Economie suisse: le ralentissement se poursuit
La marche des affaires de l'industrie a continué de se détériorer au quatrième trimestre. Dans les 200 entreprises ayant participé à l'enquête trimestrielle du Panorama conjoncturel, la diminution de l'entrée des commandes, de la production, de la réserve de travail et de l'emploi par rapport à la période comparable de 1991 était encore plus prononcée qu'au troisième trimestre. L'évolution des affaires est par conséquent demeurée en deçà des prévisions émises lors de l'enquête de septembre. Les chefs d'entreprise interrogés sont d'avis qu'au premier trimestre 1992, la marche des affaires sera moins favorable qu'au cours des trois premiers mois de 1991. Les perspectives sont un peu meilleures pour l'ensemble de l'année, les entreprises tablant sur une amélioration des chiffres d'affaires et des bénéfices. En revanche, dans la construction, les tendances à la récession se poursuivront. Dans le commerce de détail, on s'attend à une stagnation et dans le tourisme à une reprise des affaires.
Le Panorama conjoncturel paraît trimestriellement
Rédaction: B. Arnet
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Industrie:
au cours des trois premiers mois de 1992, l'entrée des commandes,
la production, la réserve de travail et les chiffres d'affaires resteront
probablement inférieurs à ceux de la période comparable de 1991. Les prévisions
pour le premier trimestre 1992 sont cependant jugées de manière un peu moins
négative que l'évolution effective au dernier trimestre 1991. Seul l'emploi
devrait diminuer sensiblement.
Construction:
le recul de la production a été un peu moins fort au quatrième
trimestre 1991. Dans le bâtiment, le volume de constructions a cependant été
nettement inférieur à celui de la période comparable de 1991. Compte tenu de la
diminution de l'entrée des commandes, la tendance à la baisse devrait persister
au cours des prochains mois. Pour l'ensemble de l'année, on craint également
une diminution du volume de constructions.
Commerce de détail:
les affaires de Noël ont été meilleures que l'année
passée, même si les pronostics très optimistes ne se sont pas confirmés. Pour
le premier trimestre 1992, les prévisions concernant les ventes sont un peu
plus modérées. Dans l'ensemble, on s'attend à une stagnation des chiffres
d'affaires exprimés en termes réels.
Tourisme:
après les excellents réultats enregistrés durant les fêtes sous
l'effet des bonnes conditions météorologiques, les directeurs des offices de
tourisme interrogés prévoient une amélioration des taux de fréquentation des
hôtels et des appartements de vacances durant la saison d'hiver 1991/92.
Industrie
La marche des affaires de l'industrie est restée décevante suisse au quatrième trimestre 1991. Dans les quelque 200 entreprises interrogées, les soldes des annonces de progression et de recul des principaux indicateurs que sont l'entrée des commandes, les chiffres d'affaires et la production étaient toujours notablement inférieurs à leur niveau de la période comparable de 1991. Cela est valable tout particulièrement pour les petites entreprises. L'appréciation de la situation actuelle a de ce fait été plus mauvaise que lors de l'enquête de septembre et était jugée plus négative que ce qu'on prévoyait il y trois mois. L'utilisation moyenne des capacités de production, soit 83%, est demeurée inchangée par rapport au trimestre précédent, mais elle était inférieure de 5 points de pourcentage à celle de la période comparable de 1991. La réduction des effectifs, qui dure depuis le début de l'année passée, s'est accélérée au quatrième trimestre; l'emploi était par conséquent inférieur à son niveau du dernier trimestre 1991 dans deux cinquièmes des entreprises.
Optimisme modéré pour le 1er trimestre 1992
Les chefs d'entreprise interrogés sont d'avis qu'au premier trimestre 1992, la marche des affaires se détériorera par rapport à janvier-mars 1991. Cela est notamment valable pour les petites entreprises, tandis que les grandes ne prévoient pas de nouvelle diminution de l'entrée des commandes et qu'elles tablent même sur un accroissement des ventes, vu qu'elle jugent très favorablement le développement des ordres suisses et des exportations. Il n'en demeure pas moins que la plupart des participants à l'enquête estiment les perspectives concernant l'entrée des commandes, la réserve de travail et les ventes de manière moins négative que l'évolution effective au quatrième trimestre 1991, bien que les prévisions par rapport à l'enquête de septembre aient été révisées en baisse. Par contre, 47% des entreprises sont d'avis que l'emploi restera inférieur à son niveau de la période comparable de 1991. Pour la fin mars, 42% des entreprises prévoient des prix de vente supérieurs à ceux de la fin du premier trimestre 1991. L'augmentation devrait cependant être un peu moins forte, étant donné qu'un an auparavant, 58% des chefs d'entreprise avaient encore annoncé une hausse. Les participants à l'enquête ne prévoient pas de reprise marquante d'ici la fin de l'année: pour l'ensemble de 1992, 60% des chefs d'entreprise interrogés s'attendent malgré tout à une augmentation des chiffres d'affaires globaux nominaux par rapport à 1991, une entreprise sur cinq pronostiquant même un accroissement supérieur à 6%. La situation est identique en ce qui concerne les exportations, 63% des firmes prévoyant une tendance haussière et un quart d'entre elles escomptant même une progression des livraisons à l'étranger de plus de 6%. Eu égard à la diminution constante des chiffres d'affaires depuis une année, ces perspectives peuvent tout au plus être qualifiées de modérément optimistes. Ceci est dû au fait que la marge de manoeuvre pour augmenter les ventes par le biais de la compression des marges a déjà été largement exploitée. Alors que pour 1991, 30% seulement des entreprises avaient annoncé une amélioration de leurs résultats par rapport à 1990 et 49% une détérioration, 40% des firmes escomptent une amélioration en 1992, 26% seulement d'entre elles craignant une dégradation.
Divergences d'un secteur à l'autre
Au dernier trimestre 1991, l'évolution a, comme d'habitude, fortement divergé d'un secteur à l'autre. Si l'on se réfère aux indicateurs entrée des commandes, réserve de travail et chiffres d'affaires, la marche des affaires de l'industrie alimentaire et de la chimie a été bien meilleure que la moyenne de tous les secteurs. En revanche, elle a été nettement inférieure à la moyenne dans la métallurgie, l'industrie du papier et les arts graphiques.
L'évolution des divers secteurs ne devrait que peu se modifier au premier trimestre 1992. Les entreprises de l'industrie alimentaire et, surtout, les petites entreprises de la chimie s'attendent à une marche des affaires plus favorable, et par conséquent meilleure que la moyenne de tous les secteurs, qu'au premier trimestre 1991. Les prévisions sont nettement inférieures à la moyenne dans la métallurgie, l'industrie du papier, l'industrie du bois et du meuble et les arts graphiques.
Entrée des commandes: prévisions révisées en baisse
Le développement de l'entrée des commandes est resté insatisfaisant. Après l'évolution décevante au troisième trimestre (solde: - 17%), l'entrée des ordres au dernier trimestre 1991, avec un solde de - 22 points, est demeurée nettement en deçà de son niveau d'octobre-décembre 1991. Par conséquent, les espoirs émis il y a trois mois ont été déçus une nouvelle fois, étant donné que, contrairement à l'attente, les ordres en provenance de l'étranger ont eu tendance à diminuer légèrement et que le ralentissement escompté de la régression des commandes suisses ne s'est pas produit. Cette évolution décevante a incité les entreprises à réviser leurs prévisions en baisse comparativement aux deux enquêtes précédentes. Ainsi, 14% des entreprises sont d'avis que l'entrée des commandes, au premier trimestre 1992, restera inférieure à celle de janvier-mars 1991. Aucune amélioration ne s'annonce pour l'instant pour les ordres suisses en particulier (solde de - 22 points), alors que 4% des chefs d'entreprise interrogés tablent sur une amélioration en ce qui concerne les commandes en provenance de l'étranger.
Recul de la production
Au quatrième trimestre, la production a été inférieure à celle d'octobre-décembre 1991 dans 33% des entreprises interrogées. Les chefs d'entreprise sont d'avis qu'elle diminuera également au premier trimestre 1992.
A fin décembre 1991, la réserve de travail était supérieure à celle d'un an auparavant dans 19% des entreprises, identique dans 21% d'entre elles et inférieure dans 60%. La tendance à la baisse devrait se poursuivre cette année. Pour la fin mars 1992, tous les secteurs, à l'exception de l'industrie alimentaire, pronostiquent une réserve de travail inférieure à celle du premier trimestre 1991.
Réduction des effectifs
S'étant établie à 83% au dernier trimestre 1991, l'utilisation des capacités de production est demeurée identique à celle du trimestre précédent, mais elle était inférieure de 5 points de pourcentage à son niveau d'octobre-décembre 1990. Les chefs d'entreprise interrogés craignent qu'elle ne se détériore encore notablement.
La diminution persistante des effectifs depuis le début de 1991 s'est accélérée au quatrième trimestre. Entre octobre et décembre, 36% des entreprises ont réduit leur personnel; dans le courant du troisième trimestre, le solde s'était encore élevé à - 23 points. De ce fait, à la fin de 1991, le personnel était moins nombreux que douze mois auparavant dans trois cinquièmes des entreprises et plus nombreux dans un cinquième d'entre elles. Les effectifs devraient continuer de diminuer au premier trimestre 1992: 33% des entreprises envisagent une nouvelle diminution par rapport à fin 1991. D'une année à l'autre, la diminution des effectifs devrait encore s'accélérer quelque peu (solde: - 47%).
Evolution décevante des chiffres d'affaires
L'évolution des chiffres d'affaires a été décevante au quatrième trimestre 1991. 14% des entreprises ont fait état de ventes globales inférieures à celles d'octobre-décembre 1990. Il y a trois mois, les entreprises avaient encore tablé sur un léger accroissement (solde: + 3%). Il en est de même des exportations: au lieu de progresser sensiblement comme prévu, les livraisons à l'étranger ont stagné par rapport à la période comparable de 1990. Compte tenu de cette situation, les entreprises sont également sceptiques en ce qui concerne le premier trimestre 1992. 5% d'entre elles craignent une diminution des ventes par rapport au premier trimestre 1991 et 5% seulement des chefs d'entreprise interrogés tablent sur un accroissement des exportations (enquête de septembre: + 17%).
Les prix de vente n'ont plus été majorés au cours des trois derniers mois de 1991. Mais étant donné qu'ils avaient été sensiblement relevés au premier trimestre, ils étaient supérieurs dans 61% des entreprises et inférieurs dans 15% d'entre elles en fin d'année. Au premier trimestre 1992, les prix ne devraient guère augmenter. 29% des participants à l'enquête ont l'intention de majorer leurs prix de vente par rapport à la fin 1991 contre 39% pour la période correspondante de l'année précédente.
Pour l'ensemble de 1992, 60% des chefs d'entreprise interrogés tablent sur des chiffres d'affaires nominaux supérieurs à ceux de 1991, tandis que 25% d'entre eux craignent un recul. 20% des entreprises tablent sur un accroissement des ventes de 3%, 20% d'entre elles sur une augmentation de 6% et 20% sur une progression de plus de 6%. L'industrie alimentaire et la chimie annoncent une croissance des ventes nettement supérieure à la moyenne de tous les secteurs. En revanche, les prévisions sont inférieures à la moyenne dans la métallurgie, l'industrie du bois et du meuble et dans les grandes entreprises de l'industrie des machines et des arts graphiques.
Les pronostics concernant les exportations sont semblables. 63% des entreprises escomptent un accroissement par rapport à 1991, 28% d'entre elles prévoyant même une augmentation supérieure à 6%. Une firme sur six seulement craint une diminution des livraisons à l'étranger. Considérée par secteurs, l'évolution est la même que pour les ventes globales.
Revirement de tendance au niveau des bénéfices
En 1991, les bénéfices ont diminué par rapport à l'année précédente. La moitié environ des entreprises a fait état de bénéfices nets inférieurs à ceux de 1990 et 30% seulement d'entre elles de bénéfices nets supérieurs. Ce sont surtout les petites entreprises qui ont vu leurs bénéfices régresser. La situation a été très divergente d'un secteur à l'autre. L'évolution a été particulièrement favorable dans la chimie et dans les petites entreprises de l'industrie alimentaire. Les bénéfices ont été inférieurs à la moyenne des secteurs dans la métallurgie et dans l'industrie du papier, ainsi que dans les grandes entreprises de l'industrie des machines.
Pour 1992, les participants à l'enquête prévoient une augmentation modérée des
bénéfices. Alors que 40% des chefs d'entreprise interrogés escomptent une
amélioration, une entreprise seulement sur quatre craint une détérioration du
bénéfice. Les prévisions optimistes émanent principalement de grandes
entreprises de l'industrie des machines et de la chimie. En revanche, la
métallurgie, l'industrie du papier et les arts graphiques craignent une
nouvelle régression de leurs bénéfices.
Bruno Bébié
Construction
Le tassement persistant de l'activité depuis le quatrième trimestre 1990
s'est poursuivi au cours des derniers mois. Selon la comptabilité nationale, la
production, au
troisième trimestre 1991
, a diminué de 3,6% par rapport à
juillet-septembre 1990. Considérée sur les trois premiers trimestres, la
production globale (y compris les prestations accessoires) a également diminué
de 3,6%, le volume dans le bâtiment et le génie civil ayant même reculé de 11%
par rapport aux trois premiers trimestres de 1990. C'est la construction de
logements qui a fléchi le plus nettement, tandis que dans le génie civil, la
diminution a été peu marquée du fait des commandes des pouvoirs publics.
Au
quatrième trimestre 1991
, le recul de l'activité s'est ralenti; la
diminution de la production par rapport à 1990, soit - 1,9%, est un peu moins
prononcée qu'au cours des trimestres précédents. 53% des entrepreneurs du
bâtiment interrogés par l'UBS et 59% de ceux du génie civil ont fait état d'une
diminution de l'entrée des commandes par rapport à 1990. Au troisième
trimestre, les données correspondantes étaient encore de - 68% et - 63%. Selon
notre enquête, le volume de constructions, au quatrième trimestre, était
inférieur à celui d'octobre-décembre 1990 dans 54% des entreprises du bâtiment
et dans 33% de celles de génie civil, soit une détérioration par rapport au
trimestre précédent dans le bâtiment et une amélioration dans le génie civil.
Les effectifs étaient supérieurs à ceux d'une année auparavant à pareille
époque dans deux seulement des quarante entreprises interrogées par l'UBS,
inchangés dans 46% d'entre elles et inférieurs dans la majorité des cas. Les
prix des prestations dans le bâtiment ont continué de baisser entre septembre
et décembre 1991 pour deux tiers des entrepreneurs interrogés, un tiers d'entre
eux étant parvenus à les maintenir. Dans le génie civil également, les prix ont
reculé pendant le même laps de temps dans 68% des entreprises interrogées.
Au
premier trimestre 1992
, la situation devrait de nouveau se dégrader. Le
volume de constructions diminuera dans 70% des entreprises du bâtiment et dans
52% de celles de génie civil. Dans le bâtiment, l'entrée des commandes restera
stable à son niveau du premier trimestre 1991 dans 11% des entreprises et
fléchira dans 89% d'entre elles. Dans le génie civil, 48% des entrepreneurs
ayant répondu à l'enquête s'attendent à un recul de l'entrée des commandes par
rapport au premier trimestre 1991. Si l'on considère l'ensemble de la
production selon la comptabilité nationale, cela équivaudrait à une diminution
de 2,3% d'une année à l'autre. Les effectifs seront inférieurs à ceux d'un an
auparavant dans 82% des entreprises et demeureront identiques dans 18% d'entre
elles. Les prix des prestations du bâtiment et notamment ceux des prestations
de génie civil continueront probablement de reculer entre décembre 1991 et mars
1992: le solde entre les annonces de progression et de recul est en effet de -
24% et de - 46% respectivement.
Pour l'ensemble de 1992, les entrepreneurs interrogés par l'UBS sont d'avis que l'entrée des commandes fléchira dans tous les secteurs. Outre le génie civil, c'est la construction d'immeubles locatifs qui diminuera le moins sensiblement (solde de - 62% des réponses), tandis que celle de maisons familiales (- 77%) reculera une nouvelle fois nettement et celle d'immeubles destinés à l'industrie et aux services, qui avait résisté jusqu'ici, régressera même le plus fortement pour la première fois (- 89%). Aucun des entrepreneurs interrogés n'envisage d'investir davantage que l'année passée dans ses installations ou son parc de machines. 62% des chefs d'entreprises feront en revanche moins d'investissements en constructions et 82% moins d'investissements d'équipement.
Commerce de détail
Au dernier trimestre 1991, ce secteur économique a perdu une bonne partie de l'élan qu'il avait eu jusque-là. Les prévisions optimistes émises il y trois mois par les gros distributeurs interrogés ne se sont pas totalement confirmées. A une seule exception près, les chiffres d'affaires ont cependant été supérieurs à ceux du dernier trimestre 1990; le taux de croissance n'a toutefois été que de 3 à 4%, soit inférieur à l'augmentation de 5% pour l'ensemble de 1991. Les produits alimentaires se sont nettement mieux vendus que les articles non alimentaires. Quant aux prix, ils ont continué de grimper de manière pratiquement ininterrompue.
Les affaires de Noël 1991 ont été meilleures que l'année précédente. Les articles du secteur textile et habillement ont été particulièrement prisés. Les prévisions très positives à l'origine ne se sont cependant pas entièrement confirmées et l'augmentation de 3% ressortant de notre enquête devrait être due en grande partie aux prix. La retenue des consommateurs consécutive à l'incertitude régnant à propos de l'évolution de l'économie et du marché de l'emploi a été un facteur négatif fréquemment évoqué.
Les prévisions concernant le développement des chiffres d'affaires au premier
trimestre 1992 sont un peu plus modérées. Même si le même nombre d'entreprises
qu'au quatrième trimestre 1991 tablent sur un nouvel accroissement des ventes,
il n'en demeure pas moins que les taux de croissance avancés sont notablement
inférieurs à ceux du trimestre précédent. Par ailleurs, étant donné que les
prix de vente continueront de monter, les chiffres d'affaires réels stagneront
au premier trimestre. De l'avis des gros distributeurs, la marge brute sera
donc tendanciellement comprimée.
Christian Frey
Tourisme
Les bonnes conditions d'enneigement et le beau temps dans les stations suisses ont contribué dans une large mesure à la bonne marche des affaires durant les fêtes 1991/92. Deux tiers des 27 directeurs d'offices de tourisme interrogés des principales régions de sports d'hiver de Suisse ont fait état d'une augmentation du nombre de nuitées dans l'hôtellerie par rapport à l'année passée, les taux de croissance ayant oscillé entre 2 et 10%. Aucune des stations n'a enregistré un recul. Dans la parahôtellerie, les annonces de progression et de recul se sont pratiquement équilibrées, avec des divergences régionales. Alors qu'aux Grisons, en Suisse orientale, en Suisse centrale et dans l'Oberland bernois, ce sont surtout les nuitées dans l'hôtellerie qui ont progressé, les directeurs des offices de tourisme d'importantes stations de sport d'hiver du Valais et de Suisse romande ont annoncé une augmentation plus sensible dans la parahôtellerie. Selon les résultats de l'enquête, le taux de fréquentation des chemins de fer de montagne et des remontées mécaniques s'est amélioré dans quatre cinquièmes des stations interrogées.
En ce qui concerne l'ensemble de la saison d'hiver 1991/92 (novembre-avril),
les perspectives demeurent favorables dans les principales stations. Deux tiers
des directeurs d'offices de tourisme interrogés tablent sur une augmentation du
nombre de nuitées dans l'hôtellerie. Aucune station ne craint un recul. Si l'on
se réfère aux réservations actuelles, les hôtes suisses et les hôtes étrangers
contribueront à peu près dans la même mesure à ce résultat. Les touristes
allemands et italiens, en particulier devraient venir plus nombreux. Alors
qu'une stagnation s'annonce en ce qui concerne les vacanciers de France, de
Grande-Bretagne, des Pays-Bas, de Belgique/Luxembourg et du Japon, on s'attend
à une diminution des hôtes américains.
Irene Meier
Notices économiques janv/fév. 92
Le GATT: contre-poids aux blocs commerciaux
Les tendances à la formation de blocs commerciaux régionaux freinent de plus en plus le trafic mondial des marchandises. Ce sont surtout les pays en développement qui en subissent les conséquences. L'aboutissement des négociations actuelles est ardemment souhaité dans l'intérêt du commerce mondial.
Les négociations dans le cadre de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) ont débuté en 1986 sous l'appellation de cycle de l'Uruguay. Leur conclusion est imminente, mais il n'est pas encore certain que les grandes nations participantes parviennent à un consensus sur une politique commerciale future. Les divergences d'intérêt sur la question agricole, notamment entre la Communauté européenne et les Etats-Unis, compromettent la signature des nouveaux accords. Pour de nombreux pays en développement et les petites nations industrielles, la formation accrue de blocs commerciaux se traduit par un accès plus difficile au marché. Le renforcement du GATT s'offre en contre-poids aux blocs commerciaux pour enrayer cette évolution négative. Facteur essentiel de croissance, le commerce revêtira toujours plus
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d'importance, surtout dans les pays à démographie galopante. C'est pourquoi nombre de pays en développement ont ouvert leur économie à la concurrence étrangère ces dernières années et accru leurs exportations.
Les blocs commerciaux gagnent du terrain
Les zones de libre-échange de la CE et de l'AELE déjà en place devraient prochainement fusionner en un Espace économique européen. En revanche, l'accord de libre-échange nord-américain (NAFTA) entre les Etats-Unis, le Canada et le Mexique est encore en phase de discussion. Il devrait cependant voir le jour avant la fin de la décennie. Ces deux gros blocs commerciaux exercent une pression considérable sur les pays asiatiques, qui à leur tour se regroupent. Créée en 1967, l'ASEAN associe les pays du Sud-Est asiatique. Quant au Japon, on peut imaginer qu'il cherche aussi à réorganiser son environnement économique dans un avenir prévisible, ce qui renforcera d'autant la puissance économique de la région.
La formation de blocs modifie sensiblement les flux commerciaux. La réduction des droits de douane et la suppression des autres barrières stimulent le commerce au sein des zones de libre-échange. En revanche, les échanges avec des Etats tiers sont généralement soumis à de plus fortes restrictions et de ce fait handicapés. Si aujourd'hui de nombreux pays industriels favorisent la formation de blocs et cloisonnent ainsi leur économie vis-à-vis des pays non membres, il existe parallèlement un courant inverse dans nombre de pays en développement. Ce courant vise la libéralisation des relations économiques et l'ouverture au commerce international.
L'accès aux grands marchés des pays industriels, qui effectuent près de 80% du commerce mondial, est primordial pour les pays en développement. La croissance de leur économie dépend étroitement de la conjoncture dans les pays industriels. Selon les estimations de la Banque mondiale, une croissance de 1% dans les pays de l'OCDE se traduit par une augmentation de 0,7% environ dans les pays en développement. En revanche, la hausse de 1% du niveau de l'intérêt dans les pays industriels réduit leur croissance de 0,2% environ. Ces pays - surtout en Afrique, mais aussi souvent en Asie et en Amérique latine - sont surendettés (endettement intérieur et extérieur). Leur chance de réduire l'endettement étranger ne passe pas par des remises de dettes, accordées comme on peut facilement le comprendre avec réticence par les banques commerciales, mais par l'amélioration de leur situation économique. Et le meilleur moyen d'y parvenir consiste en une expansion des exportations doublée d'investissements directs effectués par les pays industriels.
Le GATT avocat du commerce global
Le GATT aurait à jouer un rôle important dans ce cas de figure, puisque sa tâche consiste à créer un système d'échanges mondiaux aussi libres que possible. Vu les modes actuels de production, où la conception, l'assemblage et la commercialisation d'un produit s'effectuent de plus en plus dans des pays différents, les marchandises ne sont plus le seul enjeu des négociations du GATT. C'est pourquoi les discussions ont été étendues, entre autres, au domaine des services et à celui de la protection de la propriété intellectuelle. Les tendances protectionnistes des pays industriels compromettent cependant les efforts visant à l'élargissement des règles du GATT. Durant ces quarante dernières années, celles-ci ont contribué à abaisser les droits de douane, qui sont revenus de quelque 40% à 3% environ. En revanche, elles n'ont pu éviter l'introduction de nombreuses barrières non tarifaires, comme les licences d'importation, les contrôles des prix, les prescriptions de change ou les restrictions volontaires à l'exportation. La suppression de ces entraves permettrait un sensible accroissement de l'activité économique mondiale. De nombreux pays en développement pourraient ainsi s'assurer des sources additionnelles et régulières de revenus tirées de l'exportation accrue de services.
Investissements directs au lieu de crédits
Dans divers pays en développement, les efforts de libéralisation ont suscité un flux considérable d'investissements directs, effectués essentiellement par des pays industriels. En 1988, la part des pays en développement au total des investissements directs avoisinait 21%, dont 9,4% dans quelques pays d'Asie et 9,3% en Amérique latine. Ces derniers temps, les investissements directs ont encore augmenté dans les pays en développement sous le double effet de l'amélioration de l'environnement économique et de perspectives de croissance meilleures que dans les pays industriels. Les investissements directs ont souvent remplacé les crédits étrangers et ont sensiblement contribué à améliorer la solvabilité de certains pays.
Les efforts de maints gouvernements pour assainir leur économie ont aussi généré un afflux considérable d'investissements de portefeuille, permettant un remarquable essor des marchés boursiers locaux. Ainsi, les Bourses des pays d'Amérique latine (sauf le Brésil) ont enregistré un redressement spectaculaire en 1990 et 1991, tandis qu'en Inde, au Pakistan, en Turquie et au Zimbabwe, les marchés ont également fortement progressé. Si les réformes économiques entreprises et des possibilités de placement attrayantes permettent de confirmer cette tendance (notamment par le rapatriement des capitaux), on peut alors s'attendre à une amélioration des perspectives de croissance des pays considérés.
Perspectives
Les positions divergentes des pays industriels au niveau des négociations
actuelles du GATT ne doivent pas faire oublier que la formation de blocs
commerciaux pénalise sérieusement les exportations des pays tiers. Depuis que
de nombreux pays en développement ont libéralisé leur économie et ont ainsi
anticipé les exigences du GATT, il appartient désormais aux grandes nations
commerciales d'améliorer les conditions pour un libre échange des biens et des
services. Cela donnerait aux pays en développement, jusqu'à présent en marge du
commerce mondial, la possibilité d'accroître davantage leurs échanges. Un
commerce extérieur libéralisé est la condition essentielle à une croissance
durable de l'économie des pays en développement et le meilleur moyen d'éviter
une recrudescence de l'immigration dans les pays industriels. De nombreux
problèmes resteront encore toutefois en suspens, même en cas d'aboutissement
des négociations. Quant à l'application des mesures décidées, elle prendra
plusieurs années car la suppression des barrières non tarifaires est lente. En
outre, le GATT devra s'attaquer dans un prochain cycle à l'un des problèmes
prioritaires que constitue l'environnement en relation avec le commerce.
Peter Britt
Nous renvoyons à la publication SBG-Standpunkt No 64 du 18 décembre 1991 pour de plus amples informations sur les négociations actuelles au sein du GATT et leur incidence sur les pays en développement. La publication n'existe qu'en allemand et peut être commandée gratuitement - jusqu'à épuisement des stocks - à l'adresse suivante: Union de Banques Suisses, département Economie politique, case postale, 8021 Zurich, tél. (01) 234 42 43.
Bon potentiel de cours pour investisseurs sélectifs
Plongée dans une profonde morosité depuis plusieurs mois, la Bourse
suisse
s'est notablement reprise à l'aube de la nouvelle année. Preuve en est
le Swiss Performance Index, qui a gagné 5,7% depuis la fin de 1991, passant de
1052,8 à 1112,9 points (le 16 janvier) dans un volume d'échanges croissant. Les
premiers signes d'un revirement de tendance sur le front des taux d'intérêt et
les meilleures dispositions du marché obligataire qu'ils promettent redonnent
de l'aplomb aux investisseurs. Les actions helvétiques restent favorablement
capitalisées tant en comparaison internationale qu'historique. Nous leur
attribuons un potentiel de hausse de plus de 10% en 1992. Notre préférence va
aux valeurs des assurances et aux actions des grandes entreprises chimiques et
pharmaceutiques à vocation internationale.
L'indice
allemand
des actions (DAX) rend également compte de l'optimisme
des marchés: depuis la fin de l'année, il a grimpé de 5,6% à
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1666,3 points le 16 janvier 1992. Il est notoire que la Bourse allemande est très sensible aux mauvaises nouvelles en provenance d'Europe orientale. Pourtant, les perspectives sont bonnes à moyen terme, notamment au regard du fort potentiel de baisse des taux d'intérêt. En outre, la remontée prévue du dollar améliore les recettes des entreprises exportatrices. Comme la performance des titres allemands reste un peu en retrait sur le plan international, nous attendons des plus-values jusqu'à 15% au cours de cette année, notamment dans l'électrotechnique et le secteur financier.
La Bourse
britannique
n'est pas en reste: elle a également participé au
mouvement de hausse du début 1992, et ce malgré la faiblesse de la livre et les
incertitudes quant aux chances de succès du parti conservateur aux prochaines
élections. L'indice FT-SE 100 a avancé jusqu'à 2547 points le 16 janvier. A
l'affût des moindres signes positifs, les investisseurs ont anticipé la reprise
conjoncturelle ardemment attendue. Leurs espoirs pourraient cependant être vite
déçus par des bénéfices d'entreprise moins élevés qu'escomptés.
Fondamentalement, il existe certes un potentiel de redressement de plus de 15%,
mais la prudence voudrait que l'on s'en tienne à moyen terme aux titres
défensifs et que l'on n'envisage des valeurs cycliques qu'à plus long terme.
Les secteurs pharmaceutique et alimentaire nous semblent être les meilleurs
paris.
Les hausses de cours enregistrées par les Bourses du monde entier ont été
déclenchées par la réduction du taux d'escompte aux
Etats-Unis
peu avant
Noël. Depuis le début de l'année, le Dow Jones des valeurs industrielles s'est
propulsé d'un record historique à l'autre (3258,5 points le 15 janvier 1992).
Si une courte relâche ou une correction subite ne sont pas exclues, le marché
reste néanmoins assuré contre une baisse par le bas niveau des taux d'intérêt.
On peut affirmer que les actions américaines sont avantageusement capitalisées
en comparaison historique, surtout si l'on considère les faibles résultats
semestriels dégagés par les entreprises, lesquelles vont néanmoins au-devant de
jours meilleurs. Nous misons sur les secteurs biens de consommation (tabac,
alimentation, restauration, électro-ménager) et biens d'équipement (élimination
des déchets, ingénierie et construction, électrotechnique), auxquels nous
conférons un potentiel haussier de près de 10% en 1992.
Bien que le
Japon
jouisse encore de la meilleure conjoncture parmi les
principaux pays industriels, la Bourse de Tokyo est encline à la déprime. Par
moments, les cours sont tombés au-dessous de leurs planchers de 1988, 1990 et
1991: le 16 janvier, l'indice Nikkei 225 a clôturé à 21 612 points. Comme les
investisseurs tablent sur un nouveau recul des taux d'intérêt, les liquidités
restent essentiellement placées dans des valeurs à revenu fixe. La détente
prévisible des taux d'intérêt ne manquera pas d'apporter un net soutien contre
la dégringolade de la cote. Par ailleurs, les bénéfices décevants des
entreprises ne seront pas escomptés par la Bourse avant mars, lorsque de
meilleures perspectives bénéficiaires pour l'exercice 1992/93 insuffleront un
nouvel élan. Pour l'heure, les titres japonais sont assurément intéressants.
L'investisseur soucieux d'éviter les valeurs cycliques se tournera de
préférence vers les actions de la technologie, de la construction et des
services publics: nous leur accordons un potentiel de plus-values supérieur à
15% sur un an.
S. Mehlisch
Marchés de l'argent et des capitaux
Taux d'intérêt: le fossé atlantique
L'année 1991, riche en fluctuations des taux, n'a pas été avare non plus sur sa fin de secousses infligées aux marchés financiers. Les décisions contradictoires sur les taux directeurs, enregistrées des deux côtés de l'Atlantique, ont aggravé le traditionnel écart entre l'Europe et les Etats-Unis dans une proportion depuis longtemps inaccoutumée. Les réductions des taux d'escompte aux Etats-Unis et au Japon ont notamment anticipé la tendance du marché, contrairement aux mesures précédentes, donnant par conséquent un net signal de politique économique. Le message de stabilité de la Bundesbank, sous la forme d'un relèvement des taux, a cependant été tout aussi clair. Une fois passé cette phase de divergences manifestes, les premières semaines de 1992 font entrevoir un rapprochement possible des taux d'intérêt, résultant d'une légère détente sur les marchés européens et d'un maintien des positions sur les marchés américain et japonais.
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La Réserve fédérale joue rusé
Vu la persistance de la faiblesse conjoncturelle aux Etats-Unis, l'institut d'émission, suivant les autorités politiques, a manifestement tiré la sonnette d'alarme. Début décembre déjà, réagissant à l'annonce d'une nouvelle détérioration du marché de l'emploi, la Réserve fédérale a injecté des liquidités sur le marché, alignant le taux de l'argent au jour le jour à celui du taux d'escompte, alors de 4 1/2%. Par la suite, ce taux directeur, à l'importance surtout optique, a été ramené à 3 1/2%, son plus bas depuis 1964. Cette réduction du loyer de l'argent, d'une ampleur inhabituelle, et la date choisie (un jour après le relèvement du taux directeur allemand) ont plongé le marché dans une certaine perplexité, et ce pour deux raisons. D'abord, cette manière spectaculaire du Fed de contrer le pessimisme conjoncturel généralisé pourrait parfaitement s'avérer contre-productive. Ensuite, anticiper des mesures d'ordre fiscal d'une certaine envergure par le biais d'un assouplissement monétaire a son côté sournois, étant donné qu'en cette année électorale le succès de l'intervention ne sera visible que trop tard pour le Congrès. Les marchés ont toutefois bien réagi en répercutant pour une bonne part la réduction des taux: le rendements des bons du Trésor a chuté au-dessous de 4%, celui des emprunts d'Etat avec une durée résiduelle de 10 ans s'est momentanément replié à 6,75%. Un léger raidissement n'est apparu que début janvier.
Le Japon emboîte le pas
La Banque du Japon a encore abaissé son taux d'escompte, cette fois d'un demi-point à 4 1/2% au 30 décembre. Comme dans le cas des Etats-Unis, la précocité de la décision a surpris; la raison avancée est le tassement de l'activité économique combiné au recul du danger inflationniste. Mais la mesure visait indéniablement, en préalable à la visite du président Bush, à diminuer ses griefs au nom du commerce américain - avec un certain succès, comme on a pu le constater. Le yen s'est notablement affermi face au dollar, ce qui devrait avoir pour effet de réduire l'excédent commercial nippon. Bien que le loyer de l'argent à court et long terme soit revenu respectivement de 2,7 et 1,5 points de ses derniers sommets du milieu de 1991, induisant un tassement de la courbe des revenus de capitaux, les taux d'intérêt réels restent élevés, compte tenu du ralentissement de l'inflation. Un nouvel assouplissement monétaire en début d'année n'est pas exclu, même si les marchés devaient être entrés dans une phase de consolidation en janvier.
Pour la Bundesbank, cap sur la stabilité
La Bundesbank et la plupart de ses consoeurs européennes, par le biais du système monétaire européen (SME), s'en est tenue à sa ligne restrictive en dépit du ralentissement conjoncturel. Les menaces pesant sur la stabilité monétaire, du fait des exigence salariales excessives des syndicats, ont conduit l'institut d'émission à relever les taux directeurs d'un demi-point le 19 décembre. Les taux de l'escompte et des avances sur nantissement ont ainsi atteint un nouveau sommet depuis 1948, soit 8 et 9 3/4%. Des banques centrales du SME, soit celles des Pays-Bas, de Belgique et du Danemark, de même que la banque centrale autrichienne ont suivi l'exemple allemand; un pas auquel la Banque de France et la Banque d'Italie ne se sont résolues que quelques jours plus tard sous la pression des marchés, la Banque d'Angleterre acceptant pour sa part un fléchissement de la livre pour ne s'être pas associée au mouvement. La publication successive des objectifs de masse monétaire des pays d'Europe continentale a indiqué que la retenue restera de mise dans l'approvisionnement en liquidités. Les marchés ont toutefois abordé l'année dans un esprit relativement positif, les rendements des emprunts d'Etat notamment diminuant quelque peu.
Légère détente sur le franc suisse
La Banque nationale suisse (BNS) n'a pour une fois pas senti la nécessité d'entrer dans la ronde des taux directeurs de décembre. Le taux des avances sur nantissement, variable de toute façon, suit les mouvements de l'argent au jour le jour dans une fourchette de 2%; le taux d'escompte officiel n'a pour sa part pas le même poids qu'à l'étranger, vu le volume modeste des opérations de change en Suisse, et son adaptation aurait éventuellement eu valeur indicative sur le degré de rigueur de la politique monétaire. Il n'était toutefois pas question de resserrer encore l'approvisionnement en liquidités, l'environnement économique étant à la récession. Bien que la BNS ait affirmé à plusieurs reprises la nécessité de maintenir le cours actuel de sa politique, en insistant sur une croissance à court terme de la monnaie centrale de 1% par an, l'impression majeure a été qu'un assouplissement marginal est en cours. Le léger recul de la rémunération de l'eurofranc, début décembre, est intervenu dans le contexte d'une détente sur les principaux marchés financiers européens. La BNS n'a toutefois pas fait jouer les taux pour soutenir un franc suisse parfois légèrement déprécié par rapport au mark allemand et aux autres monnaies du SME.
Le marché obligataire suisse a passé par une nette phase de détente. De début décembre 1991 à milieu janvier 1992, le rendement moyen des obligations de la Confédération s'est contracté de près d'un demi-point à 6,17%, avant que n'intervienne une légère correction. Cette assez bonne orientation du marché a permis aux banques commerciales de réduire la rémunération des obligations de caisse d'un quart de point, notamment pour les échéances à court et moyen terme. Si la tendance globale des taux a soutenu le marché, des facteurs intérieurs ont également favorisé la baisse du loyer de l'argent: la faiblesse de la conjoncture, laquelle s'accompagne d'un besoin en liquidités croissant des collectivités publiques, et notamment la perspective d'un recul de l'inflation, très attendu, consécutif à une longue période de politique monétaire restrictive. Il s'est avéré de plus en plus que la hausse marquée des rendements, intervenue à fin octobre 1991, est moins le signe d'une adaptation fondamentale aux taux européens qu'une réaction exagérée, corrigée peut-être à l'excès. Le potentiel de recul des taux ne doit toutefois pas être surestimé dans l'immédiat, en raison de l'interdépendance internationale des marchés financiers et des lenteurs du repli inflationniste.
Dans la seconde quinzaine de janvier, la Confédération a lancé un emprunt record de Fr. 600 millions à 6 1/2%, qui doit être fondu avec un autre emprunt par la suite et qui pourrait devenir une valeur de référence ("benchmark") du marché. Suivant l'emprunt de fin 1991 portant sur Fr. 500 millions, cette émission traduit la hausse spectaculaire des besoins financiers de la Confédération.
C. Frey
L'histoire se répète
Sur les marchés des changes, l'année 1992 a non seulement démarré en fanfare, elle a aussi mis à jour des parallèles saisissants avec le tournant de 1990/91. Aujourd'hui, comme alors, les taux des marchés monétaires allemand et américain divergent et les deux puissances économiques, à différentes phases du cycle conjoncturel, ont des intérêts diamétralement opposés. Pour mémoire: le 31 janvier 1991, la Bundesbank avait tiré un coup de semonce à l'intention des politiciens à l'humeur trop dépensière et des partenaires tarifaires en relevant ses taux directeurs d'un demi-point de pourcentage, s'attirant par là les foudres de l'étranger. Le lendemain, c'était au tour de la Réserve fédérale d'abaisser son taux d'escompte d'un demi-point sous le couvert de pertes d'emplois massives; en contrepartie, elle devait accepter un affaiblissement de sa monnaie. A l'époque (comme aujourd'hui), l'administration Bush laissait entendre que la marge de manoeuvre de la Fed était suffisamment large pour permettre d'autres réductions de taux. On s'aperçoit que le scénario et les raisons motivant les décisions prises
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ont suivi le même schéma que l'an dernier, sauf que tout s'est déroulé un mois plus tôt. En effet, cette fois la Bundesbank a relevé ses taux directeurs d'un demi-point le 19 décembre, et la Fed a réduit son taux d'escompte d'un point entier le 20. A nouveau, le dollar s'est trouvé sous pression et la Banque centrale allemande s'est fait réprimander. Seule différence: cette fois, les critiques sont aussi venues de l'intérieur et, contrairement à l'an dernier, les instituts d'émission ont renoncé à soutenir le billet vert. A cet égard, il est intéressant de constater que le mouvement de hausse amorcé dans l'intervalle par la monnaie américaine repose essentiellement - comme au début de 1991 - sur l'impression que l'économie américaine se trouve au seuil d'une reprise vigoureuse. Si la fin de la guerre du Golfe était à l'origine de ce mouvement d'euphorie l'an dernier, c'est l'espoir de voir les mesures d'assouplissement durables de la Fed porter leurs fruits qui nourrit aujourd'hui l'optimisme des conjoncturistes. En hausse de 11%, le dollar avait décollé de son plancher de Fr. 1.23 le 7 février 1991 pour grimper à Fr. 1.37 le 12 mars et avait ainsi déclenché les premières tentatives de contre-offensive des banques centrales. Cette année, il a affiché une progression de Fr. 1.3365 le 27 décembre à Fr. 1.4475 le 17 janvier (+8%). Il ne manquait plus que les interventions subséquentes des instituts d'émission pour achever d'établir le parallélisme avec 1991.
Le dollar plane malgré le faible niveau des intérêts
Le dollar a évolué comme suit: Fr. 1.4240 le 2 décembre, Fr. 1.3365 le 27, Fr. 1.4475 le 17 janvier et 1.4065 le 22. En décembre, les marchés des changes ont connu une effervescence inhabituelle, bien que, comme toujours à l'approche des fêtes de fin d'année, les volumes d'affaires aient été peu étoffés. Le bel optimisme de circonstance n'ayant pas été confirmé par les indicateurs économiques - qui s'en étonnerait? -, la Fed décida de desserrer la vis monétaire d'un cran supplémentaire et abaissa le taux d'escompte de 4 1/2 à 3 1/2 %. Dans le même temps, le taux interbancaire au jour le jour était réduit à 4%. Le différentiel d'intérêt vertigineux dans certains cas entre les Etats-Unis et les autres pays industriels a eu une incidence négative sur le dollar, qui est tombé face au franc suisse à son plus bas niveau depuis mars 1991. L'enthousiasme qui a gagné les marchés vers la fin de l'année a trouvé son élan dans la formidable marque de confiance en l'avenir témoignée par Wall Street (nouveaux records historiques), les prises de bénéfices sur les placements en mark allemand, ainsi que dans des rumeurs selon lesquelles les Européens entendaient faire du redressement du billet vert leur cheval de bataille à la prochaine rencontre au sommet du G7. L'amélioration de la statistique de l'emploi en décembre et la situation dans les républiques de l'ex-URSS ont dynamisé le dollar, avant que les interventions de la Fed et de la Banque du Japon déploient leurs effets.
Avantage évanescent pour l'Allemagne
Le mark cotait 1.6110 par dollar le 2 décembre, 1.5030 le 27, 1.6350 le 17 janvier et 1.5890 le 22. Par rapport au franc suisse, il se négociait à Fr. 88.45 pour 100 unités le 2 décembre, Fr. 89.41 le 9 janvier et Fr. 88.52 le 22. En fixant l'objectif de croissance de la masse monétaire pour 1992 (3,5 à 5,5% pour M3) et en relevant ses taux directeurs, la Bundesbank a clairement fait savoir qu'elle ne se laisserait pas détourner de son objectif de stabilité monétaire par des pressions extérieures. Le mark a donc commencé par grimper avant de perdre du terrain sous l'effet de menaces de grève, de l'évaluation des risques liés aux nouvelles républiques indépendantes de la défunte URSS et de l'essoufflement de l'économie allemande.
Sterling, lanterne rouge dans le SME
La livre cotait $ 1.7785 le 2 décembre, $ 1.8885 le 27, $ 1.7505 le 17 janvier et $ 1.8050 le 22. Le Premier ministre, M. John Major, a certes remporté une belle victoire au Sommet européen de Maastricht en obtenant que la Grande-Bretagne fasse bande à part lors de l'introduction de l'Union économique et monétaire (UEM) le 1er janvier 1999, mais cela n'a pas été d'un grand secours pour la livre. Celle-ci, en effet, ployant sous le poids d'une récession tenace, du relèvement des taux en Allemagne et des rumeurs d'une éventuelle dévalorisation du sterling, voire de sa sortie du SME a glissé jusqu'à DM 2.83 par moments.
Le yen a le vent en poupe
Le yen s'échangeait à 130.05 par dollar le 2 décembre et à 123.25 le 22
janvier. L'abaissement du taux d'escompte à 4
1/2
% a été d'autant mieux supporté par le yen que le marché admettait que, dans le
sillage de la visite de M. Bush, Tokyo se déclarerait favorable à une
revalorisation du yen dans le but de rééquilibrer la balance des échanges
commerciaux entre les deux pays. Si aucune déclaration dans ce sens n'est venue
ponctuer la rencontre, la Banque du Japon, en vendant des dollars, a tout de
même fait remonter sa monnaie à son meilleur score depuis trois ans.
H.
Theiler
Aucun véritable stimulant à l'horizon
Au tournant de l'année, les marchés ne sont guère sortis de la léthargie dans laquelle ils se sont complus tout au long de 1991. Des perspectives conjoncturelles très pessimistes primant les craintes inflationnistes et l'attrait de taux d'intérêt réels à long terme relativement élevés ont émoussé l'ardeur d'acheteurs potentiels. Par ailleurs, l'incertitude planant toujours au sujet des réserves d'or de l'ancienne Union soviétique n'a en aucun cas stimulé l'intérêt des investisseurs. En outre, la diffusion d'informations alarmantes a freiné la demande physique, celle notamment de platine et d'argent, matières premières industrielles recherchées.
En effet, le platine entrant dans la fabrication des pots catalytiques a souffert de la décision prise par un des principaux constructeurs automobiles américains d'appliquer des mesures de restructuration radicales. Le résultat a été une chute du cours au-dessous du prix de l'or durant la seconde quinzaine de décembre. L'écart s'est parfois chiffré à plus de $ 20 l'once et le cours de $ 330.5 l'once du début janvier a constitué le niveau le plus bas depuis sept ans.
Les nombreuses mauvaises nouvelles, en provenance des Etats-Unis surtout,
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brisant l'espoir d'une prochaine relance de l'économie, ont pesé lourdement sur le prix de l'argent utilisé à divers titres dans l'industrie. Durant la première quinzaine de décembre déjà, le cours a crevé le plancher des $ 4 l'once. Vers la mi-janvier, il a repassé cette barre fatidique grâce à une demande plus étoffée du Moyen-Orient et de l'Extrême-Orient, créant un climat propice à un léger redressement du métal blanc.
Durant les premiers jours de décembre, l'or a grimpé à $ 371 l'once, niveau qu'il n'avait plus atteint depuis la mi-juillet. La suppression du soutien du cours par l'Union soviétique a été la cause de ce revirement. Mais par la suite, le recul a été continuel. Le manque d'intérêt des investisseurs s'est encore accentué face à des prévisions économiques déprimantes. La diminution des livraisons de l'ancienne Union soviétique, attendue pour 1992, n'a pas été profitable au marché et le métal jaune a passé temporairement au-dessous de la barre des $ 350 l'once au début janvier. Peu après, entraîné par l'argent, il s'est envolé, gagnant $ 7 l'once en un jour.
Le 22 janvier, l'or a clôturé à $ 357 l'once, tandis que l'argent s'établissait
à $ 4.26 l'once et le platine à $ 339.50 l'once.
W. Beckmann