UBS Economic Notices (fre) 3/1990

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Europe de l'Est: les réformes prendront beaucoup de temps

L'ouverture politique de l'Europe de l'Est est très encourageante et suscite les espoirs les plus fous. La réalisation des réformes économiques accompagnant la libéralisation politique demandera cependant beaucoup de temps. Il ne fait aucun doute que l'objectif économique premier est de se rapprocher du niveau de vie occidental. Pour y arriver, les économies des pays de l'Est doivent être modernisées dans un environnement politique stable. C'est pourquoi un changement fondamental des conditions-cadres de l'économie, mais aussi des investissements massifs dans l'infrastructure et l'appareil de production sont incontournables. Tant que le nouvel environnement n'est pas fixé et universellement accepté, les placements de capitaux en Europe de l'Est demeureront risqués et le commerce extérieur sous-développé. Malgré son énorme potentiel économique et les bouleversements politiques en cours, l'influence des pays de l'Est sur les économies occidentales reste modeste, à quelques exceptions près.

Potentiel inexploité

Bien que divergeant d'un pays à l'autre, le niveau de prospérité est partout relativement bas en Europe de l'Est. Si la population - y compris l'Union Soviétique - est de presque 20% supérieure à celle de l'Europe occidentale, le produit national commun n'atteint même pas la moitié de celui des pays occidentaux (cf. graphique; Etat 1987). Malgré le niveau relativement bon de la formation et d'importantes ressources en matières premières, les Européens de l'Est (425 millions) produisent à peu près autant que les Japonais (122 millions). Les ressources naturelles sont gaspillées, la productivité est faible et le management mal orienté par de fausses directives.

La pénurie de nombreux biens de consommation et la mauvaise qualité de la plupart des produits disponibles pourraient rendre l'Europe de l'Est attrayante pour les produits occidentaux, si le financement des importations ne se heurte pas à des difficultés. Les pays fortement endettés vis-à-vis de l'Occident (Pologne, Hongrie, Bulgarie et, jusqu'à tout récemment, Yougoslavie) doivent mobiliser une part considérable de leur rentrées de devises pour le service de la dette. Afin d'éviter un endettement additionnel et/ou un rééchelonnement, ils sont tributaires de soldes commerciaux et touristiques excédentaires avec l'Occident. Compte tenu de la compétitivité insuffisante de leurs produits d'exportation, il ne leur est cependant guère possible d'avoir une balance des opérations courantes excédentaire, à moins de réduire les importations. L'exemple de la Roumanie montre à l'évidence que le développement artificiel des exportations et la limitation à l'extrême des importations dans le but de réduire la dette peuvent ruiner une économie. Par ailleurs, il ne faut pas non plus s'attendre à un boom des importations fortement financées par le crédit, même dans les pays peu endettés. Les résultats des Etats de l'Europe de l'Est ayant financé la restructuration de leurs économies avec des crédits occidentaux sont décourageants. Vu le poids de la dette, la faiblesse des exportations et les restrictions apportées aux importations de la part des pays de l'Est, les échanges Est-Ouest en Europe ne représentaient que 4% du commerce extérieur global de la CE et de l'AELE en 1988.

Situations initiales divergentes

Le débat sur les réformes économiques en Europe de l'Est ne date pas d'hier. De fait, les premières discussions franches sur les carences du système remontent aux années cinquante, après la mort de Staline. Le diagnostic établi n'a cependant très longtemps donné lieu qu'à des retouches esthétiques. Mesurées à l'importance des marchés libres et à la part de l'économie privée au produit national, les réformes en Hongrie et en Pologne sont celles ayant le plus avancé (cf. tableau 1). Les marchés du travail notamment sont ici presque entièrement libéralisés. S'il est vrai que les marchés de biens de consommation présentent toujours de nombreux éléments monopolistiques, il n'en reste pas moins que plus de la moitié de la production - y compris le marché noir - est écoulée à prix libres. En revanche, les marchés des capitaux ne jouent qu'un rôle secondaire, même dans ces deux pays. La contribution de l'économie privée au produit national est nettement inférieure à 25%. La Yougoslavie a certes rompu avec le système stalinien dès 1950, mais le régime d'autogestion sociale (gestion des entreprises remise aux conseils ouvriers élus) ne présentait aucun des éléments propres à l'économie de marché. Il faut attendre le début des années quatre-vingt pour que soient réalisées des réformes permettant une coordination graduelle conforme au marché. L'Union Soviétique et la Bulgarie ont aussi soumis depuis longtemps des projets de réformes, mais leur application n'en est toujours qu'à ses premiers balbutiements. La RDA et la Tchécoslovaquie n'en sont qu'au stade de l'élaboration de projets de réformes. Même si leurs économies relativement bien développées ont de bonnes chances de succès, vu le nouvel environnement politique et sous réserve d'un programme raisonnable de réformes, les réalisations prendront néanmoins beaucoup de temps. En Roumanie, l'instabilité politique repousse la préparation même de réformes économiques à des jours meilleurs.

L'exemple hongrois

Vu les bouleversements politiques de ces derniers mois, les expériences antérieures ne sont pas absolument le seul critère pour de nouvelles stratégies. D'un autre côté, le danger de semi-réformes n'est pas non plus écarté. La Hongrie essaie depuis plus de vingt ans de laisser davantage la coordination du processus économique aux forces du marché. Effectuée en 1957, la réorganisation de l'agriculture a servi de lever de rideau à la réforme complète de l'économie en 1968. Les prix fixés par l'Etat ont été augmentés, les exploitations privées et la vente de leurs produits autorisées, l'affiliation aux coopératives rendue facultative. Résultat: il a été possible de supprimer rapidement le rationnement des denrées alimentaires, d'approvisionner la population en biens de meilleure qualité et de dégager de véritables surplus destinés à l'exportation.

L'abolition de la planification micro-économique, tatillonne et réglementant jusqu'au moindre détail la vie des entreprises, figurait en bonne place dans le programme de 1968. Ses tâches étaient supposées être assumées par le marché avec des exploitations dotées d'une large autonomie. Le fait que vingt-deux ans plus tard on n'en soit pas encore aussi loin tient à plusieurs raisons. Un des facteurs principaux est que les groupes étatisés géants n'ont pas été démantelés, empêchant ainsi l'apparition d'une concurrence efficace. Repoussée durant des décennies, la réforme complète des prix ne sera probablement réalisée que cette année. Puisque aucun prix du marché ne signalait la relative pénurie, les ressources ont continué d'être mal affectées. De fortes subventions ont bloqué les restructurations et laissé survivre des entreprises déficitaires. L'efficacité des investissements financés par le crédit est demeurée faible, de sorte que les résultats n'ont pas suffi au remboursement des dettes. Par ailleurs, le service extrêmement lourd de la dette extérieure a rendu nécessaire une politique d'austérité, pesant sur la croissance. Il est vrai qu'un petit secteur privé s'est développé, notamment dans le domaine des services, peu friands de capitaux. En revanche, dans les branches économiques à investissements élevés, la forte imposition - souvent modifiée - des "bénéfices spéculatifs" a fixé d'étroites limites à la performance des entreprises et à l'engagement personnel.

La réforme de l'économie a enregistré cependant quelques succès et créé les conditions nécessaires aux réformes politiques entreprises au milieu des années quatre-vingt. De nos jours, la Hongrie peut se prévaloir du meilleur approvisionnement en biens de consommation de tous les pays de l'Est. La croissance moyenne des exportations en monnaies convertibles se chiffrait ces dix dernières années au triple de la moyenne de l'Europe de l'Est, tout en demeurant inférieure à la tendance en Europe occidentale. Par contre, le produit national par habitant ne dépasse que de peu la moyenne de l'Europe de l'Est. De 20% par an environ, l'inflation était certes nettement inférieure aux renchérissements polonais et yougoslaves (autres pays réformistes) ces dernières années, mais n'en indique pas moins les grandes faiblesses de la politique monétaire.

Eléments d'une stratégie performante

Le tableau 2 donne une vue d'ensemble des réformes possibles dans les pays de l'Est. Tant le concept que la rapidité des réalisations sont à adapter au particularisme de chacun des Etats. Par contre, il est indispensable que les réformes suivantes soient appliquées en un seul train de mesures: suppression des répartitions planifiées aux entreprises, libération des prix et des marchés, fractionnement des groupes géants étatisés, réforme monétaire et du système bancaire. La théorie ainsi que l'expérience tirée des réformes hongroises et yougoslaves attestent que le lien entre ces réformes est si étroit que seule une application de concert à des chances de succès. Etant donné que les restructurations nécessaires demandent d'abord d'énormes sacrifices de la part de la population, avant que les premiers succès tangibles soient enregistrés, il faut que les mesures, et en particulier leurs conséquence sur la répartition, fassent l'objet d'un large consensus dans les jeunes démocraties. Plus vite on réussira à apporter des allégements, du moins dans quelques secteurs, mieux les sacrifices indispensables seront acceptés. Avec une réforme de l'agriculture sur le modèle hongrois de 1957, il est par exemple possible, en peu de temps, d'améliorer sensiblement l'approvisionnement en produits alimentaires dans la plupart des pays. De nouvelles autorisations pour de petites exploitations privées, avant la réforme complète, permettraient également d'éliminer plus rapidement les goulets d'étranglement.

Des marchés sans entrave à la concurrence ne fonctionnent que si les individus sont assurés d'assumer seuls la plénitude des succès comme des échecs. Le défaut majeur des réformes entreprises jusqu'ici dans les pays de l'Est a été de décentraliser le contrôle et de libérer partiellement les prix, sans scinder au préalable les groupes géants étatisés et introduire la responsabilité personnelle. La réduction des subventions aux entreprises déficitaires pourrait être le premier pas dans cette direction. Une privatisation des entreprises d'Etat serait susceptible d'améliorer les contrôles et d'absorber une partie du pouvoir d'achat excédentaire qui s'est accumulé durant les décennies d'économie de pénurie avec les risques inflationnistes que cela comporte.

Les restructurations indispensables en Europe de l'Est prendront beaucoup de temps, même après une réforme radicale de l'économie. L'aide occidentale peut certes faciliter le processus, mais c'est aux pays de l'Est eux-mêmes qu'il appartient d'en jeter les principales bases. Les réformes doivent être complètes et rapidement matérialisées. En outre, l'adoption d'une politique sociale efficace en tant que mesure d'accompagnement est absolument indispensable, afin que les perdants (temporaires) dans les jeunes démocraties ne puissent imposer un retour aux conditions antérieures, avant que les réformes aient portées leurs premiers fruits.

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Les problèmes posés par l'union monétaire allemande

Depuis l'ouverture des frontières entre les deux Allemagne, le 9 novembre 1989, les gouvernements ouest-allemand et de la RDA sont soumis à des pressions d'agir toujours plus fortes. Bonn y a répondu en proposant une union monétaire allemande rapide. De leur côté, les marchés financiers ont réagi avec une extrême nervosité, car l'union monétaire en question risque d'entraîner une recrudescence de l'inflation et une flambée des taux d'intérêt en Allemagne fédérale.

Le nombre croissant des transfuges de RDA recèle le danger d'une aggravation des tensions sociales en Allemagne fédérale, due entre autres raisons à l'alourdissement du fardeau que cela représente au niveau des logements, du marché du travail et des assurances sociales. Et ce alors que les élections au Bundestag auront lieu en fin d'année. Parallèlement, les appels en faveur d'une aide financière massive et d'un rapprochement économique et politique rapide des deux Etats allemands se font de plus en plus pressants en RDA, vu l'exode persistant de la population et le délabrement de l'économie. C'est pourquoi l'insatisfaction grandissante exige une action rapide. La raison "économique" qui voudrait que l'union monétaire ne soit réalisée qu'après des réformes économiques radicales en RDA n'est politiquement guère plus viable. En proposant l'union monétaire, le gouvernement fédéral espère freiner le flot des transfuges est-allemands et éviter un effondrement économique de la RDA.

Situation initiale

L'union monétaire entre la République fédérale et la RDA consisterait à fusionner deux Etats à systèmes économiques diamétralement opposés et de puissance économique très contrastée (cf. tableau). Les répercussions de l'union monétaire visée dépendent de nombreux facteurs, dont certains sont encore inconnus. Il n'existe pas de données fiables sur la masse monétaire est-allemande en circulation et on ne sait pas dans quelle mesure la consommation des ménages privés en RDA a été effectivement bridée, ni jusqu'à quel point les produits est-allemands (jusqu'ici fortement subventionnés) sont compétitifs sur le marché mondial.

Taux de conversion convenable

Le mark-est est trop faiblement apprécié lorsqu'il s'échange dans un rapport de 1:9 au marché noir du fait du régime monétaire actuel en RDA . D'un autre côté, le rapport souvent avancé de 2,3 marks-est pour un DM est également mal approprié pour servir de référence à la valeur réelle de la monnaie est-allemande. Il reflète largement le développement artificiel des exportations par lequel la RDA a pu éviter ces dernières années un rééchelonnement éventuel de sa dette étrangère. Un rapport 1:1 -- correspondant à la "valeur" officielle actuelle -- ne serait qu'un taux de change purement dicté par des considérations politiques. Si on calculait la parité des pouvoirs d'achat par rapport aux niveaux de prospérité, la relation serait alors de 1:4 environ. A noter cependant que les prix massivement subventionnés des biens et des services couvrant les besoins essentiels de la population de la RDA constituent la base de ce taux de conversion. En outre sont également compris dans cette relation les prix des biens spécifiquement locaux (par exemple les loyers) et les prestations, moins chères du fait du développement économique moins avancé de la RDA, mais dont le prix ne compte pas pour déterminer la valeur extérieure véritable du mark-est.

Toutes ces réflexions donnent à penser qu'il n'y a pas qu'un taux de conversion "convenable". Il est probable que le rapport sera modulé. On peut imaginer que la relation 1:1 sera choisie pour les patrimoines, afin de protéger les petits épargnants est-allemands. En revanche, le taux de conversion pourrait être de 1:2 à 1:3 pour les salaires et traitements, vu que la productivité des personnes actives en RDA n'est estimée qu'à 30-50% du niveau ouest-allemand.

Incidence d'une union monétaire en Allemagne fédérale

Menace d'expansion de la masse monétaire

Techniquement, une union monétaire signifie que la Bundesbank échange les marks-est contre des marks allemands. Dans quelle mesure la masse monétaire s'accroît dépend du rapport choisi. Avec un rapport de 1:1, l'excédent du pouvoir d'achat en RDA serait entièrement converti en marks allemands. Conséquence, la masse monétaire progresserait dans l'ensemble sensiblement plus vite que le potentiel de production, augmenté de la croissance économique de la RDA.

L'excédent maximum de pouvoir d'achat en RDA est évalué le plus souvent à 150-200 milliards de marks-est, correspondant au volume global estimé de l'épargne. En RDA, il n'existe pratiquement jusqu'à présent qu'une seule possibilité de constituer des patrimoines, à savoir le placement sur des comptes d'épargne. La conversion de l'épargne est-allemande au taux de 1:1 gonflerait la masse monétaire M3 ouest-allemande -- norme directrice pour la fixation des objectifs de l'expansion monétaire de la Bundesbank -- de 15% par rapport au niveau actuel. L'excédent du pouvoir d'achat interallemand en résultant obligerait la Bundesbank à resserrer encore le carcan monétaire, afin de pouvoir maintenir la stabilité des prix à moyen et long terme.

Les risques généré par l'excédent du pouvoir d'achat est-allemand pourraient être désamorcés, si les citoyens de RDA n'étaient d'abord autorisés qu'à convertir une partie de leur épargne en DM. Le reste devrait être gelé quelques années ou résorbé par la vente de biens corporels propriété de l'Etat (sol, logements, entreprises, etc.), dont le produit en marks-est serait entièrement ou partiellement annihilé. Une reprivatisation adroitement effectuée aurait aussi pour effet secondaire appréciable d'inciter les Allemands de l'Est à ne plus passer à l'Ouest. Enfin, on pourrait offrir aux épargnants est-allemands des emprunts mieux rémunérés, pour lesquels il conviendrait de créer un marché secondaire aussi rapidement que possible. En procédant de cette façon, on étoufferait dans l'oeuf tout risque de gonflement de la masse monétaire.

Taux d'intérêt élevés

En admettant que la résorption de l'excédent de pouvoir d'achat réussisse en RDA, la Bundesbank n'a aucune raison de mener une politique monétaire plus restrictive. Elle ne relâchera cependant pas les rênes monétaires, dans l'intérêt de la stabilité des prix, vu les dangers existant de surchauffe économique. C'est pourquoi les taux du court terme devraient avoisinner 8% d'ici la fin de 1990.

Dès cette année, il faudra s'accommoder d'un déficit financier additionnel du budget fédéral dû aux transferts accrus et aux prestations directes à la RDA.

S'il est vrai que les dépenses publiques additionnelles de l'Allemagne fédérale pour la RDA dépasseront annuellement la dizaine de milliards ces prochaines années, par contre des économies pourront être réalisées à moyen terme. Elles porteront notamment sur les subventions annuelles accordées à Berlin (1989: DM 14,5 milliards), les frais inhérents au développement des zones jouxtant la RDA et les coûts qu'un flot ininterrompu de réfugiés occasionnerait.

La demande privée de capitaux s'ajoute à la demande publique, du fait que la modernisation de l'appareil est-allemand de production exige des moyens financiers élevés. Vu la trésorerie aisée des entreprises ouest-allemandes et leurs perspectives bénéficiaires favorables de par la bonne conjoncture persistante, la demande privée sur les marchés des capitaux ne devrait cependant entraîner que des hausses minimes des taux d'intérêt. Malgré une diminution des craintes inflationnistes, engendrées par l'annonce d'union monétaire, les rendements du marché des capitaux pourraient cependant osciller autour de 8,5% (obligations fédérales) jusqu'en fin d'année, compte tenu des besoins en capitaux dans l'ensemble plus élevés. Sans les besoins financiers additionnels induits par la situation en RDA, les taux du marché ouest-allemand des capitaux auraient pu toutefois reculer, en raison de la surabondance de liquidités des entreprises et du déficit budgétaire réduit de l'Etat fédéral.

Pression inflationniste modérée

Une libération de la formation des prix en RDA et la demande additionnelle de produits ouest-allemands devraient relancer l'inflation en Allemagne fédérale, étant donné les goulets d'étranglement actuels dans les capacités de production. Dans le secteur des biens de consommation, l'impact sur les prix sera plutôt faible, puisqu'il est aussi possible de répondre assez vite à la demande avec des produits étrangers. En revanche, les goulets d'étranglement des capacités de production rendent les risques de dérapage plus importants dans le secteur des biens d'équipement. Le ralentissement de l'économie mondiale dans le courant de 1990 devrait cependant freiner quelque peu la demande étrangère dans ce secteur (les deux tiers des exportations ouest-allemandes sont des biens d'équipement), de sorte que la pression sur les prix induite par la demande additionnelle est-allemande restera modérée grâce aux capacités de production libérées. Dans l'ensemble, nous prévoyons une hausse des prix à la consommation de 3% en moyenne de 1990 (1989: 2,8%). Il a été également tenu compte dans cette prévision de l'effet modérateur du recul des prix à l'importation (fermeté du DM, baisse des prix des matières premières et cours pétroliers en légère hausse).

Stimulants conjoncturels

L'économie est-allemande étant en état de désagrégation, une union monétaire offre aux entreprises industrielles ouest-allemandes de nouvelles possibilités d'investissement et de débouchés pour son relèvement. Elles en seront les principales bénéficiaires, compte tenu des liens historico-culturels et de la langue commune. En outre, le bon niveau de formation de la main-d'oeuvre est-allemande et les besoins de modernisation de l'économie constituent un terrain favorable aux investissements. C'est pourquoi on peut s'attendre à une sensible progression des investissements et de la consommation. Le produit national brut en Allemagne fédérale devrait ainsi s'accroître encore un peu plus rapidement que prévu initialement. Y compris ce stimulant additionnel de 1/2% environ au PNB ouest-allemand, la croissance économique en Allemagne fédérale pourrait progresser de 3,5-4% en termes réels en 1990. La création rapide d'une économie sociale de marché sur le modèle ouest-allemand en RDA en est toutefois la condition sine qua non. A savoir: libre exercice des activités industrielles et commerciales, liberté d'établissement, protection de la propriété privée, pas d'entraves aux investissements, réforme fiscale et de la formation des prix, libéralisation du monopole du commerce extérieur et des mouvements de capitaux.

Fermeté du DM

Les perspectives bénéficiaires favorables des entreprises, la robustesse persistante de la croissance économique en Allemagne fédérale et le niveau toujours élevé des taux d'intérêt plaident en faveur d'un mark allemand fort, si l'inflation est contenue. Le scepticisme des investisseurs étranger pourrait toutefois contribuer à son affaiblissement passager. Une réévaluation du mark allemand au sein du SME n'est cependant pas exclue à moyen ou long terme, du fait que les autres pays en faisant partie profiteront moins des stimulants conjoncturels provenant de la RDA. Pour Bonn, une réévaluation au sein du SME serait en outre souhaitable, car elle pourrait aider à freiner le boom des exportations ouest-allemandes dans les autres pays du SME et ainsi modérer la surchauffe économique en Allemagne fédérale. Sur des marchés empreints généralement à une plus grande nervosité, la relation de change franc suisse/mark allemand devrait peu se modifier par rapport à février, notamment en raison des taux inhabituellement élevés servis en Suisse.

Pas d'union monétaire sans réformes économiques en RDA

Une union monétaire effectuée sans les réformes économiques indispensables telles que libre formation des prix, droit à la propriété privée ou garantie des investissements directs étrangers ne devrait pas apporter la prospérité escomptée en RDA, mais plutôt aggraver la situation de crise.

L'union monétaire rendrait nombre d'entreprises est-allemandes non compétitives vis-à-vis de leurs homologues d'Allemagne fédérale. Il en résulterait des fermetures et une augmentation du chômage. Le danger d'une telle évolution exige que la RDA se dote d'un système de protection sociale, calqué plus ou moins sur le modèle ouest-allemand. Depuis le début de février 1990, il existe en RDA une assurance-chômage visant à atténuer l'impact social du processus de réformes. Mais parallèlement, il faut aussi supprimer ou fortement réduire le droit des nouveaux arrivants à une assistance sociale en Allemagne fédérale, si l'on veut stopper le flot des transfuges est-allemands. Cette mesure contribuerait à maintenir intact le potentiel de main-d'oeuvre de la RDA, tout en soulageant d'autant le budget fédéral.

Seules des réformes économiques radicales liées à une union monétaire permettront un développement véritable de la RDA. Avec l'union monétaire, elle disposerait d'une monnaie solide et devrait suivre entièrement la politique de stabilité de la Bundesbank. En introduisant parallèlement un système d'économie de marché, attirant les capitaux étrangers et stimulant les investissements privés, l'Allemagne de l'Est réunirait alors les conditions nécessaires à un essor prochain.

Données comparatives 1989

RDA

RFA

Superficie (1'000 km2)

Population (mio.) 16,5

Personnes actives

Produit social (mia. de DM) 260 approx.

PNB par habitant (DM) 15'700 approx.

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Le produit national brut de la RDA (1989: quelque 1'049 milliards de marks-est) a été converti au taux de 4 marks-est pour un mark allemand. Vu la difficulté de comparer directement les statistiques est-allemandes et ouest-allemandes concernant le produit social, ce sont les comparaisons de prospérité entre la RDA et la Hongrie qui ont servi de base. La Hongrie disposant du meilleur matériel statistique de tous les pays de l'Est, il est possible d'établir une comparaison avec l'Autriche et via l'Autriche avec l'Allemagne fédérale.

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Résultats records de l'UBS en 1989

En 1989, la somme du bilan de l'Union de Banques Suisses (UBS) a progressé de 5,7% à Fr. 176,1 milliards et le bénéfice net de 15,9% à Fr. 902,2 millions. En raison de ces bons résultats, le Conseil d'administration propose à l'Assemblée générale des actionnaires d'augmenter le dividende de 12,5%.

Profondes modifications de la structure du bilan

La flambée des taux d'intérêt du court terme a sensiblement modifié la structure du bilan. A l'actif, les prêts à la clientèle ont progressé de Fr. 18 milliards ou de 21% pour s'élever à Fr. 102,5 milliards, la plus forte croissance ayant été notée pour les avances à terme fixe en blanc. Les affaires hypothécaires se sont elles aussi bien développées, puisque, compte tenu des avances à terme fixe garanties par hypothèque, elles se sont accrues de Fr. 7 milliards pour totaliser Fr. 48,3 milliards.

Les fonds de la clientèle ont augmenté de 5,4% à Fr. 103,6 milliards, les divers postes ayant cependant évolué de manière divergente. Les créanciers à terme, fortement rémunérés, ont augmenté de Fr. 8,6 milliards pour s'établir à Fr. 51,3 milliards; leur part à l'ensemble des fonds de la clientèle a passé de 43,5% à fin 1988 à près de 50% en 1989. En revanche, les fonds d'épargne et de dépôts ont diminué de Fr. 2,3 milliards ou de 9,7% pour s'élever à Fr. 21 milliards, tandis que les autres fonds de la clientèle ont reculé de Fr. 1 milliard à Fr. 31,3 milliards, compte tenu d'un poste obligations de caisse inchangé.

A fin 1989, les fonds propres totalisaient Fr. 12,6 milliards, soit Fr. 2,5 milliards de plus qu'à la fin de l'exercice précédent. Ce net accroissement est dû en premier lieu à la décision du Conseil d'administration de transférer sur les réserves ouvertes des réserves latentes imposées pour un montant de Fr. 2 milliards, qui figuraient jusqu'ici sous les autres passifs.

Progression du cash-flow de 14,1%

Durant l'exercice écoulé, les résultats de l'UBS ont été caractérisés par des développements opposés. Bien que les opérations de crédit aient évolué favorablement et que les intérêts créditeurs se soient accrus de plus de 30%, le produit net des intérêts ne s'est amélioré que de 0,2%. Cela est dû à l'alourdissement de 36,1% des charges d'intérêts consécutif au transfert de fonds de la clientèle vers des placements mieux rémunérés, qui a entraîné une contraction de la marge. L'évolution insatisfaisante des opérations du secteur intérêts a été compensée par la progression de 21% des commissions nettes sous l'effet de l'augmentation des courtages, des droits de garde et des commissions encaissées dans les opérations de crédit. Les opérations sur devises, billets et métaux précieux ont dégagé un résultat record de Fr. 551 millions (+16,2%). Bien que les affaires boursières se soient nettement améliorées, le produit des titres a diminué de 3% à Fr. 454 millions en raison des ajustements de valeur effectués en fin d'année sur le portefeuille d'obligations par suite de la baisse des cours due à la montée des intérêts.

Grâce au strict contrôle des coûts à tous les échelons, les frais d'exploitation n'ont augmenté que de 7,1 % pour s'élever à Fr. 2,66 milliards. Les dépenses de personnel (y compris les cotisations aux institutions de prévoyance en faveur du personnel) se sont accrues de 7,8% à Fr. 1,8 milliard. L'augmentation des frais généraux et de bureau de 5,7% à Fr. 0,9 milliard à peine s'est situé dans des limites acceptables, compte tenu de l'expansion du volume d'affaires. Le cash-flow a progressé de 14,1% à Fr. 1,76 milliard. Déduction faite des amortissements et provisions de Fr. 857,1 milliards (+12,3%), le bénéfice net s'élève à Fr. 902,2 millions contre Fr. 778,3 millions en 1988.

Augmentation de capital et du dividende

Le Conseil d'administration propose à l'Assemblée générale du 25 avril 1990 de relever le dividende à Fr. 135.- par action au porteur, à Fr. 27.- par action nominative et à Fr. 5.40 par bon de participation. Il est proposé également d'augmenter le capital-actions de Fr. 400 millions et de le porter ainsi à Fr. 2'575 millions, de prévoir la suppression du capital-bons de participation et de réviser quelques dispositions des statuts.

184'000 actions au porteur de Fr. 500 nom. et 165'000 actions nominatives de Fr. 100 nom. seront offertes en souscription aux actionnaires dans la proportion d'une nouvelle action pour 20 anciennes et aux détenteurs de bons de participation d'une nouvelle action au porteur pour 500 bons de participation. Le prix de souscription sera de Fr. 2500.- pour l'action au porteur et de Fr. 500.- pour l'action nominative. Le droit de souscription préférentiel des actionnaires étant exclu, il est en outre proposé d'émettre 485'000 actions nominatives de Fr. 100 nom. au prix de Fr. 200.- par action réservées au plan de participation par actions des collaborateurs UBS, 361'039 actions au porteur par compensation avec le capital-bons de participation, ainsi que 124'961 actions au porteur pour garantir des droits de conversion et d'option, pour financer des reprises ou pour être placées.

La suppression envisagée des bons de participation simplifiera la structure du capital social de l'UBS, améliorera la transparence et accroîtra le volume des titres pouvant être traités aux Bourses. Elle contribuera également à rendre les actions UBS encore plus attrayantes. Sous réserve de la décision de l'Assemblée générale concernant l'augmentation de capital nécessaire, les détenteurs des 9'025'964 bons de participation en circulation seront invités à les échanger contre des actions au porteur dans la proportion d'une action au porteur pour 25 bons de participation. Cette offre expirera le 17 avril 1990. L'échange se fera après l'Assemblée générale. La cotation du bon de participation sera maintenue pour l'instant.

Révision des statuts

Il est finalement proposé à l'Assemblée générale de réviser quelques dispositions des statuts. En lieu et place de la clause actuelle générale largement répandue, il est proposé une solution moderne et transparente en dressant une liste limitative des restrictions de transfert, autrement dit en précisant pour chacun la réglementation de l'inscription d'actionnaires nominatifs sur le registre des actions. Le maintien d'actions nominatives liées a pour but de sauvegarder le caractère de l'UBS en tant que société en mains suisses ouverte au public. La loi fédérale sur les banques et les caisses d'épargne et la "Lex Friedrich" obligent la banque à produire la preuve qu'elle est en mains suisses. Une autre disposition limitant à 5% des actions nominatives la participation directe ou indirecte d'une personne physique ou morale a pour but d'assurer une large répartitition des actions. Par la même occasion, une certaine limitation du droit de vote est introduite par le fait qu'aucun actionnaire ne peut réunir sur sa personne directement ou indirectement plus de 5% de l'ensemble des voix pour ses actions ou pour des actions représentées.

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Le point de la situation

L'année passée et, dans une moindre mesure, 1988 n'auront pas été particulièrement bonnes pour les actions et les obligations. Bien que sur les principaux marchés les actions aient permis de réaliser des performances de 20 à 35% (en monnaies locales) malgré le mini-krach d'octobre dernier, les détenteurs d'obligations européennes et japonaises ont subi des pertes en raison de la grimpée des taux d'intérêt. Ce n'est que dans la zone dollar que les rendements des valeurs à revenu fixe ont été comparables à ceux des actions. C'est pourquoi les papiers monétaires ont eu beaucoup de succès auprès des investisseurs du fait de leur faible risque et des taux élevés du court terme.

Sous réserve d'événements politique exceptionnels dans les pays de l'Est, nous sommes d'avis que les relations de change seront plus stables en 1990 qu'elles ne l'ont été ces tout derniers temps. Si, parmi les principales monnaies de placement, la livre sterling implique les plus gros risques de dépréciation pour les douze prochains mois, le yen comporte un bon potentiel de reprise après son accès de faiblesse en 1989. La marge de manoeuvre pour une baisse des taux d'intérêt, tant dans le long que le court terme, paraît limitée dans presque tous les pays. Nous escomptons même une légère hausse du loyer de l'argent aux Etats-Unis et au Canada.

Les persprectives des diverses Bourses sont très divergentes, selon la période envisagée. Ainsi, pour les trois prochains mois, nous nous attendons à des moins-values aux Bourses allemande et néerlandaise, alors que les cours évolueront en dents de scie en Suisse et en France et auront tendance à monter aux Etats-Unis, au Japon et en Grande-Bretagne. Sous l'effet des développements en République démocratique allemande, le marché allemand des actions s'est notablement affermi et devrait, à court terme, entrer dans une phase de consolidation. Il n'en demeure pas moins que nous tablons sur une performance positive pour toutes les Bourses, qui se situerait entre 8 à 15%. Sur certains marchés, la prime risque est toutefois minime. A cet égard, la situation est loin d'être rose aux Etats-Unis et surtout en Grande-Bretagne où les taux du marché de l'argent oscilleront toujours entre 13 et 15%. Dans l'ensemble, les Bourses européennes, abstraction faite de la Grande-Bretagne, et du Japon offrent de bonnes chances de plus-values. Quant à l'Allemagne fédérale, elle dispose également d'un bon potentiel à long terme. En dépit de l'union monétaire attendue, l'inflation ne dépassera pas 5% à notre avis. Les risques inhérents à ce marché ne doivent pourtant pas être sous-estimés. Le comportement de la Bourse dans ce pays dépendra de l'issue des élections dans les Länder et au Bundestag, des prochaines révisions tarifaires et de l'évolution de la situation dans les pays de l'Est, en République démocratique allemande notamment.

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Marchés de l'argent et des capitaux

Nouvelle hausse des taux du long terme

En février, les marchés obligataires internationaux ont dû s'accommoder d'une nouvelle poussée de leurs taux, parfois notable en Europe notamment. C'est le marché allemand qui a été principalement à l'origine de ce mouvement, vu qu'il a été insécurisé par la perspective d'une union monétaire précipitée avec l'Allemagne de l'Est. Les rendements sur les marchés français et néerlandais des capitaux ont également suivi cette orientation, tandis que les écarts de cours des obligations libellées en francs suisses et en livres sterling se sont maintenus dans des limites relativement étroites et que le secteur dollar est parvenu à se stabiliser après l'agitation constatée initialement. En revanche, les taux du court terme sont demeurés très stables dans la plupart des pays.

Union monétaire: facteur d'incertitude

Les plans en vue de la création prochaine d'une union monétaire entre les deux Etats allemands ont exercé une forte pression sur le marché obligataire de la République fédérale, le facteur temps étant limité, mais les modalités néanmoins encore très vagues (voir article en page 8). Le potentiel inflationniste plus élevé, le resserrement devenant de ce fait nécessaire du carcan monétaire et la perspective d'une demande accrue de capitaux ont fait hausser le rendement des obligations d'Etat de plus d'un point à 8,9% en l'espace de quelques semaines, avant qu'une légère correction ne soit intervenue. En revanche, les taux du court terme allemands n'ont guère réagi à ce mouvement: alors que le loyer de l'argent au jour le jour a reculé, les rendements des échéances jusqu'à 12 mois de terme n'ont progressé que d'un quart de point. Les marchés obligataires de France et des Pays-Bas, dont les rendements ont haussé jusqu'à 0,8 point, se sont trouvés également entraînés dans les turbulences du marché allemand des capitaux. Abstraction faite de ces influences externes qui ne se sont pas intégralement manifestées en raison du statut autonome de la livre, le renchérissement de la rémunération des capitaux de 0,4 point en Grande-Bretagne reflétait également les craintes d'une résurgence de l'inflation dans ce pays.

Le Japon l'emporte sur les USA

En ne procédant pas à un nouvel assouplissement de la politique monétaire et en maintenant les taux des fonds fédéraux à 8,2%, l'institut d'émission américain attestait son intention de s'en tenir à l'objectif prioritaire de la stabilité des prix. Le marché obligataire en dollars a subi une douche écossaise. Dans la perspective des importantes adjudications de refinancement effectuées à moyen et à long terme par le Trésor, les craintes d'une réserve des investisseurs nippons avaient fait monter le rendement. Les résultats des souscriptions ayant été favorables, ce dernier a été corrigé. Par la suite, le marché n'est néanmoins pas parvenu à se soustraire à la tension des taux d'intérêt à l'échelle internationale. Ainsi à fin février, la rémunération des obligations d'Etat en dollars était, avec 8,6%, supérieure de 0,7 point à son niveau du début de l'année.

Au Japon, les rendements ont continué à grimper après une brève accalmie. Les résultats des élections parlementaires du 18 février qui ont vu les libéraux-démocrates conserver une majorité absolue, mais réduite à la Chambre basse, le cours du yen déprimé et le gonflement accéléré de la masse monétaire ont nourri des espoirs d'un resserrement du carcan monétaire par la Banque du Japon, au moyen d'un nouveau relèvement du taux d'escompte. Avec des rendements nominaux de 7% des obligations d'Etat et un renchérissement escompté de 2,5%, le niveau des taux d'intérêt réels nippons est parfois supérieur d'un demi-point à celui des Etats-Unis, alors qu'à fin 1989 un écart correspondant était enregistré au détriment du Japon.

Débuts d'une consolidation en Suisse

Si les marchés monétaires de la plupart des pays ont réagi aux turbulences du marché des capitaux, tout d'abord faiblement, mais finalement par une légère progression des cours, les taux d'intérêt à court terme sur le franc suisse ont fléchi par rapport à leur record du début d'année. Cela a été particulièrement le cas pour l'argent au jour le jour, qui s'est replié d'un demi-point entraînant une réduction temporaire du taux des avances sur nantissement au-dessous de 11%. Ceci n'est certes pas encore l'expression d'un assouplissement de la politique monétaire de la Banque nationale, mais la situation conjoncturelle actuelle et l'évolution du franc ne rendent plus nécessaires un nouveau raidissement. Malgré le léger resserrement du différentiel d'intérêts au détriment du mark, le franc semble avoir gagné en attrait en tant que monnaie de placement, en raison des nombreuses points d'interrogation concernant la devise allemande.

Le marché suisse des capitaux n'a pu se soustraire entièrement à la tendance internationale, mais la hausse du rendement des obligations de la Confédération de 0,3 point s'est maintenue dans d'étroites limites. Le nouvel emprunt de la Confédération 6 1/4% a essuyé un échec, bien que son prix d'émission ait été de 98%. Eu égard aux transactions peu étoffées avec les titres de la Confédération, l'évolution des coûts de swaps à 10 ans, qui ont grimpé de manière un peu plus accentuée à 8%, témoigne de l'orientation effective des taux sur le marché des capitaux.

Métaux précieux

Sous l'influence de stimulants divergents

Au début février, des rapports faisant état de ventes éventuelles d'or du Fonds monétaire international a exercé une pression sur le cours. Le marché ne s'est ressaisi qu'après l'annonce de la levée de l'interdiction du Congrès national africain par le Gouvernement de Pretoria. Un nouveau record annuel, $ 423.50 l'once, a même été atteint. Par la suite, outre une reprise de brève durée à Wall Street, des prises de bénéfice notamment ont provoqué un retournement de tendance. Vers le milieu du mois, les déclarations de Nelson Mandela confirmant ses exigences antérieures pour une nationalisation des mines sud-africaines ont redonné un élan au métal jaune. Cependant, la liquidation de positions en relation avec les difficultés du courtier new-yorkais Drexel Burnham ont freiné le mouvement. La persistance des revendications de Mandela ont également agi sur le cours du platine, puisque plus de 80% de la production mondiale proviennent d'Afrique du Sud. La fermeté du métal blanc s'est poursuivie durant la seconde quinzaine du mois.

Le 28 février, l'or a clôturé à $ 407.50 l'once, l'argent à $ 5.13 l'once et le platine à $ 508.50 l'once.

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Marchés des changes

Le mark au centre de l'intérêt

Le projet de Bonn de créer une union monétaire avec l'Allemagne de l'Est a conditionné les marchés des changes en février. Les questions sans réponses quant à la réalisation et aux conséquences de ce projet ont jeté le trouble parmi les investisseurs. L'inquiétude d'une poussée inflationniste liée à cette union monétaire a lourdement pesé sur le marché des capitaux de l'Allemagne fédérale, de sorte que l'engouement pour le mark a disparu. Les élections au Japon, le minikrach de la Bourse de Tokyo et les difficultés financières d'une maison de courtage américaine ont également influencé le marché.

Hauts et bas du dollar

Le dollar a évolué comme suit: Fr. 1.4960 le 1er février, Fr. 1.4705 le 6, Fr. 1.5105 le 16, Fr. 1.4890 le 28. Au début février, des rumeurs de démission de M. Gorbatchev et la disparition des craintes d'une récession aux Etats-Unis ont légèrement stimulé le dollar. Les incertitudes allemandes et l'hypothèse que les taux d'intérêt élevés à l'étranger affecteraient les adjudications de refinancement trimestrielles du Trésor américain ont fait reculer le billet vert. Cette hypothèse se révéla toutefois sans fondement. Par la suite, le dollar s'est repris, profitant du transfert de capitaux hors du mark. Cependant, la faillite de la maison de courtage Drexel Burnham Lambert a détérioré le climat. L'effet positif de l'amélioration de la balance commerciale américaine en décembre a été annulé par les mauvais chiffres de la production industrielle et de l'utilisation des capacités. Toutefois, le dollar a profité, avant la fin du mois, de transferts hors du yen.

La réunification pèse sur le mark

Le mark cotait 1.6785 par dollar le 1er février, 1.6495 le 7, 1.7015 le 16, 1.6940 le 28. Par rapport au franc suisse, il se négociait à 89.13 pour 100 unités le 1er février et à 87.90 le 28. La perspective toujours plus concrète d'une réunification des deux Allemagne et d'une union monétaire a stimulé les marchés des changes. L'afflux de capitaux étrangers aux Bourses allemandes a, dans un premier temps, entraîné une hausse du mark. Mais le projet de réunification apparaissant comme une dangereuse source d'inflation, l'euphorie a fait place au désenchantement. La débâcle sur le marché obligataire allemand, où les rendements des titres publics avaient parfois progressé à plus de 9%, en fut l'illustration.

Faiblesse du yen

Le yen s'échangeait à 144.45 par dollar le 1er février, à 144.07 le 14 et à 148.75 le 28. Après s'être montré relativement stable avant les élections, notamment par rapport au dollar, le yen a perdu du terrain après la victoire - prévue - des libéraux-démocrates, en dépit d'interventions massives de la Banque du Japon. Par rapport au franc, le yen est tombé à son niveau le plus bas depuis 3 ans. La principale raison de cette faiblesse a été la forte chute des cours à la Bourse de Tokyo, liée à la crainte d'une hausse des taux d'intérêt, qui a finalement empêché la Banque du Japon de relever le taux d'escompte.

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Evolution des prix en Suisse

Persistance de l'inflation

En janvier 1990, l' indice national des prix à la consommation a progressé de 0,6% à 119,1 points (décembre 1982=100). Les groupes touchés par l'augmentation ont été les transports et communications (+2,7%), l'alimentation (+1,3%) ainsi que la santé et les soins corporels (+1%). Par contre, vu la baisse des huiles de chauffage, l'indice du groupe chauffage et éclairage a reculé de 3,6%. Les marchandises suisses ont renchéri de 0,7%, mais les marchandises importées de 0,2% seulement. Cette évolution devrait se confirmer dans les mois à venir. Comme on s'attend à une stabilisation du franc, les prix des marchandises importées n'auront guère d'effet inflationniste. En revanche, il faut escompter un nouveau renchérissement intérieur, d'autant plus qu'une hausse des loyers est prévue pour mai. C'est pourquoi le taux d'inflation annuel devrait être à fin juin supérieur à 5,1%, son niveau de fin janvier.

En janvier 1990, l' indice des prix de gros a reculé de 0,2% à 181,5 points (1963=100). Tandis que les prix des produits énergétiques et connexes diminuaient de 2,4%, et ceux des matières premières et des produits semi-finis de 0,2%, les biens de consommation renchérissaient de 0,6%. D'une année à l'autre, les prix de gros ont augmenté de 2,2%.