UBS Economic Notices (fre) 7-8/1991

Panorama conjoncturel

Economie suisse: le plancher paraît être atteint

La marche des affaires de l'industrie suisse qui se détériorait depuis près d'un an, s'est stabilisée à un bas niveau au deuxième trimestre 1991. Les quelque 200 entreprises consultées dans le cadre de notre enquête trimestrielle du "Panorama conjoncturel" ont cependant fait état d'une entrée des commandes, d'une production et de ventes encore nettement inférieures aux niveaux de 1990 à pareille époque. Pour l'entrée des commandes, la tendance attendue au troisième trimestre est néanmoins à la reprise. On table principalement sur une demande vigoureuse de l'étranger. Dans la construction, la tendance à la baisse devrait s'accentuer. Le commerce de détail et le tourisme sont nettement plus optimistes.

Le Panorama conjoncturel paraît trimestriellement.

Rédaction: Beat Arnet

Industrie: L'activité devrait avoir touché son plancher en été. Les chiffres escomptés pour le troisième trimestre en ce qui concerne réserve de travail, production et chiffre d'affaires demeurent négatifs, mais moins qu'au deuxième trimestre. Un revirement se dessine visiblement dans l'entrée des commandes de l'étranger. Un accroissement des exportations est prévisible en comparaison annuelle.

Construction: Au deuxième trimestre, le volume de constructions était inférieur à celui d'il y a douze mois. L'entrée des commandes pour le troisième trimestre ainsi que la production font l'objet de pronostics encore plus négatifs qu'il y a trois mois. Quant à la capacité bénéficiaire, qui s'est dégradée - pour deux tiers des entreprises interrogées - au premier semestre 1991 en comparaison annuelle, elle devrait se détériorer encore davantage.

Commerce De Détail: Pour la plupart des gros distributeurs, les ventes en valeur ont progressé de 3 à 5% en moyenne au deuxième trimestre par rapport à ceux d'un an auparavant. Une augmentation de même proportion est attendue de juillet à septembre.

Tourisme: L'hôtellerie suisse juge l'évolution de la saison d'été 1991 (de mai à octobre) plus favorable que lors de l'enquête de mars. Près de deux tiers des 51 directeurs des offices de tourisme interrogés tablent sur une progression du nombre des nuitées, surtout des hôtes de Suisse, d'Allemagne et d'Italie.

Industrie

La marche des affaires de l'industrie suisse, qui se détériorait depuis près d'un an, s'est stabilisée à un bas niveau au deuxième trimestre 1991. Les principaux indicateurs économiques, tels que l'entrée des commandes, le chiffre d'affaires et la production ont été annoncés comme encore nettement inférieurs à ceux d'il y a douze mois par les quelque 200 entreprises interrogées pour le "Panorama conjoncturel". La situation, jugée de manière analogue à l'enquête de mars, est considérée comme à peine plus négative qu'il y a trois mois. L'utilisation moyenne de l'appareil de production a encore reculé par rapport à janvier-mars, soit de 1,1% à 83,9%, niveau inférieur de 5,5 points au record d'une année auparavant. La contraction des effectifs observée au début de 1991 s'est accélérée pendant le deuxième trimestre, l'emploi étant nettement plus bas qu'il y a douze mois.

Déjà au plancher conjoncturel?

Pour le troisième trimestre, les participants à notre enquête craignent une nouvelle dégradation des affaires par rapport à 1990. Néanmoins, les perspectives concernant l'entrée des commandes, la réserve de travail et le chiffre d'affaires sont jugées plus souriantes que l'évolution enregistrée au deuxième trimestre. Les exportations, en particulier, retrouveront un vent favorable: de l'avis des entreprises consultées, les commandes de l'étranger ainsi que les exportations devraient dépasser les chiffres d'il y a douze mois. Le recul de la production se poursuivra, il faudra s'attendre à une compression plus forte des effectifs. Une entreprise sur dix seulement comptant augmenter ses prix de vente entre juillet et septembre 1991, le renchérissement se ralentira probablement.

Une meilleure évolution est également attendue pour le quatrième trimestre. 27% des entreprises pronostiquent une amélioration de la marche des affaires par rapport au troisième trimestre, tandis que 64% d'entre elles prédisent pour les trois derniers mois de 1991 un rythme semblable à celui qui se dessine au troisième trimestre.

Evolution des secteurs en dents de scie

D'après les indicateurs conjoncturels que sont l'entrée des commandes, la production et le chiffre d'affaires, l'industrie papetière et alimentaire, de même que celle des arts graphiques ont obtenu de meilleurs résultats que la moyenne de tous les secteurs. Par contre, la marche des affaires était inférieure à la moyenne dans l'industrie métallurgique et celle des machines.

Seuls des changements mineurs devraient intervenir au troisième trimestre. L'industrie de l'alimentation et du papier, les arts graphiques, ainsi que la majeure partie de l'industrie chimique tablent sur de meilleurs résultats en comparaison annuelle, nettement supérieurs par conséquent à la moyenne de tous les secteurs. Les perspectives de l'industrie métallurgique et mécanique sont par contre nettement moins bonnes.

Retournement de tendance dans l'entrée des commandes de l'étranger

La stabilisation du recul des commandes au deuxième trimestre, telle qu'elle était escomptée dans l'enquête de mars, ne s'est pas confirmée. Par rapport à la période correspondante de l'année précédente, le solde négatif, - 27 points, n'a pas décollé du plancher du premier trimestre. Si l'amélioration annoncée n'a pas eu lieu, c'est principalement la médiocre évolution - inattendue - de l'entrée des commandes suisses qui en est responsable: avec 32 points, elle était en recul de 14 sur les pronostics. Par contre, l'entrée des commandes de l'étranger (-10%) s'est avérée moins défavorable que ne l'avaient prévu les chefs d'entreprise interrogés il y a trois mois (18%). Pour le troisième trimestre, ils tablent sur une nette reprise. Alors que, de l'avis des intéressés, les commandes suisses devraient rester au-dessous du niveau d'un an auparavant (-8%), celles de l'étranger fourniront probablement des stimulants positifs (+13%).

Production toujours en recul

Déjà inférieure de 2% au premier trimestre en comparaison annuelle, la production a de nouveau baissé d'avril à juin pour 15% des entreprises interrogées. Celles-ci s'attendent à un tassement également pour le troisième trimestre.

A fin juin 1991, la réserve de travail dépassait celle de mars pour 20% des entreprises, alors qu'elle était inchangée pour 42% d'entre elles et inférieure pour les 38% restant. D'une année à l'autre, elle a même diminué dans 37% (solde) des entreprises. Cette tendance négative devrait quelque peu s'estomper au troisième trimestre, car la majorité des participants à l'enquête tablent, pour fin septembre, sur une réserve de travail comparable à celle d'il y a trois mois. Toutefois, 22% des entreprises s'attendent toujours à une contraction.

Diminution des effectifs plus prononcée

Au deuxième trimestre, l'utilisation moyenne de l'appareil de production est revenue à 83,9%. Ce recul est de 1,1% par rapport à janvier-mars et même de 5,5% d'une année à l'autre. Pour le troisième trimestre, les entreprises s'attendent toutefois à une légère augmentation.

Au cours du deuxième trimestre, toutes les branches - à l'exception de l'industrie papetière - ont procédé à une nouvelle réduction des effectifs. Par rapport aux trois premiers mois, 36% des entreprises ont annoncé une baisse, seules 7% d'entre elles faisant état d'une augmentation. En comparaison annuelle, les effectifs ont reculé dans 25% des entreprises. Cette tendance négative devrait persister, 19% des entreprises escomptant une compression du personnel de juillet à septembre.

Stimulants attendus de l'étranger

Au deuxième trimestre, les ventes sont demeurées au-dessous de leur niveau d'un an auparavant (-9%). L'amélioration constatée par rapport à l'enquête de mars (-15%) est à attribuer principalement aux exportations, certes toujours en recul en comparaison annuelle, mais pas autant que le prévoyaient les entreprises il y a trois mois. 7% d'entre elles tablent sur une augmentation des ventes à l'étranger au troisième trimestre par rapport à celui de 1990. Par contre, on s'attend à une stagnation des chiffres d'affaires en comparaison annuelle du fait de l'évolution des ventes en Suisse.

Après la poussée des prix de vente pendant les trois premiers mois de 1991, seules 4% des entreprises les ont encore relevés. En comparaison annuelle, 62% des participants à l'enquête annonçaient une hausse de leurs prix et 15% seulement une baisse. Au cours du troisième trimestre, les prix devraient continuer de marquer le pas, 6% à peine des entreprises entendant majorer les leurs, qui dépasseront toutefois ceux d'une année auparavant pour 44% (solde) des entreprises.

Tassement de la pression des coûts en vue

Au cours des six premiers mois, près de la moitié des entreprises ont fait état d'un alourdissement des charges salariales de l'ordre de 3 à 6% par employé, alors qu'une sur trois a annoncé un relèvement de plus de 6%. Le renchérissement des matières premières et des produits semi-finis a été moindre: de 0 à 3% pour 60 % des entreprises interrogées, de 3 à 6% pour un tiers d'entre elles. Un tassement des coûts se dessine pour le second semestre. En comparaison avec les six premiers mois, 75% des entreprises pronostiquent un nouvel accroissement des charges salariales de 0-3%, 20% une hausse de 3 à 6%. Pour la même période, pour les matières premières et les produits semi-finis, 80% des intéressés s'attendent à un renchérissement de 0 à 3% et une entreprise sur six à une hausse de 3 à 6%. Bruno Bébié

Construction

Au premier trimestre 1991 , deux tiers des entrepreneurs en bâtiment interrogés par l'Union de Banques Suisses et la moitié de ceux du génie civil ont mentionné un fléchissement de l'entrée des commandes par rapport à la même période de 1990, tandis que 10% d'entre eux ont constaté une progression. Si dans le bâtiment, le solde négatif s'est légèrement amélioré de 3 points en un trimestre, celui du génie civil a chuté de 13 points. Selon notre sondage, le volume des constructions est demeuré inférieur au niveau de 1990 pour la moitié des entreprises du bâtiment et le génie civil a atteint un solde négatif de 16 points. En juin 1991, seuls deux entrepreneurs parmi 39 ont augmenté leurs effectifs par rapport à juin 1990, 59% d'entre eux les ont réduits. Les prix des prestations dans le bâtiment ont continué de se replier entre mars et juin 1991 dans 56% des entreprises et se sont maintenus pour 44% des participants à l'enquête. Durant le même laps de temps, les prix du génie civil ont régressé pour 34% des entreprises interrogées.

Au troisième trimestre 1991, la situation devrait se dégrader un peu plus. Le volume des constructions

reculera de 5,8% pour le bâtiment et de 13% pour le génie civil par rapport à la même période de l'année précédente. L'entrée des commandes pour le bâtiment devrait être inférieure à celle de l'année précédente, et cela dans une plus forte mesure qu'au deuxième trimestre. Quant aux effectifs à fin septembre 1991, ils devraient être considérablement inférieurs à ceux de 1990, les prix des prestations tant dans le bâtiment que dans le génie civil devant reculer pour un tiers des entreprises interrogées.

Pour deux tiers des entrepreneurs, la capacité bénéficiaire a diminué au premier semestre 1991, tandis qu'elle est restée stable pour à peine un tiers d'entre eux par rapport à juin 1990. Au second semestre 1991, la situation devrait empirer, 67% (solde) des entrepreneurs escomptant une aggravation de leur situation financière.

Selon l'ensemble des entrepreneurs interrogés, la récession sévissant dans le secteur de la construction est due aux taux d'intérêt élevés. Les mesures fédérales contre la spéculation foncière et les abus en matière de location sont également mises en cause par un tiers d'entre eux, tandis que 13% invoquent la cherté des terrains. Rudolf Enz

Commerce de détail

Selon notre enquête trimestrielle, le chiffre d'affaires s'est accru de 3 à 5% au deuxième trimestre par rapport à avril-juin 1990. Dans l'alimentation, boissons et tabac, les gros distributeurs interrogés ont obtenus de meilleurs résultats que dans l'habillement, le textile et les autres secteurs non alimentaires. Au premier semestre 1991, les gros distributeurs consultés ont à peu près réalisé les chiffres d'affaires escomptés, voire les ont surpassés dans l'alimentation.

Entre avril et juin, les prix d'achat avaient tendance à être plus élevés qu'au cours des trois premiers mois de 1991. Ils ont principalement augmenté dans l'alimentation, le textile et l'habillement, tandis que pour les articles ménagers et les autres secteurs non alimentaires ils sont restés inchangés selon la majorité des personnes interrogées. Une partie du renchérissement a pu être répercuté sur les prix de vente qui, d'après le sondage, ont augmenté de 4% au deuxième trimestre comparé à l'année précédente. Pour le troisième trimestre, les gros distributeurs interrogés escomptent une progression des chiffres d'affaires de 4% par rapport à 1990. Ils prévoient une amélioration de la marche des affaires

dans tous les secteurs, à l'exception du secteur non alimentaire pour lequel certains craignent une stagnation. Une évolution analogue s'annonce pour l'ensemble de 1991. Entre juillet et septembre, les prix d'achat devraient se stabiliser au niveau du trimestre précédent pour une bonne moitié des participants à l'enquête alors qu'ils devraient augmenter pour l'autre moitié, en particulier dans les secteurs alimentation, articles ménagers et autres articles non alimentaires. Les prix de vente devraient augmenter surtout dans les secteurs alimentation, boissons et tabac; on s'attend pour 1991 à une augmentation moyenne pour l'ensemble du commerce de détail de 3 à 4%. Elisabeth Messner

Tourisme

Les résultats de notre sondage de juin livrent des prévisions pour la saison d'été (mai-octobre) de l'hôtellerie suisse quelque peu plus optimistes que celles de notre sondage de mars. Près de deux tiers des 51 directeurs d'offices de tourisme interrogés tablent sur un accroissement des nuitées par rapport à l'année précédente, alors qu'un quart d'entre eux prévoient une stagnation. Les taux de progression pronostiqués se situent autour de 2-3%, voire sont supérieurs. Dans la parahôtellerie, les prévisions d'augmentation et de stagnation se contrebalancent. On se montre plus optimiste pour les hôtes suisses que pour les étrangers. Deux tiers des directeurs d'offices de tourisme escomptent une augmentation des nuitées de vacanciers suisses alors qu'un tiers prévoit une progression des réservations étrangères. L'afflux des hôtes allemands et italiens surtout devrait être plus fort, tandis que le nombre des arrivées en provenance des autres pays principaux devrait demeurer largement inchangé. En raison de la crise du Golfe et de la récession, on attend moins de touristes des Etats-Unis. En revanche, les problèmes écologiques touchant certaines plages méditerranéennes ravivent l'attrait des vacances en montagne et se répercutent positivement sur le tourisme en Suisse. Irene Meier

La problématique du sol et du logement

Une avalanche de propositions et de mesures pour "résoudre" les problèmes posés par le sol et le logement ont été présentées au public l'an dernier. Par contre, l'analyse des mécanismes économiques jouant sur le marché foncier et celui du logement est presque toujours absente du débat.

Le lent processus d'ajustement sur le marché immobilier et du logement

La flambée des prix des terrains et des logements n'est du point de vue économique que le signe manifeste de la pénurie régnant sur ces marchés. De toute évidence, la demande augmente beaucoup plus rapidement que l'offre. Le problème spécifique du sol est qu'il s'agit d'un facteur de production non susceptible de s'accroître. Cette propriété le différencie des autres facteurs. L'inextensibilité physique est au coeur des problèmes posés par le sol sous un double aspect. D'une part, la croissance économique entraîne une augmentation constante du capital humain et foncier, alors que le sol disponible ne varie pas. D'autre part, l'inextensibilité signifie que l'offre de biens-fonds réagit mal aux modifications de son rendement. Concernant la question d'une imposition optimale du sol, cette inélasticité de l'offre globale est un élément crucial de réflexion.

Le renchérissement tendanciel du sol dans une économie en pleine croissance signifie aussi que les prix relatifs des biens et des services faisant un recours intensif au facteur sol augmentent constamment. Exemple principal: le coût de l'habitat. C'est pourquoi la hausse des loyers en termes réels est incontournable à long terme.

Le caractère de valeur patrimoniale du sol est un autre de ses aspects fondamentaux. A l'instar des autres titres de propriété, il est en principe aliénable en tout temps. Mais c'est aussi une donnée de base de l'activité économique que la valeur patrimoniale - donc aussi la propriété foncière - n'est aliénée ni achetée tant que le rendement réel attendu égale le rendement d'autres valeurs patrimoniales. C'est pourquoi, vu la hausse en termes réels des rentes foncières, l'arbitrage au niveau du rendement doit nécessairement entraîner une augmentation des prix (réels) du sol. Seul un renchérissement du sol en tant que valeur patrimoniale peut empêcher un déséquilibre au niveau du rendement et ainsi un délaissement des autres valeurs réelles au profit du sol.

La relation dynamique entre la raréfaction croissante du sol et la hausse des loyers est atténuée par le fait que la Suisse est actuellement parfaitement intégrée sur les marchés internationaux des biens et des capitaux. Il en résulte en particulier que l'industrie suisse ne doit pas obligatoirement supporter une détérioration de son rendement du capital due à la hausse des prix fonciers. Elle peut transférer des unités de production à l'étranger. Cela ralentit la progression de la demande foncière, modère la hausse des prix du sol et libère des terrains à des fins d'habitation.

Le sol devenant un bien de plus en plus rare en Suisse, son utilisation dans les fonctions économiques et autres doit être aussi parcimonieuse que possible. On ne peut y arriver que si les marchés immobilier et du logement reflètent exactement cette pénurie, c'est-à-dire lorsque les prix fluctuent aussi librement que possible. L'opinion que la hausse des prix des terrains est attribuable à une défaillance du mécanisme des prix n'est certainement pas correcte. Au contraire, les marchés remplissent assez bien leur fonction d'attribution, malgré les nombreuses interventions de l'Etat préjudiciables au mécanisme du marché et le manque de transparence. Ils le font parce qu'une grande partie du sol en Suisse est constitué de propriétés privées librement négociables et que leur dispersion est généralement assez large pour limiter les distorsions au niveau de la concurrence.

Le rôle de l'Etat

Le droit à la propriété privée n'est cependant pas absolu et peut être restreint par la Constitution. Elle prévoit - et cela est justifié - en particulier l'ampleur et le genre de restrictions apportées à l'utilisation privée du sol (aménagement du territoire), car celui-ci joue dans certaines de ses fonctions le rôle de bien public: par exemple, en tant qu'espace de repos ou comme support de formes de vie dignes d'être conservées mais économiquement menacées (agriculture). Or il est connu que le pur mécanisme de marché est inadéquat pour les biens publics.

Outre l'aménagement du territoire, un autre rôle essentiel incombe à l'Etat. Il lui revient d'intervenir au niveau social pour rémédier aux cas de rigueur résultant des mécanismes du marché. Le jeu des forces du marché peut avoir - lorsqu'il affecte des besoins vitaux tel que le logement - des conséquences dévastatrices pour les couches économiquement défavorisées. Tant que le principe de solidarité reste fermement ancré dans l'esprit de la population suisse, l'Etat se doit d'apporter son soutien aux personnes concernées. Mais il est cependant essentiel que sa fonction de distribution perturbe le moins possible le mécanisme des prix. Du point de vue de l'économiste, la seule voie praticable est l'aide directe aux intéressés: par exemple, l'octroi d'allocations de logement selon des critères parfaitement définis ou des déductions de loyer du revenu imposable des couches de la population socialement défavorisées.

Les mécanismes de résorption épargnant le marché

La collecte efficace de fonds est l'un des principaux problèmes rencontré par l'Etat dans sa fonction de distribution. Bien que les fonds ne doivent pas provenir exclusivement de l'imposition des revenus du sol et des immeubles, nous nous concentrons sur l'imposition des biens-fonds, car la plus grande incertitude règne dans ce domaine au niveau du débat politique.

Le principe économique applicable est le suivant: l'Etat devrait concentrer ses prélèvements fiscaux sur les revenus des facteurs de production dont l'offre réagit aussi peu que possible aux modifications du revenu. Cela garantit à la répartition efficace des ressources assurée par le marché de n'être affectée que de façon minime par la perception de l'impôt. Il est essentiel, pour cette raison, de séparer clairement les diverses sortes de revenus provenant du sol et du logement d'après leur fonction économique.

En ce sens, on doit d'abord distinguer entre revenu tiré uniquement de la propriété du sol et revenu provenant de la propriété d'immeubles. Les immeubles constituent - à l'instar des machines et des entrepôts - des immobilisations corporelles produites et nécessitant un entretien constant. A l'inverse du sol, l'offre à long terme en immeubles dépend ainsi de la propension à épargner et à investir, c'est-à-dire du rendement du capital. Ensuite, il convient de faire la différence entre deux types de revenus fonciers: revenu provenant de la propriété du sol (rente) et revenu tiré du commerce du sol (arbitrage ou spéculation). D'un point de vue économique, et contrairement à une opinion largement répandue, ce n'est pas le gain provenant du commerce, mais celui tiré de la propriété du sol que l'Etat devrait principalement imposer. La raison est facile à comprendre: la simple possession du sol ne correspond pas à une prestation économique passée, actuelle ou future - à l'inverse de la propriété des immeubles construits ensuite - et ne comporte aucun risque. L'offre réagit donc en conséquence de manière peu élastique aux modifications de la rente du sol. En revanche, le revenu tiré du négoce de terrains à bâtir exerce une fonction stimulante. Il suffit pour cela de constater que l'arbitrage représente l'achat et la vente simultanée (exempte de risque) de terrains sur la base d'une recherche coûteuse d'informations concernant les meilleures possibilités d'utilisation d'une parcelle; alors que la spéculation est l'appréciation entachée de risque de la pénurie future de terrains. Les deux sont des prestations économiquement précieuses, basées sur le travail et/ou des biens corporels immobilisés.

Les principes fiscaux suivants s'imposent donc d'un point de vue macroéconomique: les revenus tirés de la propriété et du négoce d'immeubles, ainsi que du négoce de terrains doivent être imposés comme revenus: Les revenus provenant de la propriété de terrains (soit la rente foncière annuelle d'un bien-fonds après déduction des amortissements et du rendement usuel du capital sur les constructions) peuvent être imposés davantage. Une imposition supérieure pourrait être évidemment facilement interprétée comme une "collectivisation" du sol et être considérée comme incompatible avec une économie de marché basée sur la propriété privée. A tort cependant, car la propriété privée et la négociabilité des terrains n'en seraient pas affectés. L'argument économique pour une imposition plus musclée de la rente foncière demeure valable. En outre, cette imposition du sol permettrait d'abaisser le taux fiscal sur les revenus du travail et des biens corporels immobilisés, le produit global de l'impôt restant toutefois le même. Il y aurait stimulation de la croissance et ainsi amélioration de la compétitivité internationale.

Les aspects monétaires

Abstraction faite de la composante économique, la problématique du sol et de l'habitat présente aussi des aspects monétaires. Comme nous l'avons déjà laissé entendre, ce sont principalement les périodes d'inflation virulente qui rallument le problème du logement pour l'ériger au rang de "problème" public. Ceci pour deux raisons. La principale étant certainement l'intervention, néfaste, spécifiquement suisse et dépourvue de toute logique économique, de l'Etat sur le marché, à savoir le jumelage des loyers et des taux hypothécaires. Ce jumelage est basé, d'une part, sur l'idée que les intérêts hypothécaires sont le principal élément de coût du propriétaire d'immeuble et, d'autre part, sur l'hypothèse que les loyers ne doivent pas être supérieurs à la "couverture des coûts". Toutes deux sont confuses. La première néglige le fait qu'en période d'inflation le relèvement du taux d'intérêt nominal n'est rien d'autre que la tentative des marchés des capitaux d'empêcher une érosion des taux réels. A noter à ce sujet que les charges hypothécaires réelles baissent habituellement dans les périodes de renchérissement, comme ces quatre dernières années l'ont amplement illustré. La seconde oublie que le prix d'équilibre d'un bien ou d'un service dépend de l'offre (c'est à dire des coûts de production), mais aussi de la demande.

Un marché du logement fonctionnant sans entrave laisse les loyers augmenter au même rythme que le niveau général des prix (soit des loyers inchangés en termes réels), lorsque l'offre et la demande progressent uniformément. Si la demande croît à un rythme supérieur à l'offre, les loyers augmentent proportionnellement plus rapidement que le niveau général des prix (les logements deviennent plus chers en termes réels) et vice versa en cas d'amplification relativement forte de l'offre. Le niveau nominal des taux hypothécaires n'influence pas les prix, lorsque les ajustements s'effectuent librement sur le marché du logement. En revanche, une accélération de l'inflation entraîne une diminution constante en termes réels des loyers et un surcroît de la demande, si les loyers sont malgré tout artificiellement liés aux taux hypothécaires. Les distorsions entre loyers trop bas pour les anciens logements (liés aux taux hypothécaires) et loyers conformes aux conditions du marché pour les nouveaux logements s'élargissent. Il en résulte le phénomène bien connu du cloisonnement quasi étanche des prix du marché du logement entre anciens et nouveaux immeubles. Les conséquences sont des loyers trop bas et la sous-occupation des anciens logements et des loyers excessifs pour les nouveaux.

La seconde raison pour laquelle les problèmes du sol et de l'habitat s'accentuent en période d'inflation tient au fait que son accélération renchérit la détention d'actifs financiers non productifs d'intérêts et entraîne des pertes en capital sur les obligations et les instruments analogues rémunérés en valeur nominale. Il en résulte une "fuite vers les valeurs réelles", c'est-à-dire un transfert des éléments patrimoniaux, principalement en faveur de la propriété foncière. D'où une hausse supérieure à l'inflation, passagère mais très rapide, des prix des terrains. Peter Buomberger et André Burgstaller

Chronique boursière

Une bonne opportunité d'investissement: le Japon

Bien que les marchés boursiers internationaux aient gagné en dynamisme en juin, ils ont marqué une divergence de tendance due à des facteurs d'origine diverse.

Aux Etats-Unis , les indicateurs conjoncturels laissent préfigurer une fin prochaine de la récession, rendant par là même peu probable une nouvelle détente des taux d'intérêt par la Réserve fédérale. La Bourse américaine ayant en partie déjà anticipé le redémarrage de l'économie, elle aurait tendance à être par trop capitalisée. Indépendamment de la possibilité ménagée aux investisseurs étrangers de réaliser des gains de cours, les titres de certains secteurs recèlent néanmoins un potentiel de plus-values substantielles: automobile, commerce de détail, compagnies pétrolières, électrotechnique et chemins de fer.

L'économie britannique est toujours plongée dans la récession. De surcroît, le climat boursier s'est détérioré sous l'effet des résultats décevants des entreprises et du nombre croissant d'émissions de droits de souscription. Après avoir déjà occasionné une détente en cascade des taux d'intérêt, le ralentissement de l'inflation laisse présager un nouvel abaissement du loyer de l'argent. Une amélioration des sondages en faveur du parti conservateur et l'apparition des prémices d'une reprise de la conjoncture pourraient redonner vigueur au marché. Aussi misons-nous en particulier sur les valeurs du secteur pharmaceutique et de l'alimentation.

En Suisse , l'activité a fortement ralenti alors que l'inflation et le loyer de l'argent plafonnent toujours à un niveau élevé. Face aux incertitudes liées au développement de l'économie, le Swiss Performance Index (SPI) s'est contenté au deuxième trimestre de fluctuer au sein d'une fourchette étroite. Pour l'heure, la Bourse suisse fait preuve d'une bonne résistance. Tout porte à croire cependant qu'elle devrait montrer de meilleures dispositions à l'égard des titres de premier ordre ("blue chips") qui bénéficient de la fermeté du dollar: assurances, pharmacie, chimie, alimentation.

L'intégration des nouveaux Länder se révèle être un fardeau lourd à supporter pour l'économie allemande . Bien que l'industrie est-allemande ait enregistré pour la première fois une progression des commandes, le creux de la vague ne devrait être atteint qu'au troisième trimestre seulement. Pour l'instant, la Bourse allemande se ressent de la forte augmentation des impôts intervenue le 1er juillet dans le but de financer la réunification. Les germes inflationnistes qu'elle renferme ont attisé la crainte d'une tension des taux d'intérêt et contribué - conjointement à la décision du Tribunal constitutionnel d'autoriser l'imposition des revenus du capital - à la déprime des cours. Les actions allemandes recèlent de ce fait un potentiel de plus-values et devraient marquer une légère reprise au second semestre. Nous recommandons en particulier les valeurs de l'électrotechnique, de la construction et du commerce de détail.

Au Japon , l'activité a été particulièrement soutenue au premier semestre, n'incitant en rien la Banque du Japon à assouplir sa politique monétaire. Découragée, la Bourse a encore amplifié son mouvement de baisse à la suite des scandales qui ont éclaboussé les principales sociétés de courtage japonaises. En vain, la banque centrale a tenté de stabiliser les cours en abaissant son taux d'escompte, la confiance des petits investisseurs ayant été ébranlée. Le moment semble donc opportun pour investir sur le marché japonais. Considérées en fonction de la prime de risque (rapport entre le rendement des actions et celui des obligations), les actions japonaises sont à l'heure actuelle sous-capitalisées. Lors d'achats, on privilégiera les sociétés de l'électronique à vocation exportatrice et de la construction mécanique ainsi que celles engagées dans l'automatisation industrielle et la technologie de l'environnement. En raison des particularités spécifiques à la Bourse japonaise , particularités qui échappent souvent à l'investisseur occidental, une large diversification paraît s'imposer. S. Mehlisch

Marchés de l'argent et des capitaux

Evolution en dents de scie

La désescalade des taux s'est provisoirement interrompue en juin. Observée sur les marchés internationaux depuis le début de 1991, elle avait concerné la plupart des monnaies. Les bouleversements n'ont donc pas eu lieu au niveau du loyer de l'argent, mais des taux de change. Alors que de nouvelles baisses des taux d'intérêt se faisaient partout attendre, sauf au Japon, le dollar s'est de nouveau envolé. Dopé par la perspective d'un amélioration de la conjoncture américaine, il a creusé l'écart vis-à-vis du yen, mais aussi des monnaies européennes. En Suisse, les taux d'intérêt n'ont pratiquement pas bougé en juin, en raison de la forte poussée de l'inflation et du niveau toujours élevé des taux allemands.

L'envol du dollar stoppe provisoirement...

Les premières lueurs d'espoir à l'horizon conjoncturel nord-américain donnent à penser que les taux du court terme sur le dollar ont atteint leur plancher dans le présent cycle de croissance. Alors que les taux des fonds fédéraux oscillent depuis assez longtemps autour de

5 3/4%, les eurotaux à trois mois avoisinent 6 1/8%. La courbe abrupte de la structure des taux des placements en dollars est particulièrement frappante. Bien que les taux du court terme aient fortement reculé ces derniers mois, ceux du long terme se sont parfois raidis. Une des explications les plus souvent avancées est la pénurie internationale de capitaux. Celle-ci ne résulte toutefois - abstraction faite de l'énorme endettement allemand - que d'extrapolations peu judicieuses des besoins. En outre, les derniers chiffres du renchérissement américain et la croissance quasi linéaire prévisible de l'économie nord-américaine ne permettent guère d'envisager une accélération de l'inflation. C'est pourquoi le niveau élevé des taux du long terme est dû plutôt aux problèmes structurels des Etats-Unis. Les entreprises doivent recourir davantage au marché des capitaux, du fait que les banques restructurent leurs bilans et limitent la progression des crédits. Par ailleurs, un nombre considérable de titres ont été émis pour procéder au sauvetage des caisses d'épargne en pleine déconfiture. Mais les investisseurs n'absorbent ces titres que si les taux du marché des capitaux progressent suffisamment par rapport à ceux du court terme pour que la substitution de placements à court terme par d'autres à plus long terme (rendements supérieurs) devienne attrayante.

A la réunion des ministres des finances et des gouverneurs des banques centrales du G7 en vue de préparer le sommet économique de Londres à la mi-juillet, les sept pays les plus industrialisés ont exprimé leur volonté de maîtriser la hausse du dollar et sont tombés d'accord pour que chaque pays fixe ses taux d'intérêt en fonction des exigences posées par les conjonctures nationales.

....la décrue des taux au Japon...

Le léger tassement de la croissance, néanmoins soutenue, le recul de l'inflation et l'expansion modérée de la masse monétaire ont incité la Banque du Japon à ramener son taux d'escompte de 6% à 5 1/2% le 1er juillet. En outre, cette désescalade va dans le sens de la coordination internationale visant à assurer une croissance économique continue. La faiblesse de la Bourse japonaise, due aux divers scandales, devrait également avoir joué un rôle dans la décision de la banque centrale de réduire ce taux directeur. Par la suite, les taux du court terme se sont repliés de 50 points de base à 7,6%, tandis que les cours des actions ont fortement haussé.

...et en Europe

Les taux de change vis-à-vis du dollar et plus particulièrement au sein du SME ont déterminé la politique monétaire de la plupart des pays européens. Aucun réajustement n'étant actuellement à l'ordre du jour dans le SME (la peseta est la monnaie la plus forte, le franc français la plus faible), les taux d'intérêt français ont été fortement relevés pour soutenir le franc, bien que l'économie française eût grand besoin d'un relâchement des rênes monétaires. En Grande-Bretagne, les rendements obligataires sont restés relativement stables, malgré la désescalade des taux du court terme, une période de récession plus longue que prévue et le fléchissement de l'inflation. En Allemagne, le relèvement parfois appréhendé des taux directeurs ne s'est pas produit, bien que la Bundesbank ne voie pas l'envolée du dollar d'un très bon oeil. Les taux du marché des capitaux n'ont pratiquement pas bougé, malgré la fermeté du billet vert et les rendements accrus sur le marché américain du long terme, jusqu'au moment de la reprise agitée du débat sur la taxation des revenus du capital à fin juin. La rémunération élevée de l'argent en Allemagne a obligé aussi toutes les monnaies liées directement ou indirectement au mark à maintenir des taux semblables.

Nivellement de la structure des taux de l'eurofranc

Les taux de l'eurofranc à trois mois, encore supérieurs aux taux allemands correspondants il y a juste un an, sontde 1% inférieurs depuis quelques mois déjà. Néanmoins, le franc suisse fait étonnamment bonne figure jusqu'à présent vis-à-vis du mark. La structure des taux de l'eurofranc reste stable aux abords de 8% pour les placements jusqu'à un an de terme. L'échéance semestrielle n'a pas donné lieu à des tensions.

Emprunt de la Confédération à 6 1/4%

Le dernier emprunt fédéral, dont les conditions ont suscité quelque surprise, a été émis au pair et a totalisé Fr. 302 millions. Il se situe ainsi à 40 points de base au-dessus de la moyenne mensuelle du rendement moyen des obligations de la Confédération, qui a légèrement haussé dernièrement. L'inflation toujours aussi virulente en Suisse incitent encore les investisseurs à la prudence. L'effet de base du renchérissement, l'impact progressif de la politique monétaire restrictive et la faible croissance de l'économie laissent espérer cependant sa décélération au second semestre. La forte baisse des taux des swaps d'une durée de un à dix ans indique que les opérateurs du marché escomptent la même chose. Par ailleurs, le bas niveau des taux à long terme en comparaison internationale et la surévaluation du franc, mesurée à la parité des pouvoirs d'achat, rendent la monnaie suisse extrêmement attrayante pour les débiteurs étrangers, d'autant qu'elle ne devrait guère s'apprécier en perspective du marché unique de 1992. Inversement, les investisseurs se montrent plutôt réticents. A. Schlegel

Un nouveau fonds de placement: "UBS Capital Invest - 90/10 SFR"

Les marchés financiers ont été caractérisés ces dernières années par d'importantes fluctuations de cours et une extrême volatilité. C'est pourquoi nombre d'investisseurs désirent limiter les risques de leurs placements, mais profiter aussi d'éventuelles plus-values substantielles sur les marchés boursiers! Avec le fonds "UBS Capital Invest - 90/10 SFR", l'UBS lance un nouveau montage répondant aux exigences de très nombreux investisseurs. Un produit qui combine de façon optimale placements à revenu fixe et certificats d'option - donc sécurité et risque.

D'une durée de trois ans, le nouveau fonds a le franc suisse pour monnaie de référence. La fortune du fonds est investie à raison de 90% en obligations et placements monétaires en francs suisses et les revenus sont capitalisés. Nous accordons la priorité à la diversification, à la qualité des débiteurs et à une structure des échéances en fonction des perspectives au niveau des taux d'intérêt. L'objectif de placement est de maintenir le capital versé. La part de la fortune investie en titres à revenu fixe permet ce maintien, même si la Bourse s'oriente à la baisse.

10% du portefeuille sont investis en certificats d'option, principalement en warrants sur indices internationaux d'actions. Les certificats d'option sur indices constituent un instrument souple et avantageux pour s'engager sur un marché boursier et offrent simultanément une diversification internationale optimale.

"UBS Capital Invest --90/10 SFR" concilie de manière simple et intéressante la sécurité - 90% des placements sont effectués en titres à revenu fixe en francs suisses - et l'attrait du risque - 10% permettent de participer aux performances des Bourses internationales. Il s'adresse à un large public d'investisseurs mettant l'accent sur le maintien du capital, mais qui ne veulent pas pour autant renoncer aux performances offertes par des Bourses bien orientées. R. Locher, R. Garobbio

Marché des changes

Réunion du Groupe des Sept: l'art de la redite

Les efforts des Etats-Unis visant à faire progresser la réduction globale des taux ont eu moins de succès en juin, car ceux du marché monétaire des principaux pays industrialisés ont évolué sans tendance bien définie. Les marchés des changes ont donc reflété sur de longues périodes les aléas de la conjoncture. L'espoir, conforté par de nombreuses données conjoncturelles, de voir les Etats-Unis sortir prochainement de la récession a joué un rôle prédominant. Dans ce contexte, le dollar s'est envolé, mouvement que dix banques centrales, rangées derrière la Banque du Japon, n'ont pu que relativement contrer dans la première moitié du mois. C'est principalement sur l'insistance de Tokyo que le Groupe des Sept s'est réuni à Londres, où il n'a fait que confirmer par une déclaration purement verbale sa position adoptée fin avril à Washington: soit poursuivre une étroite coopération et intervenir, si besoin est, sur le marché des changes par le biais d'actions concertées afin de maintenir un certain équilibre. Pour le reste, le marché a été sensible à l'alignement unilatéral du mark finlandais sur l'écu, aux bruits courant sur l'assujettissement de la peseta à la marge de fluctuation étroite du mécanisme du SME, au dégel politique en Australie (retrait du ministre des finances, M. Keating), aux troubles en Yougoslavie, à la discussion sur la retenue à la source en Allemagne et la baisse du taux d'escompte, début juin, au Japon.

Impressionnante robustesse du dollar

Le dollar a évolué comme suit: Fr. 1.4825 le 3 juin, Fr. 1.5.655 le 18, Fr. 1.5255 le 20, Fr. 1.5915 le 5 juillet. L'optimisme propagé par la Réserve fédérale ainsi que la hausse des l'indicateurs annonçant un redressement de l'économie américaine ont fait disparaître les perspectives de nouvelles réductions des taux et ont poussé le dollar vers le haut. Il s'agissait, entre autres, de la première augmentation de l'emploi - agriculture exceptée - depuis juin 1990, du recul des demandes d'allocation de chômage, de la hausse des commandes de biens de consommation; l'indice composite étant dans son ensemble en nette reprise. Dans la foulée, le billet vert a atteint son plafond de dix-huit mois, subissant quelques réactions momentanées dues à des prises de bénéfice, à des interventions des banques centrales, aux rumeurs d'un prochain relèvement des taux en Allemagne ainsi qu'aux craintes d'une éventuelle intervention concertée des gendarmes monétaires. Le marché n'a que peu tenu compte de la publication de données économiques défavorables et de la déclaration du Trésor selon laquelle les Etats-Unis ne sont pas intéressés à une nouvelle appréciation du dollar, de sorte que ces facteurs n'ont pas eu de véritable impact sur la monnaie américaine.

Le mark déprimé

Le mark cotait 1.7185 par dollar le 3 juin, 1.8185 le 24, 1.7785 le 25, 1.8430 le 5 juillet. Par rapport au franc suisse, il se négociait à Fr. 85.20 le 3 juin, Fr. 86.66 le 26, Fr. 86.18 le 5 juillet. L'envolée du mark allemand à son apogée sur 15 semaines par rapport au franc suisse, due à l'amenuisement du pessimisme affiché envers l'économie des cinq nouveaux Länder et au retour de la Bundesbank à la maîtrise de l'approvisionnement en liquidités - par le biais du procédé d'incitation par les taux (=potentiel de hausse des taux pour l'argent au jour le jour) - a fait long feu. Les facteurs intérieurs contribuant aux pertes de terrain du mark ont notamment été l'inflation, qui ne pourra être maintenue à son dernier niveau de 3,5% du fait de l'augmentation des impôts indirects en juillet; les premiers déficits de la balance commerciale enregistré depuis 1981; ainsi que la décision du Tribunal constitutionnel de Karlsruhe de rétablir la retenue à la source sur les revenus du capital.

La livre au-dessous de son cours pivot

La livre cotait $ 1.7185 le 3 juin, $ 1.6065 le 18, $ 1.6475 le 20, $ 1.6000 le 5 juillet. La crainte que la chute de popularité des conservateurs n'amène le gouvernement à réduire précipitamment les taux dans l'optique des élections qui se tiendront au plus tard en juillet 1992, ainsi que les divisions au sein de l'exécutif sur la politique européenne ont eu pour effet une rétrogradation de la livre dans le SME. La pression sur la livre, la portant au-dessous du cours pivot SME de DM 2.95, a été plus marquée encore en raison de la faiblesse temporaire de la peseta à la mi-juin, qui a contraint à tirer vers le bas la limite inférieure effective d'intervention du taux indirect £/DM.

Le yen à son plus haut de 19 mois par rapport au franc

Le yen s'échangeait à 136.25 par dollar le 3 juin, à 142.00 le 13, 137.65 le 28 et 139.30 le 5 juillet. Dans le contexte d'une Bourse à nouveau baissière, après que l'espoir d'une détente de la politique des taux se fut progressivement estompé, Tokyo a contré un affaiblissement du yen, à coups de déclarations véhémentes accompagnées de ventes de dollars. Outre le dollar, la monnaie nipponne s'est avérée la plus forte, en raison de l'attitude résolue des autorités monétaires, de la croissance des excédents commerciaux ainsi que des rapatriements de capitaux, et cela en dépit des scandales ayant secoué les principales sociétés de courtage. L'abaissement du taux d'escompte par la Banque du Japon, visiblement anticipé, n'a pas occasionné d'autre pertes de cours du yen. H. Theiler

Hausse de l'argent

En juin, le métal blanc a aiguilloné passagèrement le marché. Vers le mi- lieu du mois, les cours ont grimpé et largement dépassé la barre des $ 4.50 l'once. La ranimation de la demande de l'industrie photographique surtout a été à l'origine de cette hausse subi- te. En outre, un rapport de l'Institut américain de l'argent à Washington an- nonçant un déficit de production de l'ordre de 24,2 millions d'onces pour 1990, le premier depuis 1978, y a cer- tainement aussi contribué. Pour 1991, il devrait atteindre 32 millions d'on- ces. Les besoins, de la bijouterie no- tamment, sont en constante progres- sion. Durant la seconde quinzaine de juin, les cours ont quelque peu recu- lé, demeurant cependant nettement au-dessus du niveau du début du mois.

La flambée de l'argent s'est reflétée sur le marché de l'or. Après que son cours se fut notablement affermi à la fin mai déjà, réagissant à une forte demande en provenance du Moyen-Orient, il s'est encore accru peu avant la mi-juin et a évolué par intermittence au-dessus de $ 370 l'once. Par la sui- te, les cours se sont effrités sous l'effet de ventes de diverses banques centrales entre autres. A la fin juin, l'aggravation de la crise politique en Yougoslavie a réveillé l'intérêt pour le métal jaune. Mais les facteurs fon- damentaux influençant le marché ne se sont guère modifiés. Compte tenu du peu d'enthousiasme des investisseurs, la demande est essentiellement dépen- dante des besoins de la bijouterie, demande reculant habituellement durant la saison d'été, alors que l'offre oscille surtout au gré des devises que recherchent les principaux pays pro- ducteurs.

En juin, le platine a été soumis à forte pression et s'est même approché de temps à autre du cours de l'or. L'annonce qu'un grand constructeur au- tomobile japonais abandonnerait ce mé- tal au profit du palladium, bien meil- leur marché, pour la fabrication des pots à conversion catalytique l'a grandement affecté. A cela s'ajoute l'intention de la Communauté européen- ne de revenir sur sa décision d'appli- quer les normes américaines en matière de gaz d'échappement. En revanche, la nouvelle en provenance du Japon a don- né un nouvel élan au palladium. Il n'est cependant pas parvenu à franchir la barre des $ 100 l'once.

Le 8 juillet, l'or a clôturé à $ 370.50 l'once, l'argent à $ 4.525 l'once et le platine à $ 383.25 l'once. W. Beckmann