapport intérimaire au Conseil d'administration. [Voir 230e rapport du comité, paragr. 689 à 699, approuvé par le Conseil d'administration à sa 224e session (novembre 1983).]

&htab;403.&htab;Les plaintes relatives au cas no 1215 figurent dans des communications du CPUSTAL, de la Fédération syndicale mondiale (FSM) et de la FASGUA datées, respectivement, des 19, 23 et 30 juin 1983. La FASGUA a envoyé des informations complémentaires dans des communications du 20 août et du 7 octobre 1983 et la FSM dans une communication du 7 octobre 1983. Pour ce qui concerne les allégations formulées dans le cadre de ce cas, la CISL a demandé au Directeur général du BIT d'intervenir auprès du gouvernement. Le Directeur général a donné suite à cette demande.

&htab;404.&htab;Faute d'avoir obtenu des réponses précises au sujet des cas nos 1195 et 1215, le comité a prié instamment le gouvernement, lors de sa réunion de mai 1984 [voir 234e rapport, paragr. 17], de transmettre ses commentaires de toute urgence, appelant son attention sur le fait que, conformément à la règle de procédure en vigueur, il présenterait, à sa prochaine réunion, un rapport sur le fond de ces affaires, même si les observations du gouvernement n'étaient pas reçues à cette date.

&htab;405.&htab;Le gouvernement a envoyé certaines informations sur les cas nos 1176, 1195 et 1215 dans des communications des 13 et 25 octobre 1983, du 13 janvier et du 13 avril 1984. Exception faite des observations relatives au cas no 1176, il s'agit d'observations de caractère général.

&htab;406.&htab;Le Guatemala a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants Cas no 1176

&htab;407.&htab;Dans sa communication du 21 janvier 1983, le CPUSTAL allègue que Julián Revolorio et Raymundo Pérez (dirigeants du syndicat de l'entreprise Fábrica de Tejidos Universales) ont été séquestrés les 13 et 14 décembre 1982. Selon l'organisation plaignante, ces dirigeants ont été enlevés dans l'enceinte de la fabrique et poussés dans une voiture particulière portant la plaque minéralogique no 79-19-49, immatriculation qui correspond à celle des véhicules appartenant à l'Etat. Le CPUSTAL signale qu'il craint pour la vie de ces dirigeants.

&htab;408.&htab;Dans ses communications des 3 et 29 mars 1983, la Fédération autonome syndicale guatémaltèque (FASGUA) signale que, le 23 septembre 1983, le cadavre du dirigeant syndical Julián Revolorio a été découvert dans un cimetière clandestin et qu'il portait les marques de tortures récentes.

&htab;409.&htab;Dans sa communication du 10 octobre 1984, la FASGUA allègue que l'entreprise susmentionnée avait procédé à l'arrêt des opérations dans le but de détruire le syndicat. Ceci se serait produit après une série d'actions dirigées contre le syndicat et ses dirigeants. Ainsi le syndicaliste Valério Oscal a été l'objet de persécutions en janvier 1984 et, comme il n'a pu être enlevé, ce fut son frère qui fut victime d'un enlèvement.

Cas no 1195

&htab;410.&htab;Lorsque le comité a examiné ce cas, lors de sa réunion de novembre 1983, il a formulé les recommandations suivantes sur les allégations restées en suspens (arrestation et disparition de Mme Yolanda Urízar Martínez de Aguilar et décision ultérieure de la fusiller):

&htab;Le comité exprime sa grave préoccupation devant le fait que, sept mois après la disparition de Mme Urízar Martínez Aguilar, avocate syndicale de la Centrale nationale des travailleurs, les recherches menées ne paraissent pas avoir permis d'élucider l'affaire.

&htab;Le comité insiste pour que l'enquête en cours sur la disparition de Mme Urízar soit terminée d'urgence, et il appelle fermement son attention sur le fait qu'un mouvement syndical libre et indépendant ne peut se développer que dans une société garantissant et respectant les droits des personnes à la sécurité et les autres droits fondamentaux de l'homme. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé des résultats de l'enquête en cours.

&htab;Le comité demande au gouvernement d'envoyer de toute urgence ses observations au sujet de la décision qu'il aurait prise de faire fusiller Mme Urízar ainsi que plusieurs syndicalistes. Le comité exhorte le gouvernement à revenir sur sa décision s'il en est ainsi.

Cas no 1215

&htab;411.&htab;Les plaignants allèguent l'arrestation de Manuel Francisco Contreras, dirigeant et fondateur de la Fédération autonome syndicale du Guatemala (FASGUA) et du Comité national de l'Unité syndicale du Guatemala (CNUS). Selon les plaignants, ce dirigeant syndical qui, est atteint d'un grave diabète, a été capturé le 2 juin 1983 par des individus armés, vêtus en civil et appartenant aux forces de police, alors qu'il attendait de prendre un moyen de transport pour se rendre dans un hôpital où il avait subi récemment une délicate opération chirurgicale de l'abdomen.

&htab;412.&htab;Les plaignants allèguent également l'enlèvement de Graciela de Samoya et de ses deux enfants et celui de Luis Estrada et de Víctor Ascón (tous trois dirigeants du Syndicat universitaire) en septembre 1982; l'enlèvement du dirigeant Fermín Solano, l'arrestation du dirigeant José Luis Ramos et de Mme Antonia Argueta, par la police, le 31 juillet 1983.

&htab;413.&htab;Par la suite, les plaignants ont indiqué qu'un groupe de 35 personnes devaient être exécutées au Guatemala le 9 octobre 1983 et que, parmi elles, figuraient les syndicalistes Manuel Francisco Contreras, José Luis Ramos, Luis Estrada, Victor Ascón, Raymundo Pérez, Yolanda Urízar et Lucrecia Orellano.

B. Réponse du gouvernement

&htab;414.&htab;Au sujet des allégations relatives au cas no 1176, le gouvernement a déclaré, dans sa communication du 25 octobre 1983 que, selon les informations fournies par la police nationale, MM. Julián Revolorio et Raymundo Pérez n'ont pas été arrêtés, qu'ils ne sont pas incarcérés dans des centres de détention et qu'ils ne font pas non plus l'objet de plaintes. Par la suite, après avoir reçu la communication de la Fédération autonome syndicale, le gouvernement a envoyé une nouvelle communication en date du 13 avril 1984, dans laquelle il déclare que les autorités guatémaltèques ne mènent pas et n'ont aucun intérêt à mener des activités de persécution ou de harcèlement contre les véritables représentants des organisations syndicales existant au Guatemala; bien au contraire, ces dirigeants bénéficient de la sympathie et de l'appui des autorités pour mener leurs activités d'organisation et de négociation au bénéfice des travailleurs. Toutefois, il arrive que des éléments impliqués dans la subversion internationale qui a déjà fait tant de mal au peuple honnête et travailleur du Guatemala usurpent, dans bien des cas, des charges de représentation qui ne leur ont pas été accordées par les travailleurs authentiques et qu'ils mènent, alors, des activités tendant à ce que l'on impute aux autorités guatémaltèques des actions ou des faits dont elles ne sont pas responsables.

&htab;415.&htab;Quant aux allégations relatives au cas no 1215, le gouvernement déclare, dans une communication du 13 octobre 1983, que les messages envoyés par les organisations syndicales constituent une manoeuvre de plus dans le cadre de la campagne menée par certains organismes et associations pour porter atteinte au prestige du gouvernement de la République. Elles ont, en outre, trompé ainsi la bonne foi du Bureau international du Travail. Le gouvernement actuel de la République a pris l'engagement solennel aussi bien devant le peuple du Guatemala que devant la communauté internationale de respecter les droits de l'homme et, notamment, le droit à la vie et à une bonne administration de la justice. Parmi les mesures prises par le gouvernement actuel du Guatemala en matière de droits de l'homme figurent la suppression des tribunaux d'exception et l'élargissement de l'article du statut fondamental du gouvernement concernant la garantie de la défense en justice et d'un procès public auprès des instances prévues par la législation en vigueur. Il est donc possible d'assurer qu'il n'existe, au Guatemala, ni tribunaux ni procès secrets ni, moins encore, d'exécutions arbitraires ou sommaires. Le pouvoir judiciaire, unique instance chargée d'administrer la justice, fonctionne en toute indépendance du pouvoir exécutif. Les tribunaux compétents sont les seules instances qui peuvent condamner à la peine de mort les personnes qui ont commis des délits de droit commun graves, pour lesquelles ladite peine est prévue; cette peine a un caractère exceptionnel et n'est décidée qu'à l'issue d'un procès devant deux instances et qu'après le rejet du recours extraordinaire en cassation auprès de la Cour suprême de justice, le tribunal le plus élevé de la République. Le gouvernement réaffirme sa décision de respecter les droits de l'homme, parmi lesquels figurent, naturellement, le droit d'organisation collective et le libre exercice, dans le cadre de la loi, de leurs activités par les syndicats et les dirigeants syndicaux. Le gouvernement conclut en signalant qu'il s'est informé auprès de la Cour suprême de justice pour savoir si l'un des tribunaux de la République poursuivait les personnes mentionnées dans les plaintes et, dans l'affirmative, pour demander au tribunal en question de communiquer le numéro du dossier, d'indiquer les délits qui sont imputés aux personnes en cause et la situation du procès et de communiquer également le nom du défenseur des intéressés et toute autre information pertinente.

&htab;416.&htab;Au sujet des cas nos 1176, 1195 et 1215, le gouvernement déclare, dans une communication du 13 janvier 1984, qu'il manque d'informations pouvant constituer des preuves ou des éléments de preuves permettant d'établir la vérité quant aux faits dénoncés; c'est la raison pour laquelle il continue de procéder à des recherches pour éclaircir les faits; aussitôt qu'il obtiendra des résultats sur le sujet, il les fera connaître.

C. Conclusions du comité

&htab;417.&htab;En premier lieu, le comité tient à déplorer le fait que, malgré la gravité des allégations relatives à la détention, à l'enlèvement, à l'assassinat ou aux menaces d'exécution de dirigeants syndicaux, le gouvernement n'ait pas envoyé d'informations complètes sur les allégations présentées dans le cadre du cas no 1176 et qu'il n'ait pas non plus communiqué les informations demandées par le comité lorsqu'il a examiné le cas no 1195, ni répondu, de façon détaillée, aux allégations relatives au cas no 1215. Le comité déplore d'autant plus cette attitude que, au sujet des deux derniers cas mentionnés, il avait instamment prié le gouvernement, en mai 1984, de lui transmettre ses observations de toute urgence. [Voir 234e rapport, paragr. 17.] Le gouvernement n'ayant pas répondu depuis la réunion du comité en mai 1984, le comité se voit dans l'obligation d'examiner ces cas en l'absence des observations détaillées du gouvernement sur ces allégations.

&htab;418.&htab;Pour ce qui est du cas no 1176, relatif à la séquestration des dirigeants syndicaux Julián Revolorio et Raymundo Pérez, qui auraient été emportés dans un véhicule portant des plaques officielles, le comité exprime sa grave préoccupation, en relevant qu'une des organisations plaignantes a indiqué que le cadavre de M. Julián Revolorio a été découvert dans un cimetière clandestin et qu'il portait des traces de tortures. Le comité observe également que le gouvernement s'est borné à déclarer que les autorités n'ont aucun intérêt à mener des activités de persécution ou de harcèlement contre les dirigeants syndicaux et que les dirigeants syndicaux en question n'ont pas été arrêtés, ne se trouvent pas incarcérés dans des centres de détention et qu'ils ne font pas l'objet de plaintes.

&htab;419.&htab;Le comité prie instamment le gouvernement d'indiquer s'il est exact que le dirigeant syndical Julián Revolorio a été assassiné et, dans l'affirmative, de mener une enquête judiciaire afin d'éclaircir totalement les faits, d'établir les responsabilités et de sanctionner les coupables. Le comité observe que, selon l'allégation des plaignants, dans le cadre du cas no 1215, il aurait été décidé d'exécuter M. Raymundo Pérez. Si tel était le cas, le comité prie le gouvernement de revenir sur cette décision. Dans le cas contraire, le comité prie le gouvernement de transmettre des observations détaillées sur l'allégation relative à sa séquestration et de procéder aux recherches appropriées en vue de déterminer le lieu où il se trouve, d'éclaircir les faits, d'établir les responsabilités et de sanctionner les coupables.

&htab;420.&htab;Le comité prie le gouvernement d'envoyer ses observations sur les allégations contenues dans la communication de la FASGUA du 10 octobre 1984 (arrêt des opérations de l'entreprise Fabrica de Tejidos Universales dans le but de détruire le syndicat et enlèvement du frère du syndicaliste Valerio Oscal).

&htab;421.&htab;Pour ce qui est du cas no 1195, compte tenu du fait que le gouvernement n'a pas envoyé les informations qui lui ont été demandées, le comité ne peut que réitérer les conclusions auxquelles il est parvenu à sa réunion de novembre 1983 concernant la disparition de Mme Urizár Martínez de Aguilar et la décision qui aurait été prise de la fusiller en même temps que d'autres syndicalistes.

&htab;422.&htab;Au sujet du cas no 1215, qui a trait à la détention et à l'enlèvement de dirigeants syndicaux et à la menace d'exécution qui pèserait sur divers dirigeants syndicaux et syndicalistes, le comité prend note de ce que, selon le gouvernement, ces allégations constituent une manoeuvre de plus entreprise dans le cadre de la campagne menée par certaines associations pour porter atteinte au prestige du gouvernement du Guatemala. Le comité prend note également des garanties en matière de procédure dont fait état le gouvernement et, en particulier, de ce que la peine de mort a un caractère exceptionnel et ne peut être infligée que pour des délits de droit commun graves pour lesquels elle est prévue et seulement à l'issue d'un procès devant deux instances et après le rejet d'un recours extraordinaire en cassation. Le comité observe cependant que le gouvernement n'a pas encore envoyé les informations qu'il s'était engagé, dans sa communication du 13 octobre 1983, à demander aux autorités judiciaires au sujet des personnes mentionnées dans les allégations.

&htab;423.&htab;Dans ces conditions, tout en exprimant sa profonde préoccupation, le comité prie le gouvernement d'envoyer, de toute urgence, des observations concrètes sur la décision qui aurait été prise d'exécuter les dirigeants syndicaux et les syndicalistes mentionnés par les plaignants (Raymundo Pérez, Yolanda Urízar Martínez de Aguilar, Manuel Francisco Contreras, José Luis Ramos, Luis Estrada, Víctor Ascón et Lucrecia Orellana) et, si cette décision a été effectivement prise, de la révoquer. Le comité prie également le gouvernement d'envoyer des informations concernant le lieu où se trouveraient ces dirigeants syndicaux et syndicalistes ainsi que sur ceux qui, selon le plaignant, auraient été arrêtés ou enlevés (Graciela Samoya et ses deux enfants, Fermín Solano et Antonia Argueta). Le comité prie également le gouvernement d'indiquer les faits qui auraient motivé les détentions alléguées et de prendre des mesures pour que soit menée une enquête judiciaire sur les allégations d'enlèvement (enquête qui n'aurait été menée qu'au sujet de Mme Urízar) afin de déterminer où se trouvent les intéressés, d'éclaircir totalement les faits, d'établir les responsabilités et de sanctionner les coupables.

&htab;424.&htab;D'une manière générale, le comité prie le gouvernement de l'informer le plus rapidement possible de l'évolution des enquêtes demandées et signale à son attention que la liberté syndicale ne peut s'exercer que dans une situation de respect et de garantie complets des droits fondamentaux de l'homme, en particulier du droit à l'inviolabilité et du droit à la sécurité de la personne. [Voir, par exemple, 233e rapport, cas no 1233 (El Salvador), paragr. 682.]

Recommandations du comité

&htab;425.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, les conclusions suivantes: a) Le comité exprime sa grande préoccupation devant la gravité des allégations relatives à la détention, à l'enlèvement, à l'assassinat ou aux menaces d'exécution de dirigeants syndicaux et déplore que le gouvernement n'ait pas envoyé d'informations détaillées à ce sujet.

b) Le comité prie instamment le gouvernement d'indiquer s'il est vrai que le dirigeant syndical Julián Revolorio a été assassiné et, dans l'affirmative, de procéder à une enquête judiciaire en vue d'éclaircir totalement les faits, d'établir les responsabilités et de sanctionner les coupables.

c) Tout en exprimant sa profonde préoccupation, le comité prie le gouvernement d'envoyer de toute urgence des observations concrètes sur la décision qui aurait été prise d'exécuter les dirigeants syndicaux et syndicalistes mentionnés par les plaignants (Raymundo Pérez, Yolanda Urízar Martínez de Aguilar, Manuel Francisco Contreras, José Luis Ramos, Luis Estrada, Víctor Ascón et Lucrecia Orellana). Le comité prie le gouvernement de révoquer cette décision si elle a été effectivement prise.

d) Le comité prie également le gouvernement d'envoyer des informations sur le lieu où se trouveraient ces dirigeants syndicaux et ces syndicalistes et sur leur situation ainsi que sur ceux qui, selon le plaignant, auraient été arrêtés ou enlevés (Graciela Samoya et ses deux enfants, Fermín Solano et Antonia Argueta). Le comité prie également le gouvernement d'indiquer les faits qui auraient motivé les détentions alléguées et de prendre des mesures pour qu'il soit procédé à une enquête judiciaire sur les enlèvements allégués (enquête qui aurait été entreprise au sujet de Mme Urízar), afin de déterminer où se trouvent les intéressés, d'éclaircir totalement les faits, d'établir les responsabilités et de sanctionner les coupables.

e) Le comité prie le gouvernement de l'informer, le plus tôt possible, de l'évolution des enquêtes demandées et signale à son attention que la liberté syndicale ne peut s'exercer que dans une situation de respect et de garantie complets des droits fondamentaux de l'homme, en particulier du droit à l'inviolabilité et du droit à la sécurité de la personne.

f) Le comité demande au gouvernement de lui envoyer ses observations sur les allégations contenues dans la communication de la FASGUA du 10 octobre 1984 (arrêt des opérations de l'entreprise Fabrica de Tejidos Universales dans le but de détruire le syndicat et enlèvement du frère du syndicaliste Valerio Oscal).

Cas no 1204 PLAINTE PRESENTEE PAR LA CONFEDERATION INTERNATIONALE DES SYNDICATS LIBRES CONTRE LE GOUVERNEMENT DU PARAGUAY

&htab;426.&htab;La plainte figure dans des communications de la Confédération internationale des syndicats libres des 20 et 27 mai 1983. Cette organisation a présenté des informations complémentaires dans des communications des 13 octobre et 16 décembre 1983. Le gouvernement a répondu par une communication du 14 septembre 1984.

&htab;427.&htab;Le Paraguay a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l'organisation plaignante

&htab;428.&htab;Dans ses communications des 20 et 27 mai 1983, l'organisation plaignante allègue que le ministère du Travail et la Police politique du Paraguay se sont engagés dans une opération de répression des organisations syndicales ayant constitué le Mouvement syndical de solidarité (MSS) qui, le 21 septembre 1982, avait fait publiquement connaître sa constitution et ses objectifs par une insertion payée dans le quotidien "ABC Color". L'organisation plaignante ajoute que, prétextant qu'ils favorisaient "un vaste plan d'agitation marxiste", les services de police ont arrêté de nombreux membres du MSS, et ont, de plus, procédé à des perquisitions arbitraires et à des actes de répression illégaux en pleine nuit. Ainsi ils ont arrêté Rubén Lisboa (dirigeant syndical du Syndicat de la Banque du Brésil et de la Fédération du personnel bancaire - FETRABAN), Abel Grange (employé de commerce), Gustavo Codas (journaliste du quotidien "ABC Color" et membre du Syndicat des journalistes du Paraguay (Sindicato de Periodistas del Paraguay - SPP)), Roberto Villalba, Stella Rufinelli, Margarita Musse, Margarita Elías, Sonia Duque de Arriaza, Sonia Aquino, Desiderio Arzamendia, Benjamín Livieres, Silvano Presentado Acosta, Eulalia Leguizamón, Damián Vera (membres du personnel de la Banque de données du Paraguay (Banco Paraguayo de Datos - BPD), institution de consultations spécialisée dans l'analyse et la compilation de données nationales), Rubén Miró, Javier Joy Salomoni, Fernando Rodríguez Alcalá, Juan Carlos Oviedo et María Herminia Feliciangeli (dirigeants universitaires).

&htab;429.&htab;En outre, l'organisation plaignante allègue que le ministre de l'Intérieur a menacé d'exil les dirigeants syndicaux, dirigeants universitaires et journalistes membres du SPP.

&htab;430.&htab;L'organisation plaignante relève de plus que le quotidien "ABC Color", qui avait publié l'avis de création du Mouvement syndical de solidarité, a fait systématiquement l'objet d'actes d'intimidation et que sa libre circulation a été illégalement restreinte et entravée, ses camions de distribution ayant été tous les jours retardés par la police. Le 13 mai 1983, à l'aube, des agents de police ont encerclé les locaux de la rédaction du quotidien et saisi les exemplaires devant être expédiés à l'intérieur du pays.

&htab;431.&htab;Dans ses communications du 13 octobre et du 16 décembre 1983, l'organisation plaignante signale que les membres du MSS, dont elle avait fait état dans sa communication précédente, étaient toujours incarcérés, et que leur état de santé était extrêmement préoccupant puisqu'ils avaient entamé quelques semaines auparavant une grève de la faim d'une durée indéfinie.

&htab;432.&htab;L'organisation plaignante signale que, depuis quatre ans, le Syndicat des journalistes du Paraguay (Sindicato de Periodistas del Paraguay) fait les démarches nécessaires auprès du ministère de la Justice et du Travail pour obtenir la personnalité juridique, mais en vain, les autorités lui refusant systématiquement l'autorisation légale. Au sujet des dirigeants de ce Syndicat, l'organisation plaignante précise que le secrétaire, M. Codas Friessmand, ayant demandé asile à l'ambassade du Venezuela, s'y trouve toujours sans pouvoir obtenir un sauf conduit pour quitter le pays, et que le secrétaire général, M. Alcibiades González del Valle, journaliste du quotidien "ABC Color", a été arrêté le 23 septembre sur "ordre supérieur" puis, une fois en prison, accusé d'infraction à la loi no 209 sur la "défense de la démocratie". En outre, le 15 juillet 1983, M. Aldo Zuccolillo, directeur du quotidien "ABC Color", a été arrêté pour avoir autorisé la publication des faits qui étaient à l'origine de la présente plainte devant le comité, ainsi que de commentaires à ce sujet. En plus de cela, les docteurs Jorge Alvarenga et Carlos Cuevas, médecins à l'hôpital universitaire, ont été arrêtés par la police lors d'une "table ronde" sur le thème "Syndicalisme et répression". Quelques jours après, le docteur Alvarenga a été expulsé du pays; le docteur Cuevas demeure toujours en prison.

&htab;433.&htab;L'organisation plaignante allègue en plus que l'entreprise textile "La Americana S.A.", confrontée aux demandes des syndicats qui avaient présenté un cahier de revendications, a licencié arbitrairement de nombreux travailleurs. Dans l'entreprise "FRISA S.A.", les syndicats ayant demandé le versement des salaires dus depuis juin 1983, 800 travailleurs ont été menacés de licenciement massif.

&htab;434.&htab;L'organisation plaignante fait enfin état de la fermeture de la Radio Ñanduti (ZP 14) pour avoir transmis des messages de la Confédération paraguayenne des travailleurs en exil en date du 8 août 1983. Dans le même temps, l'Administration nationale des télécommunications (ANTELCO), institution étatique, a interdit au présentateur et directeur de cette radio, M. Humberto Rubín, d'exercer sa profession.

B. Réponse du gouvernement

&htab;435.&htab;Se référant aux arrestations alléguées, le gouvernement déclare qu'en date du 3 août 1984 le juge pénal de première instance avait ordonné la mise en liberté de Antonio Páez, Hans Grossen, Raquel Rojas de Carmona, Sonia Duque de Arriaza, Fernando Esteban Rodríguez Alcalá Zuccolillo, Javier Antonio Joy Salomoni, José Rubén Miró et Eulalia Leguizamón, huit des 20 prévenus inculpés de violation de la loi no 209 "sur la défense de la paix publique et de la liberté de la personne", qui proscrit le communisme au Paraguay et punit, après une procédure judiciaire, tout comportement jugé subversif. Le magistrat en exercice a accepté les requêtes présentées par les défenseurs desdits accusés, et les a libérés. Le gouvernement précise qu'il s'agit de personnes qui n'étaient pas directement engagées dans le fonctionnement de la Banque paraguayenne de données, dont les activités seraient, selon les autorités policières, subversives et attentatoires à la sécurité de l'Etat. Parmi ces personnes, Antonio Páez, Fernando E. Rodríguez Alcalà Zuccolillo et Javier A. Joy Salomoni, sont propriétaires de deux imprimeries dans lesquelles ont été imprimées quelques publications de ladite Banque paraguayenne de données.

&htab;436.&htab;En ce qui concerne les 12 autres inculpés (Sonia Cristina Aquino, Rubén Lisboa, Benjamín Ramos Livieres, Victoria Abel Granje, Silbano Presentado Acosta, Desiderio Arzamendia, Juan Francisco Arrón Suhurt, Augustín Chamorro, Roberto Villalba Esquivel, Ernest Grossen, Margarita Mussi et Josefina Frasqueri), le juge d'instruction a décidé de confirmer leur détention, et ils sont donc restés dans des établissements pénitentiaires. Par la suite, le 9 septembre 1984, neuf des personnes arrêtées pour violation de la loi mentionnée ci-dessus et impliquées dans l'affaire connue sous le nom de "Affaire de la Banque paraguayenne de données", ont été remises en liberté par la Cour d'appel pénale. Pour ce qui est des trois personnes restantes (Ernest Grossen, Desiderio Arzamendia et Roberto Villalba Esquivel), la Cour d'appel pénale de Feria a décidé, en date du 20 janvier 1984, d'infirmer la décision du juge de l'instance inférieure et de leur accorder leur liberté.

&htab;437.&htab;Le gouvernement ajoute que le juge pénal de première instance de Feria a, le 18 janvier 1984, décidé de révoquer le mandat d'arrêt qui frappait les inculpés María Elizeche, Mónica Pérez, Cayetano Quatrolucchi et Luis Ernesto Heisecke, qui avaient fait l'objet d'une inculpation ultérieure.

&htab;438.&htab;En conséquence, poursuit le gouvernement, les 20 personnes initialement arrêtées, ainsi que les quatre personnes inculpées par la suite de violation de la loi no 209, se trouvent actuellement en liberté, par décision du juge compétent.

&htab;439.&htab;Le gouvernement signale enfin que M. Gustavo Codas, précédemment licencié par l'entreprise de presse dans laquelle il travaillait, a demandé asile pour éviter de passer en justice à l'ambassade du Venezuela, d'où il s'est enfui par la suite, abusant ainsi du droit d'asile et de la protection accordée par ladite représentation diplomatique.

C. Conclusions du comité

&htab;440.&htab;En ce qui concerne la détention alléguée de 19 membres du Mouvement syndical de solidarité, qui auraient favorisé un vaste plan d'agitation marxiste, le comité observe que, d'après le gouvernement, un d'entre eux (M. Gustavo Codas), s'est enfuit pour éviter de passer en justice, et que 13 autres ont été inculpés de violation de la loi no 209 "sur la défense de la paix publique et de la liberté de la personne" qui proscrit le communisme au Paraguay et punit toute conduite jugée subversive. Selon le gouvernement, ces 13 personnes ont été remises en liberté par l'autorité judiciaire: deux le 20 janvier 1984, cinq le 3 août 1984 et six le 9 septembre 1984.

&htab;441.&htab;Le comité observe que le gouvernement n'a pas indiqué quels étaient les faits concrets qui avaient motivé l'arrestation et l'inculpation de ces 13 syndicalistes, et qu'il s'est limité à signaler qu'ils ont été inculpés de violation de la loi no 209 sur la défense de la paix publique et de la liberté de la personne qui proscrit le communisme et punit tout comportement jugé subversif. Dans ces circonstances, le gouvernement n'ayant pas dénié explicitement l'allégation de l'organisation plaignante selon laquelle les arrestations auraient eu lieu dans le cadre d'une opération répressive contre la constitution du Mouvement syndical de solidarité, et l'autorité judiciaire n'ayant retenu aucune charge contre les 13 syndicalistes en question, le comité regrette profondément qu'ils aient fait l'objet de mesures privatives de liberté, d'une durée de plus d'un an dans la majorité des cas, et signale à l'attention du gouvernement que l'arrestation et la détention de dirigeants syndicaux et de syndicalistes pour des motifs d'ordre syndical constituent une violation des principes de la liberté syndicale. [Voir, par exemple, 230e rapport, cas no 1212 (Chili), paragr. 644.] Le comité prie le gouvernement d'adresser ses observations concernant l'arrestation de Stella Rufinelli, Margarita Elías, Damián Vera, Juan Carlos Oviedo et María Herminia Feliciangeli qui a suivi la création du Mouvement syndical de solidarité dont ils seraient membres.

&htab;442.&htab;Enfin, le comité note avec regret que le gouvernement n'a pas répondu aux autres allégations: difficultés par le Syndicat des journalistes du Paraguay (SPP) depuis quatre ans pour obtenir la personnalité juridique; menace d'exil contre des dirigeants et des membres de ce syndicat; arrestation et inculpation du dirigeant du SPP, M. Alcibiades González del Valle; arrestation de M. Aldo Zuccalillo, directeur du quotidien "ABC Color", pour avoir autorisé la publication de faits d'ordre syndical; menaces, harcèlement et restrictions dont aurait fait l'objet ce quotidien depuis la parution de l'avis de création du Mouvement syndical de solidarité; arrestation des médecins Jorge Alvarenga et Carlos Cuevas pendant une table ronde consacrée au thème "Syndicalisme et répression"; licenciement arbitraire de travailleurs de l'entreprise textile "La Americana S.A.", faisant suite à la présentation, par des syndicats, d'un cahier de revendications; menace de licenciement de 800 travailleurs de l'entreprise "FRISA S.A.", en réponse aux demandes de versement des salaires dus présentées par les syndicats; fermeture de la Radio Ñanduti pour avoir transmis des messages de la Confédération paraguayenne des travailleurs en exil, et interdiction faite au présentateur et directeur de cette radio d'exercer sa profession. Le comité prie le gouvernement de lui envoyer sans délai ses observations à ce sujet.

Recommandations du comité

&htab;443.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) En ce qui concerne l'arrestation de 19 membres du Mouvement syndical de solidarité opérée dans le cadre d'une opération répressive suscitée par la constitution de cette organisation, le comité observe que, d'après le gouvernement, une de ces personnes a fui la justice et n'a pas été arrêtée et que 13 autres personnes ont été remises en liberté sans que l'autorité judiciaire n'ait retenu de charge contre elles. Le comité regrette profondément que ces 13 syndicalistes aient subi des mesures privatives de liberté, pendant plus d'un an pour la majorité d'entre eux, et signale à l'attention du gouvernement que l'arrestation et la détention de dirigeants syndicaux et de syndicalistes pour des motifs d'ordre syndical constituent une violation des principes de la liberté syndicale. Le comité prie le gouvernement de lui adresser ses observations concernant l'arrestation de Stella Rufinelli, Margarita Elías, Damían Vera, Juan Carlos Oviedo et María Herminia Feliciangeli, qui a suivi la création du Mouvement syndical de solidarité, dont ils seraient membres.

b) Le comité regrette de noter que le gouvernement n'a pas répondu aux autres allégations: difficultées rencontrées par le Syndicat des journalistes du Paraguay (SPP) depuis quatre ans pour obtenir la personnalité juridique; menace d'exil adressée à des dirigeants et à des membres de ce syndicat; arrestation et inculpation du dirigeant du SPP, M. Alcíbiades González del Valle; arrestation de M. Aldo Zuccalillo, directeur du quotidien "ABC Color" pour avoir autorisé la publication d'informations sur des faits syndicaux; menaces, harcèlement et restrictions dont aurait fait l'objet ce quotidien après la publication de l'avis de création du Mouvement syndical de solidarité; arrestation des médecins Jorge Alvarenga et Carlos Cuevas pendant une table ronde sur le thème "Syndicalisme et répression"; licenciement arbitraire de travailleurs de l'entreprise textile "La Americana S.A." à la suite de la présentation, par les syndicats, de cahiers de revendications; menace de licenciement de 800 travailleurs de l'entreprise "FRISA S.A.", à la suite de la demande de versement de salaires dus formulée par les syndicats; fermeture de la Radio Ñanduti, pour avoir transmis des messages de la Confédération paraguayenne des travailleurs en exil, et interdiction faite au présentateur et directeur de cette radio d'exercer sa profession. Le comité prie le gouvernement de lui envoyer sans délai ses observations sur ces questions.

Cas no 1275 PLAINTE PRESENTEE PAR LA CONFEDERATION INTERNATIONALE DES SYNDICATS LIBRES CONTRE LE GOUVERNEMENT DU PARAGUAY

&htab;444.&htab;La plainte figure dans une communication de la Confédération internationale des syndicats libres datée du 17 avril 1984. Le gouvernement a répondu par une communication du 14 septembre 1984.

&htab;445.&htab;Le Paraguay a ratifié la convention no 87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention no 98 sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants

&htab;446.&htab;Le plaignant allègue que, pendant les négociations collectives menées entre le Syndicat des employés de la Banque du Brésil et les représentants patronaux de cette société, trois membres du syndicat, MM. Rolando Duarte, Rodolfo Virgili et Guillermo Cáceres, ont été licenciés abusivement.

&htab;447.&htab;Le plaignant ajoute qu'en même temps 30 autres membres du syndicat ont été menacés de licenciement. Devant ces actes d'intimidation, le syndicat a recouru à diverses voies de droit en faveur des syndicalistes frappés ou menacés de licenciement; ces recours ayant échoué, le syndicat a organisé une manifestation pacifique de tous ses membres pour attirer l'attention de l'opinion publique et pour protester devant l'ambassade du Brésil. Cette manifestation a été réprimée violemment par la police.

&htab;448.&htab;Le plaignant allègue aussi que, malgré l'insistance du syndicat auprès du Comité permanent de conciliation et d'arbitrage, la convention collective est venue à expiration le 31 janvier 1983 sans avoir été renouvelée.

&htab;449.&htab;Enfin, le plaignant joint en annexe une communication par laquelle le Syndicat des employés de la Banque du Brésil signale que les autorités de la banque se sont soustraites à la négociation avec le syndicat par de longs atermoiements, fermant ainsi la porte à un règlement pacifique du conflit, et que la banque a fait circuler des rumeurs à propos d'une liste de 30 personnes à licencier.

B. Réponse du gouvernement

&htab;450.&htab;Le gouvernement déclare que la Banque du Brésil avait communiqué à la Direction du travail le licenciement de MM. Rolando Duarte, Adolfo Virgili et Guillermo Cáceres, avec versement des sommes qui leur étaient dues. C'est alors que le Syndicat des employés de la Banque du Brésil et la Fédération des employés de banque du Paraguay, au nom de leurs membres licenciés, ont exprimé leur total désaccord avec la mesure prise par la banque. La Direction du travail a pris toutes les dispositions voulues relevant de ses compétences selon la loi, mais, malgré ses bons offices, les parties ne sont arrivées à aucun accord. Les travailleurs, se tenant pour lésés dans leurs droits, après épuisement des recours administratifs, ont usé des facultés que leur donne la loi en portant l'affaire en justice.

&htab;451.&htab;Le gouvernement ajoute qu'il n'y a pas eu d'autre plainte contre la Banque du Brésil et que celle-ci n'a pris aucune mesure contre le syndicat ni aucun de ses membres. Il ajoute aussi que, dans tous les cas où entrent en jeu l'intérêt des travailleurs et le maintien de bonnes relations professionnelles, le gouvernement veille à l'application des dispositions appropriées de la législation du travail.

&htab;452.&htab;Le gouvernement déclare également qu'avant les licenciements le Comité permanent de conciliation et d'arbitrage avait été saisi d'une demande d'éclaircissement sur une des clauses de la convention collective en vigueur entre la Banque du Brésil et son syndicat d'employés. Après que le comité l'ait examiné, le cas a été porté devant le tribunal du travail, où il est encore à l'examen.

&htab;453.&htab;Le gouvernement déclare enfin que, pendant l'examen du cas par les instances administratives, le syndicat a organisé des manifestations publiques qui se sont chaque fois déroulées en toute liberté et sans empêchement de la part des autorités. Il est faux de dire que la police ait entravé ou réprimé ces manifestations par la force. Le Syndicat de la Banque du Brésil a usé de tous les moyens à sa disposition pour manifester son inquiétude devant la décision prise à l'encontre des travailleurs en question par la Banque du Brésil.

C. Conclusions du comité

&htab;454.&htab;En ce qui concerne le licenciement injustifié de MM. Rolando Duarte, Adolfo Virgili et Guillermo Cáceres, membres du Syndicat de la Banque du Brésil pendant le déroulement des négociations, le comité note que, malgré les bons offices de la Direction du travail, le syndicat et la banque n'ont pas pu se mettre d'accord. Le comité prend aussi note de ce que, après épuisement des recours administratifs, les intéressés ont saisi les tribunaux du travail. Dans ces circonstances, le comité prie le gouvernement de lui communiquer les résultats du recours en justice concernant le licenciement de MM. Rolando Duarte, Adolfo Virgili et Guillermo Cáceres.

&htab;455.&htab;En ce qui concerne les allégations de menaces de licenciement contre 30 membres du Syndicat des employés de la Banque du Brésil, le comité prend note de ce que, selon le gouvernement, cette banque n'a pas pris de mesure affectant les membres du syndicat. Le comité relève aussi que, selon les informations communiquées par le plaignant, ces menaces ne seraient que des rumeurs propagées par la banque. Dans ces conditions, le comité considère que cet aspect du cas n'appelle pas un examen plus approfondi.

&htab;456.&htab;En ce qui concerne la violente répression qu'aurait exercée la police contre la manifestation pacifique tenue devant l'ambassade du Brésil pour protester contre le renvoi des trois personnes nommées plus haut, le comité note que le gouvernement nie catégoriquement les faits. Devant la contradiction entre les allégations des plaignants et la réponse du gouvernement, le comité ne se trouve pas en mesure de formuler des conclusions sur cet aspect du cas.

&htab;457.&htab;Enfin, le comité prend note des explications du gouvernement sur le retard de presque deux ans mis à renouveler la convention collective entre la Banque du Brésil et le syndicat. Le comité relève que les points litigieux ont été soumis au Comité permanent de conciliation et d'arbitrage, puis au tribunal du travail, qui n'a pas encore rendu son arrêt. A cet égard, le comité constate que le plaignant a indiqué et que le gouvernement n'a pas nié que les autorités de la Banque du Brésil se sont soustraites à la négociation avec le syndicat par de longs atermoiements. Le comité ne peut qu'exprimer l'espoir que le tribunal du travail se prononcera rapidement sur les points litigieux de la convention collective, et il rappelle l'obligation qu'ont les employeurs et les syndicats de négocier de bonne foi en vue d'un accord, et que l'existence de bonnes relations professionnelles dépend essentiellement de l'attitude réciproque des parties et de leur confiance mutuelle. [Voir, par exemple, 139e rapport, cas no 725 (Japon), paragr. 279]. Le comité prie le gouvernement de l'informer de la décision que prendra le tribunal du travail à cet égard.

Recommandations du comité

&htab;458.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Le comité exprime l'espoir que le tribunal du travail se prononcera rapidement sur les points litigieux tenant au renouvellement de la convention collective entre le Syndicat des employés de la Banque du Brésil et cette banque, venue à expiration le 31 janvier 1983, et rappelle l'obligation qu'ont les employeurs et les syndicats de négocier de bonne foi en vue d'un accord, et que l'existence de bonnes relations professionnelles dépend essentiellement de l'attitude réciproque des parties et de leur confiance mutuelle. Le comité prie le gouvernement de l'informer de la décision que prendra le tribunal du travail à cet égard.

b) Le comité prie le gouvernement de lui communiquer les résultats du recours en justice concernant le licenciement de MM. Rolando Duarte, Adolfo Virgili et Guillermo Cáceres, membres du Syndicat des employés de la Banque du Brésil.

c) Le comité estime que les autres allégations n'appellent pas d'examen plus approfondi.

Cas no 1206 PLAINTES PRESENTEES PAR LA FEDERATION DES TRAVAILLEURS DE L'ELECTRICITE ET PAR PLUSIEURS AUTRES ORGANISATIONS SYNDICALES PERUVIENNES CONTRE LE GOUVERNEMENT DU PEROU

&htab;459.&htab;La plainte en violation de la liberté syndicale contre le gouvernement du Pérou est présentée par la Fédération des travailleurs de l'électricité dans une communication du 5 mai 1983. Par la suite, cette fédération a envoyé des allégations et des informations supplémentaires dans des communications des 12 mai 1983 et 13 février 1984. Par ailleurs, les 13, 15, 16 et 24 février 1984, la Fédération des employés de banque, le Syndicat des travailleurs de l'usine de Mayolica el Trebol "CERMOSA", la Confédération générale des travailleurs du Pérou et le Syndicat des travailleurs des registres publics ont formulé des allégations en relation avec cette plainte.

&htab;460.&htab;Le gouvernement a fourni certaines informations et observations en réponse aux divers aspects du cas dans des communications des 17 novembre 1983, 13 et 23 avril et 6 juillet 1984.

&htab;461.&htab;Le Pérou a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de la Fédération des travailleurs de l'électricité

&htab;462.&htab;Dans sa communication du 5 mai 1983, la Fédération des travailleurs de l'électricité du Pérou allègue plusieurs violations de la liberté syndicale dans ce pays, notamment la violation du droit de libre syndicalisation et de l'autonomie des organisations syndicales dans la gestion de leurs affaires et dans la désignation de leurs représentants, et la violation de l'exercice des droits de libre négociation collective et de grève. Elle se réfère en outre à une menace de dérogation imposée par une loi aux conditions de travail obtenues par les travailleurs de l'électricité.

&htab;463.&htab;La fédération plaignante explique que, le 30 juin 1982, elle a présenté à l'ensemble des entreprises de l'industrie électrique du pays un cahier de revendications portant projet de convention collective nationale au niveau de la branche pour la période 1982-83. Or, le 16 juillet 1982, la direction de l'entreprise Electro-Pérou s'est opposée par écrit devant le ministère du Travail à la composition de la délégation ouvrière engagée dans cette négociation. Elle a déclaré que la commission de négociation était trop nombreuse, qu'elle refusait de discuter avec certains de ses membres, et qu'elle n'accepterait de discuter qu'avec les membres du Comité exécutif national qui constituait le niveau de décisions le plus élevé de la fédération en cause. La fédération plaignante, quant à elle, estime que les assemblées générales des bases fédérales avaient mandaté le Conseil exécutif national composé des secrétaires généraux de chacune desdites bases et des dirigeants régionaux de la fédération pour négocier le renouvellement de la convention collective. Or, explique-t-elle, contre toute attente, le ministère du Travail a fait droit à la prétention patronale en s'appuyant sur le décret suprême no 12 du 21 août 1962 qui dispose que la représentation des travailleurs en matière de réclamation collective est exercée exclusivement a) par le syndicat en cause, b) par l'organisation de degré immédiatement supérieur si la réclamation se réfère aux travailleurs de plusieurs centres de travail de la même branche d'activité appartenant à ladite organisation. Le ministère du Travail a donc décidé que les secrétaires généraux des organisations membres du Conseil exécutif national ne devraient pas participer à la négociation car leur représentation viendrait en concurrence avec celle des dirigeants nationaux de la fédération.

&htab;464.&htab;La fédération plaignante estime donc qu'il y a eu ingérence des pouvoirs publics dans la gestion de ses affaires et dans la désignation de ses représentants, et elle rappelle que le ministère du Travail avait précédemment refusé de faire droit à une opposition déposée par l'autorité patronale dans le même sens en 1981, et que le ministère s'était alors contenté à l'époque de demander aux travailleurs de limiter le nombre de leurs représentants chargés de la négociation.

&htab;465.&htab;La fédération plaignante poursuit en expliquant que le projet de convention collective qu'elle avait présenté le 30 juin 1982 contenait une demande d'augmentation de salaires pour détérioration du niveau de vie et pour accroissement de la productivité. Cependant, l'autorité administrative du travail a interdit à priori à la fédération plaignante de demander de tels accroissements de rémunération, étant donné que la convention collective qui couvre les travailleurs de l'électricité accorde à ces derniers un système d'ajustement automatique trimestriel en fonction de l'augmentation du coût de la vie (indexation salariale). Or, prétend la fédération plaignante, l'année précédente, elle avait obtenu au cours de la négociation collective une augmentation de salaires au titre du niveau de vie et de la productivité qui avait été approuvée par l'autorité du travail. La fédération plaignante estime donc que l'interdiction nouvelle prononcée par les pouvoirs publics porte atteinte au droit de libre négociation collective et que seul l'employeur peut contester sa demande.

&htab;466.&htab;Par ailleurs, toujours selon la fédération plaignante, le 26 août 1982, le président du Conseil des ministres, également ministre de l'Economie et des Finances, aurait interdit par circulaire à toutes les directions d'entreprises publiques du pays d'accorder des augmentations de salaires ou des améliorations de conditions de travail sans avoir d'abord obtenu l'autorisation expresse du ministre de tutelle, du président de la Corporation nationale du développement et du ministre de l'Economie et des Finances lui-même. Selon la fédération plaignante, ceci revient à introduire un système d'approbation administrative préalable contraire à la liberté de négociation volontaire.

&htab;467.&htab;En outre, la fédération plaignante allègue qu'il n'existe pas de grève légale au Pérou. Tout arrêt de travail est déclaré illégal même si le droit de grève est consacré dans la Constitution et dans la loi.

&htab;468.&htab;Enfin, la fédération plaignante s'insurge contre les propos du ministre de l'Energie et des Mines qui, dans une déclaration publique parue dans le journal "El comercio" du 3 avril 1983, aurait dénoncé le "système injuste de rémunération" des travailleurs de l'électricité qui bénéficieraient selon lui d'un régime salarial attentatoire au niveau de vie du reste du pays résultant d'une convention conclue sous l'empire de l'ancien régime militaire. D'après la fédération plaignante, ce ministre aurait annoncé que ce régime allait être modifié par une loi. Or, rappelle-t-elle, le système d'ajustement de salaires automatique en fonction de l'accroissement de l'indice des prix à la consommation a été obtenu par convention collective signée avec les entreprises de service public de l'électricité. Selon elle, le gouvernement actuel veut mettre un terme à un avantage conquis par convention collective et renvoyer les travailleurs de l'électricité au régime salarial commun, alors que les travailleurs syndiqués du pays luttent pour obtenir un mécanisme salarial protecteur comparable à celui qu'avait obtenu la Fédération de l'électricité.

&htab;469.&htab;Dans sa communication du 12 mai 1983, la fédération plaignante ajoute que, le 9 mai 1983, par décret suprême no 036/83/PCM, le pouvoir exécutif a suspendu dans les entreprises de droit public et dans les entreprises étatiques de droit privé appartenant au secteur déclaré en état d'urgence économique (tant que dure l'état d'urgence) la mise en vigueur de nouvelles conditions de travail ou la modification de celles qui existent dans la mesure où elles ont des incidences économiques, dès lors qu'elles sont issues de cahiers de revendications en cours de négociation. Or, pour suspendre ainsi le droit de libre négociation collective, le gouvernement aurait dû déclarer l'état de siège, ce qu'il n'a pas fait, estime la fédération plaignante. En conséquence, selon elle, ce décret est inconstitutionnel et contraire aux conventions nos 87 et 98, puisqu'il annule le droit d'obtenir de meilleures conditions de travail dans certains secteurs.

&htab;470.&htab;Enfin, dans sa communication du 13 février 1984, la Fédération de l'électricité allègue également que le gouvernement a dérogé au système d'ajustement automatique de salaires en promulguant la loi no 23724 du 13 décembre 1983. En effet, précise-t-elle, l'article 46 de cette loi dispose que les augmentations qui seront autorisées dans les entreprises publiques à participation d'Etat ne seront jamais supérieures à l'indice des prix à la consommation. Or, aux termes de la convention collective de 1979 la concernant, les pourcentages indiqués par l'indice des prix à la consommation devaient s'appliquer au revenu brut moyen de l'entreprise et non pas seulement au revenu brut moyen du travail, ce qui avait pour résultat que les travailleurs qui avaient un revenu inférieur à la moyenne salariale de l'entreprise percevaient en réalité un pourcentage d'augmentation de salaires légèrement supérieur à l'inflation. La fédération plaignante estime donc que la législation nouvelle porte atteinte au droit des travailleurs de négocier collectivement.

B. Réponse du gouvernement

&htab;471.&htab;Dans sa communication du 17 novembre 1983, le gouvernement reconnaît que la fédération plaignante avait soumis, le 30 juin 1982, un cahier de revendications pour le renouvellement de la convention collective pour la période 1982-83, et que, le 16 juillet 1982, l'entreprise patronale Electro-Pérou avait soumis par écrit au ministère du Travail son opposition à une partie de la représentation ouvrière en refusant d'accepter le nombre et la personnalité de certains des membres de la commission de négociation au motif que le cahier de revendications devait être examiné par les dirigeants du Comité exécutif national de cette fédération ouvrière qui représente statutairement le plus haut niveau de décision dans ladite fédération.

&htab;472.&htab;Sur le grief relatif à l'autonomie des organisations syndicales dans la désignation de leurs représentants, le gouvernement précise qu'aux termes de la législation (décret-loi 140, article 8 d)), le ministère du Travail a pour fonction de promouvoir le système de négociations collectives par la conciliation, la médiation et l'arbitrage, et que la loi établit des normes et des procédures pour résoudre les conflits du travail, normes et procédures qui garantissent l'égalité de traitement (décret suprême 006/71/TR du 29 novembre 1971 et décret suprême 003/72/TR du 29 février 1972 sur les instances compétentes en la matière). En conséquence, et en application du décret suprême no 12 du 21 août 1962, l'autorité administrative du travail a accédé à la demande patronale, étant donné qu'aux termes de la législation les négociations collectives engagées avec un employeur par un organisme syndical de degré supérieur doivent être exercées exclusivement par ledit organisme, et que seuls les principaux dirigeants nationaux de cet organisme, à l'exclusion des dirigeants régionaux, représentaient les travailleurs de ce secteur, estime le gouvernement.

&htab;473.&htab;Sur le grief relatif à la limitation du champ de la négociation collective d'après lequel le gouvernement aurait interdit au plaignant de demander des augmentations de salaires et n'aurait autorisé la négociation que sur les conditions de travail, d'une part, et sur le grief d'après lequel le président du Conseil des ministres, le 26 août 1982, aurait envoyé une circulaire aux directions de toutes les entreprises publiques du pays pour leur interdire d'accorder des augmentations de salaires et des améliorations des conditions de travail sans l'autorisation expresse de plusieurs ministres, d'autre part, le gouvernement présente les observations suivantes: il rappelle que la fédération plaignante et les entreprises du secteur de l'électricité ont convenu d'un système d'ajustement salarial automatique en fonction de l'accroissement des prix à la consommation, et que toute augmentation de salaires complémentaire accordée dans ce secteur correspondrait à la perception d'un avantage double, ce qui d'évidence n'était pas le but visé par cet accord. En conséquence, lesdits travailleurs ne peuvent négocier que des améliorations de leurs conditions de travail. A propos de la circulaire du président du Conseil des ministres, le gouvernement réfute l'allégation de la fédération plaignante en affirmant que les entreprises de service de l'électricité et la Fédération des travailleurs de l'électricité sont parvenues d'un commun accord au renouvellement de la convention collective présentée le 14 décembre 1982, et que cet accord a été approuvé par l'autorité administrative par la résolution no 762/91130.

&htab;474.&htab;Sur le grief relatif à la violation de l'exercice du droit de grève, le gouvernement renvoie aux explications qu'il avait fournies dans le cas no 1081 [voir 214e rapport du Comité de la liberté syndicale, paragr. 255 à 258] d'où il ressort que le droit de grève est consacré par l'article 55 de la Constitution du Pérou qui dispose que ce droit doit être exercé conformément à la loi, qu'une loi en régira l'exercice, et que ce droit ne peut en aucun cas être refusé ou interdit. Le gouvernement réitère les informations fournies dans le cas no 1081, selon lesquelles le projet de loi sur la grève a été adopté par les sénateurs mais qu'il n'a pas encore été promulgué.

&htab;475.&htab;Enfin, sur le grief relatif aux prétendues attaques auxquelles le ministre de l'Energie et des Mines se serait livré contre le système salarial d'ajustement automatique des salaires en vigueur pour les travailleurs de l'électricité, système qu'il aurait traité de "système injuste de rémunération attentatoire au niveau de vie du reste du pays" et qui devrait être modifié par une loi, le gouvernement déclare que ces allégations ne constituent pas un élément suffisant pour présenter une plainte surtout dès lors qu'une telle loi n'a pas encore été adoptée.

&htab;476.&htab;Dans une communication plus récente du 6 juillet 1984, le gouvernement précise, à propos de l'allégation relative à l'article 46 de la loi no 23724, qu'à la demande de la Fédération des travailleurs de l'électricité et de l'entreprise Electro-Pérou, une commission tripartite présidée par un représentant de la Direction générale de l'inspection, trois représentants des travailleurs de la Fédération des travailleurs de l'électricité et trois représentants de l'entreprise Electro-Pérou, a été chargée, le 5 mars 1984, d'examiner la question et de statuer sur les incidences que ce texte pourrait avoir pour les intéressés dans l'année 1984. Le gouvernement précise qu'il communiquera toute information sur la solution à laquelle la commission tripartite sera parvenue dès qu'elle sera disponible.

C. Allégations du Syndicat des travailleurs de la fabrique de Mayolica el Trebol "CERMOSA"

&htab;477.&htab;Dans sa communication du 16 février 1984, ce syndicat allègue que la politique gouvernementale d'ouverture des frontières a eu pour résultat une crise dans l'industrie de la céramique qui a conduit à de nombreux licenciements, à des baisses de salaires et à des violations de la législation du travail.

D. Réponse du gouvernement

&htab;478.&htab;Le gouvernement dans sa communication du 23 avril 1984 déclare avoir demandé à la Direction générale du travail si une plainte a été déposée par le syndicat en question en violation de la législation du travail.

E. Allégations de la Confédération générale du travail

&htab;479.&htab;Dans une communication également datée du 16 février 1984, cette confédération se réfère notamment au cas no 1138 présenté par la Fédération des travailleurs municipaux du Pérou déjà examiné par le Comité de la liberté syndicale dans le 226e rapport (paragr. 48 à 56), et aux commentaires de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations à sa session de mars 1983. Elle précise que le gouvernement se refuse à modifier les dispositions de décrets de 1982 limitant les droits syndicaux des fonctionnaires publics qui, selon ces organes, ne sont pas conformes à la convention no 87.

&htab;480.&htab;Cette confédération allègue également l'impossibilité de déclarer une grève légale et ajoute qu'un projet de mars 1982, visant à modifier l'article 307 du Code pénal, envisagerait de sanctionner pénalement les arrêts de travail de caractère régional (en les qualifiant de sédition) et les actes liés à la grève ou à la paralysie des centres de travail.

&htab;481.&htab;Cette confédération se réfère par ailleurs à plusieurs exemples concrets d'interventions du gouvernement dans la négociation collective. Elle indique que, depuis l'adoption d'un décret du 14 mars 1981, les employeurs peuvent obtenir la révision des conventions collectives qui avaient été signées de 1974 à 1980 dans le secteur de la presse. En effet, les entreprises de presse qui avaient été précédemment nationalisées ont été restituées par le gouvernement à leur précédent propriétaire. Or la révision unilatérale des conventions collectives concernant ce secteur est désormais soumise à la décision finale d'un tribunal d'arbitrage. De plus, par un décret du 22 juillet 1982, le gouvernement, toujours selon la confédération plaignante, a prorogé de six mois la validité des conventions collectives du travail de la petite et de la moyenne industrie minière du pays et, aux termes des décrets 019/82/TRP, 007/83/TRP et 024/83/TR, il fixe la rémunération de cette catégorie de travailleurs. En outre, en application de la résolution ministérielle no 207/83/TR du 22 juillet 1983, le gouvernement aurait modifié le système d'ajustement de salaires au coût de la vie pour les travailleurs de l'industrie textile, en imposant une limite maximale de 70 pour cent à l'augmentation enregistrée par l'indice général des prix à la consommation. La confédération plaignante se réfère également à des difficultés intervenues au moment de l'enregistrement de la convention collective régissant le secteur des téléphones, le 14 janvier 1984, mais elle déclare que la convention a finalement été enregistrée le 25 janvier 1984. Elle signale par ailleurs que deux entreprises, la Compagnie péruvienne des vapeurs et Bayer industriel, auraient été déclarées en état d'urgence économique et se seraient vu empêchées de négocier collectivement leurs conditions de travail. Enfin, elle dénonce dans le secteur de l'industrie de la pêche le fait que le gouvernement ait modifié la convention collective du 19 juillet 1977, puisque l'article 2 du décret suprême 09/83/PE dispose désormais qu'à l'époque de l'interruption de la pêche, certains contrats de travail seront suspendus automatiquement. En conclusion, la confédération plaignante demande l'envoi d'une mission de contacts directs au Pérou pour se rendre compte des nombreuses violations de la négociation collective.

F. Réponse du gouvernement

&htab;482.&htab;Dans sa communication du 23 avril 1984, le gouvernement, à propos des allégations présentées par la Fédération des travailleurs municipaux, renvoie aux observations qu'il avait formulées dans le cas no 1138 sur les raisons qui l'ont conduit à limiter le nombre minimum de syndicats à 20 pour former une fédération, et le nombre minimum de fédérations à 10 pour former une confédération. Selon lui, si l'on réduisait cette exigence, le gouvernement devrait traiter avec un nombre considérable d'organisations de niveau supérieur.

&htab;483.&htab;A propos de la violation du droit de grève et du droit de négociation collective volontaire, le gouvernement relève le caractère selon lui générique et imprécis de ces aspects des plaintes, et déclare qu'il s'abstient de formuler des observations jusqu'à ce que la CGT donne la liste précise et concrète des faits qu'elle prétend dénoncer.

G. Allégations de la Fédération des employés de banque

&htab;484.&htab;Cette fédération, dans sa communication du 15 février 1984, allègue des atteintes aux droits acquis par conventions collectives. Elle soutient qu'aux termes de la convention collective du 18 juin 1951, les travailleurs de ce secteur avaient obtenu, en cas de maladie ou de décès de parents, conjoint ou enfants, ou de maladie du travailleur lui-même, ou en cas d'urgence dûment constatée, que les banques accordent aux travailleurs sur leur demande deux mois de salaire d'avance sans intérêts, même si lesdits travailleurs avaient déjà obtenu d'autres avances pour d'autres raisons. Les travailleurs n'ayant qu'un an de service ne pouvaient bénéficier que d'un mois d'avance. En outre, aux termes d'une seconde convention collective du 25 juin 1951, les travailleurs avaient droit à des avances dont la totalité ne devaient pas être supérieure à l'indemnité à laquelle ils pourraient prétendre, l'amortissement de ces avances s'opérant selon la forme établie par chaque banque.

&htab;485.&htab;Or, selon la fédération plaignante, l'application par les banques de la loi no 23707 du 6 décembre 1983 porte atteinte aux avantages qu'ils avaient acquis antérieurement. Cette loi, en effet, a accru les indemnités de départ octroyées en compensation du temps de service aux employés du secteur privé entrés en service après le 1er juillet 1962, en accordant aux intéressés un mois de salaire minimum vital par année de service jusqu'au 30 septembre 1979 avec un maximum de dix mois de salaire en tout. Mais l'article 4 de la loi nouvelle dispose que les travailleurs qui, par convention collective, ont obtenu des avances sur salaire ou autre, pourront opter entre la possibilité de percevoir avant la cessation de leur relation de travail le bénéfice le plus élevé résultant de l'application de la loi (dans ce cas là, le paiement aura un effet libératoire) et la possibilité de percevoir l'indemnité de départ pour services rendus au terme de leur relation de travail.

&htab;486.&htab;Les banques, explique la fédération plaignante, ont alors exigé que les travailleurs qui, en application des conventions collectives, demandaient des avances remplissent une déclaration indiquant avoir reçu ces avances comme paiement anticipé de l'indemnité de départ pour services rendus, ce que la fédération plaignante a immédiatement contesté, en déclenchant une grève nationale de 11 jours. Elle a ainsi obtenu, par la résolution no 002/84/TR du 2 février 1984, que le gouvernement reconnaisse la suprématie des conventions collectives. Mais, souligne-t-elle, dans cette résolution le gouvernement a limité à deux salaires seulement la totalité des avances n'ayant pas un caractère libératoire, ce que la fédération plaignante estime être une modification unilatérale des conventions collectives.

H. Réponse du gouvernement

&htab;487.&htab;Le gouvernement, dans sa réponse du 6 juillet 1984, observe que la fédération plaignante a mis fin à la grève de 11 jours lorsque la résolution susmentionnée du 2 février 1984, autorisant de ne pas décompter les avances sur salaire sans intérêt dans la limite de deux mois conformément aux stipulations des conventions collectives, a été adoptée. Il ajoute que ladite fédération plaignante n'a pas introduit de recours contre cette résolution, non plus que contre le décret no 013/84/TR du 11 avril 1984, qui reprend en substance et de manière générale le contenu de ladite résolution. Pour le gouvernement, les textes de 1984 appliquent strictement le contenu de la convention collective du 18 juin 1951 qui permettait clairement d'accorder aux travailleurs le droit d'obtenir une avance jusqu'à "deux mois de salaire" sans intérêt.

I. Allégations du Syndicat des registres publics

&htab;488.&htab;Le syndicat plaignant, dans sa communication du 24 février 1984, allègue que les travailleurs des registres publics n'auraient pas reçu les augmentations et bonifications qu'il prétend avoir obtenues aux termes d'un arrangement adopté par une commission paritaire composée de représentants de fonctionnaires et de travailleurs, le 11 novembre 1983. Cet arrangement avait été visé le 27 décembre 1983 par le chef de l'Institut national de l'administration publique, sans que ce dernier ait fait de commentaire. Le syndicat déclare avoir déclenché une grève de protestation.

J. Réponse du gouvernement

&htab;489.&htab;Dans sa communication du 23 avril 1984, envoyée avec une lettre de couverture le 6 juillet 1984, le gouvernement déclare avoir demandé au chef de l'Office national des registres publics et au chef de l'Institut national de l'administration publique des informations sur cette question, et il précise qu'il communiquera lesdites informations dès qu'il les aura reçues.

K. Conclusions du comité

&htab;490.&htab;Le comité observe que le présent cas met en cause essentiellement l'intervention du gouvernement dans le domaine de la fixation des salaires ou des conditions de travail et dans l'exercice du droit de grève dans différents secteurs de l'économie. L'affaire a également trait au refus du gouvernement de modifier des décrets de 1982 limitant les droits syndicaux des fonctionnaires publics, à une question d'interprétation de convention collective et à une question de mise en application d'un arrangement salarial concernant des fonctionnaires.

&htab;491.&htab;Avant d'aborder les différents aspects de ces plaintes de manière plus détaillée, le comité souhaite souligner l'importance qu'il a toujours attachée au principe de l'autonomie des parties à la négociation collective. Il rappelle que ce principe a à nouveau été largement reconnu au cours de la discussion préparatoire qui a conduit à l'adoption par la Conférence internationale du Travail de la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981, et que, lors des travaux préparatoires à la 67e session de la Conférence, en juin 1981, la Commission de la négociation collective a refusé d'inclure dans la convention no 154 une disposition selon laquelle "des mesures adaptées aux circonstances nationales devraient être prises pour encourager et faciliter la conciliation des intérêts particuliers des parties à la négociation collective avec l'intérêt général". [Voir à cet égard BIT: Promotion de la négociation collective, CIT, 66e session, 1980, Rapport V (2), p. 94, et CIT, 67e session, 1981, Rapport IV  (1), pp. 21 et 22.]

&htab;492.&htab;Plus particulièrement le comité observe, sur le grief relatif au refus d'un employeur de négocier avec certains membres d'une délégation ouvrière dans le secteur de l'électricité, que le gouvernement explique que, statutairement, la représentation au plus haut niveau de décision de cette fédération se compose de dirigeants syndicaux nationaux regroupés au sein du Comité exécutif national, ce que la fédération plaignante ne nie pas. En outre, selon le gouvernement, aux termes de la législation, les négociations engagées par un employeur avec un organisme de degré supérieur doivent être conduites par ledit organisme.

&htab;493.&htab;Pour sa part, le comité rappelle l'importance qu'il attache au principe selon lequel employeurs et syndicats doivent négocier de bonne foi en s'efforçant de parvenir à un accord. Dans le cas d'espèce, l'employeur n'a pas refusé de négocier avec le syndicat, il s'est contenté de refuser de négocier avec une partie seulement de la délégation ouvrière estimée par lui trop nombreuse, et il a accepté de négocier avec la délégation composée des dirigeants syndicaux nationaux représentant le plus haut niveau de décision dans ladite fédération. Afin d'examiner cet aspect du cas en pleine connaissance de cause, le comité prie le gouvernement de fournir des informations plus détaillées sur le motif du refus de l'employeur de négocier collectivement seulement avec les secrétaires généraux des organisations membres du Conseil exécutif national de l'organisation.

&htab;494.&htab;Sur le grief relatif à la limitation par le gouvernement du champ de la négociation collective par l'introduction d'une législation qui impose une limite aux augmentations de salaires dans les entreprises publiques en prévoyant qu'elles ne seront jamais supérieures à l'indice des prix à la consommation, le comité note que le gouvernement a indiqué, dans sa plus récente communication, datée du 6 juillet 1984, qu'il a chargé, le 5 mars 1984, une commission tripartite composée de représentants des travailleurs et des employeurs du secteur de l'électricité et du gouvernement d'examiner les incidences de la législation nouvelle sur la situation des travailleurs intéressés pour l'année 1984, et de statuer sur la question.

&htab;495.&htab;Le comité exprime le ferme espoir que ladite commission parviendra à un accord à très brève échéance et demande au gouvernement de le tenir informé de la solution intervenue dans ce conflit du travail.

&htab;496.&htab;Sur le grief relatif au conflit qui s'est développé à la fabrique Mayolica el Trebol "CERMOSA", et qui concerne de nombreux licenciements de travailleurs, le comité observe qu'aux dires mêmes des plaignants ces licenciements ont été motivés par la politique gouvernementale d'ouverture des frontières. Il semble donc ressortir des éléments du dossier qu'il s'agisse essentiellement de licenciements économiques. D'ailleurs les plaignants n'indiquent pas qu'il s'agisse de licenciements pour des motifs de discrimination antisyndicale.

&htab;497.&htab;Dans ces conditions, le comité rappelle qu'il n'a pas compétence pour se prononcer sur des licenciements économiques, surtout dès lors que les plaignants n'ont pas allégué de violation de la liberté syndicale. Il estime donc que cet aspect de la plainte ne soulève pas de questions relatives aux droits syndicaux.

&htab;498.&htab;En ce qui concerne les décrets présidentiels nos 003/82/PCM et 026/82/JUS de 1982, relatifs aux organisations syndicales de fonctionnaires publics, qui contiennent des dispositions incompatibles avec la convention no 87 et que le gouvernement refuserait de modifier, le comité observe que le gouvernement renvoie pour l'essentiel aux observations qu'il avait formulées dans le cas no 1138 à propos des raisons qui l'ont conduit à imposer des limites au nombre de syndicats et de fédérations nécessaires pour former une organisation professionnelle de degré supérieur, à savoir que, si l'on réduisait cette exigence, on contribuerait à créer le chaos.

&htab;499.&htab;Sur ce point, le comité ne peut que réitérer les conclusions qu'il avait formulées dans le cas no 1138 sur la nécessité de modifier les décrets en question pour les rendre compatibles avec les articles 2, 3, 5 et 6 de la convention no 87. [Voir 226e rapport, cas no 1138, paragr. 53 et 56.] Le comité attire une fois de plus l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur cet aspect du cas.

&htab;500.&htab;En ce qui concerne l'allégation selon laquelle les grèves légales seraient impossibles et celle selon laquelle le gouvernement se proposerait de modifier le Code pénal pour criminaliser les arrêts de travail de caractère régional et les actes liés à la grève ou à la paralysie des centres de travail, le comité observe que le gouvernement renvoie aux explications qu'il avait fournies dans le cas no 1081 où il avait affirmé que le droit de grève est consacré par l'article 55 de la Constitution du Pérou et qu'il s'exerce conformément à la loi. Le comité observe aussi que le gouvernement réitère ses informations selon lesquelles le projet de loi sur la grève a été adopté par les sénateurs, mais qu'il n'a pas encore été promulgué. Le comité observe enfin que le gouvernement n'a pas commenté l'allégation selon laquelle le Code pénal va être modifié en vue de criminaliser certaines grèves ou certains arrêts de travail.

&htab;501.&htab;Dans ces conditions, le comité ne peut que rappeler avec insistance les conclusions auxquelles il est parvenu dans le cas no 1081, où il avait exprimé sa préoccupation de voir adopter le texte du projet de loi sur la grève, déjà approuvé le 27 octobre 1981 par le Sénat, car le texte en question contient plusieurs dispositions qui ne sont pas compatibles avec les principes de la liberté syndicale. [Voir 214e rapport, cas no 1081, paragr. 269.] Le comité veut croire qu'une législation régissant l'exercice du droit de grève, conformément aux principes de la liberté syndicale, sera prochainement adoptée et il attire à nouveau l'attention de la commission d'experts sur cet aspect du cas.

&htab;502.&htab;En ce qui concerne les allégations d'interventions du gouvernement dans les négociations collectives, dans les secteurs de la presse, des mines, de la pêche, de l'industrie textile ou chimique, et plus généralement dans les secteurs déclarés en état d'urgence économique, tant que dure ledit état d'urgence, le comité relève que le gouvernement se borne à indiquer que ces allégations sont imprécises.

&htab;503.&htab;Le comité, pour sa part, observe que certaines des allégations présentées par les plaignants sont tout à fait précises puisqu'elles concernent l'adoption du décret suprême no 036/83/PCM du 9 mai 1983, par lequel le gouvernement suspend dans les entreprises de droit public et dans les entreprises étatiques de droit privé appartenant à des secteurs déclarés en état d'urgence économique la mise en vigueur de nouvelles conditions de travail ou la modification de celles qui existent. Elles concernent également la mise en place d'un système d'arbitrage obligatoire dans le secteur de la presse, la fixation par décrets des salaires des travailleurs de la petite et de la moyenne industrie minière, la limitation par résolution ministérielle des augmentations de salaires dans l'industrie textile, la modification par décret d'une convention collective introduisant la suspension des contrats de travail à l'époque de l'interruption de la pêche, la déclaration d'état d'urgence économique par décret suprême pour les entreprises de la Compagnie péruvienne des vapeurs et Bayer industriel SA.

&htab;504.&htab;Le comité a pris connaissance des explications du gouvernement présentées dans le rapport de novembre 1982 sur l'application de la convention no 98 sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ratifiée par le Pérou, et parvenues au BIT au titre de l'article 22 de la Constitution de l'OIT, en février 1983. Le comité relève que le gouvernement explique qu'il avait mis en place un système d'ajustements de salaires pour compenser l'inflation. Il fixait des projections mensuelles de l'inflation, sur un semestre, pour qu'elles puissent être prises en compte par les partenaires à la négociation et que ceux-ci puissent parvenir librement à des accords sur la périodicité et le montant des ajustements de salaires. En conséquence, selon le gouvernement, en novembre 1982, il n'y avait pas de restrictions à la négociation collective. La seule exception concernait l'industrie minière qui, comme cela est mondialement connu, était en crise. Pour ne pas adopter de mesures drastiques comme celles qui avaient été adoptées par d'autres pays, telles que des licenciements économiques, le gouvernement avait choisi de proroger l'application des conventions collectives couvrant les travailleurs de la petite et de la moyenne industrie minière en accordant aux travailleurs de ce secteur des augmentations de salaires périodiques. Le gouvernement explique aussi qu'il en est de même du système d'ajustement automatique choisi par conventions collectives par les travailleurs de certains secteurs, Pour ceux-là, les salaires sont périodiquement augmentés en fonction de la hausse du coût de la vie, ce qui constitue une situation avantageuse par rapport aux autres travailleurs grâce au rythme d'accroissement rapide de l'inflation dont ils bénéficient.

&htab;505.&htab;Le comité observe également que la législation péruvienne prévoit que les sous-directeurs du travail approuvent les conventions collectives, adoptent les résolutions en première instance et édictent les mesures à prendre éventuellement. Les directeurs régionaux du travail, de l'emploi et de la sécurité sociale édictent les résolutions en seconde et dernière instance et les mesures à prendre éventuellement. Enfin, le directeur général du travail examine les recours en nullité introduits contre les résolutions approuvant en deuxième et dernière instance les négociations collectives (décret suprême no 003/72/TR du 29 février 1972, articles 2, b et c, et 5, deuxième paragraphe).

&htab;506.&htab;Dans ces conditions, le comité se doit d'indiquer qu'une législation qui exige l'homologation ou l'approbation des autorités administratives pour qu'une convention collective entre en vigueur n'est pas conforme aux principes de la négociation volontaire établis par la convention no 98. Le comité estime en outre que les organes de l'Etat doivent s'abstenir d'intervenir pour modifier le contenu des accords collectifs librement conclus.

&htab;507.&htab;Néanmoins, le comité a estimé que, si au nom d'une politique de stabilisation économique, un gouvernement considère que le taux des salaires ne peut être fixé librement par la voie des négociations collectives, cette restriction devrait être appliquée comme une mesure d'exception limitée à l'indispensable. Elle ne devrait pas excéder une période raisonnable et elle devrait être accompagnée des garanties appropriées en vue de protéger le niveau de vie des travailleurs. [Voir 132e rapport, cas no 691 (Argentine), paragr. 27; et 230e rapport, cas no 1171 (Canada/Québec), paragr. 162; et cas no 1173 (Canada/Colombie britannique), paragr. 573.]

&htab;508.&htab;En conséquence, face aux nombreuses allégations d'ingérences récentes du gouvernement dans les négociations collectives, le comité souhaite suggérer au gouvernement du Pérou, comme il l'a fait dans le passé à l'égard d'autres pays, que le gouvernement étudie la possibilité de mettre en place une procédure permettant de signaler dans certains cas à l'attention des parties les considérations d'intérêt général qui appelleraient de leur part un nouvel examen des conventions envisagées. Toutefois, la persuasion devrait à cet égard toujours être préférée à la contrainte. Aussi, plutôt que de subordonner la validité des conventions collectives à l'approbation gouvernementale, le gouvernement pourrait prévoir que toute convention collective qui serait déposée auprès du ministère du Travail entrerait normalement en vigueur dans un délai raisonnable suivant son dépôt; si l'autorité publique estimait que les termes de la convention proposée sont manifestement contraires aux objectifs de la politique économique reconnus comme souhaitables dans l'intérêt général, le cas pourrait être soumis pour avis et recommandation à un organisme consultatif approprié, étant entendu cependant que les parties devraient rester libres dans leur décision finale. [Voir 85e rapport, cas no 341 (Grèce), paragr. 187; 118e rapport, cas no 559 (Trinité-et-Tobago), paragr. 122; et 132e rapport, cas no 691 (Argentine), paragr. 28.]

&htab;509.&htab;En ce qui concerne la question soulevée par les employés de banque relative à l'interprétation d'une convention collective de 1951 leur accordant en cas de maladie ou autre des avances sur salaires sans intérêts dans certaines limites et les incidences de l'application par les banques d'une législation nouvelle octroyant à tous les travailleurs une prime de départ, le comité a pris note des explications du gouvernement. Le comité rappelle que l'interprétation des conventions collectives devrait relever, au plan national, d'organes indépendants des parties.

&htab;510.&htab;En ce qui concerne l'allégation selon laquelle les travailleurs des registres publics n'auraient pas reçu les augmentations et bonifications qu'ils auraient obtenues aux termes d'un arrangement adopté par une commission paritaire et visé par l'autorité administrative compétente, le 27 décembre 1983, le comité note que le gouvernement communiquera des informations sur la question dès qu'il les aura obtenues.

&htab;511.&htab;Le comité rappelle d'une manière générale que les partenaires sociaux doivent négocier de bonne foi et que les arrangements et accords auxquels ils sont parvenus doivent être obligatoires pour les parties. Dans ces conditions, le comité invite le gouvernement à s'assurer que les arrangements définitifs approuvés par les parties sont effectivement appliqués.

Recommandations du comité

&htab;512.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Le comité prie le gouvernement de fournir des informations plus détaillées sur le motif du refus de l'entreprise Electro-Pérou de négocier collectivement avec les secrétaires généraux des organisations membres du Conseil exécutif national de la Fédération des travailleurs de l'électricité.

b) Le comité exprime le ferme espoir que la commission tripartite chargée d'examiner les incidences d'une législation limitant les augmentations de salaires dans les entreprises publiques pour assurer qu'elles ne soient pas supérieures à l'indice des prix à la consommation parviendra à un accord à brève échéance. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de la solution intervenue dans ce conflit du travail.

c) Au sujet du conflit du travail qui s'est développé à la fabrique Mayolica el Trebol "CERMOSA", le comité estime que cet aspect de la plainte ne soulève pas de questions relatives aux droits syndicaux. d) Au sujet du refus du gouvernement de modifier les décrets présidentiels nos 003/82/PCM et 026/82/JUS de 1982 relatifs aux organisations syndicales de fonctionnaires publics qui contiennent des dispositions incompatibles avec les articles 2, 3, 5 et 6 de la convention no 87 et au sujet de l'exercice du droit de grève, le comité estime nécessaire d'attirer à nouveau l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur ces aspects du cas.

e) Au sujet des allégations d'interventions récentes du gouvernement dans les négociations collectives de plusieurs secteurs de l'économie, au nom d'un état d'urgence économique, et des dispositions du décret suprême no 003/72/TR du 29 février 1972, qui confère aux autorités administratives le pouvoir d'approuver les conventions collectives, d'adopter des résolutions les concernant et d'édicter les mesures à prendre éventuellement, le comité souligne que l'exigence d'une approbation des autorités administratives pour qu'une convention collective entre en vigueur n'est pas conforme aux principes de la négociation volontaire établis par la convention no 98.

f) Par ailleurs, le comité rappelle que les organes de l'Etat doivent s'abstenir d'intervenir pour modifier le contenu des accords collectifs librement conclus et que, si au nom d'une politique de stabilisation économique, un gouvernement considère que les taux de salaires ne peuvent être fixés librement par la négociation, cette restriction devrait être appliquée comme une mesure d'exception limitée à l'indispensable, elle ne devrait pas excéder une période raisonnable et elle devrait être accompagnée de garanties appropriées en vue de protéger le niveau de vie des travailleurs. Le comité attire également l'attention de la commission d'experts sur cet aspect du cas.

g) Le comité estime que l'interprétation des conventions collectives doit relever au plan national d'organes indépendants des parties.

h) Le comité rappelle que les arrangements et accords auxquels sont parvenus de bonne foi les partenaires sociaux doivent être obligatoires pour les parties. Le comité invite en conséquence le gouvernement à s'assurer que les arrangements définitifs approuvés par les parties sont effectivement appliqués. Il demande au gouvernement de le tenir informé de l'évolution de cette affaire.

Cas no 1258 PLAINTE PRESENTEE PAR LA FEDERATION SYNDICALE MONDIALE ET LA CONFEDERATION INTERNATIONALE DES SYNDICATS LIBRES CONTRE LE GOUVERNEMENT D'EL SALVADOR

&htab;513.&htab;Les plaintes figurent dans des communications de la Fédération syndicale mondiale (FSM) et de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) datées respectivement du 26 janvier et du 6 avril 1984. Le gouvernement a répondu par des communications des 25 juillet, 12 et 24 octobre 1984.

&htab;514.&htab;El Salvador n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants

&htab;515.&htab;Selon la FSM, le 19 janvier 1984, le gouvernement d'El Salvador aurait déféré à la justice militaire un groupe de 11 militants et dirigeants du Syndicat des travailleurs de l'énergie électrique, arrêtés le 23 août 1980 pour avoir fait une grève sur le tas en vue d'obtenir des augmentations salariales. Il s'agit de Héctor Bernabé Recinos, Santos Rivera, José Arnulfo Grande, Arcadio Rauda, Chedor Ascendio, Jorge A. Valencia, José Valencia, Francisco Ramos, Alfredo Hernandez, Orlando Machuca et Jorge Artigas. La FSM indique ignorer encore les charges qui leur sont imputées et précise qu'ils encourent la peine de mort ou en tout cas des peines plus lourdes que s'ils étaient poursuivis devant la justice civile.

&htab;516.&htab;La FSM ajoute que cinq dirigeants syndicaux du secteur du café, Isabel Flores, José Rico Amayas Checa, Julio César Gonzalez Lopez, Santos Valentin Velasquez et Rafael Martin Mendoza, appréhendés en décembre 1983 dans le département de Sonsonete, se trouvent dans une situation semblable.

&htab;517.&htab;La CISL quant à elle allègue l'arrestation de Carlos Someta, secrétaire général du Syndicat des travailleurs de l'administration nationale des aqueducs et égouts, et demande au BIT d'intervenir auprès du gouvernement pour faire garantir la sécurité personnelle de Salvador Carazo, secrétaire général de la Fédération des syndicats de l'industrie et de la construction (FESINCONSTRANS), plusieurs fois menacé de mort; M. Carazo a en effet dû quitter son domicile avec sa famille après qu'un groupe de civils armés s'y soit présenté en son absence pour se saisir de lui.

B. Réponse du gouvernement

&htab;518.&htab;Dans sa communication du 25 juillet 1984, le gouvernement transmet une note officielle du tribunal militaire de première instance, datée du 8 mars 1984, qui contient des informations sur la situation au procès des 11 militants et dirigeants du Syndicat des travailleurs de l'énergie électrique (STECEL) mentionnés par la FSM. Cette note indique que le procès no 244/80 intenté contre les intéressés pour terrorisme avec occupation d'installations publiques et coupure d'alimentation électrique s'est terminé par un non-lieu provisoire et par la mise en liberté de 55 accusés, mais que la Cour suprême de justice a ordonné la poursuite de l'action judiciaire contre 11 autres accusés (Héctor Bernabé Recinos, Santos Rivera, José Arnulfo Grande, Arcadio Rauda et autres) du fait que leur arrestation était validement motivée. La note indique également que ces 11 accusés, ayant commis des délits politiques entraînant des peines de plus de quatre ans de prison, ne bénéficient pas du décret no 210 portant amnistie et restitution des droits civiques.

&htab;519.&htab;Dans ses communications des 12 et 24 octobre 1984, le gouvernement déclare que le dirigeant syndical du STECEL, Héctor Bernabé Recinos, et neuf autres membres du STECEL (dont il mentionne les noms) ont été libérés, le 10 octobre 1984. Le gouvernement ne fournit pas d'information sur M. Jorge Artigas.

C. Conclusions du comité

&htab;520.&htab;En ce qui concerne l'arrestation et le procès intenté contre 11 militants et dirigeants du Syndicat de l'énergie électrique arrêtés le 23 août 1980, le comité prend note de ce que, selon les informations communiquées par le gouvernement, ces personnes ont été poursuivies par la justice militaire pour terrorisme avec occupation d'installations publiques et coupure d'alimentation électrique, que ces délits sont considérés comme politiques et donc punissables de peines supérieures à quatre ans de prison et que 10 d'entre elles ont été libérées.

&htab;521.&htab;A cet égard, devant l'imprécision des actes qui étaient reprochés aux syndicalistes par le gouvernement, qui se borne à déclarer qu'ils ont commis des actes de terrorisme avec occupation d'installations publiques et coupure d'alimentation électrique, et compte tenu de ce que le plaignant allègue que ces syndicalistes ont été arrêtés pour des raisons syndicales - en l'occurrence pour avoir fait grève à l'appui de revendications salariales -, le comité signale à l'attention du gouvernement que l'arrestation ou la condamnation de dirigeants syndicaux ou de syndicalistes pour des activités liées à la défense des intérêts des travailleurs constitue une grave atteinte aux libertés publiques en général et aux libertés syndicales en particulier. [Voir, par exemple, 234e rapport, cas no 1040 (République centrafricaine), paragr. 479.] Cependant, le comité observe qu'il semble qu'un des syndicalistes du STECEL, M. Jorge Artigas, continue à être détenu et poursuivi. En conséquence, le comité demande au gouvernement d'indiquer les faits concrets qui lui sont imputés et de donner des informations sur l'évolution des poursuites qui leur seraient intentées afin de pouvoir se prononcer sur cet aspect du cas avec des éléments d'appréciation suffisants. Le comité tient à exprimer son inquiétude en observant que ce syndicaliste aurait été traduit devant la justice militaire. Le comité demande au gouvernement d'indiquer la raison pour laquelle la justice militaire et non civile serait saisie de cette affaire.

&htab;522.&htab;Enfin, le comité regrette que le gouvernement n'ait pas répondu aux autres allégations (arrestation et procès des dirigeants du secteur du café Isabel Flores, José Rico Amayas Checa, Julio César Gonzalez Lopez, Santos Valentin Velasquez et Rafael Martin Mendoza; arrestation de Carlos Someta, secrétaire général du Syndicat des travailleurs de l'administration nationale des aqueducs et égouts, et menaces de mort et tentative d'arrestation contre le dirigeant syndical de la FESINCONSTRANS Salvador Carazo par un groupe de civils armés). Le comité insiste auprès du gouvernement pour qu'il réponde à ces allégations de toute urgence.

Recommandations du comité

&htab;523.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) En ce qui concerne l'arrestation et le procès intenté contre 11 militants et dirigeants du Syndicat des travailleurs de l'énergie électrique, le comité note que 10 d'entre eux ont été libérés et prie le gouvernement d'indiquer les faits concrets reprochés au syndicaliste maintenu en détention, M. Jorge Artigas, ainsi que de le tenir informé de l'évolution des poursuites le concernant afin de pouvoir se prononcer sur cet aspect du cas avec des éléments d'appréciation suffisants. Le comité tient toutefois à exprimer son inquiétude en observant que ce syndicaliste aurait été traduit devant la justice militaire et il demande au gouvernement d'indiquer la raison pour laquelle la justice militaire serait saisie de cette affaire.

b) Face au manque de précisions fournies par le gouvernement sur les faits concrets qui ont motivé la détention et les poursuites des syndicalistes en cause, le comité signale à l'attention du gouvernement que l'arrestation ou la condamnation de dirigeants syndicaux ou de syndicalistes pour des activités liées à la défense des intérêts des travailleurs constitue une grave atteinte aux libertés publiques en général et aux libertés syndicales en particulier. c) En outre, le comité regrette que le gouvernement n'ait pas répondu aux autres allégations (arrestation et procès des militants du secteur du café Isabel Flores, José Rico Amyas Checa, Julio César Gonzalez Lopez, Santos Valentin Velasquez et Rafael Martin Mendoza; arrestation de Carlos Someta, secrétaire général du Syndicat des travailleurs de l'administration nationale des aqueducs et des égouts, et menaces de mort et tentative d'arrestation du dirigeant syndical de FESINCONSTRANS Salvador Carazo par un groupe de civils armés). Le comité insiste auprès du gouvernement pour qu'il réponde à ces allégations de toute urgence.

Cas no 1269 PLAINTE PRESENTEE PAR LA CONFEDERATION MONDIALE DES ORGANISATIONS DE LA PROFESSION ENSEIGNANTE CONTRE LE GOUVERNEMENT D'EL SALVADOR

&htab;524.&htab;La plainte figure dans une communication de la Confédération mondiale des organisations de la profession enseignante (CMOPE) du 22 mars 1984. La CMOPE a envoyé des renseignements complémentaires dans une communication du 28 mars 1984. Le gouvernement a répondu par une communication du 17 mai 1984.

&htab;525.&htab;Le Salvador n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de l'organisation plaignante

&htab;526.&htab;Selon l'organisation plaignante, au cours de la matinée du 16 mars 1984, la police nationale salvadorienne a fait une perquisition dans les locaux de l'organisation du personnel enseignant d'El Salvador "ANDES 21 juin". L'organisation plaignante exprime sa préoccupation de ce que la police a confisqué des listes où figurent le nom et l'adresse de tous les membres de l'organisation locale en cause. Elle ajoute, à propos du contexte dans lequel s'inscrit cette mesure, que, depuis 1979, plus de 300 enseignants ont été assassinés par des escadrons de la mort d'extrême-droite et des groupes paramilitaires, essentiellement en raison de leur affiliation à l'ANDES. C'est pourquoi cette perquisition et la confiscation des listes d'adresses ne peuvent s'interpréter que comme une mesure d'intimidation contre l'ANDES, d'autant plus qu'un haut fonctionnaire de l'Etat et des membres de l'extrême-droite ont formulé des menaces contre l'organisation et ses membres.

&htab;527.&htab;L'organisation plaignante signale qu'elle craint, non seulement que les renseignements sur les enseignants syndiqués ne servent de base à de nouvelles actions de la police, mais encore qu'ils ne soient communiqués à des groupes de droite prétendument indépendants responsables de divers assassinats et agressions, car il s'est produit une série de faits qui montrent clairement que les forces de sécurité n'ont pas su, ou voulu, protéger l'organisation et garantir son libre fonctionnement.

&htab;528.&htab;La CMOPE allègue aussi que les services postaux font l'objet d'ingérences dont le but manifeste est de faire obstacle aux communications et à la coopération entre l'ANDES et elle-même, la CMOPE, à laquelle l'ANDES est affiliée. Ainsi, bien que l'ANDES n'ait pas changé d'adresse, la correspondance que lui envoie la CMOPE n'arrive pas ou est retournée avec la mention "destinataire parti sans laisser d'adresse".

&htab;529.&htab;Enfin, l'organisation plaignante allègue que les menaces qui pèsent sur l'ANDES l'empêchent de tenir régulièrement et normalement ses réunions.

B. Réponse du gouvernement

&htab;530.&htab;Le gouvernement déclare que l'organisation "ANDES 21 juin" n'est pas un syndicat, mais une association générale de professeurs, régie par une loi spéciale et non par le Code du travail. C'est pourquoi le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale n'a rien à voir avec elle.

&htab;531.&htab;Le gouvernement ajoute qu'il faut comprendre que l'état d'exception est en vigueur au Salvador, ce qui implique une restriction de certaines garanties constitutionnelles, et que l'association de professeurs en question a déclaré publiquement qu'elle adhérait au Front démocratique révolutionnaire (FDR), lequel, avec le FMLN, constitue le front politique et militaire qui a déclaré la guerre au gouvernement suprême d'El Salvador. Comme il est logique dans de telles circonstances, les autorités procèdent à des enquêtes au sujet des personnes qui appartiennent à ce front extrémiste ou aux organisations qui le soutiennent et, pour des raisons de sécurité, les locaux de ces organisations sont visités.

C. Conclusions du comité

&htab;532.&htab;Le comité observe que la présente plainte concerne la perquisition dans les locaux de l'organisation "ANDES 21 juin" et la confiscation de listes de ses membres, ainsi que l'interception de la correspondance adressée à ladite organisation. L'organisation plaignante a souligné sa crainte de voir les listes en question communiquées à des groupes d'extrême-droite qui, depuis 1979, auraient assassiné des centaines de membres d'"ANDES 21 juin".

&htab;533.&htab;Le comité prend note des déclarations du gouvernement et en particulier du fait que, selon lui, l'"ANDES 21 juin" ne serait pas un syndicat, mais une association générale de professeurs régie par une loi spéciale. A cet égard, le comité observe qu'"ANDES 21 juin" est une organisation affiliée à une organisation syndicale internationale (la Confédération mondiale des organisations de la profession enseignante) et qu'elle est composée d'enseignants. Dans ces conditions, tout paraît indiquer qu'"ANDES 21 juin" est une organisation de travailleurs qui a pour objet de promouvoir et de défendre les intérêts des travailleurs. Cependant, le comité demande au gouvernement d'indiquer si la législation nationale reconnaît à "ANDES 21 juin" les garanties prévues par la convention no 87.

&htab;534.&htab;Le comité note d'autre part que le gouvernement reconnaît qu'une perquisition a été effectuée dans les locaux d'"ANDES 21 juin" et que les membres de cette organisation ont fait l'objet d'enquêtes. Le comité observe que le gouvernement justifie ces mesures en invoquant l'état d'exception, ainsi que des raisons de sécurité tenant à ce qu'"ANDES 21 juin" a déclaré publiquement qu'elle adhérait à l'une des organisations formant le front politique et militaire qui a déclaré la guerre au gouvernement.

&htab;535.&htab;Le comité observe néanmoins que le gouvernement n'a pas expliqué les raisons concrètes pour lesquelles la perquisition alléguée avait été effectuée. Le comité estime à cet égard que, puisqu'il s'agit d'une organisation ayant existence légale, "ANDES 21 juin" devrait être traitée sur pied d'égalité avec les autres organisations de travailleurs et pouvoir exercer pleinement les droits syndicaux.

&htab;536.&htab;A cet égard, le comité déplore que les locaux d'"ANDES 21 juin" aient fait l'objet d'une perquisition avec confiscation de listes de ses membres sans que, semble-t-il, un mandat judiciaire eût été délivré à cette fin. Le comité appelle l'attention du gouvernement sur le fait que les perquisitions dans les locaux syndicaux ne devraient avoir lieu que sur mandat de l'autorité judiciaire ordinaire, lorsque cette autorité est convaincue qu'il y a de solides raisons de supposer qu'on trouvera sur les lieux les preuves nécessaires à la poursuite d'un délit de droit commun, et à la condition que la perquisition soit limitée aux objets qui ont motivé la délivrance du mandat. [Voir, par exemple, Etude d'ensemble de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations , rapport III, partie 4B, Conférence internationale du Travail, 69e session, 1983, paragr. 69.]

&htab;537.&htab;De façon plus générale, eu égard au contexte historique dans lequel s'inscrivent les allégations et au nombre élevé de membres d'"ANDES 21 juin" qui, selon les plaignants, auraient été assassinés depuis 1979, ou auraient fait l'objet de menaces, le comité signale à l'attention du gouvernement que la liberté syndicale ne peut s'exercer que dans une situation de respect et de garantie complets des droits fondamentaux de l'homme, en particulier du droit à l'inviolabilité et à la sécurité de la personne. [Voir, par exemple, 233e rapport, cas no 1233 (El Salvador), paragr. 682.] Le comité prie le gouvernement de prendre des mesures pour mettre fin à la persécution dont font l'objet "ANDES 21 juin" et ses membres et pour faire en sorte que ceux-ci puissent exercer pleinement leurs droits syndicaux.

&htab;538.&htab;En ce qui concerne l'allégation relative à l'interception de la correspondance adressée par la CMOPE à "ANDES 21 juin", le comité désire signaler que le principe selon lequel toute organisation de travailleurs a le droit de s'affilier à des organisations internationales de travailleurs implique le droit des organisations syndicales nationales et internationales de maintenir des contacts. [Voir, par exemple, 233e rapport, cas no 1228 (Pérou), paragr. 184.] Le comité prie le gouvernement de procéder à une enquête au sujet de l'interception de correspondance alléguée.

Recommandations du comité

&htab;539.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Le comité demande au gouvernement d'indiquer si la législation nationale reconnaît à l'organisation dénommée "ANDES 21 juin" les garanties prévues par la convention no 87.

b) Le comité déplore que les locaux d'"ANDES 21 juin" aient fait l'objet d'une perquisition avec confiscation de listes de membres de l'organisation, sans que, semble-t-il, un mandat judiciaire eût été délivré à cette fin. Le comité signale à l'attention du gouvernement que les perquisitions dans les locaux syndicaux ne devraient avoir lieu que sur mandat de l'autorité judiciaire ordinaire, lorsque cette autorité est convaincue qu'il y a de solides raisons de supposer qu'on trouvera sur les lieux les preuves nécessaires à la poursuite d'un délit de droit commun, et à la condition que la perquisition soit limitée aux objets qui ont motivé la délivrance du mandat.

c) Le comité signale à l'attention du gouvernement que la liberté syndicale ne peut s'exercer que dans une situation de respect et de garantie complets des droits fondamentaux de l'homme, en particulier du droit à l'inviolabilité et à la sécurité de la personne. Il prie le gouvernement de prendre des mesures pour mettre fin à la persécution dont font l'objet "ANDES 21 juin" et ses membres et pour que ceux-ci puissent exercer pleinement leurs droits syndicaux. d) En ce qui concerne l'allégation relative à l'interception de la correspondance adressée par la CMOPE à "ANDES 21 juin", le comité désire signaler que le principe selon lequel toute organisation de travailleurs a le droit de s'affilier à des organisations internationales de travailleurs implique le droit des organisations syndicales nationales et internationales de maintenir des contacts. Le comité prie le gouvernement de procéder à une enquête au sujet de l'interception de correspondance alléguée.

Cas no 1273 PLAINTES PRESENTEES PAR LA FEDERATION SYNDICALE REVOLUTIONNAIRE ET PAR LE CONGRES PERMANENT D'UNITE SYNDICALE DES TRAVAILLEURS D'AMERIQUE LATINE CONTRE LE GOUVERNEMENT D'EL SALVADOR

&htab;540.&htab;Les plaintes figurent dans des communications de la Fédération syndicale révolutionnaire (FSR) et du Congrès permanent d'unité syndicale des travailleurs d'Amérique latine (CPUSTAL), datées respectivement des 5 et 9 avril 1984. La FSR a transmis des renseignements complémentaires par une communication en date du 27 avril 1984. Le gouvernement a répondu par une communication du 16 juillet 1984.

&htab;541.&htab;Préalablement à la présentation des plaintes, diverses organisations syndicales avaient demandé au Directeur général du BIT d'intervenir auprès du gouvernement sur les mêmes questions que celles qui sont soulevées dans les allégations formulées dans le cadre du présent cas. Le Directeur général s'était aussitôt adressé au gouvernement qui lui avait transmis certaines observations par des communications datées respectivement du 26 janvier et du 7 février 1984.

&htab;542.&htab;El Salvador n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants

&htab;543.&htab;Les plaignants allèguent que, le 19 janvier 1984, alors que la Fédération syndicale révolutionnaire (FSR) tenait dans les locaux de la Confédération générale des syndicats son cinquième congrès fédéral ordinaire en vue de l'élection du nouveau comité directeur fédéral, des membres de la police nationale fortement armés ont pénétré de force dans les lieux et arrêté un nombre important de dirigeants syndicaux et syndicalistes.

&htab;544.&htab;Les plaignants ajoutent qu'après des interrogatoires et des mauvais traitements prolongés, quelques-uns des dirigeants et syndicalistes arrêtés ont été libérés, mais que les personnes suivantes demeurent toujours détenues: José Jeremías Pereira (secrétaire général de la FSR), Juan José Vargas Lemus, Juan Salvador Ramos, Cruz Alfaro Escalante (secrétaire de rédaction de la FSR), Salvador Chávez (secrétaire chargé des relations de la FSR), Oscar Armando Benavides, Esteban González (secrétaire général du SETIVU), Dinora Ramírez de Pereira (secrétaire chargé de l'organisation de la FSR), Amanda Ramos de Villegas.

&htab;545.&htab;Enfin, les plaignants déclarent que les informations données par le gouvernement suivant lesquelles les arrestations ont été motivées par l'organisation d'une réunion dans la maison de retraites spirituelles "Loyola", à laquelle participaient des membres des forces populaires de libération liés au Mouvement ouvrier révolutionnaire sont erronées.

B. Réponse du gouvernement

&htab;546.&htab;Le gouvernement déclare que, le 19 janvier 1984, des membres de la police nationale se sont présentés à la maison de retraites spirituelles "Loyola" où se tenait un congrès syndical et qu'ils ont arrêté 15 personnes, aux fins d'enquête, ayant été informés que se déroulait dans lesdits lieux une réunion de la Fédération syndicale révolutionnaire à laquelle participaient des membres du groupe terroriste clandestin "Forces populaires de libération" (FPL) liés au Mouvement ouvrier révolutionnaire.

&htab;547.&htab;Le gouvernement ajoute qu'entre le 23 et le 27 janvier 1984, après des enquêtes minutieuses, six personnes ont été remises en liberté. Les neuf autres syndicalistes (qui sont ceux que les plaignants ont mentionnés) ont été déférés par le juge d'instruction militaire au centre pénitentiaire Mariona où ils sont détenus provisoirement, pendant que l'enquête les concernant se déroule.

&htab;548.&htab;Dans sa dernière communication, le gouvernement déclare, à propos de ces neuf personnes, que, selon les enquêtes effectuées, Oscar Armando Benavides, Juan José Vargas Lemus, Dinora Ramírez de Pereira, Esteban González Perez et Amanda Ramos de Villegas ont été arrêtés parce qu'ils appartenaient à une organisation de mobilisation des masses du FMLN, alors qu'ils étaient réunis avec José Jeremías Pereira Amaya, Cruz Alfaro Escalante et Salvador Escalante Chávez pour étudier un plan de travail des "Forces populaires de libération" dénommé "Une bataille décisive".

C. Conclusions du comité

&htab;549.&htab;Le comité observe que les présentes plaintes se rapportent à la violation, le 19 janvier 1984, par des membres de la police nationale, des locaux où se déroulait un congrès de la Fédération syndicale révolutionnaire (FSR), et à l'arrestation de dirigeants syndicaux et de syndicalistes, dont certains ont été remis en liberté quelques jours plus tard. Le gouvernement a confirmé que les membres de la police nationale s'étaient présentés dans les locaux où se déroulait le congrès de la FSR et qu'ils avaient arrêté, aux fins d'enquête, 15 personnes, dont six ont été remises en liberté quelques jours après. Selon le gouvernement, les neuf autres personnes ont été accusées d'appartenir au groupe terroriste "Forces populaires de libération" (affirmation que les plaignants rejettent) ou d'être en relation avec ce groupe, et elles ont été surprises alors qu'elles étaient en train d'étudier un plan de travail dudit groupe, dénommé "Une bataille décisive".

&htab;550.&htab;A ce sujet, le comité regrette que le gouvernement ne lui ait pas fourni d'informations détaillées sur le plan de travail du groupe terroriste "Forces populaires de libération", dénommé "Une bataille décisive", qu'étaient censés étudier, au moment de leur arrestation, les neuf syndicalistes ou dirigeants syndicaux actuellement arrêtés et inculpés, et en particulier sur les objectifs dudit plan et les moyens envisagés pour les atteindre. Le comité demande au gouvernement de lui communiquer ces informations, ainsi que des renseignements sur le déroulement du procès en cours, et, le cas échéant, le texte du jugement rendu, afin qu'il puisse se prononcer sur les allégations en disposant de suffisamment d'éléments d'appréciation. Toutefois, étant donné que les six autres syndicalistes de la même organisation syndicale ont été arrêtés pendant ledit congrès syndical, puis libérés quelques jours plus tard sans qu'aucune charge n'ait été retenue contre eux, le comité appelle l'attention du gouvernement sur le fait que les mesures d'arrestation et de détention prises à l'encontre de dirigeants syndicaux et de syndicalistes pour des activités se rapportant à l'exercice de leurs droits syndicaux sont contraires aux principes de la liberté syndicale. [Voir, par exemple, 233e rapport, cas no 1007 (Nicaragua), paragr. 233.]

&htab;551.&htab;Enfin, le comité tient à mettre l'accent sur le fait que, dans sa réponse, le gouvernement n'indique pas avoir opéré en vertu d'un mandat judiciaire lors de la pénétration dans les locaux où la Fédération syndicale révolutionnaire tenait son cinquième congrès syndical. A cet égard, le comité attire l'attention du gouvernement sur le principe suivant lequel l'inviolabilité des locaux syndicaux a nécessairement pour corollaire que les autorités ne peuvent exiger de pénétrer dans ces locaux sans être en possession d'un mandat judiciaire qui les y autorise. [Voir, par exemple, 230e rapport, cas no 1200 (Chili), paragr. 610.]

Recommandations du comité

&htab;552.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Le comité regrette que le gouvernement ne lui ait pas fourni d'informations suffisamment détaillées sur les raisons qui ont motivé l'arrestation puis le procès de neuf des quinze syndicalistes et dirigeants de la Fédération syndicale révolutionnaire, mis en état d'arrestation alors qu'ils assistaient à un congrès syndical. En conséquence, le comité demande au gouvernement de communiquer des précisions à ce sujet, ainsi que des informations sur le déroulement du procès en cours et, le cas échéant, le texte du jugement rendu, afin qu'il puisse se prononcer sur les allégations en disposant de suffisamment d'éléments d'appréciation.

b) Toutefois, étant donné que les six autres syndicalistes de la même organisation ont été arrêtés pendant le congrès syndical mentionné et qu'ils ont été libérés quelques jours plus tard sans qu'aucune charge n'ait été retenue contre eux, le comité appelle l'attention du gouvernement sur le fait que les mesures d'arrestation et de détention prises à l'encontre de dirigeants syndicaux et de syndicalistes pour des activités se rapportant à l'exercice de leurs droits syndicaux sont contraires aux principes de la liberté syndicale.

c) Par ailleurs, le comité attire l'attention du gouvernement sur le principe suivant lequel l'inviolabilité des locaux syndicaux a nécessairement pour corollaire que les autorités ne peuvent exiger de pénétrer dans ces locaux sans être en possession d'un mandat judiciaire qui les y autorise.

Cas no 1266 PLAINTES PRESENTEES PAR LE SYNDICAT NATIONAL DES ENSEIGNANTS AFRICAINS DE HAUTE-VOLTA ET PAR LA CONFEDERATION MONDIALE DES ORGANISATIONS DE LA PROFESSION ENSEIGNANTE CONTRE LE GOUVERNEMENT DU BURKINA FASO

&htab;553.&htab;Le Syndicat national des enseignants africains de Haute-Volta a déposé une plainte en violation de la liberté syndicale le 10 mars 1984. Par la suite, il a présenté des informations complémentaires à l'appui de sa plainte et de nouvelles allégations dans des communications des 22 mars, 2 et 24 avril 1984. Parallèlement, la Confédération mondiale des organisations de la profession enseignante a également porté plainte dans cette affaire par des communications des 16 et 27 mars 1984. Elle a aussi fourni des informations complémentaires dans des communications des 2 avril et 1er octobre 1984. Ces communications contenaient des renseignements fournis par le syndicat voltaïque qui lui est affilié.

&htab;554.&htab;Face à la gravité des allégations relatives à l'arrestation et à l'internement administratif des trois membres du bureau national du syndicat des enseignants de Haute-Volta, le Directeur général est intervenu à propos de ces arrestations par communication télégraphique auprès du gouvernement le 20 mars 1984.

&htab;555.&htab;Le gouvernement de la Haute-Volta qui, depuis lors, est devenu le gouvernement du Burkina Faso en juillet 1984, a envoyé les informations et observations en réponse aux allégations formulées dans ce cas dans un télégramme du 23 mars 1984 puis dans une lettre du 5 juin 1984.

&htab;556.&htab;Le Burkina Faso a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention no 98 sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants

&htab;557.&htab;La Confédération mondiale des organisations de la profession enseignante (CMOPE) et l'organisation qui lui est affiliée au Burkina Faso, le Syndicat national des enseignants africains de Haute-Volta (SNEAHV), ont dénoncé dans leur plainte initiale l'arrestation par le gouvernement, le 9 mars 1984, dans la soirée, à leur domicile, de Jean Pagnimda Bila, secrétaire général du SNEAHV, de Bahiéba Joachim Sib, secrétaire aux relations extérieures et de Batiémoko Komé, secrétaire chargé des problèmes pédagogiques. Ils ajoutaient que Ismael Ousmane Kindo, secrétaire adjoint du syndicat, avait échappé ce soir-là à la répression mais qu'il était recherché.

&htab;558.&htab;Dans des communications ultérieures des 22 mars et 2 avril 1984, les plaignants précisaient que les trois dirigeants arrêtés le 9 mars avaient été déportés à Koudougou, à 100 kilomètres de Ouagadougou, où ils étaient désormais internés au bataillon d'infanterie aéroporté et que le secrétaire général adjoint, Ismael Ousmane Kindo, qui s'était depuis lors rendu à la gendarmerie le 13 mars 1984, avait, lui aussi, été déporté avec ses camarades. Le SNEAHV indiquait également que Batiémoko Komé, arrêté le 9 mars, avait été libéré peu après puisque le ministre de la Défense avait admis qu'il ne menait que des activités "purement syndicales". Cependant, selon le plaignant, l'intéressé avait été à nouveau interné depuis le 3 avril 1984, sans qu'aucun chef d'accusation ne lui soit reproché.

&htab;559.&htab;Enfin, dans une communication du 1er octobre 1984, la CMOPE joint une lettre envoyée de Ouagadougou le 29 août 1984, mais reçue seulement le 11 septembre 1984, dans laquelle le secrétaire administratif du SNEAHV, M. Garango, confirme l'internement à Koudougou des dirigeants syndicaux, MM. Bila, Kindo et Sib, les deux premiers depuis le 9 mars 1984, et la détention à la gendarmerie de Ouagadougou depuis le 3 avril 1984, de M. Komé.

&htab;560.&htab;Les plaignants indiquaient en outre que, pour obtenir la libération des dirigeants syndicaux du SNEAHV, le syndicat avait déclenché une grève de protestation et d'avertissement de 48 heures, très largement suivie, les 20 et 21 mars 1984. Le Conseil national de la révolution avait répliqué le 23 mars à 22 heures 30 par une déclaration radiotélévisée licenciant tous les enseignants qui avaient participé à la grève. Selon le SNEAHV dans sa communication du 24 avril 1984, 2.600 enseignants auraient été ainsi licenciés, soit environ la moitié des adhérents du syndicat, et le gouvernement aurait recruté sur la base de la simple conviction idéologique et politique des enseignants non qualifiés pour remplacer les grévistes à partir du 16 avril 1984. Le SNEAHV joignait en annexe à cette communication une circulaire signée du ministre de l'Education nationale, des Arts et de la Culture parue le même jour, soit le 24 avril 1984, et invitant les directeurs d'établissements privés, primaires et secondaires à ne pas utiliser les services des grévistes dans leurs établissements.

&htab;561.&htab;Enfin, il semble ressortir de la lettre du 27 août 1984 adressée par le secrétaire exécutif, M. Garango, au ministre de l'Intérieur et de la Sécurité (lettre jointe en annexe à la communication de la CMOPE du 1er octobre 1984), que le gouvernement aurait pris des mesures de clémence en faveur des enseignants. La lettre ne contient toutefois aucune précision sur la nature et la portée de ces mesures.

&htab;562.&htab;De plus, dans leurs plaintes initiales des 10 et 27 mars 1984, les plaignants faisaient état des difficultés rencontrées par le syndicat national des enseignants depuis l'avènement du Conseil national de la révolution. Ainsi, le SNEAHV avait précisé que, depuis la tenue de son 28e congrès en août 1983, le gouvernement avait refusé aux membres de son bureau national toute autorisation de sortie pour effectuer une mission syndicale à l'étranger et que, depuis le 12 janvier 1984, le gouvernement avait notifié par écrit à sa direction syndicale que, tant que sa position politique ne serait pas révisée, il n'entretiendrait pas de contact avec ledit syndicat. En outre, depuis le 3 février 1984, le gouvernement avait interdit au SNEAHV la diffusion radiotélévisée de ses communiqués syndicaux et, depuis le 1er mars 1984, avait entrepris, avec l'aide des comités de défense de la révolution, une campagne de diffamation contre le bureau syndical sous prétexte de prétendues menées subversives développées par le syndicat dans les assemblées générales et dans des circulaires d'informations syndicales.

&htab;563.&htab;La CMOPE, quant à elle, précisait que le refus de quitter le pays imposé aux syndicalistes avait empêché un représentant du SNEAHV de prendre part à un programme de visites de nombreux pays africains effectuées par des dirigeants syndicaux enseignants en novembre 1983 et que l'arrestation du secrétaire pédagogique du syndicat avait eu pour conséquence de l'empêcher d'assister à une conférence panafricaine sur la réforme de l'éducation en Afrique à Yaoundé, du 2 au 7 avril 1984.

&htab;564.&htab;Enfin, dans sa communication du 1er octobre 1984, la CMOPE joint une lettre du secrétaire administratif du SNEAHV qui lui était adressée de Ouagadougou le 29 août 1984. Dans cette lettre, ce dirigeant syndical fait état de la tenue d'un congrès extraordinaire du SNEAHV du 28 au 30 août 1984, sans la participation des enseignants grévistes, mais avec celle de deux dirigeants du bureau national dudit syndicat qui se seraient désolidarisés du mouvement de protestation des 20 et 21 mars 1984. Les dirigeants en cause seraient MM. Sanfo, secrétaire chargé de l'animation, des affaires sociales et de la formation syndicale, et Gampene, secrétaire à l'organisation, dans le bureau national dirigé par Jean Bila. Or ces syndicalistes seraient l'un et l'autre proches des comités de défense de la révolution. Selon le secrétaire administratif, le bureau issu de ce congrès extraordinaire serait illégal.

B. Réponse du gouvernement

&htab;565.&htab;Dans son télégramme du 23 mars 1984, en réponse à l'intervention du Directeur général, le gouvernement, sans nier les arrestations et internements des trois membres du bureau national du syndicat en cause, avait indiqué que les mesures prises avaient été motivées par les activités politiques et non syndicales des intéressés. Il avait en outre précisé que, dans sa "proclamation du 4 août 1983", le Conseil national de la révolution avait suspendu les partis politiques et interdit les activités politiques.

&htab;566.&htab;Dans sa lettre du 5 juin 1984, le gouvernement réitère ses indications sur la nature politique et non syndicale des activités des dirigeants arrêtés. Il brosse un tableau de la situation générale dans le pays, expliquant qu'après le soulèvement populaire du 4 août 1983, qui avait conduit au pouvoir le nouveau gouvernement, le SNEAHV l'avait, dès le 7 août 1983, provoqué en dénonçant le caractère antidémocratique de la "proclamation du 4 août 1983" du capitaine Sankara dans sa motion sur la conjoncture nationale. Cette motion accusait en substance le nouveau gouvernement de représenter l'aile fascisante du Conseil suprême de la révolution qui s'était déjà illustrée par ses "velléités dictatoriales, la mystification et la surenchère politique". La motion syndicale du SNEAHV poursuivait dans les termes suivants:

&htab;Considérant que ladite proclamation fait fi des libertés individuelles, collectives, syndicales et démocratiques passées sous silence; &htab;Considérant que cette proclamation est un attentat contre les libertés fondamentales qu'elle assassine par la dissolution des partis politiques officiels et la création des structures d'embrigadement, notamment des comités de défense de la révolution tristement célèbres en d'autres lieux;

&htab;Le 28e congrès du Syndicat national des enseignants africains de Haute-Volta (SNEAHV) tenu à Bobo-Dioulasso les 2, 3, 4, 5, 6 et 7 août 1983,

&htab; - Se démarque de la proclamation du 4 août 1983 de son Conseil national de la révolution (CNR).

&htab; - Met en garde les autorités contre les atteintes aux libertés individuelles, collectives, syndicales et démocratiques.

&htab; - Affirme sa disponibilité permanente pour la constitution d'un front pour la lutte des travailleurs pour la sauvegarde de leurs libertés.

&htab; - En appelle au peuple voltaïque, aux organisations démocratiques et de masse à se démarquer de la proclamation du 4 août 1983, et de son Conseil national de la révolution (CNR) qui n'est qu'une autre appellation du fascisme déjà célèbre du Conseil suprême de la révolution première formule.

&htab;567.&htab;Le gouvernement conclut au caractère foncièrement politique de cette motion et ajoute que cette attitude putchiste du SNEAHV est d'autant plus inadmissible que ce même syndicat ne s'est pas opposé aux mesures prises par le comité militaire de redressement pour le progrès national du précédent gouvernement qui avait supprimé tour à tour le droit de grève puis la Confédération syndicale voltaïque et lancé un mandat d'arrêt national et international contre son secrétaire général. [Voir 218e rapport du Comité de la liberté syndicale, cas no 1131, Haute-Volta, paragr. 751 à 782 et 222e rapport, paragr. 85 à 96.] Selon le gouvernement, cette attitude aurait tenu à ce que la direction du syndicat aujourd'hui plaignant était alors entre les mains de politiciens inféodés au parti politique qui soutenait le gouvernement d'alors, noyautait des milliers d'adhérents et les maintenait dans le mutisme face aux mesures les plus impopulaires et les plus antitravailleurs. En conséquence, poursuit le gouvernement, cette direction syndicale a fait apparaître, en jetant le masque, sa couleur politique colonialiste et réactionnaire, et le Conseil national de la révolution et le peuple voltaïque ne peuvent que les combattre comme tous les politiciens qui, depuis des décennies, ont travaillé à conserver leurs intérêts égoïstes au mépris du peuple resté dans le dénuement et la misère.

C. Conclusions du comité

&htab;568.&htab;Le comité observe avec une profonde préoccupation que les plaintes présentées dans le présent cas contiennent des allégations sérieuses faisant état de l'emprisonnement de quatre dirigeants syndicaux internés administrativement, pour deux d'entre eux au moins depuis le 9 mars 1984, et du licenciement de quelque 2.600 enseignants pour avoir participé à une grève de protestation de deux jours organisée par le syndicat plaignant pour obtenir la libération de ses dirigeants. Le comité prend note des explications du gouvernement au sujet des motifs qui l'auraient conduit à adopter de telles mesures.

a) &htab;Allégations relatives à l'internement &htab;administratif de dirigeants syndicaux

&htab;569.&htab;Au sujet de l'arrestation de plusieurs dirigeants syndicaux du syndicat des enseignants voltaïques, intervenue selon le gouvernement pour des motifs politiques, le comité observe que le gouvernement n'a imputé aux intéressés aucun acte concret de violence ou autre et qu'il s'est contenté de faire état d'un texte antigouvernemental contenu dans une motion syndicale rédigée le 7 août 1983, soit trois jours après sa prise du pouvoir grâce à un "soulèvement populaire" et sept mois avant l'arrestation des dirigeants en cause. Tout en remarquant le ton dur utilisé dans cette motion, le comité observe néanmoins qu'au dire même du gouvernement, il avait lui-même, par sa proclamation du 4 août 1983, suspendu les partis politiques et interdit les activités politiques. Le comité estime qu'une telle attitude de la part du gouvernement ne pouvait pas conduire à favoriser l'éclosion d'un climat propice à la sauvegarde des libertés démocratiques et, partant, syndicales.

&htab;570.&htab;Lorsqu'il est saisi d'allégations portant sur des arrestations de dirigeants syndicaux, le comité a toujours insisté sur le fait que les mesures d'internement administratif peuvent impliquer une grave ingérence dans les activités syndicales. Aussi le comité insiste-t-il sur l'importance qu'il attache à ce que dans tous les cas, y compris lorsque des syndicalistes sont accusés de délits politiques que le gouvernement considère comme étrangers à leurs activités syndicales, les personnes en cause soient rapidement déférées devant un tribunal impartial et indépendant.

&htab;571.&htab;Dans ces conditions, le comité ne peut que déplorer la détention sans jugement depuis de longs mois de dirigeants syndicaux et il lance un appel au gouvernement, pour qu'il les libère ou pour qu'ils soient déférés devant un tribunal indépendant et impartial et, dans ce cas, pour qu'il communique le texte des jugements les concernant avec leurs attendus. b) &htab;Allégations relatives au licenciement de &htab;2.600 enseignants pour avoir participé à &htab;une grève, et au recrutement de travailleurs &htab;pour remplacer les grévistes

&htab;572.&htab;Le comité note que le gouvernement n'a ni commenté ni nié cette allégation. Il observe cependant que, d'après une circulaire du ministre de l'Education nationale du 24 avril 1984, jointe au dossier par les plaignants, le gouvernement, "dans une riposte révolutionnaire, a licencié tous les enseignants qui ont observé le mot d'ordre de grève". Dans cette circulaire, le ministre a en outre enjoint aux directeurs d'établissements de l'enseignement privé "de ne pas utiliser les services des grévistes dans leurs établissements". Le comité relève aussi avec préoccupation que, selon les plaignants, 2.600 personnes, soit la moitié des adhérents du syndicat, auraient été touchées par cette mesure de licenciement particulièrement sévère.

&htab;573.&htab;Tout en observant, d'après la dernière communication des plaignants, qu'une mesure de clémence aurait été prise en faveur des grévistes licenciés, le comité ne peut que déplorer l'absence de commentaires du gouvernement sur cette allégation qui constitue une mesure d'une excessive gravité prise à l'encontre d'enseignants qui ne s'étaient mis en grève que pour protester, semble-t-il, contre la détention sans jugement de leurs propres dirigeants syndicaux. Le comité demande instamment la réintégration des enseignants grévistes licenciés pour le seul fait d'avoir participé à une grève. Il demande au gouvernement de le tenir informé de toute mesure prise à cet effet.

&htab;574.&htab;Au sujet du recrutement de travailleurs pour remplacer les grévistes, le comité regrette que le gouvernement n'ait pas commenté cette allégation. Dans ces conditions, et en l'absence de dénégations de la part du gouvernement sur cet aspect du cas, le comité se doit de signaler que le droit de grève est un des moyens essentiels dont doivent pouvoir disposer les travailleurs pour la défense de leurs intérêts et que le recrutement de travailleurs pour remplacer les grévistes constitue une mesure destinée à porter atteinte au droit syndical des enseignants.

c)&htab; Allégations relatives à des restrictions &htab;à l'exercice de la liberté syndicale &htab;du Syndicat des enseignants africains &htab;de Haute-Volta

&htab;575.&htab;Au sujet du refus du gouvernement d'autoriser les membres du bureau national du SNEAHV de quitter le pays pour participer à des réunions syndicales, le comité regrette que le gouvernement n'ait pas commenté cette allégation. En l'absence de dénégations du gouvernement sur cet aspect du cas, le comité rappelle qu'aux termes de la convention no 87 ratifiée par le Burkina Faso, les organisations de travailleurs doivent avoir le droit de s'affilier à des organisations internationales de travailleurs et que les autorités publiques doivent s'abstenir d'interventions de nature à limiter ce droit. En conséquence, le comité estime qu'il incombe au gouvernement, non seulement de s'abstenir de gêner les représentants des travailleurs lorsqu'ils désirent assister à une réunion internationale de l'organisation internationale à laquelle ils sont affiliés hors de leur pays, mais encore d'adopter des dispositions raisonnables pour assurer qu'il ne puisse être en rien porté préjudice à leurs droits d'être en contact avec lesdites organisations.

&htab;576.&htab;Au sujet de l'allégation relative à l'interdiction de transmettre des messages syndicaux par l'intermédiaire de la radio et de la télévision, le comité regrette également que le gouvernement n'ait pas non plus commenté cette allégation et qu'il se soit borné à invoquer la nature politique et non syndicale des propos tenus par la direction syndicale en cause. En l'absence de dénégations formelles de la part du gouvernement sur ce point également, le comité rappelle que le droit d'exprimer des opinions syndicales par voie de presse ou autre est un élément essentiel du droit syndical.

d) &htab;Allégations relatives à la tenue &htab;d'un congrès extraordinaire du SNEAHV &htab;en août 1984 qui aurait élu une &htab;direction syndicale illégale

&htab;577.&htab;Le comité prie le gouvernement de formuler ses commentaires à propos de cette allégation qui date du 1er octobre 1984.

Recommandations du comité

&htab;578.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Au sujet du cas dans son ensemble, le comité note avec une profonde préoccupation l'internement administratif imposé à quatre dirigeants syndicaux depuis de longs mois et les mesures de licenciement massif qui auraient touché environ 2.600 enseignants pour avoir participé à une grève de deux jours.

b) Le comité lance un appel au gouvernement pour qu'il libère les dirigeants syndicaux internés administrativement et sans avoir été jugés ou pour qu'ils soient rapidement déférés devant un tribunal indépendant et impartial et, dans ce dernier cas, qu'il communique le jugement les concernant avec leurs attendus.

c) Le comité demande au gouvernement de le tenir informé du sort de ces dirigeants syndicaux.

d) Le comité demande instamment la réintégration des enseignants licenciés pour le seul fait d'avoir participé à une grève. e) Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de toute mesure prise à cet effet.

f) Le comité prie le gouvernement de transmettre ses observations sur l'allégation à laquelle il n'a pas encore répondu et qui date du 1er octobre 1984 selon laquelle, au cours d'un congrès extraordinaire du SNEAHV en août 1984, une direction syndicale illégale aurait été élue.

Cas no 1267 PLAINTE PRESENTEE PAR LA CONFEDERATION MONDIALE DES ORGANISATIONS DE LA PROFESSION ENSEIGNANTE CONTRE LE GOUVERNEMENT DE LA PAPOUASIE-NOUVELLE-GUINEE

&htab;579.&htab;Dans une communication en date du 26 mars 1984, la Confédération mondiale des organisations de la profession enseignante a présenté une plainte contre le gouvernement de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, alléguant la violation des droits syndicaux dans ce pays. Le gouvernement a présenté ses observations dans une communication du 25 mai 1984.

&htab;580.&htab;La Papouasie-Nouvelle-Guinée a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949; elle n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.

A. Allégations du plaignant

&htab;581.&htab;Dans sa communication du 26 mars 1984, la Confédération mondiale des organisations de la profession enseignante (CMOPE) fait état, au nom de l'Association des enseignants de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, organisation qui lui est affiliée, de sa préoccupation au sujet de l'amendement de l'article 52 de la loi sur la conciliation et l'arbitrage dans la fonction publique/enseignement, introduit par la loi de 1983.

&htab;582.&htab;Le plaignant allègue, en particulier, que cet amendement a deux effets: il énonce les raisons pour lesquelles le gouvernement peut rejeter une décision relative aux salaires, arrêtée par voie de conciliation et d'arbitrage; et il permet ce rejet à n'importe quel moment de la durée d'application d'une convention salariale, alors que la disposition initiale disposait que ce rejet ne pouvait intervenir que dans les 14 jours de la date à laquelle le ministre en informait le Conseil exécutif national.

&htab;583.&htab;Le plaignant considère l'amendement comme inopportun et inapproprié pour deux motifs: en premier lieu, il perpétue la limitation des droits de négociation que la disposition initiale instaurait déjà, ce qui est inacceptable, dans la mesure où le pouvoir du gouvernement de revenir sur la totalité ou sur une partie d'une convention salariale et d'y opposer son veto se trouve ainsi renforcé. Il fait observer que, depuis l'adoption de l'amendement, ce pouvoir a déjà été exercé à deux reprises. En second lieu, le plaignant estime que l'amendement, en supprimant le délai de 14 jours qui existait au préalable et qui, à son avis, assurait, à tout le moins, que la décision relative aux salaires serait confirmée ou ferait l'objet d'un veto, dans un délai déterminé, compromet les accords salariaux de façon permanente et inacceptable.

&htab;584.&htab;Le plaignant ajoute en outre que l'amendement permet d'annuler une décision relative aux salaires, à n'importe quel moment de la durée d'application d'une convention, si le chef de l'Etat, après avoir pris conseil, estime que cette convention est "contraire à la politique du gouvernement" ou "dessert les intérêts de la Papouasie-Nouvelle-Guinée" (ces deux motifs étant stipulés dans le nouveau sous-paragraphe 52A 1) introduit par l'amendement). Selon le plaignant, comme le gouvernement au pouvoir est l'arbitre de l'intérêt national et l'instigateur de la politique officielle, il est évident que des événements étrangers à la question, tels que la modification de la politique au sein du Conseil exécutif national ou le changement de gouvernement ou une élection, pourraient, à tout moment, conduire à l'invalidation d'une convention collective. Le plaignant estime que, dans ces conditions, le seul recours ou moyen dont disposent les syndicats pour remédier à la situation consiste à essayer d'infléchir la politique, ce qui, à son avis, ne devrait pas constituer le seul moyen d'appliquer une convention collective.

&htab;585.&htab;Pour le plaignant, le seul amendement qui eût satisfait le principe de la négociation collective qui est fondamentale pour la liberté syndicale eût été la suppression de tous les sous-paragraphes de l'article 52 de la loi qui ont trait au rejet des décisions relatives aux salaires; l'amendement qui fait l'objet de la plainte fait fi du mécanisme tout entier de conciliation et d'arbitrage, ce qui est confirmé et aggravé par une modification des procédures équivalant au reniement du principe fondamental de droit selon lequel les engagements doivent être tenus.

B. Réponse du gouvernement

&htab;586.&htab;Dans sa réponse, le gouvernement déclare que, le 15 août 1983, le Conseil exécutif national a approuvé les amendements visant à permettre l'annulation de l'enregistrement de décisions, dans le cadre de la loi sur la conciliation et l'arbitrage dans la fonction publique et de la loi sur la conciliation et l'arbitrage dans l'enseignement. Il déclare avoir agi ainsi pour un certain nombre de raisons qui visaient, principalement, à maintenir une uniformité et à sauvegarder les intérêts publics.

&htab;587.&htab;Le gouvernement explique que trois textes législatifs définissent les procédures à suivre en matière de différends du travail et d'enregistrement des conventions, sentences et décisions dans le domaine du travail: la loi sur les relations professionnelles, qui a trait essentiellement au secteur privé; la loi sur la conciliation et l'arbitrage dans la fonction publique, qui porte sur le secteur public et certaines institutions statutaires déterminées; et la loi sur la conciliation et l'arbitrage dans l'enseignement, qui concerne les enseignants.

&htab;588.&htab;La première de ces lois s'applique à 75 pour cent de l'effectif des travailleurs et contient une disposition en vertu de laquelle le chef de l'Etat peut rejeter une décision ou une convention enregistrée, à tout moment, soit lorsqu'elle va à l'encontre de la politique du gouvernement, soit parce qu'elle ne répond pas au meilleur intérêt de la Papouasie-Nouvelle-Guinée; l'objet de l'amendement apporté au deuxième texte de loi (et cela est aussi entièrement vrai du troisième texte) était d'insérer une telle disposition dans ces textes, en partie afin d'introduire une certaine uniformité dans la législation et les pratiques du pays dans le domaine du travail.

&htab;589.&htab;Selon le gouvernement, une deuxième considération importante qui a conduit à introduire ces amendements était que les négociations avec les syndicats du secteur public ne se déroulaient pas, comme il avait été prévu, conformément à la décision du Conseil des salaires minimums qui, comme d'autres décisions antérieures, prévoyait des "références" nationales en matière de salaires et des méthodes d'ajustement; il était fort probable qu'un tribunal d'arbitrage devrait être constitué pour statuer sur la question. Le gouvernement ajoute que le maintien en vigueur d'une convention, après sa date d'expiration, offre l'avantage de ne pas avoir à modifier une convention de travail conclue précédemment avec des syndicats du secteur public; comme la convention de travail précédente prévoyait des dispositions sur les ajustements de salaires beaucoup plus favorables que celles qui sont prescrites par la décision du Conseil des salaires minimums, elle n'aurait pas servi le meilleur intérêt de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, et il n'aurait pas non plus été sensé, pour de bonnes relations professionnelles, de permettre à des fonctionnaires, y compris des enseignants, de bénéficier de dispositions meilleures en matière d'ajustement de salaires que celles qui sont applicables à l'ensemble des travailleurs; agir ainsi aurait créé une tension dans le monde du travail.

&htab;590.&htab;Le gouvernement conclut en soulignant que, selon lui, les amendements ne contrevenaient en rien à aucune convention ratifiée de l'OIT, qu'ils étaient justes et n'enfreignaient pas directement les droits des syndicats à négocier avec les employeurs.

C. Conclusions du comité

&htab;591.&htab;Le comité note que le présent cas a trait à des dispositions législatives qui confèrent au gouvernement le pouvoir de rejeter des sentences ou des décisions relatives aux employés de la fonction publique et de l'enseignement de la Papouasie-Nouvelle-Guinée.

&htab;592.&htab;Le comité note, en outre, qu'avant son abrogation et son remplacement en 1983 ce pouvoir existait en application de l'article 52 de la loi sur la conciliation et l'arbitrage dans la fonction publique qui était ainsi conçu:

&htab;52. &htab;Présentation et rejet des décisions

&htab;1) Lorsqu'une décision a été enregistrée, conformément à l'article 51, le greffier doit, sans délai, envoyer au ministre, sous pli recommandé, une copie certifiée de la décision.

&htab;2) Dès réception, le ministre devra soumettre au Conseil exécutif national la copie certifiée de la décision, ainsi que toute observation du président du tribunal, conformément à l'article 43 3).

&htab;3) Le chef de l'Etat, après avoir pris conseil, peut, dans les 14 jours qui suivent la présentation d'une décision, conformément au sous-paragraphe 2), rejeter la totalité ou une partie de cette décision.

&htab;4) Lorsque le chef de l'Etat, après avoir pris conseil, a rejeté, conformément à cet article, la totalité ou une partie d'une décision, la décision ou la partie rejetée, selon le cas, ne sera pas appliquée et sera nulle et non avenue.

&htab;5) Une notification du rejet ou non d'une décision par le chef de l'Etat, après avoir pris conseil, devra être publiée dans la gazette officielle.

&htab;593.&htab;L'amendement en vertu duquel l'article ci-dessus a été abrogé remplace cet article par un nouvel article 52 relatif à la présentation des décisions et reprend les termes des deux premiers sous-paragraphes cités ci-dessus, et ajoute un nouvel article 52A qui prévoit ce qui suit:

&htab;52A. Rejet des décisions

&htab;1) Le chef de l'Etat, après avoir pris conseil, peut, à tout moment, rejeter une décision ou n'importe quelle partie d'une décision, au motif:

&htab;&htab;a) qu'elle est contraire à la politique du gouvernement; ou

&htab;&htab;b) qu'elle n'est pas conforme aux intérêts de la Papouasie-Nouvelle-Guinée.

&htab;2) La notification du rejet d'une décision ou d'une partie d'une décision devra être publiée dans la gazette officielle, et la décision ou une partie de la décision cessera d'avoir effet, dès la publication de la notification.

&htab;3) Le rejet d'une décision ou d'une partie d'une décision:

&htab;&htab;a) n'affecte aucun droit acquis ni aucune obligation contractée avant la date de la publication de la décision de rejet; et

&htab;&htab;b) redonne effet, à compter de la date de publication de la notification du rejet, à toute décision qui a été, en totalité ou en partie, remplacée ou abrogée, soit expressément soit implicitement, par la décision rejetée.

&htab;594.&htab;Il semblerait, d'après un examen de ces textes, que la modification de la législation a introduit trois principaux changements, à savoir: 1) la suppression du délai de 14 jours durant lequel le rejet d'une sentence ou d'une décision pouvait avoir lieu, et son remplacement, dans l'article 52A 1), par une disposition permettant un tel rejet à n'importe quel moment; 2) la spécification, dans le même article, de deux motifs qui, séparément ou ensemble, peuvent justifier un rejet; et 3) la spécification, dans l'article 52A 3), d'autres effets entraînés par la notification d'un avis de rejet, en dehors de ceux qui sont prévus dans l'article 52A 2) (qui ne fait que reprendre les dispositions antérieures de l'ancien article 52 4)).

&htab;595.&htab;Le comité estime qu'il est indubitable que ces changements ont pour effet de renforcer le pouvoir du gouvernement de rejeter des sentences et des décisions, en supprimant le délai durant lequel il était déjà possible de le faire et il relève que, conformément à la disposition modifiée, cette mesure peut s'appliquer à des sentences ou des décisions déjà en vigueur.

&htab;596.&htab;Le comité note l'explication donnée par le gouvernement selon laquelle les principales raisons qui ont conduit à l'adoption des dispositions modifiées sont de placer tous les travailleurs, du secteur public comme du secteur privé, sur un pied d'égalité; il note que les nouvelles dispositions sont en fait identiques à celles qui s'appliquent au secteur privé, en vertu de l'article 42 de la loi sur les relations professionnelles. Le comité tient à relever, à cet égard, qu'il a toujours estimé que la convention no 98, et en particulier son article 4, relatif à l'encouragement et à la promotion de la négociation collective, est applicable au secteur privé comme aux organismes publics, à l'exception éventuellement des fonctionnaires [voir 141e rapport, cas no 729 (Bangladesh), paragr. 15], expression qu'il a essayé de définir avec précision au fil des ans, afin d'en limiter l'application aux catégories d'agents de la fonction publique auxquelles elle peut strictement s'appliquer.

&htab;597.&htab;Le comité a également pris note de l'explication du gouvernement relative à la deuxième raison importante de l'adoption des amendements législatifs, à savoir que les négociations avec les syndicats du secteur public ne se déroulaient pas comme il avait été prévu, conformément à la décision du Conseil des salaires minimums qui devait fixer des références pour les niveaux de salaires. Le comité a déjà examiné dans le passé des cas où l'intervention des pouvoirs publics visait essentiellement à garantir que les parties qui négocient subordonnent leurs intérêts à la politique économique nationale du gouvernement, que celle-ci recueille ou non leur agrément. Il a estimé qu'une situation de ce type n'est pas compatible avec les principes généralement acceptés, selon lesquels les organisations de travailleurs et d'employeurs devraient avoir le droit d'organiser librement leurs activités et de formuler leurs programmes, les autorités publiques devant s'abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l'exercice légal, et la législation nationale ne devant pas être de nature, ou ne devant pas être appliquée de façon à compromettre la jouissance de ce droit. [Voir 65e rapport, cas no 266 (Portugal), paragr. 70.]

&htab;598.&htab;Le comité observe que cette explication semble renforcer la conclusion selon laquelle le fait que le gouvernement ne soit pas satisfait des négociations l'amenait à ne pas être non plus disposé à permettre que la négociation collective continue de se dérouler selon le mode antérieurement prescrit. De l'avis du comité, en optant pour cette attitude, grâce au renforcement de son pouvoir de rejeter, complètement à sa propre discrétion et à tout moment, des sentences ou des décisions, le gouvernement a agi d'une manière qui porte atteinte aux principes de la libre négociation collective, ce qui va à l'encontre de l'obligation établie par l'article 4 de la convention no 98 "d'encourager et de promouvoir le développement et l'utilisation les plus larges de procédures de négociation volontaire de conventions collectives entre les employeurs et les organisations d'employeurs, d'une part, et les organisations de travailleurs, d'autre part, en vue de régler par ce moyen les conditions d'emploi". Le comité exprime l'espoir que le gouvernement l'informera des mesures prises en vue de remédier à cette situation.

&htab;599.&htab;A cet égard, le comité note, avec une certaine préoccupation, l'affirmation du gouvernement selon laquelle il était fort probable que la question faisant l'objet de la négociation devrait être soumise à arbitrage, considération qui avait également influé sur sa décision d'amender la législation. L'article 8 de la convention no 151 établit très précisément que "le règlement des différends survenant à propos de la détermination des conditions d'emploi sera recherché, d'une manière appropriée aux conditions nationales, par voie de négociation entre les parties ou par une procédure donnant des garanties d'indépendance et d'impartialité telles que la médiation, la conciliation ou l'arbitrage, instituée de telle sorte qu'elle inspire la confiance des parties intéressées". En conséquence, le comité exprime l'espoir que le gouvernement usera de tous les moyens possibles pour résoudre les différends relatifs aux conditions d'emploi dans la fonction publique et dans l'enseignement, y compris, le cas échéant, en recourant à une procédure donnant des garanties d'indépendance et d'impartialité, aux fins d'arbitrage.

&htab;600.&htab;Au sujet de la deuxième des modifications apportées par l'amendement, c'est-à-dire la spécification de deux motifs qui peuvent justifier le rejet de sentences et de décisions, le comité observe que la spécification des motifs qui peuvent désormais justifier une action du gouvernement pourrait être considérée comme une limitation du pouvoir qu'a ce dernier de rejeter des sentences et des décisions, notamment dans la mesure où la législation précédente ne prévoyait aucun motif dont le gouvernement devait pourvoir se prévaloir pour justifier son action. Le comité estime, cependant, que l'étendue et le caractère général de chacun des deux motifs prévus dans l'amendement pourraient, au contraire, avoir pour effet d'étendre la latitude d'action du gouvernement et il exprime donc l'espoir que celui-ci tiendra dûment compte, dans l'exercice de ses pouvoirs, des principes de la liberté syndicale en général et de ceux qui sont prescrits par la convention no 98 au sujet de la promotion de la négociation collective volontaire, en particulier. A ce sujet, le comité attire l'attention sur le fait que, lorsqu'une législation implique que le refus de dépôt d'une convention collective pourrait avoir comme justification l'invocation de motifs tels que l'incompatibilité avec la politique générale du gouvernement, elle équivaudrait à la nécessité d'une approbation préalable pour la mise en vigueur d'une convention collective et porterait atteinte au principe de négociation volontaire prévu par la convention précitée. [Voir 85e rapport, cas no 341 (Grèce), paragr. 181 et 186.]

&htab;601.&htab;Enfin, le comité a pris note de l'observation faite par le gouvernement, dans sa réponse au sujet de la prorogation d'accords précédemment en vigueur. A cet égard, le comité rappelle et réaffirme le point de vue qu'il a déjà exprimé en une autre occasion, à savoir qu'une disposition légale qui pourrait être appliquée de manière à remplacer les conditions prévues dans les conventions collectives ou à empêcher à l'avenir les travailleurs de négocier telles conditions qui leur apparaîtraient souhaitables porterait atteinte au droit des travailleurs intéressés de négocier collectivement. [Voir 15e rapport, cas no 102 (Afrique du Sud), paragr. 185.] Toutefois, le comité relève que la troisième des nouvelles dispositions introduites par la législation amendée, telle qu'elle figure dans l'article 52A 3), semblerait avoir pour effet à la fois de préserver les droits acquis, avant la publication de la notification d'un rejet, et de redonner effet à des accords antérieurs qui peuvent avoir été remplacés ou modifiés par une sentence ou une décision qui a été rejetée. Il semblerait donc que, dans le cas présent, les avantages dont bénéficient les travailleurs de la fonction publique et de l'enseignement seront maintenus après le rejet de toute nouvelle sentence ou décision. Dans ces conditions, le comité estime que cet aspect du cas n'appelle pas un examen plus approfondi de sa part, bien qu'il recommande que la législation en question soit portée à l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations qui pourrait souhaiter en examiner les incidences plus larges.

Recommandations du comité

&htab;602.&htab;Le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Le renforcement du pouvoir du gouvernement de rejeter, complètement à sa propre discrétion et à tout moment, des sentences ou des décisions porte atteinte aux principes de la libre négociation collective, ce qui va à l'encontre des obligations établies par l'article 4 de la convention no 98. Le comité exprime l'espoir que le gouvernement l'informera des mesures prises en vue de remédier à cette situation.

b) Le comité exprime en outre l'espoir que le gouvernement usera de tous les moyens possibles pour résoudre les conflits relatifs aux conditions d'emploi dans la fonction publique et l'enseignement, y compris, le cas échéant, en recourant à un mécanisme offrant toutes les garanties d'indépendance et d'impartialité, aux fins d'arbitrage.

c) Le comité recommande que la législation en question soit portée à l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations afin qu'elle en examine les incidences plus larges.

Cas no 1270 PLAINTES PRESENTEES PAR LE SYNDICAT DES TRAVAILLEURS DE LA METALLURGIE DE JOAO MONLEVADE, LA CENTRALE UNITAIRE DES TRAVAILLEURS ET LA CONFEDERATION MONDIALE DU TRAVAIL CONTRE LE GOUVERNEMENT DU BRESIL

&htab;603.&htab;Le Syndicat des travailleurs de la métallurgie de Joao Monlevade a présenté une plainte en violation de la liberté syndicale contre le gouvernement du Brésil dans des communications des 23 mars, 18 mai, 11 et 19 juin 1984. La Centrale unitaire des travailleurs s'est jointe à cette plainte dans une communication du 25 mai 1984 et la Confédération mondiale du travail a fait de même par des communications des 19 juin et 20 août 1984. Le gouvernement, pour sa part, a envoyé une réponse partielle sur ce cas dans une lettre datée du 6 août 1984.

&htab;604.&htab;Le Brésil n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; en revanche, il a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants

&htab;605.&htab;Les plaignants expliquent qu'alors que, dans le passé, il était possible de régler les conflits du travail par voie de négociations collectives dans la compagnie sidérurgique Belgo Mineira, filiale d'une compagnie multinationale dont le siège est à Luxembourg et qui est présente en Belgique, en France, en Allemagne et en Italie, l'entreprise a, en 1983, été le théâtre de graves tensions sociales. La direction a adopté une attitude très dure lors des négociations sur le renouvellement de la convention collective du travail. Elle a refusé de discuter les propositions syndicales pour ensuite licencier 192 ouvriers en mai 1983, en prétendant que ces licenciements étaient le résultat de l'attitude intransigeante du syndicat. Or, expliquent les plaignants, en février 1983, la direction avait proposé au syndicat d'accepter des réductions de 50 pour cent des salaires alors que l'inflation atteignait 230 pour cent l'an, ce que le syndicat avait refusé puisque l'entreprise venait d'augmenter ses distributions de bénéfice. La direction, en juin 1983, avait en outre annulé le paiement des congés des dirigeants syndicaux, pour motifs syndicaux, alors que ce droit avait été acquis par le syndicat depuis plus de vingt ans. Elle avait aussi refusé de déduire les cotisations syndicales des fiches de paie des travailleurs sous prétexte que cette opération serait coûteuse.

&htab;606.&htab;Les plaignants déclarent que les travailleurs ont riposté par une grève le 3 octobre 1983 que le tribunal du travail a refusé, le 10 octobre 1983, de déclarer illégale comme le demandait la direction. Le tribunal a en outre ordonné à la compagnie de satisfaire certaines revendications syndicales, mais les travailleurs licenciés ne furent pas réengagés et la majeure partie des revendications syndicales ne furent pas satisfaites, expliquent les plaignants. Malgré cela, les travailleurs reprirent le travail.

&htab;607.&htab;Quelques semaines plus tard, la direction a repris ses provocations à l'égard des travailleurs. Dans certains secteurs, par exemple, le paiement du supplément pour travail de nuit fixé par la convention collective fut tout simplement aboli. Les travailleurs déposèrent plainte au tribunal du travail, mais la direction les convoqua individuellement pour les contraindre à signer une déclaration par laquelle ils renonçaient à porter plainte et au supplément pour travail de nuit. Peu d'entre eux cédèrent à cette pression. La direction utilisa la même méthode de pression lorsqu'elle décida de décupler le prix des repas. Entre-temps, le réfectoire de l'entreprise fut fermé et son personnel licencié. En outre, contrairement aux conventions conclues qui prévoyaient un certain salaire de départ, l'entreprise se mit à recruter de nouveaux travailleurs pour un salaire trois fois moindre et à la condition qu'ils ne se syndiquent pas, ce que même la législation du travail brésilienne ne permet pas. Enfin, les dirigeants du Syndicat des travailleurs de la métallurgie furent personnellement visés: mutation, transfert à une fonction inférieure et même licenciement les frappèrent. Deux intéressés déposèrent plainte au tribunal du travail et obtinrent gain de cause. Selon les plaignants, cette liste n'est pas exhaustive.

&htab;608.&htab;A l'occasion de ces événements, le Syndicat des travailleurs de la métallurgie de Monlevade convoqua une assemblée générale le 13 janvier 1984 où il fut décidé d'engager la procédure du déclenchement de la grève. Une assemblée générale ultérieure devait être convoquée pour décider, conformément à la loi sur les grèves, de lancer le mot d'ordre de grève, mais ladite assemblée ne fut pas convoquée immédiatement car le syndicat souhaitait encore donner une chance aux négociations. Finalement, la date de la grève fut fixée au 8 mars 1984. Entre-temps, cependant, les tensions avaient atteint un niveau tellement critique que, le 27 février 1984, les travailleurs arrêtèrent spontanément le travail. La direction annonça immédiatement 98 nouveaux licenciements. Le Syndicat des travailleurs de la métallurgie affirme qu'il s'agissait de travailleurs ayant participé à l'action syndicale. La direction ordonna alors aux ingénieurs et aux contremaîtres d'aller réquisitionner les travailleurs à leur domicile et de les menacer de licenciement s'ils refusaient de reprendre le travail. Les épouses dont le mari n'était pas à la maison furent forcées de les accompagner en voiture pour aller le chercher. Ses tentatives échouèrent cependant.

&htab;609.&htab;En raison des fortes pressions exercées par la direction, il fut décidé que les piquets de grève resteraient à leur poste jour et nuit pour surveiller les accès de l'usine. En réponse à cette décision, la direction renforça encore ses pressions. Elle ordonna aux chefs d'équipe d'intimider sans relâche les membres de la famille des travailleurs. Des voitures faisaient la ronde à trois heures du matin et ceux qui refusaient de se laisser emmener devaient être licenciés séance tenante. Des hauts parleurs ont été placés par la direction aux entrées de l'usine pour appeler par leur nom et menacer de licenciement les piquets de grève. Finalement, 106 travailleurs cédèrent face à ses pressions. Ils furent escortés par la police vers l'entreprise où ils durent rester pendant vingt heures.

&htab;610.&htab;Toujours selon les plaignants, le 29 février, des représentants du ministère du Travail entreprirent une tentative de médiation dans le conflit. La direction de Belgo Mineira nia qu'elle avait usé de menaces à l'égard des travailleurs et refusa d'entamer des pourparlers avec le Syndicat des travailleurs de la métallurgie avant que soit mis fin à la grève. Le représentant du ministère du Travail proposa alors au syndicat de reprendre le travail à deux conditions: arrêt des mesures coercitives de l'entreprise et enquête par l'inspection sociale à propos des infractions aux lois, règlements et conventions collectives en vigueur dans l'entreprise. Le syndicat accepta cette proposition et le travail reprit le 1er mars. Or les évolutions ultérieures démontrent que la direction n'avait pas modéré ses attaques vis-à-vis des travailleurs et du Syndicat des travailleurs de la métallurgie de Monlevade:

- seul un appel urgent au gouverneur de l'Etat fédéré permit au syndicat d'éviter 426 nouveaux licenciements le jour même de la reprise du travail;

- actuellement, la direction prétend ne plus vouloir négocier avec les représentants syndicaux, mais uniquement avec une délégation de travailleurs qu'elle constituerait elle-même;

- la direction essaie d'amener les ingénieurs et les contremaîtres à faire des déclarations incriminant le syndicat. Les déclarations sont alors transmises à la justice auprès de laquelle une plainte a été déposée pour faire déclarer illégale la grève du 27 février au 1er mars 1984;

- les contremaîtres affiliés au syndicat font l'objet de pressions pour qu'ils renoncent à leur affiliation: on leur envoie une lettre de préavis préimprimé dont un exemplaire doit être envoyé au syndicat et l'autre à l'entreprise;

- la direction tente de faire obstacle à l'enquête de l'inspection du travail: elle a envoyé un télégramme de menace aux fonctionnaires responsables et a exercé des pressions sur les travailleurs pour qu'ils ne fassent aucune déclaration.

&htab;611.&htab;Pour conclure, les plaignants indiquent que la radio locale, en janvier et en février 1984, s'est employée à discréditer le syndicat. Ils demandent donc au BIT d'utiliser les moyens à sa disposition pour exiger qu'au Brésil la direction de cette entreprise adopte une conduite respectueuse de la liberté syndicale et qu'elle cesse sa politique de confrontation et de liquidation du syndicat.

&htab;612.&htab;Par ailleurs, la Centrale unitaire des travailleurs se réfère en particulier à plusieurs mesures de mise sous tutelle des syndicats intervenues à la suite des mouvements de grève de juin 1983 et qui ont été examinées dans le cadre du cas no 1225. [Voir paragr. 303 à 315 du présent rapport.]

B. Réponse du gouvernement

&htab;613.&htab;Dans sa réponse du 6 août 1984, le gouvernement déclare que la délégation régionale du travail de l'Etat du Minas Gerais, sur la plainte du syndicat en cause et à la demande du Secrétariat aux relations du travail du ministère du Travail, est allée enquêter sur place dans l'entreprise pour s'efforcer d'amener les parties à des concessions réciproques et obtenir la réouverture du dialogue et le retour aux négociations.

&htab;614.&htab;Le Secrétariat aux relations du travail poursuit son action dans cette direction en vue de promouvoir la conciliation des intérêts en présence, ajoute le gouvernement. Or, grâce à cette enquête gouvernementale, certaines situations ont été normalisées, d'autres ont été éclaircies.

&htab;615.&htab;Les questions de droit du travail et de respect des conventions collectives sont du ressort du pouvoir judiciaire tant que les conventions collectives sont en vigueur, indique le gouvernement. Il précise que, lorsqu'elles arrivent à expiration, étant donné qu'aucune convention collective n'a été signée, la direction des entreprises peut suspendre certains des avantages prévus par le texte signé antérieurement. Ainsi, dans le présent cas, les heures payées pour les dirigeants syndicaux ont été supprimées étant donné qu'aux termes de l'article 543, paragraphe 2, de la consolidation des lois du travail la période durant laquelle le travailleur est absent de son travail pour remplir des fonctions syndicales est considérée comme une période de congé "non payé" sauf s'il en est prévu autrement par une clause contractuelle ou l'assentiment de l'employeur. Le gouvernement souligne également que le droit de se syndiquer ou de ne pas se syndiquer est libre au Brésil. Donc, un travailleur ne peut être empêché d'exercer son droit. En effet, conformément à l'article 543, paragraphe 6, de la loi précitée, l'entreprise qui cherche à empêcher un travailleur de s'affilier à un syndicat, d'organiser une association professionnelle ou syndicale, d'exercer ses droits inhérents à la condition de syndiqué sera passible de sanctions et le travailleur pourra percevoir une indemnité, affirme le gouvernement.

&htab;616.&htab;En ce qui concerne les retenues à la source des contributions syndicales, elles doivent obligatoirement être effectuées par l'employeur une fois qu'elles ont été autorisées par les employés. Or on est en train de vérifier si les retenues n'ont pas été opérées et si cela est dû à l'initiative de l'employeur.

&htab;617.&htab;En conclusion, selon le gouvernement, la position du ministère du Travail est orientée vers la promotion de la négociation entre les parties, condition d'importance primordiale pour la solution de l'affaire en instance.

C. Conclusions du comité

&htab;618.&htab;Le comité observe que le conflit du travail qui s'est développé dans l'entreprise sidérurgique du Minas Gerais, Belgo Mineira, semble s'être déroulé en trois étapes. Dans un premier temps, la direction aurait: - renvoyé 192 travailleurs au mois de mai 1983 après avoir proposé au syndicat, au mois de février 1983, de très importantes réductions de salaire au moment même où l'entreprise augmentait ses distributions de bénéfices;

- annulé le paiement des congés syndicaux alors que ce droit avait été acquis depuis plus de vingt ans;

- refusé de déduire les cotisations syndicales des fiches de paie des travailleurs sous prétexte que cette opération serait coûteuse;

- refusé de renouveler la convention collective venue à expiration au mois d'octobre de l'année 1983.

Dans un second temps, par mesure de rétorsion contre la grève légale de protestation déclenchée par les travailleurs à partir du 3 octobre 1983, la direction aurait:

- supprimé le paiement des heures supplémentaires pour travail de nuit dans certains secteurs et exercé des pressions pour empêcher les travailleurs concernés de porter plainte;

- recruté de nouveaux travailleurs à un salaire moindre, en leur interdisant de se syndiquer;

- muté, transféré ou licencié des dirigeants syndicaux;

- licencié au début de l'année 1984 98 travailleurs qui auraient participé à l'action syndicale;

- réquisitionné des travailleurs grévistes et menacé de licenciement les piquets de grève;

- exercé des pressions sur les ingénieurs et les contremaîtres pour qu'ils renoncent à leur affiliation syndicale.

Dans un troisième temps, face à une nouvelle grève déclenchée du 27 février au 1er mars 1984, la direction aurait essayé de la faire déclarer illégale et de négocier avec les travailleurs non syndiqués, à l'exclusion des représentants syndicaux. Parallèlement, elle aurait fait obstacle à l'enquête de l'inspecteur du travail dépêché sur les lieux.

&htab;619.&htab;Le comité observe que le gouvernement ne nie pas le développement de ce conflit du travail. Bien au contraire, il déclare s'efforcer de se poser en médiateur pour aider les parties à trouver une solution. Le comité prend note des explications du gouvernement concernant le non-paiement des congés syndicaux. Il prend note également des assurances données par le gouvernement selon lesquelles nul, aux termes de la loi brésilienne, ne peut être privé du droit de se syndiquer. Il note aussi que l'employeur doit déduire les cotisations syndicales des fiches de paie des travailleurs si le syndicat en a fait la demande et que le gouvernement s'efforce de savoir si ce principe de la loi brésilienne a été violé.

&htab;620.&htab;Néanmoins, le comité observe avec regret que le gouvernement ne fournit aucune information sur plusieurs des griefs invoqués par les plaignants, notamment le licenciement de travailleurs ayant participé à une action syndicale et de dirigeants syndicaux, la réquisition de grévistes et les menaces de licenciement de piquets de grève, le recrutement de nouveaux travailleurs à un salaire inférieur et interdits de syndicalisation. Sur ces différentes allégations, le comité attire l'attention du gouvernement sur le danger que de telles entraves peuvent représenter pour la liberté syndicale. Il estime également qu'elles constituent une atteinte à l'exercice légitime du droit de grève. Il insiste en conséquence sur le fait que la réquisition de grévistes, de piquets de grève et de travailleurs sous-payés et interdits de syndicalisation pour briser des grèves légitimes et pacifiques dans des services qui ne sont pas essentiels au sens strict du terme, ce qui est le cas de la sidérurgie, n'est pas conforme au respect de la liberté syndicale. Le comité demande donc au gouvernement d'indiquer les mesures prises ou envisagées pour favoriser la réintégration des travailleurs et des dirigeants syndicaux qui auraient été indûment licenciés et pour assurer le respect de la loi brésilienne garantissant aux travailleurs le droit de se syndiquer.

&htab;621.&htab;Enfin, le comité, face au refus allégué de la direction de procéder au renouvellement de la convention collective et à ses tentatives de négocier avec des travailleurs non syndiqués, à l'exclusion des représentants des travailleurs, rappelle l'importance qu'il attache à ce que le développement de règles de procédure convenues entre les employeurs et les organisations de travailleurs soit encouragé et à ce que des mesures soient prises pour promouvoir la négociation collective volontaire avec les représentants des travailleurs. Le comité souligne bien entendu que ces mesures ne doivent pas être conçues ou appliquées de manière à entraver la liberté de négociation collective. En conséquence, le comité demande au gouvernement de communiquer des informations sur les motifs qui seraient à l'origine du refus de l'employeur de négocier ainsi que sur les développements intervenus dans ce conflit du travail.

Recommandations du comité

&htab;622.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Au sujet des allégations de licenciement de travailleurs et de dirigeants syndicaux ayant participé à une action syndicale, et des allégations de réquisition de grévistes, de menaces de licenciement de piquets de grève et de recrutement de travailleurs à un salaire inférieur avec interdiction de se syndiquer pour briser une grève, le comité attire l'attention du gouvernement sur le danger que de telles entraves peuvent représenter pour la liberté syndicale. Il estime également qu'elles constituent une atteinte à l'exercice légitime du droit de grève. Il demande donc au gouvernement d'indiquer les mesures prises ou envisagées pour favoriser la réintégration des travailleurs et des dirigeants qui auraient été injustement licenciés et pour assurer le respect de la loi brésilienne garantissant aux travailleurs le droit fondamental de se syndiquer. b) Pour ce qui est du refus allégué de la direction de l'entreprise sidérurgique Belgo Mineira de procéder au renouvellement de la convention collective arrivée à expiration au mois d'octobre 1983 et aux tentatives de négocier avec les travailleurs non syndiqués, le comité, rappelant l'importance qu'il attache à ce que des mesures soient prises pour promouvoir la négociation collective volontaire avec les représentants des travailleurs, demande au gouvernement de communiquer des informations sur les motifs qui seraient à l'origine du refus de l'employeur de négocier ainsi que sur les développements intervenus dans ce conflit du travail.

Cas no 1272 PLAINTE PRESENTEE PAR LA CONFEDERATION MONDIALE DES ORGANISATIONS DE LA PROFESSION ENSEIGNANTE CONTRE LE GOUVERNEMENT DU CHILI

&htab;623.&htab;La plainte de la Confédération mondiale des organisations de la profession enseignante (CMOPE) figure dans une communication du 29 mars 1984. Le gouvernement a fourni des observations dans des communications des 16 mai et 13 septembre 1984.

&htab;624.&htab;Le Chili n'a ratifié ni la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations de la confédération plaignante

&htab;625.&htab;Dans sa communication du 29 mars 1984, la confédération plaignante se réfère à des atteintes aux droits syndicaux qui auraient été perpétrées par les autorités chiliennes à l'encontre des travailleurs de l'enseignement. La CMOPE, s'exprimant au nom de l'Association syndicale des enseignants du Chili (AGECH), allègue que la municipalisation et la privatisation de l'instruction ont permis aux employeurs de mettre fin aux contrats de travail de nombreux enseignants pour de prétendues "raisons tenant aux nécessités de la marche de l'entreprise, de l'établissement ou du service" sans aucune protection pour les travailleurs, en application des articles 13, f), et 14, paragr. 2, du décret-loi no 2200 du 1er mai 1978.

&htab;626.&htab;Selon la CMOPE, 300 enseignants ont été ainsi licenciés dont Fernando Azula, dirigeant de l'AGECH à Santiago, et Luigi Salerno, président de cette même association à Cachapoal. Toujours selon la CMOPE, l'Association syndicale des enseignants du Chili, l'AGECH, estime que ces licenciements ont été motivés par les activités syndicales des intéressés. Elle joint à l'appui de cette assertion des coupures de presse chilienne de février 1984 où il est fait mention notamment des déclarations de Fernando Azula, enseignant au lycée de Conchali et dirigeant du Conseil régional métropolitain de l'AGECH, qui indiquent que l'établissement d'où il a été licencié est dirigé par un professeur du primaire qui ne se rend jamais au lycée, qu'on ne peut jamais rencontrer et qui interdit même aux enseignants de l'AGECH d'afficher un simple bulletin mural. L'AGECH, dans une des coupures de presse, précise que l'intéressé s'est opposé au processus de municipalisation et qu'il a dénoncé l'administration bureaucratique et arbitraire de son établissement. Son attitude oppositionnelle a suffi pour qu'il soit licencié, conclut l'AGECH, qui réclame la réintégration de l'intéressé.

B. Réponse du gouvernement

&htab;627.&htab;Dans sa réponse du 16 mai 1984, le gouvernement ne nie pas que les établissements d'enseignement du Chili aient été municipalisés ou privatisés mais il communique les explications du ministère de l'Education nationale sur ce sujet. Ce ministère prétend que la municipalisation des établissements d'enseignement n'aurait visé qu'à combattre une charge bureaucratique excessive dans ce secteur et à rendre le système d'enseignement plus efficace et plus souple. En effet, les relations entre les autorités centrales et les établissements d'enseignement, d'une part, et entre les autorités provinciales et les professeurs, d'autre part, auraient été limitées à un caractère administratif et n'auraient pas eu de caractère technico-pédagogique. Aussi le système actuellement mis en place permettrait-il, par le truchement de subventions gouvernementales, de redistribuer de manière plus équitable l'éducation et d'assurer un équilibre entre le nombre des élèves et le lieu où ils se trouvent. Même s'il n'est pas parfait, affirme le gouvernement, ce système serait plus juste et plus démocratique.

&htab;628.&htab;Le gouvernement fournit des informations statistiques d'où il ressort que les écoles qui ont été municipalisées sont restées des écoles d'Etat pour 6.929 d'entre elles sur un total de 9.221. Les 25 pour cent restants sont des écoles privées dont 62 pour cent sont subventionnées et contrôlées par l'Etat et 38 pour cent, soit 860 écoles en tout, sont entièrement privées. Ceci correspond à une privatisation qui ne serait en augmentation que de 50 pour cent seulement, indique le gouvernement.

&htab;629.&htab;Parallèlement, ajoute-t-il, l'Etat a promulgué un statut des enseignants régissant les conditions d'accès à la fonction et à la formation, établissant une échelle académique et posant les droits et les devoirs des maîtres. Le statut précise la durée du travail (30 heures par semaine) et des congés, et prévoit que la cessation des contrats de travail n'intervient qu'après enquête sur la situation qui a motivé ladite cessation. Dans les collèges privés subventionnés, il est interdit de renvoyer un professeur pendant la période des congés.

&htab;630.&htab;Le gouvernement fournit d'ailleurs le texte de la circulaire no 1284 du 10 août 1983 des ministères de l'Intérieur et de l'Education contenant des instructions adressées aux maires du pays au sujet de l'administration du service de l'éducation dans leurs communes respectives d'où il ressort qu'en cas de cessation de fonctions d'un enseignant les maires doivent indiquer avec précision le motif de ladite cessation du contrat pour permettre au fonctionnaire affecté par cette mesure d'engager, éventuellement, un recours légal devant la commission de conciliation compétente.

&htab;631.&htab;Le gouvernement affirme, en outre, que, pour tous les professeurs licenciés à la fin de l'année scolaire, le ministère a contraint les établissements à payer leurs congés aux intéressés puisqu'ils avaient reçu des subventions à cet effet. Il ajoute qu'il est léger de prétendre que les professeurs ont été licenciés pour des raisons syndicales. Au contraire, le ministère a eu la preuve, après avoir demandé des renseignements aux responsables des établissements, que, dans beaucoup de cas, ces licenciements étaient dus à la négligence des fonctionnaires, au non-accomplissement des horaires de travail, au défaut de diplôme professionnel ou à des actions moralement répréhensibles à l'égard des élèves.

&htab;632.&htab;En ce qui concerne plus particulièrement MM. Luigi Salerno et Fernando Azula, dirigeants de l'AGECH de Rancagua et de Santiago, respectivement, leur situation est différente, affirme le gouvernement. En effet, pour M. Salerno, les autorités communales ont fourni des preuves évidentes de sa négligence en tant que fonctionnaire. Quant au professeur Azula, le ministère étudierait la possibilité de le réincorporer dans un des collèges de la région métropolitaine.

&htab;633.&htab;Puis, dans une communication ultérieure du 14 septembre 1984, le gouvernement fournit les textes des différents jugements concernant l'affaire de M. Salerno et indique que l'intéressé avait pris ses fonctions le 1er octobre 1981. Son contrat de travail prévoyait à l'origine un horaire de 30 heures de travail par semaine, lequel avait été porté, d'un commun accord, à 44 heures, à partir du 15 octobre 1981. Or, du 19 octobre 1983 au 4 novembre de la même année, de manière unilatérale et sans y avoir été autorisé par son employeur, l'intéressé a décidé de moins travailler portant ainsi gravement atteinte à son contrat de travail: il s'est absenté sept fois entre ces deux dates, soit toute la journée, soit le matin seulement. Le 4 novembre 1983, son employeur lui notifia son licenciement pour grave inexécution de ses obligations contractuelles en application de l'article 14, alinéa 5, du décret-loi no 2200 de 1979. L'intéressé introduisit un recours devant le juge de Rancagua, le 28 novembre 1983, pour licenciement abusif mais, le 10 janvier 1984, le juge titulaire le débouta, confirmant la légalité du licenciement effectué par l'employeur. L'intéressé se pourvut en appel et gagna son procès le 29 mars 1984, la Cour d'appel ayant révoqué la décision du premier juge et déclaré injustifié le licenciement, obligeant l'employeur à verser une indemnité de licenciement. L'employeur, à son tour, porta alors l'affaire devant la Cour suprême le 4 avril 1984, mais celle-ci ne s'est pas encore prononcée, précise le gouvernement.

&htab;634.&htab;Pour ce qui est de M. Fernando Azula qui avait pris ses fonctions le 1er décembre 1981 au lycée de Conchali, et qui avait exercé pendant deux ans et trois mois dans ce lycée, il fut mis fin à son contrat de travail le 29 février 1984. Son employeur lui signifia en effet son congé par écrit avec un préavis de 30 jours. Les parties (employeur et travailleur) signèrent, par la suite, une décharge devant notaire, le 12 mars 1984, aux termes de laquelle M. Azula reçut une somme correspondant à trois mois de salaire d'indemnisation pour solde de tout compte, affirme le gouvernement. La lettre de licenciement datée du 21 janvier 1984 contenant la proposition d'indemnisation qui, par la suite, a été acceptée par le travailleur est jointe à la communication du gouvernement.

C. Conclusions du comité

&htab;635.&htab;Le comité a estimé, dans des cas antérieurs, qu'il ne lui appartient pas de se prononcer sur la question de la rupture des contrats de travail, sauf dans le cas où le licenciement implique une mesure de discrimination antisyndicale. [Voir, par exemple, 103e rapport, cas no 490 (Colombie), paragr. 55, et 204e rapport, cas no 986 (République dominicaine), paragr. 106.]

&htab;636.&htab;Au sujet des mesures de licenciement prises à l'encontre de plusieurs professeurs et de deux dirigeants syndicaux, considérées par les plaignants comme des mesures de discrimination antisyndicale, le comité note que, selon le gouvernement, ces mesures n'étaient pas liées à des activités syndicales mais étaient motivées, dans de nombreux cas, par la négligence des fonctionnaires, le non-accomplissement d'horaire de travail ou le défaut de diplôme.

&htab;637.&htab;Le comité a pris connaissance de la documentation jointe à la réponse du gouvernement d'où il ressort que, pour le dirigeant syndical, M. Salerno, la Cour d'appel a fait droit à son recours en licenciement abusif et a condamné l'employeur à l'indemniser mais que l'employeur s'est pourvu devant la Cour suprême. Le comité note, également, en ce qui concerne le dirigeant syndical Fernando Azula, qu'il a accepté une indemnisation de trois mois de salaire pour son licenciement. De plus, le comité note que les plaignants se sont référés à des entraves à la liberté syndicale spécifiques qui auraient été exercées par certains employeurs. Dans ces circonstances, compte tenu de ce que la question du licenciement d'un dirigeant syndical est encore en instance devant la Cour suprême, le comité rappelle l'importance qu'il attache au principe selon lequel nul ne devrait faire l'objet de discrimination dans l'emploi en raison de son affiliation ou de son activité syndicale. Le comité croit également utile de souligner l'importance de ce principe dans le cas des dirigeants syndicaux pour assurer le respect du droit des organisations de travailleurs d'élire librement leurs représentants. Il prie le gouvernement de communiquer le texte de l'arrêt qui sera rendu par la Cour suprême.

Recommandation du comité

&htab;638.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, la conclusion suivante:

&htab;Le comité rappelle au gouvernement, compte tenu de ce que la question du licenciement d'un dirigeant syndical est encore en instance devant la Cour suprême, qu'il est important qu'une protection adéquate contre les actes de discrimination antisyndicale soit accordée aux dirigeants syndicaux pour assurer le respect du droit des organisations de travailleurs d'élire librement leurs représentants. Il prie le gouvernement de communiquer le texte de l'arrêt qui sera rendu par la Cour suprême.

Cas no 1283 PLAINTE PRESENTEE PAR LA CONFEDERATION MONDIALE DU TRAVAIL CONTRE LE GOUVERNEMENT DU NICARAGUA

&htab;639.&htab;La plainte figure dans une communication de la Confédération mondiale du travail du 24 mai 1984. Cette organisation a fourni des informations complémentaires par une communication en date du 15 juin 1984. Le gouvernement a répondu par une communication datée du 4 juillet 1984.

&htab;640.&htab;Le Nicaragua a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations du plaignant

&htab;641.&htab;Le plaignant allègue que le 29 avril 1984, la sécurité de l'Etat a arrêté M. Luis Manuel Mora Sánchez, président du Syndicat des travailleurs de la presse de Managua (qui est affilié à la Centrale des travailleurs nicaraguayens (CTN)), et correspondant de la radio "Impacto", dont le siège se trouve à San José, au Costa Rica. Le plaignant ajoute qu'il est impossible d'entrer en contact avec M. Mora, que les avocats chargés de sa défense ont présenté, sans succès, des recours notamment au titre de l' habeas corpus , et qu'on croit savoir que l'intéressé est blessé à la suite de tortures qu'il aurait subies.

&htab;642.&htab;Selon le plaignant, M. Mora a été arrêté en raison de la retransmission, à la radio "Impacto", d'une interview d'un groupe de mères dont les fils avaient été obligés de faire leur service militaire et dont elles étaient sans nouvelles depuis plusieurs semaines.

&htab;643.&htab;Le plaignant signale également que M. Mora aurait été obligé de faire des aveux forcés, de sa cellule, à la télévision le 17 mai 1984. Il aurait alors notamment déclaré appartenir à une organisation de guerilleros, et être en collusion avec des diplomates des Etats-Unis dans l'exercice de ses fonctions de journaliste. Le plaignant craint que lesdits aveux ne servent de base à une condamnation de l'intéressé dans le cadre du procès qui se déroule devant les tribunaux populaires antisomosistes. Le plaignant indique aussi que deux éditoriaux parus dans le journal "La Prensa", dénonçant de tels aveux forcés faux et résultant de fortes pressions, ont été censurés.

&htab;644.&htab;Enfin, le plaignant allègue l'arrestation de M. Jorge Ortega Rayo, membre du Syndicat des travailleurs de la presse, arbitrairement accusé d'activités contre-révolutionnaires, qui serait astreint à résider dans la zone franche, ainsi que l'arrestation, le 2 juin 1984, des dirigeants syndicaux de la CTN, MM. Antonio Benito Gómez Centeno et Numan Pompilio Calderon Araus. S'agissant de ces deux dirigeants, le plaignant précise ne pas savoir où ils se trouvent, les autorités niant les avoir arrêtés. Les tentatives faites par leurs avocats pour entrer en contact avec eux seraient restées vaines.

B. Réponse du gouvernement

&htab;645.&htab;Le gouvernement déclare que l'arrestation de M. Mora Sánchez n'est pas arbitraire et que l'intéressé n'a pas été arrêté parce qu'il avait interviewé un groupe de mères dont les fils faisaient leur service militaire obligatoire. M. Mora a été arrêté pour avoir exercé des activités contre l'ordre et la sécurité publics de l'Etat nicaraguayen. Selon les propres déclarations de M. Mora, ses activités délictueuses se sont manifestées de la façon suivante: il a adhéré au groupement contre-révolutionnaire dénommé "Alianza Revolucionaria Democratica (ARDE)", qui a organisé des opérations armées contre le Nicaragua depuis le territoire du Costa Rica dans le dessein de former un "Front occidental", recrutant, à cet effet, de nombreux éléments avec lesquels il a préparé une série d'actes criminels, dont certains sont mis à exécution. Ainsi, il a tenté de mettre le feu aux arènes de Managua, a lancé des provocations pour mettre aux prises un groupe de travailleurs avec la police sandiniste le 1er mai, placardé des messages contre-révolutionnaires sur les routes, fait plusieurs voyages à l'étranger pour aller voir des dirigeants contre-révolutionnaires afin de coordonner leur action, de transmettre des renseignements sur la sécurité et de percevoir des dollars en récompense de ses activités de recrutement et couvrir ses frais.

&htab;646.&htab;Le gouvernement conclut en signalant que M. Mora est en instance de jugement devant les tribunaux compétents de la ville de Managua.

C. Conclusions du comité

&htab;647.&htab;En ce qui concerne le dirigeant syndical, M. Luis Manuel Mora Sánchez, le comité observe que les versions du plaignant et du gouvernement, quant aux raisons de son arrestation et de son procès, sont contradictoires. En effet, selon le plaignant, M. Mora a été arrêté à la suite de la retransmission à la radio "Impacto" d'une interview qu'il avait réalisée avec un groupe de mères dont les fils avaient été obligés de faire leur service militaire et dont on était sans nouvelles. En revanche, le gouvernement nie qu'il ait été arrêté pour cette raison et ajoute qu'il l'a été pour activités délictueuses comme le fait d'avoir appartenu à un groupement contre-révolutionnaire qui se livre à des opérations armées à partir du Costa Rica, d'essayer de mettre le feu aux arènes de Managua, de lancer des provocations pour mettre aux prises un groupe de travailleurs avec la police sandiniste le 1er mai, de placarder des messages contre-révolutionnaires sur les routes, etc.

&htab;648.&htab;Le comité estime que les motifs de l'arrestation et du procès de M. Mora, indiqués par le plaignant et niés par le gouvernement, ont un rapport, non pas avec la liberté syndicale, mais avec la liberté d'expression des journalistes dans l'exercice de leurs activités professionnelles. Le comité observe en revanche que, parmi les raisons qui ont motivé l'arrestation et le procès de M. Mora au dire du gouvernement, si certaines constituent des délits de droit commun, d'autres, par contre, pourraient se rattacher à l'exercice des droits syndicaux; en particulier,les provocations visant à mettre aux prises un groupe de travailleurs avec la police sandiniste le 1er mai ou les messages contre-révolutionnaires sur les routes. En conséquence, le comité demande au gouvernement de lui communiquer le texte du jugement qui sera rendu à l'égard de M. Mora.

&htab;649.&htab;Le comité observe enfin que le gouvernement n'a pas répondu aux allégations concernant les arrestations du syndicaliste, M. Jorge Ortega Rayo et des dirigeants syndicaux, MM. Antonio Benito Gómez Centeno et Numan Pompilio Calderón Araus. Le comité demande au gouvernement de transmettre ses observations à ce sujet.

Recommandations du comité

&htab;650.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Constatant que certaines des raisons qui ont motivé l'arrestation et le procès du dirigeant syndical Luis Manuel Mora Sánchez au dire du gouvernement pourraient se rattacher à l'exercice des droits syndicaux, le comité demande au gouvernement de transmettre le texte du jugement qui sera rendu à l'égard de M. Mora.

b) Le comité demande au gouvernement de transmettre ses observations sur les allégations concernant les arrestations du syndicaliste M. Jorge Ortega Rayo et des dirigeants syndicaux, MM. Antonio Benito Gómez Centeno et Numan Pompilio Calderón Araus.

Cas nos 1277 et 1288 PLAINTES PRESENTEES PAR PLUSIEURS ORGANISATIONS SYNDICALES, REGIONALES ET INTERNATIONALES, A SAVOIR: L'ORGANISATION REGIONALE INTERAMERICAINE DU TRAVAIL, LA CONFEDERATION LATINO-AMERICAINE DES TRAVAILLEURS, LE CONGRES PERMANENT DE L'UNITE SYNDICALE DES TRAVAILLEURS DE L'AMERIQUE LATINE, LA FEDERATION SYNDICALE MONDIALE, LA CONFEDERATION INTERNATIONALE DES SYNDICATS LIBRES, LA CONFEDERATION MONDIALE DU TRAVAIL, ET PAR PLUSIEURS ORGANISATIONS SYNDICALES DOMINICAINES, A SAVOIR: LA CENTRALE GENERALE DES TRAVAILLEURS, LA CONFEDERATION NATIONALE DES TRAVAILLEURS DOMINICAINS, L'UNION GENERALE DES TRAVAILLEURS DOMINICAINS, LA CENTRALE UNITAIRE DES TRAVAILLEURS ET LA CONFEDERATION AUTONOME SYNDICALE CLASSISTE, CONTRE LE GOUVERNEMENT DE LA REPUBLIQUE DOMINICAINE

&htab;651.&htab;Dans le cas no 1277, les organisations suivantes ont présenté une plainte en violation des droits syndicaux en République dominicaine: l'Organisation régionale interaméricaine du travail (ORIT) (communications des 30 avril et 8 mai 1984), la Centrale latino-américaine des travailleurs (CLAT) (communications des 30 avril et 31 août 1984), la Fédération syndicale mondiale (communications des 28 avril et 15 mai 1984), la Confédération mondiale du travail (communications des 3, 15 mai et 31 août 1984), la Confédération internationale des syndicats libres (communications des 11 mai, 31 août et 14 septembre 1984).

&htab;652.&htab;Ces communications ont été transmises au gouvernement qui a d'abord répondu dans un télégramme du 21 mai 1984, puis il a envoyé certaines observations dans une lettre du 28 juin 1984.

&htab;653.&htab;La plainte relative au cas no 1288 est contenue dans une communication du 28 mai 1984 présentée par les cinq centrales syndicales dominicaines dont il est fait mention dans le cas no 1277, à savoir la Confédération nationale des travailleurs dominicains (CNTD), l'Union générale des travailleurs dominicains (UGTD), la Centrale unitaire des travailleurs (CUT) et la Confédération autonome syndicale classiste (CASC). Par la suite, la Centrale unitaire des travailleurs (CUT), la Centrale générale des travailleurs (CGT) et le congrès permanent de l'Unité syndicale des travailleurs de l'Amérique latine (CPUSTAL) ont envoyé des informations complémentaires à l'appui de leurs plaintes et de nouvelles allégations dans les communications des 21, 22 et 28 juin, 4 juillet et 3 septembre 1984.

&htab;654.&htab;Le gouvernement pour sa part a envoyé une réponse très partielle dans une communication du 13 juillet 1984, et a réitéré les informations qu'il avait données dans le cas no 1277 dans une communication du 1er septembre 1984.

&htab;655.&htab;Face à la gravité des allégations, le Directeur général est immédiatement intervenu par câble auprès du gouvernement dominicain dans des télégrammes des 4 mai et 4 septembre 1984.

&htab;656.&htab;La République dominicaine a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des plaignants

&htab;657.&htab;Les organisations plaignantes ont brossé un tableau général de la sévère répression dont a fait l'objet le mouvement syndical dans le cadre de la protestation déclenchée pour riposter contre le triplement du coût de la vie consécutif à un accord intervenu entre le gouvernement dominicain et le Fonds monétaire international à la fin du mois d'avril 1984.

&htab;658.&htab;Elles ont notamment exprimé leur profonde préoccupation à l'annonce de la mort et des blessures de nombreux travailleurs, des arrestations massives de militants et de dirigeants syndicaux, et de l'occupation des locaux syndicaux.

&htab;659.&htab;Selon l'ORIT et la CISL, dans leurs communications des 30 avril et 11 mai 1984, au cours des journées de protestation, conduites par le Conseil syndical dominicain (qui regroupe les cinq centrales de travailleurs de la République dominicaine), contre l'augmentation exorbitante des produits de première nécessité, 65 travailleurs seraient morts, 600 auraient été blessés et 4.000 auraient été détenus. La CMT, dans sa communication du 3 mai, estime à 37 le nombre des morts, 157 le nombre des blessés et 4.358 le nombre de personnes détenues. La FSM, dans sa communication du 28 avril 1984, confirmant les allégations des autres organisations plaignantes, insiste pour sa part particulièrement sur la nécessité pour le BIT de prendre des mesures dans le cadre du système des Nations Unies pour garantir que l'octroi de prêts par le Fonds monétaire international n'entraîne pas d'exigences telles qu'elles provoquent des événements aussi tragiques.

&htab;660.&htab;La CISL, dans sa communication du 11 mai 1984, ajoute également que, le 27 avril 1984, les forces armées ont occupé le siège du Syndicat des travailleurs portuaires (POASI) et que, le 8 mai, les dirigeants syndicaux Carlos Enriquez Arias, Mariano Negrón et Francisco Guerrerro de la Confédération nationale des travailleurs dominicains (CNTD), ainsi que le secrétaire à l'éducation de l'Union générale des travailleurs dominicains (UGTD), ont été arrêtés. La FSM, dans sa communication du 15 mai 1984, précise que le secrétaire général de la Centrale unitaire des travailleurs (CUT), Cristobal Duran, et le dirigeant de l'Association dominicaine des professeurs (ADP) et de la Centrale générale des travailleurs (CGT) ont également été arrêtés. Elle confirme aussi l'arrestation de Carlos Enriquez Arias et précise que le dirigeant de la CGT Julio de Peña Valdes serait soumis à des persécutions policières.

&htab;661.&htab;Les secrétaires généraux des cinq centrales syndicales dominicaines, la CASC, la CMTD, l'UGTD, la CUT et la CGT, dans leurs communications jointes du 28 mai 1984, fournissent des renseignements détaillés sur le déroulement des événements. Ils expliquent que, pour défendre les travailleurs dominicains des conséquences néfastes de la crise économique qui frappait le pays et qui se traduisait par la réduction du pouvoir d'achat et par l'augmentation du chômage, leurs cinq centrales ont décidé d'un commun accord, le 26 janvier 1984, de mettre en place un plan de lutte unitaire. Des marches pacifiques ont donc été organisées pour le 4 février 1984 à Santo Domingo et Santiago ainsi qu'à l'intérieur du pays pour demander au gouvernement de rompre les négociations avec le Fonds monétaire international, de geler les prix des produits alimentaires et des médicaments, de fixer un salaire minimum mensuel de 200 dollars et un réajustement général des salaires, de réformer le système de sécurité sociale, d'effectuer une réforme agraire garantissant la propriété de la terre aux paysans et de garantir l'exercice des activités syndicales.

&htab;662.&htab;Le 17 avril 1984, soit dix jours après que les cinq centrales eurent effectué une journée nationale de protestation contre la faim, le Président de la République, le Dr Salvador Jorge Blanco, annonça au pays que, le gouvernement étant parvenu à un accord préliminaire avec le Fonds monétaire international pour obtenir un prêt, ceci conduirait au transfert des importations, à l'exception du pétrole et de ses dérivés, au marché parallèle des devises. Ces mesures avaient pour conséquences une augmentation des prix des produits alimentaires supérieure à 100 pour cent et une augmentation des prix des médicaments supérieure à 300 pour cent, expliquent les cinq secrétaires généraux des centrales plaignantes.

&htab;663.&htab;Lesdites augmentations, ajoutent-ils, provoquèrent un puissant mouvement de protestation populaire à travers tout le territoire national les 23, 24 et 25 avril 1984. Ce mouvement fut réprimé de manière criminelle par le gouvernement. Les secrétaires généraux des cinq centrales plaignantes confirment d'ailleurs que les forces armées et la police provoquèrent la mort de 64 personnes, hommes, femmes et enfants, que plus de 400 personnes furent blessées et que 4.000 personnes furent emprisonnées.

&htab;664.&htab;Les violations spécifiques de la liberté syndicale imputables au gouvernement, toujours selon les secrétaires généraux plaignants, ont été l'occupation policière des locaux de la CGT, de l'UGTD et du Syndicat des ouvriers du port de Arrimo (POASI) le 27 avril 1984, empêchant par la force les dirigeants et les militants syndicaux d'entrer et de sortir, ainsi que l'occupation policière des locaux de la CGT, de l'UGTD, de la CNTD, de la CUT et de la CASC le 29 avril 1984; l'occupation de la résidence du secrétaire général de la CGT le 24 avril 1984; le refus du Secrétaire à l'intérieur et à la police d'autoriser une marche ouvrière le 1er mai 1984; l'arrestation pendant trois jours des dirigeants nationaux de la CNTD, de l'UGTD, de la CGT et de la CUT, MM. Arias, Valdez, Guerrerro, Galval et de la Rosa, et des syndicalistes Rámon Ramiréz et Dionisio de Leone, détenus par les agents de la police secrète le 8 mai 1984 après qu'ils eurent participé à une conférence de presse au siège du Syndicat national des journalistes professionnels (SNPP); l'arrestation à travers le pays de 300 syndicalistes adhérant aux cinq centrales du 6 au 9 mai, et les persécutions subies par Mario Vasquez, José Duran et Julio de Peña de la CASC, de la CUT et de la CGT; l'ensemble de ces mesures répressives ont eu pour but d'empêcher le déroulement de la grève nationale convoquée pour le 9 mai 1984, affirment les plaignants. En outre, indiquent-ils, des circulaires administratives du 7 mai 1984 ont été adressées aux fonctionnaires pour les menacer de licenciement s'ils s'abstenaient de travailler le 9 mai au cours de la grève nationale convoquée par les cinq centrales et par le mouvement paysan indépendant (MCI). Par ailleurs, toujours selon les cinq secrétaires généraux signataires, une tentative gouvernementale de démanteler l'UGTD aurait été lancée à partir de janvier 1984.

&htab;665.&htab;Dans une communication ultérieure du 28 juin 1984, la CUT affiliée à la FSM fait état de 100 morts au cours des journées tragiques des 23, 24 et 25 avril 1984, et insiste sur l'occupation de ses locaux et de ceux des autres centrales et sur l'arrestation des dirigeants syndicaux, MM. de la Rosa et Galvan. Elle ajoute que, le 14 juin, son siège de Santiago a été occupé par la police et qu'Antonio Cruzy a été arrêté de même que le dirigeant syndical, Robles Fortuna, qui a été arrêté à son domicile le 19 juin 1984; la dirigeante du Département de la femme travailleuse a également été arrêtée à son retour de Cuba où elle avait participé à un cours de formation syndicale. En outre, toujours selon la CUT, la police secrète espionnerait et persécuterait des dirigeants syndicaux de son organisation, ce qui l'aurait conduite à mettre fin à ses activités d'éducation ouvrière à partir du 24 juin 1984.

&htab;666.&htab;Dans une communication du 4 juillet 1984, la CGT indique que, le 20 juin 1984, des agents du service secret de la police nationale ont arrêté des centaines de dirigeants et de militants syndicaux dont Julio Peña Valdez et Carlos Enriquez Arias, secrétaires généraux de la CGT et de la CNTD, ainsi que Juan José Jerez, secrétaire général de la Fédération des travailleurs du Nord (affiliée à la CGTD). Les interessés contre lesquels aucune charge n'a été retenue ont été libérés le 22 juin à 19 heures. Le 23 juin, les agents de la police secrète ont occupé le siège de la CGT et arrêté le secrétaire général de l'Association dominicaire des professeurs (ADP), Raphaël Santos, ainsi que le secrétaire à l'éducation de l'ADP, Juan Pastor Minaya, le secrétaire de la Fédération CGT des travailleurs du sucre (FENAZUCAR) et Victor Rufino Alvarez, le trésorier du syndicat de l'INDRHI, Raphaël Rodriguez, le trésorier de l'UGTD, et Raphaël Rondol qu'ils ont gardés à vue jusqu'au 25 juin 1984, date à laquelle ils ont été remis en liberté sans qu'aucune charge non plus n'ait été retenue contre eux.

&htab;667.&htab;Enfin la CUT, dans une communication du 3 septembre 1984, réitère ses allégations concernant l'occupation de ses locaux et l'espionnage de ses communications téléphoniques, ainsi que l'arrestation de José Francisco Ramoz, de la CUT, Gabriel del Rio Doñe, de la CASC, Carlos Enrique Arias, de l'UGTD, Juan Pablo Reyes, de l'UGTD, et Barbarin Mojica, de la POASI. La résidence de José Cristobal Duran et de Julio de Peña Valdez, secrétaires généraux de la CUT et de la CGT, aurait à nouveau été perquisitionnée. Les plaignants précisent que les arrestations et les détentions mentionnées ci-dessus ont duré du 29 août au 2 septembre 1984.

&htab;668.&htab;En outre, par des communications télégraphiques du 31 août 1984, la CISL, la CMT et la CLAT avaient dénoncé l'arrestation des cinq secrétaires généraux des centrales du Conseil syndical, alors que ces dirigeants s'étaient réunis le 29 août dans la nuit pour décider d'une grève générale si le gouvernement autorisait la hausse des prix des combustibles et des services essentiels. Au matin du 30 août, les cinq secrétaires généraux des centrales en question ont donc été arrêtés.

&htab;669.&htab;Par la suite, dans un télégramme du 14 septembre 1984, la CISL a fait savoir que les cinq secrétaires généraux arrêtés le 30 août ont été libérés les 2 et 3 septembre 1984.

B. Réponse du gouvernement

&htab;670.&htab;Dans un télégramme du 21 mai 1984, le gouvernement a signalé qu'aucun syndicaliste n'est détenu et que ceux qui ont été arrêtés aux fins d'enquête ont été immédiatement mis en liberté en vertu des pouvoirs qui appartiennent au gouvernement pour faire face à l'éventualité de troubles de l'ordre public. Le gouvernement dominicain soulignait en outre qu'il était respectueux des libertés publiques et des libertés syndicales.

&htab;671.&htab;Puis dans des communications ultérieures des 28 juin et 1er septembre 1984, le gouvernement a expliqué que ces négociations avec le Fonds monétaire international avaient eu pour conséquence la mise en oeuvre de diverses mesures économiques qui avaient entraîné des ajustements nécessaires pour permettre au pays de disposer des fonds correspondant aux engagements pris à l'égard de la Banque internationale et obtenir les crédits qui étaient vitaux pour le développement du pays. Néanmoins, le gouvernement avait pris des mesures conservatoires pour que les classes sociales les plus défavorisées ne supportent pas la totalité du fardeau consécutif à ces changements structurels de l'économie.

&htab;672.&htab;Dans cet ordre d'idée, le gouvernement a déclaré avoir récemment promulgué une loi accordant une augmentation du salaire minimum de 40 pour cent aux travailleurs. En outre, les prix de plusieurs produits de première nécessité ont été gelés et, a-t-il annoncé, d'autres mesures de caractère social ont été prises, dont l'installation de plus de 600 magasins ou pharmacies populaires où seront vendus à prix coûtants plus de 200 médicaments classés par les organismes internationaux de la santé comme prioritaires pour la population, de même que la création de marchés populaires installés pour que les produits de première nécessité parviennent à la population à des prix accessibles.

&htab;673.&htab;Le gouvernement confirme néanmoins qu'au cours des journées des 23 et 25 avril 1984 des troubles violents ont perturbé la paix et la tranquillité publiques tant dans la capitale qu'à l'intérieur du pays: il s'agissait notamment de mises à sac et incendies de propriétés publiques et privées, et d'agressions ouvertes contre les autorités responsables de l'ordre public. Celles-ci agissant dans le cadre de la légalité ont repoussé ces agressions, ce qui a malheureusement eu pour conséquence un bilan de plusieurs morts et blessés. Ces agissements des forces armées et de la police n'ont été dirigés contre aucun secteur particulier, qu'il s'agisse de syndicalistes, d'étudiants ou d'autres citoyens, affirme le gouvernement.

&htab;674.&htab;Il ajoute par contre que les organisations syndicales, profitant du mécontentement créé par les nécessaires ajustements économiques, ont présenté au gouvernement, comme elles l'indiquent elles-mêmes dans leurs plaintes, une série de demandes correspondant à un programme de gouvernement impossible à mettre en oeuvre dans l'immédiat, compte tenu de multiples facteurs. Ce programme à caractère démagogique allait au-delà du social et tombait dans le politique. Aussi le gouvernement dominicain ne pouvait-il admettre que des organisations syndicales, politiques ou de petits noyaux de la population troublassent la paix et l'ordre publics auxquels le gouvernement avait le devoir de veiller dans le cadre de son mandat constitutionnel.

&htab;675.&htab;En conséquence, explique-t-il, le Conseil syndical profitant de la conjoncture surgissant des troubles engendrés par les forces d'opposition a lancé un appel à la grève les 27 avril et 1er mai accompagnée de manifestations qui se seraient soldées par un véritable échec, étant donné que, selon le gouvernement, la population n'y aurait pas participé. Le gouvernement déclare en outre que les grèves, manifestations et arrêts de travail effectués sans l'autorisation des autorités légalement constituées sont une violation flagrante de la loi, et que ces agissements deviennent dangereux quand ils s'inscrivent dans un climat non approprié tel que celui qu'il a décrit. Selon lui, la politisation des organisations syndicales a causé un grave dommage au mouvement syndical en République dominicaine.

&htab;676.&htab;En conclusion, le gouvernement affirme qu'aucun siège d'organisation syndicale n'est actuellement occupé, que les mesures de sécurité adoptées autour des locaux syndicaux ont eu un caractère préventif pour éviter la répétition des graves incidents survenus auparavant face aux appels à la grève et à la manifestation lancés par les organisations syndicales plaignantes, et il affirme à nouveau que, sur tout le territoire, pas un seul syndicaliste n'est emprisonné pour avoir exercé des activités syndicales, et que ceux qui ont été détenus ont été immédiatement relâchés après avoir été entendus par les services de sécurité. Selon lui, les faits dénoncés par les plaignants ont été grandement exagérés, et certains ne correspondent même pas à la réalité. Au contraire, estime-t-il, les activités syndicales dans le pays sont complètement normales, et le gouvernement garantit leur maintien et leur renforcement.

C. Conclusions du comité

&htab;677.&htab;Cette affaire porte essentiellement sur les graves incidents survenus au cours des journées de protestation d'avril-mai 1984 déclenchées par les cinq centrales syndicales dominicaines regroupées au sein du conseil syndical, contre l'augmentation très importante du coût de la vie provoquée par l'accord signé entre le gouvernement dominicain et le Fonds monétaire international à la fin d'avril 1984. Le mouvement a entraîné la mort de nombreuses personnes ainsi que des blessures pour beaucoup d'autres, l'arrestation de dirigeants syndicaux et l'occupation temporaire des sièges syndicaux. Le comité doit, en premier lieu, exprimer sa vive préoccupation et sa réprobation face à la gravité particulière de ces incidents, spécialement de la mort de plusieurs personnes.

&htab;678.&htab;Le comité observe que le gouvernement admet que les négociations avec le Fonds monétaire international ont entraîné l'adoption de mesures économiques et d'ajustements visant à permettre au pays de disposer des fonds correspondant aux engagements pris à l'égard de la Banque internationale et à obtenir des crédits vitaux pour l'économie du pays. Néanmoins, selon le gouvernement, des mesures ont été prises pour que les classes sociales les plus défavorisées ne supportent pas la totalité du fardeau consécutif à ces changements structurels et il a évoqué l'augmentation du salaire minimum de 40 pour cent et le gel de produits de première nécessité ainsi que l'installation de 600 magasins et pharmacies populaires vendant à prix coûtant les médicaments essentiels à la santé et de marchés populaires vendant à des prix accessibles les produits de première nécessité à la population.

&htab;679.&htab;Il n'en demeure pas moins que le gouvernement confirme qu'au cours des journées troublées du 23 au 25 avril 1984 les autorités ont été conduites à agir et à repousser les agressions populaires. Selon le gouvernement, l'appel à la grève des 27 avril et 1er mai lancé par le conseil syndical a eu un caractère démagogique et politique, et le gouvernement a été contraint d'adopter des mesures de sécurité autour des locaux des syndicats pour éviter la répétition des graves incidents qui avaient déjà eu lieu. En outre, toujours selon le gouvernement, les arrestations n'ont duré que peu de temps, les intéressés ayant été immédiatement relâchés après avoir été entendus par les services de sécurité.

&htab;680.&htab;Le comité observe néanmoins que les plaignants, pour leur part, allèguent que les actions en cause ont été déclenchées à l'appui de revendications sociales. Il s'agissait de demander au gouvernement, face aux conséquences néfastes de la crise économique qui frappait le pays et qui se traduisait par la réduction du pouvoir d'achat et l'augmentation du chômage, de rompre les négociations avec le Fonds monétaire international, de geler les prix des produits alimentaires et des médicaments, de fixer un salaire minimum mensuel à un certain taux et de réajuster les salaires.

&htab;681.&htab;Le comité estime que l'ensemble des revendications des cinq centrales dominicaines avait essentiellement un caractère syndical. En conséquence, le comité regrette profondément que l'augmentation des produits alimentaires et des médicaments ait conduit à un mouvement de protestation sociale qui s'est soldée par des morts et des blessés et de nombreuses arrestations et il rappelle que, dans les cas où la dispersion de manifestation pour des raisons d'ordre public a entraîné des pertes de vies humaines et des blessures, il attache une grande importance à ce qu'il soit procédé à une enquête approfondie pour déterminer les responsabilités et il demande au gouvernement de prendre des mesures pour éviter le renouvellement de telles actions, et de fournir des informations sur le résultat de l'enquête.

&htab;682.&htab;Par ailleurs, le comité a toujours considéré le droit de grève comme un moyen légitime et même essentiel dont disposent les travailleurs pour promouvoir et défendre leurs intérêts professionnels. Ce droit, a-t-il ajouté, ne devrait pas être restreint aux seuls différends du travail susceptibles de déboucher sur une convention collective particulière: les travailleurs et leurs organisations doivent pouvoir manifester, le cas échéant, dans un cadre plus large leur mécontentement éventuel sur des questions économiques et sociales touchant aux intérêts de leurs membres. [Voir 172e rapport, cas no 885 (Equateur), paragr. 385; 181e rapport, cas no 899 (Tunisie), paragr. 242.] Le comité est conscient que le fait d'exercer une activité syndicale ou de détenir un mandat syndical n'implique aucune immunité vis-à-vis de la législation pénale ordinaire mais il rappelle qu'il lui appartient de vérifier lui-même si les intéressés ont été arrêtés pour des délits de droit commun ou pour des activités syndicales. Or, dans le cas d'espèce, étant donné que les dirigeants syndicaux ont été arrêtés à plusieurs reprises et remis en liberté après quelques jours de détention sans qu'aucune charge ait été retenue contre eux, le comité croit utile d'indiquer au gouvernement qu'il devrait assurer que les autorités reçoivent des instructions appropriées en vue de faire disparaître le danger que les arrestations représentent pour les activités syndicales. [Voir 147e rapport, cas no 777 (Inde), paragr. 214; et cas no 753 (Uruguay), paragr. 345.]

&htab;683.&htab;Pour ce qui concerne l'allégation relative à l'interdiction de la manifestation du 1er mai, le comité rappelle que le droit d'organiser des réunions publiques et des cortèges à l'occasion du 1er mai constitue, comme il l'a signalé à maintes reprises, un aspect important des droits syndicaux. Néanmoins, le comité a également souligné qu'il appartient au gouvernement en tant que responsable du maintien de l'ordre de déterminer, dans l'exercice de ses pouvoirs de sécurité, si, dans des circonstances données, des manifestations même syndicales peuvent mettre en danger la tranquillité et la sécurité publiques, et de prendre les mesures préventives nécessaires pour écarter ce danger. Cependant, si pour éviter des désordres les autorités décident d'interdire une manifestation, elles devraient, de l'avis du comité, s'efforcer de s'entendre avec les organisateurs de la manifestation afin de permettre sa tenue en un autre lieu (éventuellement privé) où des désordres ne seraient plus à craindre. [Voir, par exemple, 139e rapport, cas no 660 (Mauritanie), paragr. 60; et 204e rapport, cas no 962 (Turquie), paragr. 255.]

&htab;684.&htab;Pour ce qui est de l'occupation temporaire des locaux de plusieurs syndicats, le comité estime qu'une telle occupation peut constituer une grave ingérence des autorités dans les activités syndicales. Dans le cas d'espèce, le gouvernement prétend que ses occupations temporaires ont eu un caractère préventif et affirme que les locaux ne sont plus occupés par les forces de l'ordre. Le comité souhaite, cependant, insister sur la grande importance qu'il attache à l'inviolabilité des locaux syndicaux pour garantir la liberté syndicale et veut croire que le gouvernement prendra des mesures pour éviter le renouvellement de tels faits sans mandat judiciaire.

Recommandations du comité

&htab;685.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Le comité exprime sa vive préoccupation devant la portée et la gravité des allégations formulées dans ce cas et qui concernent la mort et les blessures de nombreuses personnes intervenues au cours de manifestations de protestation syndicale contre des augmentations importantes du coût de la vie.

b) Au sujet des morts violentes et des blessures de nombreuses personnes, le comité rappelle l'importance de procéder à une enquête approfondie pour déterminer les responsabilités et de prendre des mesures pour éviter le renouvellement de telles actions. Le comité prie donc le gouvernement de fournir des informations sur le résultat de cette enquête.

c) Au sujet des arrestations de dirigeants syndicaux relâchés après qu'aucune charge n'eut été retenue contre eux, le comité rappelle que le gouvernement devrait garantir que les autorités reçoivent des instructions spéciales appropriées pour faire disparaître le danger que les arrestations représentent pour les activités syndicales. d) Au sujet de l'occupation temporaire des locaux syndicaux, le comité insiste sur l'importance qu'il attache à l'inviolabilité des locaux syndicaux pour garantir la liberté syndicale et veut croire que le gouvernement prendra les mesures appropriées pour éviter le renouvellement de tels faits sans mandat judiciaire.

e) Au sujet de l'interdiction de la manifestation du 1er mai, le comité rappelle que le droit d'organiser des réunions et des cortèges à l'occasion du 1er mai constitue un aspect important des droits syndicaux et que les autorités devraient s'entendre avec les organisateurs afin de permettre la tenue normale de réunion ou de manifestation.

Cas no 1291 PLAINTE PRESENTEE PAR LA CONFEDERATION SYNDICALE DES TRAVAILLEURS DE COLOMBIE CONTRE LE GOUVERNEMENT DE LA COLOMBIE

&htab;686.&htab;La plainte figure dans une communication de la Confédération syndicale des travailleurs de la Colombie, en date du 5 juin 1984. Cette organisation a envoyé des informations complémentaires par une communication du 24 juillet 1984. Le gouvernement a répondu par des communications des 8 août et 10 octobre 1984.

&htab;687.&htab;La Colombie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations du plaignant

&htab;688.&htab;Le plaignant allègue que le Syndicat des travailleurs de l'entreprise Noel a présenté un cahier de revendications, le 27 mai 1983, à l'administration de l'entreprise "Industrias Alimenticias Noel SA", que celle-ci refuse depuis lors de discuter, bien que les autorités administratives lui aient infligé une amende de 5.000 pesos par jour, en vertu de l'article 433 du Code du travail qui fait obligation à l'employeur de recevoir, dans les 24 heures qui suivent la présentation d'un cahier de revendications, la Commission de négociation, et qui interdit de différer de plus de cinq jours les discussions en vue d'un règlement direct. Malgré cela, le plaignant déclare que l'entreprise a refusé systématiquement de payer les amendes et le ministère du Travail ne prend pas de mesures suffisamment coercitives pour obliger l'entreprise à discuter du cahier de revendications.

&htab;689.&htab;Par ailleurs, le plaignant allègue que l'entreprise susmentionnée a violé le droit à la libre association syndicale en exerçant des pressions sur les membres du Syndicat des travailleurs de l'entreprise Noel pour qu'ils quittent le syndicat. Cela a été prouvé par une enquête menée par les autorités administratives qui ont sanctionné l'entreprise par une amende. Le plaignant envoie copie des décisions administratives pertinentes.

&htab;690.&htab;Enfin, le plaignant allègue que, afin d'affaiblir le syndicat, il a été procédé au licenciement de 13 travailleurs syndiqués en l'espace de huit jours. Le plaignant indique que cette mesure constitue une atteinte à la protection dont bénéficient ces travailleurs, conformément à l'article 25 du décret-loi no 2351 qui interdit aux employeurs de licencier des travailleurs lorsqu'un cahier de revendications a été soumis, et cela jusqu'à ce qu'une nouvelle convention collective de travail ait été signée.

B. Réponse du gouvernement

&htab;691.&htab;Le gouvernement déclare que, par la résolution no 0241 du 5 juillet 1983, l'inspection primaire de la Division départementale du travail et de la sécurité sociale d'Antioquia a infligé à l'entreprise "Industria Alimenticias Noel SA" une amende de 5.000 pesos par jour pour avoir refusé de discuter du cahier de revendications. Le montant de l'amende le plus élevé qui puisse être infligé est un montant équivalant à quarante fois le salaire minimum mensuel. L'entreprise a présenté un recours afin que cette décision soit reconsidérée et a interjeté appel contre elle, mais la décision a été confirmée par les décisions nos 0284 et 0460 des 2 et 31 août 1983. L'entreprise a sollicité, en priorité, au Tribunal administratif d'Antioquia la suspension des trois décisions susmentionnées, demande qui a été refusée par décision du 6 décembre 1983. Le gouvernement précise également qu'en cas de refus de paiement de l'amende la législation prévoit une procédure de recours pour faire appliquer la décision de l'inspection du travail.

&htab;692.&htab;Par ailleurs, le gouvernement déclare que la Division départementale d'Antioquia a une nouvelle fois infligé une amende à l'entreprise "Industrias Alimenticias Noel SA", par décision no 0434 du 5 décembre 1983 pour avoir enfreint le droit syndical.

&htab;693.&htab;Compte tenu de ce qui précède, le gouvernement déclare qu'il est faux de dire que le ministère du Travail et de la Sécurité sociale soit resté inactif devant le refus de l'entreprise de discuter du cahier de revendications présenté par le Syndicat des travailleurs de cette entreprise. En droit colombien, les autorités ne disposent que des pouvoirs que la loi leur confère expressément. En ce sens, le ministère, dans le cadre de ses fonctions de surveillance et de contrôle du respect des règles du travail, a le droit d'imposer des amendes à quiconque enfreint ces règles, mais il ne peut recourir à d'autres moyens de sanction sous peine de violer les dispositions légales. En conséquence, si l'entreprise "Industrias Alimenticias Noel SA" persiste dans son refus de discuter du cahier de revendications avec le syndicat, l'autorité administrative du travail continuera à la sanctionner en lui infligeant des amendes équivalant au montant d'une à 40 fois le salaire minimum mensuel le plus élevé (paragr. 2 de l'article 486 du Code du travail, modifié par l'article 24 de la loi 11 de 1984), mais elle ne pourra, en aucun cas, prendre des mesures plus coercitives comme celles dont il est question dans la plainte. Enfin, le gouvernement déclare que les travailleurs qui ont été licenciés par l'entreprise peuvent introduire des recours devant les tribunaux.

C. Conclusions du comité

&htab;694.&htab;En ce qui concerne les faits allégués, le comité observe que les autorités compétentes ont infligé des amendes à l'entreprise "Industrias Alimenticias Noel SA" pour avoir continûment refusé, en violation de la législation en vigueur, de discuter du cahier de revendications présenté par le syndicat de l'entreprise le 27 mai 1983 et pour avoir enfreint le droit d'association syndicale en exerçant des pressions sur les membres du syndicat pour qu'ils quittent le syndicat.

&htab;695.&htab;Dans ces conditions, le gouvernement ayant confirmé que l'entreprise susmentionnée n'a pas respecté la législation, le comité ne peut que demander au gouvernement de prendre des mesures adéquates y compris des sanctions efficaces pour garantir que la législation en matière de négociation collective et de protection du droit syndical soit pleinement respectée et il prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard. Le comité demande également au gouvernement d'appeler l'attention de l'entreprise "Industrias Alimenticias Noel SA" sur l'obligation qui incombe aussi bien aux employeurs qu'aux syndicats de négocier, de bonne foi, pour arriver à un accord, ainsi que sur le fait que l'existence de relations professionnelles satisfaisantes dépend essentiellement de l'attitude qu'adoptent les parties l'une à l'égard de l'autre et de leur confiance réciproque. [Voir, par exemple, 139e rapport, cas no 725 (Japon), paragr. 279.] Le comité estime indispensable que l'entreprise en question reconsidère son refus de négocier avec le syndicat et ouvre des négociations dans un bref délai.

&htab;696.&htab;Enfin, le comité observe que le gouvernement n'a pas répondu de manière détaillée à l'allégation selon laquelle l'entreprise "Industrias Alimenticias Noel SA" aurait licencié illégalement 13 travailleurs syndiqués afin d'affaiblir le syndicat. En effet, le gouvernement s'est borné à déclarer que les personnes prétendument licenciées peuvent introduire des recours devant les tribunaux. En conséquence, le comité demande au gouvernement d'envoyer des observations détaillées à ce sujet.

Recommandations du comité

&htab;697.&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Le comité demande au gouvernement d'appeler l'attention de l'entreprise "Industrias Alimenticias Noel SA" sur l'obligation qui incombe aussi bien aux employeurs qu'aux syndicats de négocier, de bonne foi, afin de parvenir à un accord, ainsi que sur le fait que l'existence de relations professionnelles satisfaisantes dépend essentiellement de l'attitude qu'adoptent les parties l'une à l'égard de l'autre et de leur confiance réciproque.

b) Le comité estime indispensable que l'entreprise en question reconsidère son refus de négocier avec le syndicat et qu'elle ouvre des négociations dans un bref délai.

c) Le comité demande au gouvernement de prendre des mesures adéquates y compris des sanctions efficaces pour garantir que la législation en matière de négociation collective et de protection du droit syndical soit pleinement appliquée. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.

d) Enfin, le comité observe que le gouvernement n'a pas répondu de manière détaillée à l'allégation selon laquelle l'entreprise "Industrias Alimenticias Noel SA" aurait licencié illégalement 13 travailleurs syndiqués afin d'affaiblir le syndicat. Le comité demande donc au gouvernement d'envoyer des observations détaillées à cet égard.

Genève, 7 novembre 1984. (Signé) Roberto Ago, &htab;&htab; Président.
237e RAPPORT INTRODUCTION

&htab;1.&htab;Le Comité de la liberté syndicale, institué par le Conseil d'administration à sa 117e session (novembre 1951), s'est réuni au Bureau international du Travail, à Genève, les 1er, 2 et 7 novembre 1984 sous la présidence de M. Roberto Ago, ancien Président du Conseil d'administration.

&htab;2.&htab;Le comité est saisi de différentes plaintes en violation de la liberté syndicale en Turquie déposées par diverses organisations syndicales (cas nos 997, 999 et 1029) et d'une réclamation relative à la non-observation par ce pays des conventions (no 11) sur le droit d'association (agriculture), 1921, et (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, présentées, en vertu de l'article 24 de la Constitution de l'OIT, par la Confédération générale des syndicats de Norvège.

&htab;3.&htab;A sa 224e session (novembre 1983), le Conseil d'administration avait adopté les conclusions intérimaires formulées par le comité dans son 232e rapport.

&htab;4.&htab;Depuis lors, le gouvernement a transmis des informations et une mission de contacts directs a été effectuée.

Cas nos 997, 999 et 1029 PLAINTES PRESENTEES PAR LA CONFEDERATION MONDIALE DU TRAVAIL, LA FEDERATION SYNDICALE MONDIALE, LA CONFEDERATION INTERNATIONALE DES SYNDICATS LIBRES ET PLUSIEURS AUTRES ORGANISATIONS SYNDICALES CONTRE LE GOUVERNEMENT DE LA TURQUIE RECLAMATION PRESENTEE PAR LA CONFEDERATION GENERALE DES SYNDICATS DE NORVEGE, EN VERTU DE L'ARTICLE 24 DE LA CONSTITUTION, AU SUJET DE LA NON-APPLICATION DES CONVENTIONS (no 11) SUR LE DROIT D'ASSOCIATION (AGRICULTURE), 1921, ET (no 98) SUR LE DROIT D'ORGANISATION ET DE NEGOCIATION COLLECTIVE, 1949, PAR LA TURQUIE

&htab;5.&htab;Le comité examine ces cas depuis février 1981 et il a présenté successivement à leur sujet dix rapports intérimaires au

 Voir page 1, note 1.

Conseil d'administration dont le dernier en mai 1984. [Voir 235e rapport du comité, approuvé par le Conseil d'administration à sa 226e session, mai-juin 1984.]

&htab;6.&htab;La dernière fois qu'il a examiné les cas en question, en mai 1984, le comité a adressé un certain nombre de recommandations au gouvernement à propos de leurs divers aspects et il lui a demandé de prendre des mesures au sujet de certains des points soulevés ou de fournir des renseignements supplémentaires sur d'autres points.

&htab;7.&htab;A la 70e session (1984) de la Conférence internationale du Travail, après avoir examiné les commentaires de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations à propos de l'application par la Turquie de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, la Commission de l'application des conventions et recommandations de la Conférence a pris note des informations détaillées que le gouvernement de la Turquie avait fournies au sujet de l'application de la convention no 98 ainsi que des diverses observations faites au cours du débat. La Commission de la Conférence a noté, en particulier, que le gouvernement avait donné son accord à une nouvelle mission de contacts directs, qui, espérait-on, permettrait de discuter en détail des différents problèmes soulevés par la commission d'experts. Elle a néanmoins noté avec préoccupation les problèmes relevés par la commission d'experts et par le Comité de la liberté syndicale. Elle a exprimé l'espoir que les contacts directs permettraient de faire des progrès afin de surmonter les difficultés qui existent dans le domaine de l'application de la convention no 98 et que, l'année prochaine, la commission d'experts serait en mesure de noter que les amendements nécessaires auraient été apportés pour tenir compte des observations faites par la commission d'experts. Elle voulait croire aussi que les recommandations du Comité de la liberté syndicale seraient rapidement et pleinement mises en oeuvre.

&htab;8.&htab;A la suite d'entretiens entre les représentants du Bureau et ceux de la Mission permanente de la Turquie à Genève, des dispositions ont été prises en vue d'une nouvelle mission de contacts directs, qui a eu lieu du 24 septembre au 5 octobre 1984. [Il y avait déjà eu deux missions de contacts directs au sujet de ces cas, la première en juillet 1982 et la seconde en septembre 1983.]. Le Directeur général a désigné M. William R. Simpson, Chef du Service de la liberté syndicale du Département des normes internationales du travail, comme son représentant pour s'acquitter de cette mission.

&htab;9.&htab;La Turquie n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; en revanche, elle a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen précédent des cas en question par le comité

&htab;10.&htab;&htab;La dernière fois que le comité avait examiné ces cas, en mai 1984, il avait noté que le gouvernement entendait maintenir sa politique d'ouverture d'esprit et de coopération avec l'OIT.

&htab;11.&htab;&htab;Le comité avait noté que, selon le gouvernement, les syndicalistes mentionnés dans la communication complémentaire de l'Union internationale des travailleurs de l'alimentation et des branches connexes (UITA) étaient inculpés devant le Tribunal no 2 du Commandement de la loi martiale à Istanbul, mais que tous, à l'exception de M. Zirtiloglu (ancien président d'OLEYIS), avaient été remis en liberté. Il avait prié le gouvernement de le tenir informé de l'évolution de la situation de ces syndicalistes et des résultats des audiences lorsqu'elles auraient eu lieu.

&htab;12.&htab;&htab;Le comité avait aussi noté avec intérêt que, conformément au programme national d'abolition progressive de la loi martiale, celle-ci avait été levée le 19 mars 1984 dans 13 provinces. Etant donné que, dans les 54 autres provinces, elle avait été reconduite pour une période de quatre mois, à l'issue de laquelle la situation devait être réexaminée, le comité avait exprimé l'espoir que les autres provinces bénéficieraient alors de telles mesures afin que soit rétabli un climat propice aux activités syndicales normales et que puissent entrer en vigueur les nouvelles dispositions législatives concernant les droits de grève et de négociation collective. Le comité avait souligné que la loi martiale était incompatible avec le plein exercice des droits syndicaux.

&htab;13.&htab;&htab;En ce qui concernait les syndicalistes de la DISK, le comité avait noté que le procès suivait son cours, mais qu'entre-temps un certain nombre de prisonniers avaient été mis en liberté provisoire. Du fait que les allégations des organisations plaignantes désignaient nommément les personnes sur lesquelles pesaient de lourdes charges, le comité avait estimé utile que le gouvernement fournisse la liste de celles qui avaient bénéficié d'une libération et continue à le tenir informé des développements de l'affaire. Le comité avait rappelé qu'il ressortait du rapport de mission du représentant du Directeur général de septembre 1983, ainsi que des allégations des plaignants, que le procès en cours avait lieu contre l'organisation DISK et que les charges ne pesaient pas sur les détenus à titre personnel. Or, selon le rapport du gouvernement et les informations antérieures qu'il avait fournies, les syndicalistes dont il était question dans les plaintes étaient poursuivis en tant qu'individus impliqués directement ou indirectement dans des actes de terrorisme. Tout en soulignant cette contradiction, le comité avait prié le gouvernement de préciser si un procès avait bien été engagé contre l'organisation syndicale DISK, dont les activités étaient suspendues, ou contre des individus (dirigeants et membres de ce syndicat ou de syndicats affiliés) à titre personnel, en fournissant des éléments à l'appui de sa réponse.

&htab;14.&htab;&htab;Le comité avait profondément déploré que le procès des syndicalistes en question ne semblât pas prendre fin et que des syndicalistes fussent en détention depuis trois ans et demi, faisant l'objet de jugements partiels et devant assister à des audiences par intermittence, ce qui faisait peser sur ces détenus un poids moral éprouvant pour eux-mêmes et leurs familles, les sensibilisant davantage à leurs conditions de détention et, de ce fait, leur faisant ressentir leur situation comme injustifiée. Le comité considérait qu'une telle situation était en soi une négation de la liberté syndicale. Il avait souligné que les syndicalistes détenus devaient, à l'instar des autres personnes, bénéficier d'une procédure judiciaire régulière et être jugés dans des délais raisonnables. Il avait exprimé encore une fois le ferme espoir que tous ces syndicalistes poursuivis, qu'ils fussent emprisonnés ou en liberté provisoire, seraient jugés dans les meilleurs délais.

&htab;15.&htab;&htab;En ce qui concernait les conditions de détention, le comité avait pris note du rapport de la commission d'enquête effectuée par les autorités turques en mars 1984 et, en particulier, des recommandations qu'il contenait quant à la nécessité d'améliorer certains aspects des conditions de détention des prisonniers (entretiens avec leurs conseils, rencontres avec leurs familles, conditions pratiques dans lesquelles se déroulaient les visites, etc.). Tout en notant que, selon le gouvernement, des ordres avaient été donnés pour que ces recommandations fussent suivies d'effet, le comité avait prié le gouvernement de le tenir informé de leur mise en pratique et de l'évolution de la situation à cet égard.

&htab;16.&htab;&htab;Au sujet des allégations de torture et de mauvais traitements, le comité avait observé que, selon le gouvernement, depuis l'instauration de la loi martiale le 26 décembre 1978, des poursuites judiciaires avaient été engagées contre leurs auteurs et que 80 agents de la sécurité avaient déjà été condamnés pour ces motifs. Le comité avait pris note de ces informations, mais, étant donné les allégations récentes dont il avait été saisi lors du dernier examen des cas, il avait exprimé l'espoir que les autorités turques poursuivent inlassablement et avec la plus grande vigilance la restauration des garanties en vue de protéger l'intégrité physique des personnes emprisonnées, ces garanties ayant été gravement compromises avec les conséquences irrémédiables que cela avait entraînées pour certains militants et dirigeants syndicaux.

&htab;17.&htab;&htab;Pour ce qui était des problèmes de travail auxquels était confrontée la grande majorité des personnes libérées de prison, qui se seraient trouvées au chômage à cause de dispositions statutaires ou de mesures discriminatoires de la part de l'employeur dès lors qu'elles avaient eu des liens avec la DISK, le comité avait noté les dispositions de la loi no 2869, amendant la loi no 4175 sur le travail, citées par le gouvernement, en vertu desquelles toute entreprise comptant 50 travailleurs ou plus est tenue de recruter au moins 2 pour cent de sa main-d'oeuvre parmi d'anciens détenus. Le comité avait relevé que, selon les affirmations du gouvernement, beaucoup d'anciens prisonniers étaient déjà employés et exerçaient des activités syndicales, mais que, tant que le minimum de 2 pour cent imposé par la loi était respecté par l'employeur, nul ne pouvait obliger celui-ci à embaucher davantage d'anciens détenus. Tout en notant cette assertion, le comité avait tenu cependant à attirer l'attention du gouvernement sur l'article 1 de la convention no 98, ratifiée par la Turquie, concernant la discrimination en matière syndicale, aspect important du droit d'organisation, qui prévoit une protection des travailleurs à l'embauchage. Le comité avait rappelé à cet égard qu'en vertu de cette convention un gouvernement doit, si nécessaire, prendre des mesures efficaces pour qu'aucun travailleur ne fasse l'objet d'une discrimination à l'embauchage en raison de son affiliation ou de son activité syndicale, qu'elles soient présentes ou passées. Le comité avait attiré l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur cet aspect du cas.

&htab;18.&htab;&htab;Depuis la suspension de l'organisation DISK, les biens et avoirs de celle-ci avaient été gelés et déposés entre les mains de curateurs désignés par les tribunaux. Le comité avait noté que ces biens étaient toujours sous séquestre et que le gouvernement indiquait qu'ils le resteraient jusqu'à la reprise des activités du syndicat. Etant donné que, par ailleurs, il était précisé dans cette communication du gouvernement que l'article 5, transitoire, de la loi sur les syndicats disposait que les activités des organisations suspendues ne pourraient reprendre tant que leurs dirigeants ne seraient pas absous des charges de crime contre l'Etat pesant sur eux, même s'ils étaient en liberté provisoire, le comité ne pouvait que fermement souligner qu'il importait que les dirigeants de la DISK fussent jugés au plus tôt. Le comité avait pris note que, toujours selon le gouvernement, la date limite du 1er janvier 1984 prévue par la loi sur les syndicats, avant laquelle les organisations syndicales devaient adapter leurs statuts à la législation sous peine de dissolution automatique, n'était pas applicable aux organisations syndicales suspendues. En l'absence d'autres informations, le comité avait estimé pouvoir conclure que les syndicats suspendus à la suite de la prise de pouvoir du 12 septembre 1981 par les autorités militaires n'avaient pas été dissous par l'arrivée de cette échéance.

&htab;19.&htab;&htab;Le comité avait exprimé l'espoir que les syndicalistes sur lesquels pesaient des charges pénales seraient jugés dans les meilleurs délais, et il avait rappelé avec la plus grande insistance que, depuis novembre 1982, le Conseil d'administration exprimait le ferme espoir que les mesures de suspension seraient levées et que les organisations en cause seraient en mesure d'exercer leurs activités syndicales en pleine possession de leurs biens et avoirs. A cet égard, le comité avait noté que, selon le gouvernement, la MISK avait pu reprendre ses activités syndicales. Le comité avait demandé au gouvernement d'indiquer si des mesures semblables étaient envisagées à l'égard de la DISK et si les biens et avoirs de la MISK lui avaient été entièrement rendus.

&htab;20.&htab;&htab;Au sujet de l'aspect législatif du cas, le comité avait attiré l'attention du gouvernement sur le fait qu'il pourrait faire des propositions au Parlement dans le sens préconisé par le comité et la commission d'experts; il convenait en effet que, dans la mesure du possible, la situation fût réexaminée à la lumière des commentaires formulés par ces deux organes de contrôle. En insistant sur cette nécessité, le comité croyait utile de rappeler les commentaires relatifs aux lois nos 2821 et 2822 de mai 1983, modifiées en août 1983, qu'il avait faits à sa session de novembre 1983. Le comité avait relevé les points suivants:

1)&htab;Sur la loi no 2821 sur les syndicats:

-&htab;article 3: interdiction des syndicats d'entreprise;

- article 14: obligation d'avoir travaillé dix ans dans la profession pour être élu dirigeant syndical (qui correspond à l'article 51.7 de la Constitution), cinq années d'emploi à l'étranger pouvant être comptabilisées dans ce calcul;

- article 19: obligation, pour briguer un mandat syndical, de ne pas avoir été condamné pour violation de dispositions en matière de négociation collective et de grève;

- article 21: interdiction de s'affilier à un syndicat pour les personnes travaillant dans les institutions et écoles religieuses;

-&htab;article 25: l'affiliation prend fin avec le départ à la retraite;

- article 46: transfert des actifs d'une organisation dissoute au Trésor public.

2) Sur la loi no 2822 sur la négociation collective, la grève et le lock-out:

- article 12: nécessité de compter plus de 50 pour cent des travailleurs de l'unité de travail concernée pour négocier collectivement et de constituer au moins 10 pour cent du nombre de travailleurs de l'industrie de branche concernée;

- articles 13 et 14: nécessité d'obtenir une autorisation de négocier à chaque ouverture de nouvelles négociations;

- article 25: interdiction des grèves politiques, générales ou de solidarité, des ralentissements et résistance au travail (correspond à l'article 53 de la Constitution);

- article 31: l'exercice du droit de grève est temporairement réservé tant que l'état d'urgence et la loi martiale sont maintenus, ce qui est toujours le cas dans 54 provinces, soit la majeure partie du pays;

- articles 52 à 55: instituant un arbitrage obligatoire en cas de grève illégale ou ajournée; - article 72: sanctions pénales pour faits de grève pouvant aller jusqu'à 18 mois de prison;

- article 81: augmente les sanctions pénales ci-dessus de moitié en cas de récidive.

&htab;21.&htab;&htab;Dans ces conditions, le comité avait recommandé au Conseil d'administration d'approuver son rapport intérimaire, et en particulier les conclusions suivantes:

a) Le comité note que le gouvernement entend maintenir sa politique d'ouverture d'esprit et de coopération avec l'OIT.

b) En ce qui concerne la loi martiale que le Conseil d'administration avait, en novembre 1983, exhorté le gouvernement à lever au plus tôt, le comité note avec intérêt la levée effective depuis le 19 mars 1984 de cette loi dans 13 provinces du pays. Le comité souligne que la loi martiale est incompatible avec le plein exercice des droits syndicaux. Il exprime le ferme espoir qu'elle sera très bientôt abolie également dans les 54 autres provinces afin de permettre le retour à une vie syndicale normale, et notamment la mise en application des nouvelles dispositions législatives de 1983 sur la grève et la négociation collective.

c) Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de l'évolution de la situation judiciaire des syndicalistes de l'OLEYIS ainsi que des résultats des audiences dès qu'elles auront été tenues.

d) Le comité note que les procès des syndicalistes de la DISK suivent leur cours, et que certains d'entre eux ont été mis en liberté provisoire. Le comité prie le gouvernement de fournir la liste de ces personnes. Tout en notant la contradiction qui apparaît entre les affirmations selon lesquelles le procès concerne les dirigeants ou militants de la DISK à titre personnel pour des actes de terrorisme et celles recueillies sur place par le représentant du Directeur général en septembre 1983 et contenues dans les allégations des plaignants, selon lesquelles le procès est dirigé contre la DISK, le comité prie le gouvernement de préciser si un procès contre l'organisation DISK a été engagé et de fournir des éléments à l'appui de sa réponse.

e) Au sujet de la détention prolongée, depuis trois ans et demi, de syndicalistes dans l'attente d'être jugés, le comité déplore profondément que le procès ne semble pas prendre fin, et souligne que de telles lenteurs font peser sur les détenus et sur leurs familles un poids moral éprouvant, leur faisant ressentir leur situation comme étant injustifiée. Le comité estime qu'une telle situation est en soi une négation de la liberté syndicale. Le comité exprime donc le ferme espoir que ces syndicalistes poursuivis, qu'ils soient ou non en prison, seront très rapidement jugés par les tribunaux, étant donné qu'à l'instar des autres personnes ils doivent bénéficier d'une procédure régulière et avoir le droit d'être jugés dans des délais raisonnables. f) Le comité prend note qu'une commission d'enquête désignée par des autorités turques a visité les prisons et entendu les détenus en privé, en mars 1984. Le comité relève que des recommandations relatives à certaines améliorations nécessaires aux conditions de détention ont été faites par la commission; il prie le gouvernement de l'informer de la suite qui leur a été donnée et de l'évolution de la situation à cet égard.

g) A propos des allégations de torture et de mauvais traitements, le comité espère que les autorités turques poursuivront inlassablement et avec la plus grande vigilance la restauration des garanties en vue de protéger l'intégrité physique des personnes emprisonnées, ces garanties ayant été gravement compromises avec les conséquences irrémédiables que ces situations ont entraînées pour certains militants et dirigeants syndicaux.

h) Au sujet des allégations selon lesquelles d'anciens détenus seraient encore au chômage et subiraient une discrimination à l'embauchage du fait de leurs liens passés avec la DISK, le comité tient à souligner que, conformément à l'article 1 de la convention no 98, ratifiée par la Turquie, un gouvernement doit, si nécessaire, prendre des mesures efficaces pour qu'aucun travailleur ne fasse l'objet de discrimination à l'embauchage, en raison de son affiliation ou de son activité syndicale qu'elles soient présentes ou passées. En outre, le comité attire l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur cet aspect du cas.

i) A propos de la suspension de l'organisation syndicale DISK, le comité note que ses biens sont toujours sous séquestre en attendant que ses dirigeants soient absous des charges pesant sur eux et qu'elle n'a pas été dissoute par l'échéance du 1er janvier 1984 qui, aux termes de l'article 5, transitoire, de la loi sur les syndicats, n'était applicable qu'aux organisations alors en activité. Le comité souligne fermement qu'il importe donc que tous les syndicalistes impliqués dans cette affaire soient jugés au plus tôt, afin que les mesures de suspension soient levées et que ces organisations puissent de nouveau exercer leurs activités en pleine possession de leurs biens et avoirs.

j) Le comité note que les mesures de suspension affectant l'organisation MISK ont été levées. Il prie le gouvernement d'indiquer si une action semblable est envisagée à l'égard de la DISK et de confirmer si les biens et avoirs de la MISK ont été entièrement rendus à cette organisation.

k) Le comité relève que, du fait de la levée de la loi martiale dans 13 provinces, les dispositions des lois no 2821 sur les syndicats, et no 2822 sur la négociation collective, la grève et le lock-out, telles qu'amendées, ont désormais été appliquées dans une partie du pays, mais qu'elles restent inapplicables dans les 54 autres provinces mentionnées plus haut. Le comité se doit d'insister de nouveau sur la nécessité de modifier de nombreuses dispositions relatives notamment à la structure, à l'affiliation et aux activités syndicales contenues dans la législation, et qui mettent en cause les principes de la liberté syndicale. Il suggère au gouvernement de formuler des propositions au Parlement dans ce sens à la lumière de ses commentaires et de ceux de la commission d'experts. A cet égard, il souligne que le Bureau international du Travail reste à la disposition du gouvernement pour toute assistance qu'il pourrait demander.

&htab;22.&htab;&htab;Le comité a maintenant examiné le rapport détaillé du représentant du Directeur général au sujet de la mission de contacts directs qui a eu lieu du 24 septembre au 5 octobre 1984. Un exemplaire de ce rapport est annexé au présent rapport du comité. Eu égard au rapport du représentant du Directeur général et, en ce qui concerne les aspects législatifs du cas, à la réponse écrite, en date du 13 août 1984, que le gouvernement a fait parvenir au Directeur général à la suite des commentaires formulés par la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations au sujet de l'application de la convention no 98 par la Turquie, le comité est parvenu aux conclusions suivantes en ce qui concerne les cas dont il est saisi.

B. Conclusions du comité

&htab;23.&htab;&htab;Avant de traiter des diverses questions qu'il lui reste à examiner, le comité souhaite remercier le représentant du Directeur général de son rapport détaillé, qui lui a permis de dégager ses conclusions en meilleure connaissance de cause. Il apprécie en particulier le fait que le représentant du Directeur général a pu mentionner que, tant au cours des préparatifs de la mission que pendant la mission elle-même, il a bénéficié d'une coopération sans réserve de la part du gouvernement et a pu rencontrer librement toutes les personnes avec lesquelles il avait demandé à s'entretenir des diverses questions soulevées. En conséquence, le comité souhaite remercier le gouvernement pour l'esprit de coopération dont il a fait preuve en acceptant qu'une nouvelle mission de contacts directs ait lieu et pour avoir donné au représentant du Directeur général toutes les facilités dont il avait besoin pour s'acquitter de sa mission.

&htab;24.&htab;&htab;Le comité rappelle que les cas dont il est saisi portent sur des questions de fait et des questions de droit. En premier lieu, certaines questions en instance concernent la situation des dirigeants de la DISK et des organisations qui lui sont affiliées, qui ont été arrêtés et détenus après l'intervention militaire de septembre 1980 et dont les procès se poursuivent. En second lieu, le comité s'est penché sur la situation de la DISK qui, en tant qu'organisation, a été suspendue par décret des autorités militaires peu après l'intervention militaire, ainsi que sur la question de ses biens, qui ont été confiés à des curateurs désignés par le tribunal du travail après la suspension de l'organisation. Troisièmement, il reste aussi à régler les questions relatives aux allégations de discrimination à l'encontre d'anciens détenus membres de la DISK, qui ne parviendraient pas, ou difficilement, à retrouver du travail ou à être réintégrés dans leur emploi du fait de leurs liens avec la DISK. Quatrièmement, d'autres questions en suspens concernent la législation sur les syndicats et la négociation collective, la grève et le lock-out, promulguée en mai 1983 et modifiée en août de la même année, ainsi que les problèmes que pose son application pratique.

&htab;25.&htab;&htab;En ce qui concerne les 52 premiers membres du comité exécutif de la DISK qui avaient été arrêtés après l'intervention des militaires (par la suite, leur nombre est passé à 76), le comité avait noté précédemment que le tribunal militaire les avait pour la plupart remis en liberté à différents moments, encore que leur procès se poursuivît. En prenant connaissance du rapport du représentant du Directeur général, le comité a noté avec intérêt que le tribunal militaire, qui connaît des poursuites intentées contre la DISK et ses dirigeants, a ordonné la remise en liberté de la plupart de ceux-ci, y compris le président de l'organisation, M. A. Bastürk, libéré quelques jours seulement avant le début de la mission de contacts directs. Le comité note toutefois que cinq des dirigeants de la DISK initialement détenus restent incarcérés à cause de charges ou de condamnations sans rapport avec les accusations originellement portées contre la DISK et sa direction. Certaines charges semblent toutefois avoir trait à l'exercice des fonctions syndicales antérieures des accusés. Le comité note qu'après la mise en liberté ordonnée par le tribunal militaire en faveur du président de la DISK, M. Bastürk, l'intéressé est resté détenu en vertu d'une condamnation antérieurement prononcée contre lui par un autre tribunal au sujet d'infractions relatives à la publication de documents écrits, et que c'est seulement après une série de recours et, pour finir, une demande présentée à la Cour suprême par le ministère de la Justice lui-même qu'il a enfin été libéré.

&htab;26.&htab;&htab;Il ressort aussi du rapport du représentant du Directeur général que les dirigeants d'organisations affiliées à la DISK qui étaient détenus antérieurement ont été remis en liberté en attendant la conclusion des quelque 30 procès intentés contre eux et qui sont encore en cours. Le représentant du Directeur général, qui a pu de nouveau assister à une session du procès principal contre la DISK et sa direction, a déclaré que plusieurs de ces procès avaient été joints à l'instance principale et que deux de plus l'ont été alors qu'il était présent au tribunal. Il a aussi déclaré que, d'après les informations qu'il a obtenues de diverses sources, notamment des avocats de la DISK, il est probable que tous les procès restants seront joints à l'instance principale. Sur la base de toutes les informations qu'il possède au sujet de ces procès et, en particulier, des conséquences pratiques et des difficultés qui résulteront de la jonction d'instances, le comité ne peut que conclure que le verdict final en ce qui concerne l'ensemble de l'affaire relative à la DISK et aux organisations qui lui sont affiliées - dont dépendent la liberté des accusés ainsi que l'existence future de la DISK en tant qu'organisation et la façon dont il sera disposé de ses biens -, risque encore d'être retardé. Tout en se félicitant de la mise en liberté des syndicalistes concernés, le comité exprime le ferme espoir que les procès ainsi joints aboutiront au maintien en liberté des intéressés, au rétablissement de la DISK dans sa capacité d'agir en tant qu'organisation syndicale et à la restitution de ses biens. En ce qui concerne les cinq dirigeants de la DISK qui restent détenus, le comité exprime l'espoir que les tribunaux se prononceront rapidement au sujet des charges relevées contre eux et qu'eux aussi seront remis en liberté prochainement.

&htab;27.&htab;&htab;En ce qui concerne le procès lui-même, le comité conclut, à la lecture du rapport du représentant du Directeur général, qu'il se déroule dans une atmosphère dans laquelle les avocats de la défense et les témoins peuvent s'exprimer librement et sans obstruction devant le tribunal. Les avocats de la défense eux-mêmes ont reconnu que la tension qui s'était fait sentir pendant les étapes initiales du procès et les difficultés de procédure auxquelles ils s'étaient heurtés précédemment avaient été en grande partie levées. Des restrictions subsistent toutefois en ce qui concerne la possibilité pour les avocats de la défense de rencontrer les cinq dirigeants de la DISK qui restent détenus, et il ne semble pas que, comme le comité l'avait recommandé, le règlement ait été modifié de façon à accroître le temps imparti aux avocats de la défense pour s'entretenir avec les détenus (vingt minutes, deux fois par semaine) ou pour les visites des familles. Le comité exprime l'espoir que des mesures seront prises ou que des instructions seront données en vue d'améliorer la situation à cet égard. Des difficultés se sont aussi présentées et continueront de surgir en ce qui concerne la possibilité pour les accusés et leurs défenseurs d'avoir accès à la masse de documents et d'éléments de preuves que les autorités ont produits lors des autres procès qui ont été joints au procès principal contre la DISK ou le seront - pièces qui les intéressent eux aussi. Le comité veut croire que, pour assurer le respect de la procédure régulière et de l'équité envers les accusés, ces problèmes seront surmontés et que tous les renseignements et documents dont les accusés ont besoin pour assurer correctement leur défense seront mis à la disposition des intéressés ou de leurs avocats.

&htab;28.&htab;&htab;Bien qu'ils aient été remis en liberté, les dirigeants de la DISK et des organisations qui lui sont affiliées se voient expressément interdire d'exercer toute activité syndicale par l'article 5 des dispositions transitoires promulguées en même temps que la loi no 2821 sur les syndicats (5 mai 1983), qui visent manifestement à empêcher tout membre d'un syndicat ou d'une organisation suspendu de mener aucune activité syndicale jusqu'à ce que les tribunaux l'aient acquitté. Le comité considère que ces dispositions non seulement constituent une négation de la liberté syndicale, mais aussi sont en contradiction directe avec le principe selon lequel les syndicalistes, comme toutes autres personnes, doivent être présumés innocents jusqu'à ce que les charges relevées contre eux aient été prouvées. Le comité souligne que les dirigeants syndicaux ne sauraient certes jouir d'une immunité spéciale en ce qui concerne les infractions au droit pénal ordinaire, mais qu'ils devraient néanmoins pouvoir s'acquitter de leurs fonctions normales de dirigeants syndicaux et assumer leurs responsabilités en ce qui concerne la défense et le soutien des membres de l'organisation à laquelle ils appartiennent jusqu'à ce que les délits dont ils sont accusés aient été prouvés par la procédure judiciaire normale. Le comité ne saurait ignorer le fait que la DISK, en tant qu'organisation, ainsi que ses dirigeants sont poursuivis pour des actes qu'on accuse ceux-ci d'avoir commis en violation des dispositions de la Constitution et de la législation pénale de la Turquie. Toutefois, il ne peut ignorer non plus le fait que, en suspendant la DISK et en intentant contre elle des poursuites qui, si elles aboutissent à une condamnation, pourraient entraîner sa dissolution définitive en temps qu'organisation, les autorités ont dénié à des milliers de travailleurs le droit d'être représentés par un syndicat de leur choix. Le comité reconnaît que c'est un droit et, de fait, un devoir pour tout gouvernement que de prendre les mesures qui peuvent être nécessaires pour mettre fin à des actes de terrorisme ou de violence. Cependant, il n'accepte pas qu'une importante confédération de travailleurs et les nombreuses organisations qui lui sont affiliées soient suspendues et courent même le risque d'une dissolution complète du fait de délits éventuellement commis par certains des membres de ladite confédération. Dans ces conditions, le comité demande instamment que l'article 5 des dispositions transitoires précitées soit abrogé sans délai, de façon à restituer leurs pleins droits syndicaux aux dirigeants qui en restent privés en vertu de ces dispositions.

&htab;29.&htab;&htab;Le comité rappelle que, dans son rapport précédent, il a attiré l'attention de la commission d'experts sur l'aspect du cas qui concerne une discrimination antisyndicale, étant donné qu'il avait été informé de ce que, à leur sortie de prison, un certain nombre d'anciens dirigeants de la DISK n'avaient pu retrouver d'emploi en raison de leurs liens avec cette organisation. Le comité note une fois de plus qu'au cours de sa mission le représentant du Directeur général a reçu de nouvelles plaintes et a recueilli des informations indiquant que les employeurs, et en particulier les ministères et les entreprises d'Etat, refusaient d'engager les anciens membres de la DISK ou de les réintégrer dans leurs fonctions. Attirant de nouveau l'attention de la commission d'experts sur cet aspect du cas, le comité rappelle au gouvernement qu'aux termes de l'article 1 de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, que la Turquie a ratifiée, les travailleurs doivent bénéficier d'une protection adéquate contre tous actes de discrimination tendant à porter atteinte à la liberté syndicale en matière d'emploi.

&htab;30.&htab;&htab;En ce qui concerne les conditions dans lesquelles les dirigeants de la DISK étaient détenus ainsi que les allégations de torture et de mauvais traitements dont le comité était saisi précédemment, ces questions sont en grande partie caduques du fait de la remise en liberté des dirigeants de la DISK (à l'exception de cinq d'entre eux) et des informations et assurances fournies par le gouvernement selon lesquelles il continue de prendre des mesures en vue de supprimer la torture et les mauvais traitements et de punir les personnes reconnues coupables de tels actes. Le comité espère que les autorités poursuivront leurs enquêtes au sujet des mauvais traitements officiellement portés à l'attention des autorités et du tribunal par les dirigeants de la DISK précédemment détenus et que des mesures appropriées seront prises pour punir les auteurs de ces actes.

&htab;31.&htab;&htab;Le comité note qu'au cours de sa mission le représentant du Directeur général a mené une enquête approfondie au sujet des biens de la DISK qui ont été confisqués lors de sa suspension et remis à des curateurs désignés par le tribunal du travail. Le comité note en particulier que, en tant que confédération, la DISK elle-même n'était propriétaire d'aucun immeuble, encore qu'elle possédât des liquidités provenant de cotisations syndicales accumulées, et que tous les immeubles et la plupart des liquidités appartenaient aux organisations qui lui sont affiliées. De toutes les informations que l'on possède maintenant, il semble ressortir que les biens restent à peu près intacts entre les mains d'un nouveau curateur récemment désigné et que la façon dont il en sera disposé en fin de compte dépendra des décisions que le tribunal militaire rendra finalement dans le procès contre la DISK et les organisations qui lui sont affiliées. Le comité observe toutefois qu'au cas où le tribunal viendrait à prononcer la dissolution de la DISK et des organisations qui lui sont affiliées, l'ensemble des biens serait remis au Trésor public (article 46 de la loi no 2821 sur les syndicats). Dans les cas impliquant la dissolution d'une organisation syndicale, le comité a seulement accepté que les biens de cette organisation soient répartis entre ses anciens membres ou remis à l'organisation qui lui succède [voir, par exemple, 110e rapport du comité (cas no 519) (Grèce), paragr. 82]. Dans le cas présent, le comité étant fermement convaincu que la suspension prononcée contre la DISK devrait être levée immédiatement et que cette organisation et ses dirigeants devraient recouvrer leurs pleins droits syndicaux, il s'ensuit que les organisations en question devraient être en mesure de mener leurs activités syndicales en pleine possession de leurs biens. Le comité escompte que des mesures seront prises en ce sens dès que les mesures de suspension auront été levées. En attendant, il exprime l'espoir que toutes les mesures nécessaires seront prises pour conserver et protéger les biens déposés entre les mains du curateur.

&htab;32.&htab;&htab;En ce qui concerne les allégations selon lesquelles la MISK aurait été suspendue et ses biens confisqués, le comité rappelle que le gouvernement a indiqué que cette organisation avait été pleinement rétablie dans ses droits syndicaux et que la suspension avait été levée. Le comité a demandé au gouvernement de confirmer que la MISK était maintenant en pleine possession de ses biens. Encore que le représentant du Directeur général n'ait pu entrer en contact avec la direction de la MISK au cours de sa mission, le gouvernement a confirmé que les biens de cette organisation, qui a maintenant repris ses activités, lui avaient été entièrement restitués. N'ayant pas de raison de douter qu'il en soit ainsi, le comité considère que cet aspect du cas n'appelle pas un examen plus approfondi.

&htab;33.&htab;&htab;En ce qui concerne les aspects législatifs du cas, le comité rappelle que, lors de ses derniers examens du cas en novembre 1983 et mai 1984, il a attiré l'attention du gouvernement sur les diverses dispositions des lois nos 2821 (sur les syndicats) et 2822 (sur la négociation collective, la grève et le lock-out) qui n'étaient pas conformes aux principes de la liberté syndicale. Plus précisément, le comité a indiqué que les dispositions suivantes de ces lois s'écartaient des principes de l'OIT concernant la liberté syndicale et a recommandé au gouvernement de faire des propositions au Parlement en vue de supprimer les divergences relevées.

1)&htab;Sur la loi no 2821 sur les syndicats:

-&htab;article 3: interdiction des syndicats d'entreprise;

- article 14: obligation d'avoir travaillé dix ans dans la profession pour être élu dirigeant syndical (qui correspond à l'article 51.7 de la Constitution), cinq années d'emploi à l'étranger pouvant être comptabilisées dans ce calcul;

- article 19: obligation, pour briguer un mandat syndical, de ne pas avoir été condamné pour violation de dispositions en matière de négociation collective et de grève;

- article 21: interdiction de s'affilier à un syndicat pour les personnes travaillant dans les institutions et écoles religieuses;

-&htab;article 25: l'affiliation prend fin avec le départ à la retraite;

- article 46: transfert des actifs d'une organisation dissoute au Trésor public.

2) Sur la loi no 2822 sur la négociation collective, la grève et le lock-out:

- article 12: nécessité de compter plus de 50 pour cent des travailleurs de l'unité de travail concernée pour négocier collectivement et de constituer au moins 10 pour cent du nombre de travailleurs de l'industrie de branche concernée;

- articles 13 et 14: nécessité d'obtenir une autorisation de négocier à chaque ouverture de nouvelles négociations;

- article 25: interdiction des grèves politiques, générales ou de solidarité, des ralentissements et résistance au travail (correspond à l'article 53 de la Constitution);

- article 31: l'exercice du droit de grève est temporairement réservé tant que l'état d'urgence et la loi martiale sont maintenus, ce qui est toujours le cas dans 54 provinces, soit la majeure partie du pays; - articles 52 à 55: instituant un arbitrage obligatoire en cas de grève illégale ou ajournée;

- article 72: sanctions pénales pour faits de grève pouvant aller jusqu'à 18 mois de prison;

- article 81: augmente les sanctions pénales ci-dessus de moitié en cas de récidive.

&htab;34.&htab;&htab;A cet égard, le comité a aussi noté que, dans son rapport de 1984, la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations a relevé, au sujet de l'application par la Turquie de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ratifiée par ce pays, que, pour des raisons qu'elle indiquait, l'article 12 de la loi no 2822, qui impose aux syndicats de compter 10 pour cent de membres dans l'industrie de branche et au moins 50 pour cent dans l'entreprise pour obtenir l'autorisation de négocier et conclure une convention collective, n'était pas conforme au principe de la libre négociation collective. La commission a aussi appelé l'attention, en particulier, sur les articles 13 et 14 de ladite loi (nécessité pour un syndicat d'obtenir une autorisation administrative avant de pouvoir négocier) et sur son article 33 (établissement d'une procédure d'arbitrage obligatoire dans certains cas) qui, à son avis, restreignaient le droit à la négociation collective volontaire établi à l'article 4 de la convention no 98.

&htab;35.&htab;&htab;Le comité voudrait tout d'abord souligner que l'application de la nouvelle législation doit être considérée dans le contexte du maintien en vigueur de la loi martiale dans 39 provinces (contre 54 en mai 1984) - y compris les principales villes industrielles comme Ankara, Istanbul et Izmir -, où la grève est interdite, sauf avec l'autorisation du commandant militaire provincial. En second lieu, il semble ressortir du rapport du représentant du Directeur général que, la seule fois où une autorisation de grève a été demandée dans une province (Istanbul) où la loi martiale est en vigueur, cette autorisation a en fait été accordée. Le comité note toutefois qu'il ne s'agissait pas dans ce cas d'un établissement très important et on peut se demander si une telle autorisation serait accordée au cas où une grève viendrait à être envisagée dans une branche d'activité primordiale.

&htab;36.&htab;&htab;Ainsi que le comité l'a déjà déclaré, l'application de la loi martiale est incompatible avec l'exercice des droits syndicaux. Le comité exprime l'espoir que les motifs à l'origine de l'application continue de la loi martiale cesseront bientôt d'exister, permettant ainsi sa levée dans les provinces où elle est encore en vigueur, de façon que les activités syndicales normales puissent reprendre sans restriction dans tout le pays.

&htab;37.&htab;&htab;Il ressort clairement du rapport du représentant du Directeur général que le principal problème concerne le droit de négociation collective et, plus particulièrement, les méthodes pratiques que les autorités ont instituées pour déterminer l'agent négociateur. Le comité est conscient du fait que, en provoquant une restructuration du mouvement syndical et en adoptant des critères pour la négociation collective (en vertu des articles 12 et 13 de la loi no 2822), le gouvernement cherchait, d'une part, à renforcer le mouvement syndical affaibli par la prolifération de petits syndicats morcelés et des pratiques de négociation chaotiques et, d'autre part, à faciliter la détermination du syndicat le plus représentatif aux fins de la négociation collective. Le processus de restructuration sur la base de la branche d'activité a entraîné une diminution du nombre des syndicats (tombé de plus de 900 à environ 120). Pour ce qui est de la détermination de l'agent négociateur sur la base des critères mentionnés à l'article 12 de la loi no 2822, ce sont les statistiques publiées par le ministère du Travail en janvier et en juillet de chaque année qui serviront à calculer si la proportion de 10 pour cent de travailleurs de la branche est respectée. L'effectif total de travailleurs de la branche et le nombre de membres de chaque syndicat de cette branche mentionnés dans ces statistiques feront foi aux fins de la négociation collective (article 12 de la loi no 2822).

&htab;38.&htab;&htab;S'il est vrai que, comme l'indique le rapport du représentant du Directeur général, des négociations collectives ont eu lieu dans diverses branches d'activité depuis janvier 1984 et que des conventions ont été conclues, il n'en est pas moins manifeste que de gros problèmes se posent en ce qui concerne la détermination de l'importance numérique des divers syndicats qui demandent à pouvoir négocier collectivement. Diverses plaintes ont été formulées en ce qui concerne les statistiques publiées par le ministère du Travail et, soutient-on, même le tribunal du travail - auquel ces litiges peuvent être déférés - est incapable de se prononcer, faute de données statistiques exactes. En outre, il semblerait qu'à diverses reprises le ministère du Travail n'ait pas délivré les certificats de compétence pour la négociation dans les six jours prévus par la loi (article 16) et que des mois s'écoulent parfois avant que le syndicat auquel la qualité d'agent négociateur a été reconnue reçoive ce certificat.

&htab;39.&htab;&htab;A ce sujet, le comité renvoie de nouveau aux commentaires que la commission d'experts a formulés en ce qui concerne les critères prévus par la loi pour la détermination de l'agent négociateur. En outre, il souligne que les dispositions pratiques actuelles pour la compilation et l'analyse des statistiques qui servent à établir si le critère de 10 pour cent est respecté ne semblent pas suffisantes et qu'il faudrait les améliorer sensiblement pour minimiser le risque d'erreur et éliminer toute possibilité d'abus.

&htab;40.&htab;&htab;Le comité espère que le gouvernement, en consultation avec les organisations de travailleurs et d'employeurs appropriées, s'emploiera le plus rapidement possible à résoudre ces problèmes pour faire en sorte que la détermination de la représentativité des syndicats aux fins de la négociation collective soit considérée par toutes les parties intéressées comme équitable et objective.

&htab;41.&htab;&htab;Attirant l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur ces considérations, le comité insiste de nouveau sur la nécessité de modifier diverses dispositions de la nouvelle législation, mentionnées plus haut, sur la structure, l'affiliation et les activités syndicales, qui toutes mettent en question la conformité de la législation avec les principes de l'OIT concernant la liberté syndicale.

Recommandations du comité

&htab;42.&htab;&htab;Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'approuver le présent rapport intérimaire et, en particulier, les conclusions suivantes:

a) Le comité souhaite remercier le gouvernement de la Turquie pour l'esprit de coopération dont il a fait preuve en acceptant qu'une nouvelle mission de contacts directs ait lieu et d'avoir accordé au représentant du Directeur général toutes les facilités dont il avait besoin pour s'acquitter de sa mission.

b) Le comité note que la loi martiale est encore en vigueur dans un grand nombre des 67 provinces du pays et que l'état d'urgence a été décrété dans quelques-unes des régions où la loi martiale a été levée. Il prie le gouvernement de fournir des informations concernant les effets de cette mesure sur les droits syndicaux, particulièrement en ce qui concerne le rôle des tribunaux du travail et le droit à la négociation collective.

c) Rappelant le principe selon lequel l'application de la loi martiale est incompatible avec l'exercice des droits syndicaux, le comité exprime l'espoir que les motifs à l'origine de l'application continue de la loi martiale cesseront bientôt d'exister, permettant ainsi sa levée dans les provinces où elle reste en vigueur, de façon qu'une activité syndicale normale puisse reprendre sans restriction dans tout le pays.

d) En ce qui concerne la situation de la DISK et de ses dirigeants, le comité se félicite de ce que la plupart des membres de la direction de la DISK et des organisations qui lui sont affiliées, y compris le président de la confédération, M. A. Bastürk, aient été libérés; il note toutefois avec regret que cinq dirigeants restent détenus, certains pour des chefs d'inculpation relatifs à l'exercice de leurs fonctions syndicales antérieures; il espère que les tribunaux se prononceront sans tarder sur ces chefs d'inculpation et que les intéressés seront libérés prochainement. e) En ce qui concerne le procès contre la DISK et les effets de la jonction à cette instance des autres procès intentés contre les organisations affiliées à la confédération, le comité exprime le ferme espoir que les procès ainsi joints aboutiront au maintien en liberté des intéressés, au rétablissement de la DISK dans sa capacité d'agir comme organisation syndicale et à la restitution de ses biens.

f) Le comité veut aussi espérer que, à la suite de la jonction des procès, tous les renseignements et les documents nécessaires pour assurer correctement la défense des accusés seront mis à la disposition des intéressés ou de leurs avocats, afin d'assurer le respect de la procédure régulière et de l'équité en faveur des personnes ainsi jugées.

g) Le comité exprime de nouveau l'espoir que des mesures seront prises ou que des instructions seront données en vue d'améliorer la situation en ce qui concerne la possibilité pour les avocats et les familles des détenus restants de rencontrer les intéressés.

h) En ce qui concerne l'interdiction expresse d'exercer des activités syndicales prévue par l'article 5 des dispositions transitoires annexées à la loi no 2821 sur les syndicats à l'encontre des dirigeants libérés de la DISK et des organisations qui lui sont affiliées, toutes suspendues, le comité estime que ces dispositions non seulement constituent une négation de la liberté syndicale, mais aussi sont en contradiction directe avec le principe selon lequel les syndicalistes, comme toutes autres personnes, doivent être présumés innocents jusqu'à ce que les accusations portées contre eux aient été prouvées; le comité demande instamment que l'article 5 des dispositions transitoires soit abrogé sans délai, de façon que les dirigeants syndicaux visés par cet article soient pleinement rétablis dans leurs droits syndicaux.

i) En ce qui concerne les actes allégués de discrimination antisyndicale à l'égard de dirigeants syndicaux antérieurement détenus, le comité rappelle qu'aux termes de l'article 1 de la convention no 98, que la Turquie a ratifiée, les travailleurs doivent bénéficier d'une protection adéquate contre tous actes de discrimination tendant à porter atteinte à la liberté syndicale en matière d'emploi; il attire de nouveau l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur cet aspect du cas.

j) En ce qui concerne l'allégation de torture et de mauvais traitements infligés aux dirigeants de la DISK pendant leur détention, le comité note les informations et les assurances fournies par le gouvernement selon lesquelles des mesures continuent d'être prises en vue d'éliminer la torture et les mauvais traitements et de punir les personnes reconnues coupables de tels actes; le comité espère que les autorités poursuivront leurs enquêtes au sujet des actes que les dirigeants de la DISK antérieurement détenus avaient officiellement portés à l'attention des autorités et du tribunal, et que des mesures appropriées seront prises pour punir les auteurs de ces actes. k) En ce qui concerne les biens de la DISK et des organisations qui lui sont affiliées, le comité espère que des mesures seront prises en vue de restituer leurs biens à ces organisations dès que la suspension prononcée contre elles aura été levée; en attendant, le comité exprime l'espoir que toutes les mesures nécessaires seront prises en vue de conserver et de protéger les biens qui se trouvent entre les mains du curateur.

l) Le comité considère que les allégations formulées antérieurement en ce qui concerne la MISK, qui semble avoir été rétablie dans ses droits syndicaux et s'être vu restituer ses biens, n'appellent pas un examen plus approfondi.

m) En ce qui concerne les aspects législatifs du cas, et plus particulièrement les dispositions de la loi no 2822 sur la négociation collective, le comité espère que le gouvernement, par des consultations organisées avec les représentants de travailleurs et d'employeurs, s'emploiera au plus vite à résoudre les problèmes que l'application de cette législation a posés, en particulier pour ce qui est de la détermination du syndicat le plus représentatif aux fins de la négociation et la délivrance des certificats de compétence pour la négociation; le comité attire aussi l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur cet aspect du cas.

n) Le comité note avec intérêt l'introduction d'une nouvelle législation du travail ainsi que la reprise du processus de la négociation collective. Il insiste cependant de nouveau sur la nécessité de modifier diverses dispositions de la nouvelle législation (loi nos 2821 et 2822) telles que mentionnées au paragraphe 33 ci-dessus concernant la structure, l'affiliation et les activités syndicales, qui toutes mettent en question la conformité de cette législation avec les principes de l'OIT en matière de liberté syndicale.

o) Le comité souligne que le Bureau international du Travail reste à la disposition du gouvernement pour toute aide que celui-ci pourrait demander à propos des questions soulevées dans le présent rapport.

Genève, 2 novembre 1984. (Signé) Roberto Ago, Président.
ANNEXE Rapport sur la mission de contacts directs effectuée en Turquie par William R. Simpson, chef du Service de la liberté syndicale, Département des normes internationales du travail I. Introduction

&htab;1.&htab;La mission décrite dans le présent rapport a eu lieu entre le 24 septembre et le 5 octobre 1984. C'était la troisième mission [deux missions avaient eu lieu, précédemment la première en juillet 1982 et la deuxième en septembre 1983] entreprise dans le cadre des procédures d'examen des plaintes concernant des violations alléguées de droits syndicaux par le gouvernement de la Turquie, présentées par la Confédération mondiale du travail, la Confédération internationale des syndicats libres et un certain nombre d'autres organisations syndicales (cas nos 997, 999 et 1029).

&htab;2.&htab;Ces cas ont été examinés par le Comité de la liberté syndicale du Conseil d'administration à plusieurs reprises depuis que les plaintes ont été présentées en 1980 et, le plus récemment, à la 226e session du Conseil d'administration en mai 1984. Le rapport intérimaire soumis par le comité au Conseil d'administration à cette occasion faisait suite à la réception de plusieurs communications émanant du gouvernement et contenant notamment ses observations sur les recommandations du Conseil d'administration concernant ces cas, ainsi qu'à une nouvelle communication d'une des organisations syndicales plaignantes. Parmi les recommandations du Comité de la liberté syndicale adoptées par le Conseil d'administration à ladite session certains aspects des cas se rapportant à la convention no 98 ont été soumis à l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations. La commission d'experts a traité de la question soulevée par la convention no 98 et d'autres questions annexes dans le rapport qu'elle a soumis à la Conférence internationale du Travail, lors de sa 70e session, en juin 1984.

&htab;3.&htab;Le rapport de la commission d'experts a été examiné par la Commission de l'application des conventions et recommandations de la Conférence internationale du Travail, à sa 70e session. Elle a pris note des informations détaillées fournies par le gouvernement de la Turquie au sujet de l'application de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ainsi que des différents points ayant été soulevés lorsqu'elle avait débattu de cette question. La commission a noté en particulier l'accord du gouvernement à une nouvelle mission de contacts directs, et elle a exprimé l'espoir que cette mission permettra des discussions détaillées sur les différentes questions soulevées par la commission d'experts. La commission a cependant noté avec préoccupation les problèmes soulevés par la commission d'experts et par le Comité de la liberté syndicale, et a exprimé l'espoir que les contacts directs aboutiront à des progrès afin de surmonter les difficultés rencontrées dans l'application de la convention no 98. Elle a aussi exprimé l'espoir que, l'année prochaine, la commission d'experts pourra noter que les amendements nécessaires auront été apportés pour tenir compte de ses observations et que les recommandations du Comité de la liberté syndicale seront rapidement et pleinement mises en oeuvre.

&htab;4.&htab;Des arrangements ont en conséquence été pris, par le truchement de la mission permanente de la Turquie à Genève et du Bureau du BIT à Ankara, afin que la mission ait lieu à partir de la dernière semaine de septembre 1984: je me suis donc rendu, en ma qualité de représentant du Directeur général, à Ankara et à Istanbul, pendant la période s'étendant du 24 septembre au 5 octobre. Pendant toute la durée de la mission, j'étais accompagné de M. Neville Rubin, fonctionnaire supérieur du Service de la liberté syndicale, et de M. John Murray, directeur du bureau du BIT à Ankara, ainsi que de M. Ruchan Isik, ancien professeur de droit de l'Université d'Ankara et actuellement fonctionnaire du BIT qui, comme il l'avait fait lors des occasions précédentes, s'est chargé d'organiser les réunions et a assuré l'interprétation du turc vers l'anglais.

&htab;5.&htab;La mission a bénéficié de l'entière coopération du gouvernement et a été en mesure de rencontrer librement toutes les autorités civiles et militaires qu'elle souhaitait, ainsi que les individus et les organisations de son choix. Elle désire transmettre l'expression de son appréciation au gouvernement de la Turquie qui lui a assuré toutes les facilités nécessaires pour permettre au représentant du Directeur général d'accomplir la mission qui lui était impartie et qui a fait preuve d'un réel esprit de coopération en acceptant qu'une telle mission ait lieu.

&htab;6.&htab;En vue d'examiner de la manière la plus complète possible les questions mentionnées dans les rapports du Comité de la liberté syndicale et de la commission d'experts, j'ai mis au point un programme de réunions dès mon arrivée à Ankara et j'ai été en mesure d'en informer sans tarder le gouvernement et, en particulier, le ministère des Affaires étrangères. Le programme prévoyait des réunions avec le ministre du Travail et de la Sécurité sociale, le Dr M. Kalemli, et avec le ministre de la Justice, M. N. Eldem, ainsi qu'avec le chef du Département des affaires judiciaires militaires, le général Edip Gultekin, et avec le président et les représentants de la Confédération des syndicats de travailleurs de Turquie (TURK-Is) et de la Confédération des syndicats des employeurs de Turquie (TISK). La mission a également pu rencontrer à Istanbul les membres du bureau exécutif de la Confédération des syndicats des travailleurs progressistes (DISK), et notamment son président, M. A. Bastürk, et son secrétaire général, M. F. Isiklar; et, à Ankara et à Istanbul, leurs avocats. De plus, la mission a assisté à une séance du procès des dirigeants de la DISK et des syndicats qui lui étaient affiliés, devant le tribunal militaire, dans l'enceinte de la prison Metris, à Istanbul. La mission n'a malheureusement pas été en mesure de rencontrer des représentants de la MISK, qui étaient absents d'Ankara au moment où l'entretien a été demandé. Une visite de courtoisie a été rendue au Représentant résident des Nations Unies à Ankara, M. Sarfraz Khan Malik.

&htab;7.&htab;Il ressort à l'évidence de l'examen précédent des cas concernant la Turquie que ceux-ci portent sur des points de fait et des points de droit. Les premiers se rapportent aux circonstances dans lesquelles se poursuivent le ou les procès des dirigeants syndicaux, et surtout de ceux de la DISK et des syndicats qui lui sont affiliés, ainsi que de questions connexes; appartient à la deuxième catégorie, la législation relative aux droits syndicaux et notamment la négociation collective et le droit de grève. La mission a consacré son attention à ces deux aspects, au sujet desquels elle a pu tenir compte de faits nouveaux et d'informations complémentaires ayant contribué à clarifier un certain nombre de questions préoccupantes.

II. La DISK et les procès de la DISK

&htab;8.&htab;En ce qui concerne les cas dont le comité est saisi, un sujet de préoccupation majeure est la poursuite des procès intentés aux syndicats associés à la DISK sur laquelle l'attention de la mission a été appelée à la fois par les dirigeants de la DISK et par les avocats les représentant, que la mission a pu rencontrer à Ankara et à Istanbul.

&htab;9.&htab;Le fait que les procès intentés contre les défendeurs soient encore en cours plus de quatre ans après leur arrestation est bien entendu en soi une cause de préoccupation bien que le degré de privation de liberté personnelle subi par les intéressés ait, dans une certaine mesure, été atténué puisque presque tous les détenus ont été libérés (voir ci-après, paragr. 14 et 15). Néanmoins, les poursuite initiales - y compris celles passibles de la peine de mort - sont maintenues et la complexité des cas a plutôt augmenté qu'autre chose.

&htab;10.&htab;Une des sources de cette complexité est le processus par lequel le nombre des inculpés a augmenté, par le biais de la jonction du procès initial des dirigeants de la Confédération DISK elle-même et des procès des dirigeants des syndicats affiliés à cette centrale. En tout, il y a quelque trente procès de ce genre dont neuf ont, à ce jour, fait l'objet d'une telle jonction. Il en est résulté que le nombre initial des personnes inculpées avec les dirigeants de la DISK est passé à 591 et pourrait, si le processus de jonction se poursuit, atteindre 2.000. Quelques-uns des avocats agissant pour le compte de la DISK et de ses syndicats affiliés n'ont pas une attitude tout à fait défavorable à l'égard de ce processus car, à leur avis, il leur permet d'étudier beaucoup plus d'éléments de preuve rassemblés contre la DISK et les activités qu'on lui impute. Des jonctions ont donc été demandées par des avocats agissant pour le compte de la DISK et, alors même que la mission était présente au tribunal, deux procès ont été joints pour faire droit à une telle demande.

&htab;11.&htab;L'élargissement des questions faisant l'objet du ou des procès est toutefois source de situations nouvelles qui doivent être prises en compte par les inculpés et par leurs représentants. Tout d'abord, le nombre des juges devant statuer a maintenant été porté de trois à cinq. En deuxième lieu, les données sur lesquelles les inculpations sont fondées sont de plus vaste portée et, selon les avocats de la DISK, portent sur quelque seize différentes catégories d'activités qui, selon le Procureur militaire, motiveraient les accusations d'actes inconstitutionnels et criminels portés contre la DISK elle-même, contre ses affiliés et contre les individus inculpés. Parmi les allégations sur lesquelles les inculpations sont fondées, figurent certaines qui se rapportent notamment aux éléments de preuves suivants: déclarations figurant dans les documents de base relatifs à la création et au fonctionnement de la DISK, ainsi que dans diverses publications; résolutions adoptées par divers organes des organismes inculpés; activités telles que celles qui portent sur la formation et diverses réunions organisées ou parrainées par les organismes inculpés; sans compter les grèves qui sont considérées comme ayant eu un caractère politique ou comme étant de toute autre façon entachées d'illégalité. Selon les avocats de la DISK, les questions mentionnées portent sur des faits qui se sont produits pendant la période allant de 1970 à 1980, date à laquelle la DISK a été dissoute et ses dirigeants ainsi que ceux de ses affiliés ont été arrêtés. Un autre facteur dont il convient de tenir compte à cet égard est le volume énorme d'éléments de preuves qui doivent être étudiés et auxquels, selon les avocats de la défense, ceux-ci n'ont pas toujours accès, ou qu'ils ne peuvent pas toujours obtenir de manière à leur permettre de préparer leurs dossiers convenablement. Ainsi, à leur avis, les documents qui avaient été confisqués aux syndicats affiliés pour être utilisés contre eux dans les procès qui leur étaient intentés constituaient des éléments de preuves contre les défendeurs de la DISK, et ils avaient en conséquence demandé à la Cour d'avoir accès à ce matériel; cette demande avait, selon ce qui a été dit à la mission, été rejetée lors d'une audience en date du 26 septembre, et la question pourrait bien faire l'objet d'un recours qui, s'il était admis, pourrait entraîner le renvoi de la question, pour réexamen, devant le tribunal chargé du procès.

&htab;12.&htab;Comme nous l'avons déjà indiqué, la mission a été en mesure d'assister à une séance du procès et elle a pu constater que les garanties de procédure étaient respectées. Cela a été confirmé par les avocats de la défense qui ont en outre indiqué que la tension qui avait caractérisé les phases antérieures de la procédure - surtout pendant la période ayant précédé la mise en liberté de la grande majorité des inculpés - avait en grande partie été atténuée.

&htab;13.&htab;Il convient néanmoins d'observer que l'effet cumulatif des situations nouvelles déjà mentionnées en liaison avec la jonction des procès et l'accroissement du nombre des accusés et de la complexité des questions qui en est résulté risque fort d'allonger la procédure. Un des avocats de la défense a indiqué que le processus de jonction à lui seul risque de prendre jusqu'à un an pour être mené à terme et que le procès pourrait s'étaler en tout sur quatre ans et durera probablement au moins deux ans. Si rien, dans la manière dont les procès sont menés, ne reflète un encouragement officiel de mesures dilatoires, le fait que les inculpés risquent d'avoir été en péril pendant un total de six à huit ans avant d'arriver au terme de leur procès est une source inévitable d'inquiétude supplémentaire sur le double plan de la persistance de la suspension des activités syndicales des organisations et des individus poursuivis devant les tribunaux et du préjudice subi par ces derniers et par leur famille.

&htab;14.&htab;A ce sujet, il convient de noter que la situation des inculpés s'est nettement améliorée puisque presque tous ont été mis en liberté au cours de cette année, la libération la plus récente ayant été celle du président de la DISK, M. A. Bastürk, qui a eu lieu peu de temps avant l'arrivée de la mission par suite d'une décision de la Cour suprême agissant sur intervention du ministre de la Justice en vertu d'une procédure constitutionnelle spéciale qui entre dans ses prérogatives exclusives. En fait, le tribunal militaire, statuant sur les chefs d'accusation liés au procès de la DISK, avait précédemment ordonné sa mise en liberté, mais il avait été maintenu en prison au titre d'une autre inculpation concernant une publication illégale. Agissant en vertu d'une disposition constitutionnelle relative au principe de l'égalité devant la loi, le ministre a présenté sa demande après que le Procureur militaire ait refusé de le faire, et l'a fondée sur le motif que les quatre années déjà passées en prison par M. Bastürk dépassaient la sanction dont il était passible pour la deuxième accusation.

&htab;15.&htab;Cinq des inculpés initiaux de la DISK sont encore en prison; comme pour M. Bastürk, ils sont retenus pour des délits qui ne seraient pas liés à leurs activités au nom de la DISK. Mais cette argumentation est contestée par les avocats de la DISK, qui ont déclaré lors d'un entretien avec la mission que, dans trois de ces cas au moins, les délits qui leur sont reprochés concernent des activités syndicales ou la possession de biens syndicaux (plus expressément le non-paiement de droits de douane sur une automobile offerte à un syndicat affilié à la DISK par une organisation syndicale internationale).

&htab;16.&htab;La mission a largement bénéficié de la possibilité de rencontrer les inculpés et leurs avocats. Certaines des informations qui lui ont été communiquées à ces réunions ont déjà été mentionnées, et d'autres le seront par la suite en fonction de leur pertinence. A Istanbul, elle a aussi pu s'entretenir longuement avec M. Bastürk et les autres membres du bureau exécutif de la DISK, dans l'étude d'un des avocats de cette centrale.

&htab;17.&htab;M. Bastürk et les autres membres du bureau exécutif de la DISK ont clairement exposé à la mission un certain nombre de leurs préoccupations; ils ont, dans le même temps, indiqué combien ils comprenaient le rôle de l'OIT dans le cas turc et appréciaient ce qui avait été fait jusqu'alors. Ils ont eu l'occasion de voir et d'étudier le rapport concernant la Turquie que le Comité de la liberté syndicale a soumis au Conseil d'administration à sa session de mai 1984 et ils ont souhaité clarifier et discuter certains points.

&htab;18.&htab;Le bureau exécutif de la DISK a attiré l'attention sur le fait que le procès de la DISK n'était plus isolé par suite de la jonction avec les procès des organisations syndicales qui lui étaient affiliées. Il a mentionné la probabilité de nouvelles jonctions et, partant, la possibilité de voir en définitive le nombre des défendeurs atteindre plus de 2.000. Il a toutefois souligné que la peine de mort était toujours requise contre 76 personnes (celles qui étaient inculpées dans le procès initial de la DISK), bien que les sanctions requises contre les autres inculpés aillent de 6 ans et 8 mois à 20 ans de prison.

&htab;19.&htab;Le bureau exécutif de la DISK a en outre souligné qu'il était fermement convaincu que ce n'étaient pas exclusivement les membres de la DISK qui étaient poursuivis mais la centrale elle-même. A son avis, le rapport du BIT était entaché d'une certaine confusion sur ce point, et ceci appelait une clarification.

&htab;20.&htab;Une autre question que le bureau exécutif de la DISK voulait clarifier était l'attitude de celle-ci à l'égard du terrorisme. Il voulait préciser très nettement que ni la DISK ni les défendeurs à titre individuel ressortissant à la DISK ne s'étaient engagés dans un terrorisme de quelque type que ce soit et que l'attitude de la DISK à l'égard du terrorisme avait été énoncée dans ses publications et transparaissait au travers de sa participation aux protestations démocratiques contre le terrorisme, dont elle avait elle-même été victime. Le bureau exécutif a ajouté qu'il lui semblait aussi nécessaire d'éliminer l'élément de confusion qui entourait le mot turc figurant dans sa dénomination qui avait parfois été traduit à tort par "révolutionnaire" et dont la traduction exacte était "progressiste". Force lui était de croire qu'une telle confusion avait été intentionnelle puisque ce mot est couramment utilisé dans l'acception qui est la leur et qu'il a même été employé dans ce sens dans la première Constitution de la République turque.

&htab;21.&htab;Le bureau de la DISK a témoigné d'un vif désir de voir appliquer les libertés et les droits syndicaux tels qu'ils ressortent de la Constitution et des principes de l'OIT. D'accord avec l'appréciation critique formulée par l'OIT au sujet des restrictions apportées aux droits et libertés syndicaux par la législation turque relative aux syndicats et à la négociation collective, aux grèves et aux lock-out, il souhaitait toutefois appeler l'attention de la mission sur des points supplémentaires. Le premier concerne l'effet de la mesure transitoire figurant à l'article provisoire 5 de la la loi no 2821 sur les syndicats, qui a suspendu les activités syndicales. Un demi-million de membres de la DISK étaient en fait punis par l'application de cette disposition en vertu de laquelle les syndicats étaient fermés et les activités syndicales interdites, tout simplement parce qu'un petit nombre de membres du bureau exécutif de la DISK étaient injustement poursuivis. De même, l'interdiction faite par les articles 5 et 14 de la loi sur les syndicats aux personnes condamnées pour des crimes d'exercer des fonctions syndicales empêche 2.000 syndicalistes expérimentés de la DISK de participer à des activités syndicales pour le restant de leur vie. Le bureau exécutif de la DISK a dit à la mission que ces deux dispositions devraient être abrogées.

&htab;22.&htab;Le porte-parole de la DISK, M. Bastürk, a aussi appelé l'attention sur la différence de traitement dont a bénéficié la MISK, qui a obtenu l'autorisation de reprendre l'exercice de ses activités et dont les membres n'ont pas fait l'objet d'inculpations alléguant une participation au terrorisme, bien que la presse ait fait état de l'explosion d'une bombe en cours de fabrication au siège de la MISK. La DISK, qui n'a jamais pris part à des activités illégales, devrait, a-t-il indiqué, jouir de la même possibilité que la MISK de reprendre ses activités.

&htab;23.&htab;Le bureau exécutif de la DISK a, pour conclure l'exposé de son point de vue à la mission, observé que les biens de la DISK et des syndicats qui lui étaient affiliés étaient administrés par des curateurs qui avaient mis en vente des avoirs, terrains et bâtiments sans autorisation des propriétaires légitimes, à savoir les syndicats et les travailleurs. De la même façon, il a souhaité appeler l'attention sur le fait que les membres du bureau exécutif n'avaient pas perçu de salaires et que des arriérés de salaires accumulés leur restaient dus.

&htab;24.&htab;La mission s'est efforcée, à plusieurs reprises, d'obtenir des informations exactes concernant les avoirs de la DISK et la manière dont ils étaient gérés. Au début de la mission, le sous-secrétaire adjoint du ministère du Travail et de la Sécurité sociale lui a indiqué que, lorsque la DISK avait été suspendue, elle ne possédait aucunes liquidités, mais que le système de retenue des cotisations à la source avait continué d'être appliqué pour les membres jusqu'à l'expiration des conventions collectives dont beaucoup avaient en fait été prorogées par le Conseil d'arbitrage supérieur pendant la période précédant la reprise de la négociation collective. En conséquence, la DISK a maintenant à son crédit 3 milliards de livres turques (soit environ 7,5 millions de dollars des Etats-Unis). Le sous-secrétaire adjoint a aussi fourni à la mission les noms des curateurs précédents et actuels et a déclaré qu'à son avis rien n'empêchait la mission de discuter d'autres questions avec ces derniers. C'est ce que la mission a essayé de faire et elle est arrivée à obtenir un rendez-vous avec le curateur, dans son bureau, à l'ancien siège de la DISK à Istanbul. Malheureusement, il ne lui a pas été possible d'obtenir d'informations utiles de la part du curateur car il n'était entré en fonctions qu'une semaine auparavant et qu'il ne se sentait pas autorisé à fournir des précisions concernant les avoirs de la DISK à qui que ce soit d'autre que le tribunal militaire. Le curateur a aussi refusé de fournir des informations sur la nature de ses pouvoirs ou du mandat qui aurait pu lui être donné; sur ces points, il a renvoyé la mission aux dispositions du Code civil turc. Vers la fin de la mission, cette question a été soulevée une fois de plus lors d'un entretien avec le représentant du Haut-commandement militaire, le général Gültekin, qui a proposé de fournir des informations en la matière à la mission. La mission a reçu ces informations le matin du jour de son départ définitif d'Ankara; les renseignements fournis ne traitaient pas des questions que la mission avait soulevées: au lieu, ils fournissaient des précisions concernant la mauvaise gestion financière alléguée dont se seraient rendus coupables les responsables de la DISK et ceux des syndicats affiliés à cette centrale pendant la période précédant le 11 septembre 1980.

&htab;25.&htab;Pendant ce temps, la mission avait eu connaissance d'un certain nombre d'exemples précis d'allégations d'utilisation abusive, par les curateurs, des avoirs de la DISK et de ses syndicats affiliés, qui venaient s'ajouter à ceux auxquels se référait la déclaration dont il a déjà été fait état au paragraphe 23. Ainsi, bien que les avocats de la DISK n'estiment ne pas avoir disposé du temps ou des facilités suffisants pour examiner de façon complète et approfondie les comptes mensuels soumis par le curateur au tribunal militaire, ils ont allégué les exemples suivants de mauvaise gestion: 1) Un centre de formation qui appartenait à Maden-Is (mineurs) et qui avait aussi été employé en tant que centre de loisirs et de vacances pour les membres du syndicat avait été loué, moyennant un loyer modique, à une exploitation agricole d'Etat qui le jouxtait. En outre, un des membres du bureau exécutif de la DISK a allégué qu'un protocole annexé à l'acte de location accordait au locataire un droit de présomption pour l'achat de cette propriété. 2) Un grand nombre de voitures automobiles appartenant à la DISK et aux syndicats qui lui sont affiliés avaient tout d'abord été laissées à l'abandon puis vendues à l'encan. 3) Le curateur a mis fin au contrat d'emploi des salariés et des responsables élus de la DISK en 1981, soit un an après leur emprisonnement. Les avocats de la DISK se sont opposés par écrit à ces mesures indiquant que le curateur n'avait pas droit de les prendre puisqu'il s'agissait de responsables élus. Ils ont reçu une réponse admettant le bien-fondé de leur position mais, dans la pratique, aucun salaire n'a été versé aux salariés ou aux responsables en question depuis la date à laquelle il a été mis fin à leurs contrats.

&htab;26.&htab;La mission a eu l'occasion de discuter des conditions d'incarcération avec d'anciens détenus qui sont des défendeurs dans le procès de la DISK et ses syndicats affiliés lors d'une réunion convoquée à cet effet par un des avocats de la DISK à Ankara. Le bureau exécutif de la DISK avait aussi soulevé cette question, indiquant expressément qu'à son avis les cinq défendeurs n'ayant pas encore été remis en liberté devraient être transférés hors des prisons militaires telles que Sagmalcilar-Bayrampasa Cezaevi. Les avocats de la DISK ont aussi fait savoir à la mission qu'aucun changement n'était survenu pour améliorer la situation des défendeurs en ce qui concerne les possibilités de recevoir leurs avocats et leur famille.

&htab;27.&htab;Tous les anciens détenus que la mission a rencontrés avaient été mis en liberté au cours des deux semaines qui ont précédé d'environ un mois l'arrivée de la mission. Aucun d'entre eux n'avait passé moins de deux ans et demi en prison, tout d'abord à Davutpasa puis à Metris, après une période initiale de détention policière. Tous ont déclaré avoir eu les yeux bandés pendant les premiers interrogatoires et, bien qu'aucun d'entre eux n'ait été soumis à une torture à l'électricité, ils savaient bien qu'un de leurs collègues avait subi un tel traitement et que d'autres avaient été battus sur la plante des pieds. Quelques-uns d'entre eux avaient toutefois eux aussi été battus lors d'un interrogatoire: on les avait mis face au mur afin qu'ils ne puissent pas reconnaître ceux qui leur donnaient les coups. Ces mauvais traitements remontaient aux premières étapes de leur interrogatoire et ne s'étaient pas reproduits après leur transfert à Davutpasa et à Metris. Ils avaient cependant subi d'autres formes de mauvais traitements pendant qu'ils étaient à Metris. Ainsi, pendant l'hiver, en attendant d'être emmenés au tribunal, ils avaient à maintes reprises été contraints d'attendre dehors dans le froid sans vêtements protecteurs pendant trois à quatre heures; ils avaient été privés de livres ou de journaux pendant l'année précédant leur libération et n'avaient pas obtenu la restitution de tous leurs effets personnels lors de leur libération.

&htab;28.&htab;Les anciens détenus ont dit à la mission que leur situation n'avait été que très peu modifiée après la visite des fonctionnaires du BIT en 1983; en fait, à certains égards, elle avait empiré: ainsi, quelques prisonniers avaient été transférés du deuxième étage de la prison au sous-sol, qui était humide, et le nombre des détenus par cellule, qui était de onze à douze, avait été augmenté à quatorze à seize. Peu avant l'arrivée de la précédente mission du BIT à la prison, une fouille très méticuleuse avait eu lieu, au cours de laquelle la totalité des publications ainsi que des documents - dont quelques-uns étaient nécessaires à leur défense - leur avaient été retirés. Le directeur de la prison n'avait pas rencontré les prisonniers comme il avait promis de le faire mais un représentant de chaque cellule avait été autorisé à discuter de leurs doléances avec un agent subalterne de la prison. Ils n'avaient pas été satisfaits des soins médicaux qui leur étaient assurés; un d'entre eux, présent à la réunion, qui avait eu besoin d'examens radiodiologiques, aurait dû, pour pouvoir se faire radiographier, accepter d'être emmené enchaîné à l'hôpital, ce qu'il avait refusé. Les avocats de la DISK ont fait savoir à la mission que l'on n'avait rien changé au temps qui leur était accordé pour voir leurs clients ni au temps alloué aux visites des familles.

&htab;29.&htab;Les membres du bureau exécutif de la DISK ainsi que les autres anciens détenus ont, les uns et les autres, fait état de mesures vexatoires de gravité diverse, que quelques-uns d'entre eux avaient dû subir, ainsi que d'une discrimination en matière d'emploi dont quelques-uns d'entre eux avaient fait l'objet. En particulier, les membres du bureau exécutif de la DISK ont appelé l'attention sur les répercussions des accusations formulées à leur encontre auprès des tribunaux civils, alléguant une mauvaise gestion des biens immobiliers ou des fonds syndicaux, et notamment donnant à penser qu'ils n'avaient pas payé les droits de douane voulus sur des voitures venues de l'étranger et offertes aux syndicats considérés par des organisations syndicales internationales. Les autorités policières locales avaient exigé de plusieurs anciens prisonniers qu'ils se présentent au poste régulièrement, voire quotidiennement, et qu'ils signalent à la police tout changement d'adresse ou qu'ils la préviennent de toutes mesures qu'ils comptaient prendre pour se déplacer localement. (La mission a, d'un autre côté, appris du général Gültekin que tous les inculpés avaient été privés de leur passeport et du droit de quitter le pays.)

&htab;30.&htab;En ce qui concerne les questions d'emploi, la mission a appris qu'un seul des onze anciens détenus présents à la réunion d'Ankara avait pu reprendre son ancien travail. Un autre, qui avait précédemment travaillé pour le Département des affaires villageoises au ministère de l'Agriculture, de la Sylviculture, des Coopératives et des Affaires villageoises, avait demandé à être engagé à nouveau, mais s'était fait dire qu'il avait été mis fin à son contrat deux ans auparavant. Il lui avait été impossible d'obtenir une indemnité de son ancien employeur qui lui a fait comprendre à mots couverts que s'il n'avait pas été réengagé c'était notamment en raison de son inculpation. Il a également été signalé à la mission que l'article 29 de la nouvelle loi sur les syndicats avait été cité dans les cas de plusieurs anciens détenus à qui on avait refusé un travail: cet article prive un ancien responsable syndical du droit d'être réengagé s'il a été condamné pour un délit se rapportant à ses activités syndicales, alors que - ce fait a été relevé - dans le cas des défendeurs aux procès de la DISK et des syndicats qui lui étaient affiliés aucune condamnation n'avait encore été prononcée. Il a en outre été signalé que tous les anciens détenus avaient été priés d'obtenir du Procureur civil une attestation déclarant que le détenteur répondait aux conditions lui donnant le droit d'être recruté mais que la responsabilité en incombait à l'employeur; cela n'avait été d'aucune utilité et avait en fait servi à signaler que les personnes intéressées étaient d'anciens membres de la DISK. Un exemple précis a aussi été donné par l'un des anciens détenus d'un cas dans lequel un employeur du secteur privé, ayant eu un entretien avec lui pour pourvoir à un emploi de dessinateur technique, lui avait dit qu'il avait les qualifications requises pour occuper cet emploi mais qu'il ne serait pas recruté en raison de ses antécédents.

III. La législation et les questions connexes

&htab;31.&htab;Pendant toutes les discussions qu'elle a eues à Ankara et à Istanbul avec des organisations de travailleurs et d'employeurs et, en particulier, avec le ministère du Travail et de la Sécurité sociale, la mission avait bien conscience de la nécessité d'obtenir des informations à jour sur la législation relative aux droits et aux activités syndicaux et à la manière dont ses dispositions étaient mises en oeuvre.

&htab;32.&htab;Bien que les deux principaux textes législatifs portant sur les questions du travail - à savoir la loi no 2821 sur les syndicats et la loi no 2922 concernant la négociation collective, les grèves et les lock-out - soient intégralement entrés en vigueur depuis le début de 1984, il apparaît clairement que leur application se poursuit alors même que la loi martiale est maintenue dans de nombreuses parties de la Turquie, y compris les principales villes et les zones présentant une importance industrielle. Selon des informations que la mission a obtenues de sources officielles, la loi martiale a, en fait, été maintenant levée dans 18 provinces (soit cinq de plus qu'au moment de l'examen du présent cas par le Comité de la liberté syndicale en mai 1984); elle reste en vigueur dans 39 provinces et, dans dix autres, l'état d'urgence a été proclamé.

&htab;33.&htab;Les restrictions aux droits syndicaux que le comité avait relevées précédemment sont donc maintenues dans la plus grande partie du pays, surtout en ce qui concerne le droit de grève: en d'autres termes, comme on l'a répété à plusieurs reprises à la mission, aucune grève ne peut avoir lieu dans une zone soumise à la loi martiale sans l'autorisation préalable du Commandant de la région chargé de l'application de la loi martiale. A en juger par les avis que les organisations d'employeurs et de travailleurs ont exposés à la mission et que le gouvernement (les autorités à la fois civiles et militaires) a confirmés, l'intention qui sous-tend cette disposition est de restreindre à la fois les possibilités de déclencher des grèves et les répercussions de celles-ci. Il a été déclaré à plusieurs reprises que l'expérience acquise lors de la mise en oeuvre des précédentes lois sur le travail montre qu'il y avait eu des grèves beaucoup trop nombreuses, qui s'étaient poursuivies pendant des périodes beaucoup trop longues et qui, partant, avaient été cause de désorganisation et qu'il y avait eu une tendance - que d'aucuns ont décrites comme étant une hypothèse de départ - à considérer le recours à la grève comme étant le seul moyen de résoudre les conflits du travail.

&htab;34.&htab;Néanmoins, le représentant du pouvoir militaire a indiqué à la mission que, dans l'utilisation de son pouvoir d'accorder ou de refuser l'autorisation de grève, le Haut-commandement militaire n'appliquait aucune politique globale: ces questions étaient laissées à la discrétion de chaque commandant chargé de la mise en oeuvre de la loi martiale qui n'avait, pour seul principe général ou ligne directrice à suivre, que la nécessité de tenir compte, dans sa décision, de questions se rapportant à la sécurité nationale.

&htab;35.&htab;Un autre point de vue, auquel soucrit bon nombre des représentants que la mission a rencontrés, est que le nouveau système, établi par les deux lois et fonctionnant dans le contexte de la loi martiale, était d'application récente et qu'il était trop tôt pour émettre un jugement valable - sur la mesure dans laquelle il a permis de s'écarter du système précédent, ou sur son harmonisation avec les normes internationales. En ce qui concerne l'autorisation de déclencher une grève, par exemple, il n'y avait eu jusqu'alors qu'un seul cas de demande d'autorisation présentée aux militaires; elle avait, en fait, été soumise à Istanbul peu avant l'arrivée de la mission en Turquie. Il s'agissait d'une demande émanant d'un syndicat de la branche d'activité des chantiers navals, qui désirait faire grève à la suite de l'échec des tentatives de règlement d'un conflit du travail surgi dans un certain nombre de petites entreprises. L'autorisation a été accordée, et la grève devait commencer le 2 octobre 1984. Aucune des personnes rencontrées par la mission, qu'elles viennent des milieux des travailleurs ou des employeurs, n'accordait une grande importance à cette grève: le nombre total des travailleurs qui y auraient participé était de 57; les travailleurs d'une des entreprises en cause n'avaient, selon ce qui a été dit, pas touché leur salaire pendant les cinq mois précédant la grève; de plus, certains ont laissé entendre que la quasi-insolvabilité de l'entreprise ou des entreprises en cause aurait pu même les inciter à accueillir la grève avec soulagement. De toute façon, il a semblé à la mission que nul n'était disposé à établir une prédiction quelconque sur l'avenir de l'exercice du droit de grève: le pouvoir militaire, parce qu'il se contentait de traiter de la question cas par cas; la plupart des autres personnes rencontrées, parce qu'elles estimaient qu'il était trop tôt pour se prononcer ou parce qu'il n'était pas sûr que les négociations collectives ou les décisions des commandants chargés de l'application de la loi martiale s'ordonnent en un schéma cohérent.

&htab;36.&htab;Nous avons déjà appelé l'attention, lorsque nous avons parlé de la déclaration que le bureau exécutif de la DISK a faite à la mission, sur les restrictions apportées aux activités syndicales par les dispositions transitoires adoptées en liaison avec la loi no 2821 sur les syndicats. La mission a été en mesure d'obtenir le texte de ces dispositions. Elles prévoient que les organisations syndicales dont les activités ont été suspendues par le Conseil de la sécurité nationale ou par un commandant chargé de l'application de la loi martiale, après la date du 11 septembre 1980, ainsi que les fédérations et les confédérations constituées par ces organisations n'ont pas le droit - si elles-mêmes ou l'un quelconque des membres de leur comité directeur ou de leurs organes d'inspection ont été poursuivis par l'Etat pour avoir commis l'un quelconque des actes contre l'Etat spécifiés au chapitre 1 du volume II du Code pénal - de jouir des droits syndicaux accordés par la présente loi ni d'entreprendre des activités syndicales tant qu'une décision judiciaire d'acquittement n'a pas été rendue. Aucune cotisation ne peut être levée auprès des membres de telles organisations syndicales. Les membres enregistrés de ces organisations ont le droit de s'en retirer par voie de préavis écrit adressé aux curateurs et à leurs employeurs. Le Comité de la liberté syndicale voudra sans doute étudier ces dispositions à la lumière des principes de l'OIT concernant la liberté syndicale et le droit d'organisation.

&htab;37.&htab;Pour ce qui a trait à la négociation collective, il est apparu clairement à la mission qu'il existe une nette différence entre la situation qui lui a été décrite et celle qu'elle avait constatée précédemment, puisque la négociation collective a maintenant lieu sur une large échelle. Aucun chiffre n'a été fourni à la mission à ce sujet, mais des informations obtenues auprès des trois partenaires sociaux donnent à penser que des conventions collectives ont déjà été conclues ou sont en cours de négociation, et ce dans les secteurs public et privé; et que ces conventions sont applicables à des effectifs importants de travailleurs.

&htab;38.&htab;Les fonctionnaires du ministère du Travail et de la Sécurité sociale et les représentants des organisations d'employeurs ont précisé à la mission que les dispositions relatives à la reconnaissance des syndicats et à l'autorisation de négocier des conventions collectives visaient à créer des mécanismes grâce auxquels le nombre des syndicats serait réduit et le processus de la négociation collective moins fragmentaire. Dans la pratique, cela a, au moment où la mission a eu lieu, abouti à faire tomber à 120 le nombre des syndicats qui s'élevait précédemment à 930. Le représentant de la TISK a fait observer à la mission que cela signifiait qu'il y avait encore, en moyenne, quelque chose comme cinq syndicats enregistrés pour chacune des vingt-huit branches d'activité économique; et, qu'à son avis, c'était encore trop. Un autre représentant des employeurs que la mission a rencontré a été toutefois d'avis que l'existence d'une multiplicité de syndicats n'était pas nécessairement défavorable à la négociation et pouvait même présenter certains avantages.

&htab;39.&htab;L'attention de la mission a été appelée sur l'existence de restrictions pesant sur la mise en oeuvre des dispositions pertinentes de la loi no 2822 sur la négociation collective, les grèves et les lock-out. Il s'agit en particulier, d'une allégation formulée par les représentants de la TURK-Is, qui ont indiqué que la manière dont les articles 12 et 13 de la loi étaient mis en application suscitait un certain nombre de difficultés. Ces articles ont trait à la procédure d'accréditation à deux étages imposée à un syndicat pour obtenir le droit de négocier collectivement au niveau de l'entreprise - la loi telle qu'elle est actuellement appliquée n'offre aucune latitude à une négociation au niveau de l'ensemble de la branche d'activité économique - et à l'obligation faite à un syndicat de prouver qu'il représente au moins 10 pour cent de la main-d'oeuvre de l'ensemble de la branche d'activité ainsi que plus de 50 pour cent des effectifs du lieu de travail pour lequel il cherche à être accrédité. La TURK-Is a cité, parmi les difficultés suscitées jusqu'alors par l'application de ce système, un certain nombre de différends portant sur l'exactitude des chiffres présentés par les syndicats concernant leurs effectifs et ayant abouti à des recours devant les tribunaux du travail. Néanmoins, de l'avis de la TURK-Is, l'action de ces tribunaux était entravée par l'inexactitude et l'inaccessibilité des données sur lesquelles le ministère du Travail fonde ses statistiques ainsi que par certains problèmes dus à l'utilisation de l'ordinateur. (Un représentant des employeurs a, lui aussi, critiqué les résultats des calculs relatifs à la main-d'oeuvre faits par l'ordinateur, lors d'un entretien avec la mission.) Il a été suggéré que cette incertitude avait notamment incité les tribunaux à rendre une décision aux termes de laquelle, lorsque les exigences relatives aux effectifs par branche d'activité économique (à savoir 10 pour cent) semblaient avoir été remplies, il n'était plus nécessaire d'étudier de façon détaillée les chiffres précis relatifs au nombre des membres; ce qui, à son tour, avait débouché sur une situation dans laquelle les chiffres officiels ne pouvaient pas être étudiés et dans laquelle l'accréditation avait été obtenue par des syndicats dont la propre évaluation de leurs effectifs était fondée sur des chiffres dépassés ou inexacts. Le problème était encore, avaient suggéré les tenants de cette thèse, compliqué par la disposition du troisième paragraphe de l'article 12 de la loi qui prévoit que "la compétence d'un syndicat de travailleurs au bénéfice d'une accréditation ne sera pas mise en cause par des statistiques publiées ultérieurement". En tout et pour tout, au moment où la mission a eu lieu, les tribunaux ont été saisis de 48 cas portant sur cette question: deux d'entre eux ont été rejetés, neuf admis et trente-sept n'ont pas été examinés, étant donné que l'exigence des 10 pour cent n'était pas en cause. La TURK-Is s'est aussi plainte du retard - parfois de plusieurs mois - que les autorités du travail ont mis à délivrer les accréditations, alors que l'article 16 de la loi leur impartit un délai de six jours.

&htab;40.&htab;La mission a saisi l'occasion, lors de sa dernière réunion avec des fonctionnaires du ministère du Travail et de la Sécurité sociale, d'appeler l'attention sur quelques-unes des questions dont elle avait eu connaissance au sujet de la législation et sur l'opportunité d'étudier quelque peu la possibilité de modifier les dispositions mises en cause, et surtout celles qui se rapportent à l'agent négociateur. Ses interlocuteurs lui ont répondu que le ministère était conscient des difficultés qu'a pu susciter l'établissement des statistiques, mais qu'il fallait espérer que ces difficultés pourraient être réglées avec le temps grâce à l'acquisition de compétences spécialisées additionnelles et à une plus grande expérience du fonctionnement du système dans son ensemble. Ils ont quelque peu insisté sur le fait que l'on n'avait disposé que de dix mois pour juger de l'efficacité des nouvelles dispositions et qu'il faudrait davantage de temps avant d'aboutir à une conclusion définitive sur les modifications qui pourraient s'imposer. Le gouvernement a toutefois déclaré que, s'il est convaincu que quoi que ce soit dans la législation du travail est contraire aux intérêts des travailleurs ou affecte les conditions de travail, il le modifiera. Ce faisant, il se devra de tenir dûment compte de l'expérience du passé, et notamment des déficiences qui ont entaché le système d'avant 1980 et qui se sont traduites par la perte de plus de 7,6 millions de journées/homme pour fait de grève rien que pendant les années 1979-80, ainsi que des objectifs primordiaux que sont le maintien des disponibilités de main-d'oeuvre et la promotion de la paix du travail.

&htab;41.&htab;La mission a achevé son programme sur une visite au ministère des Affaires étrangères, où elle a fait un exposé des réunions qu'elle avait eues et indiqué la nature des discussions qui s'étaient déroulées avec les autorités militaires et civiles ainsi qu'avec les représentants des travailleurs et des employeurs, et a notamment évoqué les diverses questions qui, selon ses observations, continuent d'être un sujet de préoccupation en liaison avec le procès des dirigeants de la DISK et des syndicats qui lui sont affiliés et avec la législation et la pratique dans le domaine du travail.

&htab;42.&htab;Il ne me reste qu'à exprimer ma profonde reconnaissance aux autorités civiles et militaires de Turquie pour leur coopération, leur courtoisie sans faille et les nombreuses facilités qui m'ont été offertes pour permettre le bon déroulement de la mission. Je souhaite également remercier le président de la TURK-Is, M. Yilmaz, ainsi que ses collègues qui, une fois de plus, ont pleinement collaboré avec la mission; M. Narin, le président, et M. Ibrahimoglu, le secrétaire général de la TISK, dont la collaboration avec la mission a été fort appréciée.

&htab;43.&htab;Enfin, j'aimerais exprimer ma reconnaissance à M. John Murray, directeur du bureau de l'OIT à Ankara, qui, avec ses collaborateurs, a fourni une aide précieuse à la mission, ainsi qu'à M. Ruchan Isik qui, grâce à une efficacité et une ingéniosité exemplaires, nous a, une fois de plus, grandement facilité la tâche.

William R. Simpson Genève, octobre 1984.